Histoire de femmes ?
Certains posent parfois la question : « Et qu’en est-il du sort des femmes dans le judaïsme traditionnel ? Les prescriptions de la loi juive ne les relèguent-elles pas dans un rôle second, ne les limitent-elles pas à des activités centrées sur les préoccupations domestiques ? » En d’autres termes, la sollicitude des questionneurs fait qu’ils envisagent la femme dans le foyer juif à mi-chemin entre la servitude passéiste et la souffrance au quotidien. Mais voilà que, cette semaine, tombe le 22 Chevat, l’anniversaire du décès de la Rabbanite Haya Mouchka Schneerson, la femme du Rabbi. Voilà que cette date est aussi, annuellement, celle du congrès international des Chlou’hot, les déléguées du Rabbi dans tous les pays du monde. Ce congrès se déroule à New York et nous avons, sans aucun doute, besoin de son retentissement.
Voici des femmes qui, présentes sur place ou connectées via internet, disent leurs expériences et partagent leurs résolutions, évoquent peut-être leurs difficultés mais surtout racontent le monde qu’elles construisent jour après jour. Ces femmes sont, pêle-mêle et à la fois, des mères de familles, des enseignantes, des directrices d’institution, des animatrices, des amies et des exemples pour tous, des conseillères et des guides pour beaucoup. Ainsi donc, des femmes, porteuses d’immenses responsabilités, se retrouvent. La pandémie a bien tenté de les empêcher mais rien ne résiste à leur volonté. Car c’est bien d’une histoire de femmes qu’il s’agit et, pour cette raison, nous ressentons ici toute sa puissance.
Bien loin de l’imagerie surannée évoquée plus haut, bien loin de cette espèce de condescendance dont elle est empreinte, ces femmes ont entrepris littéralement de changer le monde qui les entoure. Elles vivent en France, aux Etats-Unis ou en Israël, au fin fond de l’Asie, en Afrique ou en Scandinavie, en Australie, en Amérique du Sud ou en Alaska mais elles partagent toutes le même rêve : être, très concrètement, les actrices de ce grand changement, être celles par qui les lignes bougent, par qui la société de demain sera meilleure, plus belle et plus harmonieuse que celle d’aujourd’hui sanitaire. En ces jours que nous vivons, en dépit du contexte sanitaire, elles savent le dire et leur vision porte loin. Aussi bien, elles assument totalement les choix qu’elles ont fait et leur participation au congrès, au-delà des échanges que cela permet, est également une manière d’affirmer haut et fort à destination d’un monde qui, peut-être, préfère ne pas l’entendre : « Etre une femme juive est décidément un sort enviable ». Mais il est vrai que le judaïsme le proclame de longue date : « C’est par le mérite de telles femmes que nos ancêtres furent libérés d’Egypte ». C’est aussi par lui que vient la Délivrance messianique.
L’éducation juive et la venue de Machia’h
Décrivant le temps de Machia’h, D.ieu dit (Isaïe 44:3) : « Je déverserai Mon esprit sur ta descendance et Ma bénédiction sur tes générations ». Dès la première lecture du verset, il est clair que sont ici désignés les enfants.
Or, on connaît le principe selon lequel toutes les révélations de ces temps futurs dépendent de nos actions et de notre effort d’aujourd’hui (Tanya chap. 37). C’est dire à quel point l’éducation juive assurée aux enfants est un impératif pour chacun.
(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch Chabbat Parchat Vayikra 5740)
Michpatim
A la suite de la révélation sinaïtique, D.ieu légifère une série de lois pour le Peuple juif. Elles incluent les lois concernant le serviteur contractuel, les compensations en cas de meurtre, d’enlèvement, d’assaut et de vol, les lois civiles pour rembourser les dommages, les prêts et les responsabilités des « quatre gardiens », enfin les lois dirigeant la conduite des cours de justice.
On y lit également les lois interdisant les mauvais traitements à l’égard des étrangers, l’observance des fêtes saisonnières, les dons agricoles à apporter au Saint Temple de Jérusalem, l’interdiction de cuire ensemble le lait et la viande et la Mitsva de la prière. La Paracha Michpatim comporte en tout 53 Mitsvot : 23 commandements positifs et 30 commandements négatifs.
D.ieu promet de conduire le Peuple d’Israël en Terre Sainte et le met en garde contre les pratiques païennes de ses habitants.
Le Peuple d’Israël proclame : « Nous ferons et nous entendrons tout ce que D.ieu nous a ordonné ». Laissant Aharon et Hour en charge du camp israélite, Moché monte sur le Mont Sinaï pour recevoir la Torah de D.ieu et y reste quarante jours et quarante nuits.
Le verset 1 du chapitre 24 de la Paracha Michpatim déclare : « A Moché, Il dit : Monte vers l’Éternel… ».
Rachi commente les mots : « A Moché Il dit » en ces termes :
« Cette partie fut dite avant les Dix Commandements [qui sont mentionnés plus tôt dans le texte, dans la Paracha Yitro] ; et le 4 Sivan, [le commandement] « Monte » lui fut enjoint. »
Cette Paracha rappelle les événements qui se produisirent le 4 Sivan (et également le 5). Son occurrence chronologique se situe avant Yitro, où sont relatés avec force détails les événements préparatifs à Matan Torah : le « Don de la Torah ». Cependant, la Torah n’est pas écrite selon un ordre chronologique. C’est la raison pour laquelle Rachi note que cette section fut prononcée avant les Dix Commandements, quand bien même elle est relatée plus tard dans la Torah.
Cependant, il reste des zones obscures : quand une section ne figure pas là où elle est attendue, il faut une explication. Donnons un exemple : à la fin de la Paracha Noa’h (11: 31), Rachi demande : « Pourquoi l’Écriture évoque-t-elle d’abord la mort de Téra’h avant de continuer avec Avraham ? Pour que la chose ne soit pas connue par tout le monde… » Nous voyons alors que dans la simple interprétation du texte, une explication est nécessaire pour comprendre pourquoi une partie de la Torah n’est pas à la place adéquate. Dans notre cas, pour quelle raison une partie entière (et non un seul verset comme dans la Paracha Noa’h) n’est pas là où elle est attendue ? Et puisque Rachi, qui explique toujours ce qui est nécessaire, au sens littéral, ne donne-t-il aucune explication ? Nous devons donc en conclure que la réponse est évidente, si bien qu’il ne juge pas nécessaire de la repréciser.
Le Matan Torah comprend deux aspects généraux.
D’une part, il s’agit du Don de la Torah que D.ieu enseigna aux Juifs, comme il est statué : « D.ieu prononça tous ces mots. » D’abord Il dit les Dix Commandements ; puis Il enseigna toute la Torah, y compris : « Voici les jugements » (qui amorcent notre Paracha).
Par ailleurs, il est question de l’élévation des Juifs vers D.ieu, du lien qu’ils nouent avec Lui, effectué grâce à l’alliance contractée entre D.ieu et le Peuple juif. Ce second aspect s’exprime par l’intermédiaire du service de D.ieu qu’accomplissent les Juifs, également l’un des aspects essentiels du Matan Torah, comme il est dit : « Quand tu sortiras le peuple d’Égypte, vous servirez D.ieu sur cette montagne. »
C’est ainsi que parmi les paroles que D.ieu recommande à Moché de dire avant le Matan Torah, apparaissent les mots : « Vous serez un royaume de prêtres et une nation sainte pour Moi », l’idée générale de la connexion des Juifs à D.ieu (le second aspect du Matan Torah.)
Après le commandement d’ordre général : « Voici les choses que tu diras aux Enfants d’Israël », les deux aspects du Matan Torah sont présentés en détails. Tout d’abord, les Dix Commandements (commençant avec leur préparation), puis « A Moché, Il dit : Monte vers l’Éternel », le second aspect du Matan Torah : l’élévation du Juif vers D.ieu, sa connexion à Lui par l’alliance.
C’est la raison pour laquelle la partie : « A Moché Il dit » n’est pas écrite avec les Dix Commandements.
C’est un aspect second, séparé, du Matan Torah, qui suivit les Dix Commandements.
Cependant, cela ne peut expliquer que la raison pour laquelle cette partie n’est pas jointe aux Dix Commandements. Cela n’éclaire pas sur le fait qu’elle figure spécifiquement à la fin de Michpatim.
Quand une section ne figure pas à son emplacement adéquat, c’est parce qu’elle a une relation avec la Paracha dans laquelle elle se trouve.
Dans notre cas, si la partie « A Moché Il dit » est écrite à cet endroit, à la fin de la Paracha, c’est à cause de son lien avec la Paracha suivante.
Notre Paracha, comme nous l’avons précédemment vu, évoque le lien établi entre D.ieu et l’homme par le biais de l’alliance. Les quelques Parachiot qui suivent : Terouma, Tetsavé, Vayakhel et Pekoudé parlent de la construction du Michkan, « le Tabernacle ». L’édification du Michkan constitue le paroxysme dans le lien entre D.ieu et les Juifs, comme il est statué : « Ils Me feront un Sanctuaire et Je résiderai avec eux. »
C’est donc pour cela que notre section est placée juste avant ces Parachiot.
Ce qui précède clarifie certains détails qu’exprime Rachi qui cite les mots : « A Moché Il dit : monte. » Son commentaire ne concerne que le moment où ce passage fut dit (« A Moché, Il dit »). Il ne semble donc pas nécessaire d’ajouter le mot « Monte » dans sa citation.
Mais précisément parce que l’idée de ce passage est l’alliance entre D.ieu et les Juifs, quand les Juifs furent élevés au summum de la perfection, Rachi cite également le mot « Monte » pour mettre l’accent sur l’idée de toute cette section.
Rachi veille à souligner que « cette section fut prononcée avant les Dix Commandements » et non « avant Matan Torah ». Comme ce passage est une partie de Matan Torah (le second aspect, comme nous l’avons expliqué plus haut), Rachi ne pouvait pas dire que cela fut prononcé avant Matan Torah mais plutôt « avant les Dix Commandements ».
Qu’est-ce que le mois d’Adar ?
Cette année 5782 est embolismique – c’est-à-dire qu’elle compte deux mois d’Adar.
Dès qu’entre le mois d’Adar, c’est-à-dire dès Roch ‘Hodech Adar Richone – cette année mardi 1er et mercredi 2 février 2022 (et, selon certains, dès le Chabbat Michpatim qui bénit le mois d’Adar) – on multiplie chaque jour la joie. Nous aurons donc 59 jours joyeux. On peut célébrer des mariages durant tous les jours des deux mois d’Adar (sauf le Chabbat évidemment).
Celui qui doit passer en jugement contre un non-Juif s’efforcera de retarder le procès jusqu’aux mois d’Adar.
Le 7 Adar est le jour anniversaire ainsi que le jour du décès de Moché Rabbenou (Moïse notre maître). Lors d’une année embolismique, ce jour est marqué dans le premier mois d’Adar. Les personnes impliquées dans la Mitsva de Hevra Kadicha (les enterrements) se réunissent en ce jour pour prendre de bonnes décisions et améliorer encore leurs actions – car c’est D.ieu Lui-même qui a pris soin de la dépouille de Moché, Son fidèle serviteur.
(d’après Chéva’h Hamoadim)
Cent années de lumière
La Rabbanit ‘Haya Mouchka quitta ce monde le mercredi 22 Chevat 5748 (10 février 1988). Notre organisation, dédiée à la campagne d’allumage des bougies de Chabbat, avait programmé depuis plusieurs mois une soirée de levée de fonds pour le samedi soir suivant. A l’annonce de la nouvelle du décès, nous avons hésité et avons pensé à l’annuler mais nous avons finalement décidé de dédier la soirée à la mémoire de la Rabbanit. Et nous avons décidé d’instituer un nouveau Fonds en son mérite pour intensifier cette campagne.
Bien que, d’habitude, j’informai le Rabbi de chaque nouvelle initiative dans ce domaine, je n’eus pas le cœur de le contacter pendant la semaine de deuil. Cependant, dès la fin des Chiva, je fus convoquée avec mon père, Rav Chnéor Zalman Gurary (très proche du Rabbi et responsable de multiples organisations charitables). Mon père était très nerveux : comment affronter le regard du Rabbi en cette période si chargée d’émotion ? Il en tremblait et, moi aussi, je me mis à trembler.
Le Rabbi nous reçut dans sa maison, au deuxième étage, dans son bureau personnel, évidemment rempli de livres saints. Il prit l’invitation que nous lui avions envoyée auparavant et, comme il avait appris la création de ce Fonds, il souhaitait y participer à la hauteur de 470 dollars – correspondant à la valeur numérique du nom de sa défunte épouse. Il y ajoutait un dollar, sa contribution personnelle pour le succès de ce projet. Il nous bénit abondamment, avec tant de conviction que mon père et moi-même étions stupéfaits. Il souhaita que toutes les personnes impliquées dans cette campagne et qui parviennent à influencer des femmes et filles juives à allumer les bougies de Chabbat voient leurs vies illuminées. Bref, il avait transformé son deuil personnel en bénédiction pour la campagne d’allumage des bougies.
Je rapportai tout cela à M. J.J Gross – notre responsable marketing – et il suggéra qu’on utilise l’argent du Rabbi pour acheter un petit encart en bas de la première page du New York Times : « Appelons cela : projet 470 ».
La première page du New York Times est diffusée dans le monde entier tandis que les pages intérieures changent selon les régions. Acheter une publicité sur cette page est très onéreux – il faut payer chaque lettre et même chaque espace entre les mots – mais M. Gross élabora un message très court :
Femmes et filles juives : allumez les bougies de Chabbat avant 17h15. Info : 718 2060.
Ce minuscule encart eut d’énormes répercussions, nombre de gens se posèrent des questions quant à leur judaïsme et c’est moi qui reçus tous les appels. Les gens posaient toutes sortes de questions, même sans rapport avec les bougies de Chabbat et j’en informai fidèlement le Rabbi – ce qui lui causait à l’évidence une grande satisfaction.
Durant les dix années qui suivirent, nous avons continué chaque semaine, avec quelques modifications puis un numéro automatisé : il suffisait de taper son code postal pour obtenir l’horaire approprié pour sa région.
Malheureusement, quand le coût de cet encart devint vraiment prohibitif, nous avons été obligés d’arrêter.
Et pourtant il réapparut mystérieusement – à notre plus grande surprise…
Le 1er janvier 2000 tombait un Chabbat. Dès la fin de ce jour (si particulier pour nos voisins – le jour de changement de millénaire – mais ordinaire dans notre communauté), M. Gross me téléphona, très excité
- Avez-vous vu le New York Times de ce matin ?
- Non, pourquoi ?
- Je ne vous en dirai pas plus ! Allez vite vous le procurer !
Je courus emprunter un exemplaire auprès d’une voisine et là… je compris ce qui lui causait tant de palpitations :
Depuis quelques mois déjà, l’équipe du journal avait préparé une page remplie de nouvelles les plus extravagantes qu’on pourrait trouver dans l’édition du 1er janvier 2100 : tous les journalistes avaient rivalisé d’imagination quant à la une du journal d’ici cent ans. Les dernières manipulations météorologiques, les robots exigeant l’égalité des droits, des soucoupes volantes réglant la circulation et toutes sortes d’idées plus loufoques les unes que les autres. Et, tout en bas de la page, à l’endroit où nous avions l’habitude d’imprimer notre encart, il y avait :
Femmes et filles juives ! Allumez les bougies de Chabbat avant le coucher du soleil. A New York avant 16h39. Pour tout autre endroit et pour tout renseignement, appuyez ici.
Nous n’étions absolument pas au courant de cet encart, nous n’avions donné aucun horaire et n’avions pas été prévenus de cette page de science-fiction. M. Gross téléphona pour demander ce qui s’était passé et voici ce qu’on lui répondit :
- Cela fait très longtemps que nous avons réfléchi à la situation du monde dans cent ans. Nous ne pouvons être surs de rien – sauf d’une chose : c’est que dans cent ans, les femmes et filles juives continueront d’allumer des bougies de Chabbat !
Vous rendez-vous compte de ce que cela signifie et de l’effet produit par cet encart ? Des millions de gens l’ont lu et ont constaté que le seul élément stable dans cet univers était le peuple juif et ses bougies de Chabbat.
Et tout ceci avait été rendu possible grâce au Projet 470 initié par le Rabbi en l’honneur de son épouse, la Rabbanit ‘Haya Mouchka.
Esther Sternberg - JEM
Traduite par Feiga Lubecki