Lettre n° 1095

[11 Tamouz 5711]

J’ai pris connaissance avec plaisir de la lettre de votre père, le Rav et ‘Hassid, dans laquelle il me dit qu’il étudie la Torah, qu’il a le désir de poursuivre ses études, d’accumuler des connaissances. Il gardera sûrement cette attitude, qui est également celle du Saint béni soit-Il, comme le disent nos Sages, au traité Sanhédrin 99b, commentant le verset : "Il se maintiendra dans ce qui fait Ma force et M’apportera la paix", qui se rapporte à celui qui étudie la Torah pour elle-même.

Le Tanya et la ‘Hassidout, en général, expliquent que la Torah est la Sagesse et la Volonté de D.ieu. Or, Lui-même et Sa Sagesse ne font qu’un. C’est donc en étudiant la Torah que l’on peut accomplir les termes de la promesse selon laquelle "Israël, la Torah et le Saint béni soit-Il ne font qu’un".

Malheureusement, la faute de l’arbre de la connaissance du bien et du mal introduisit la mort dans le monde et le Be’hayé souligne que le corps de l’enfant commence à se dessécher, dès l’instant de sa naissance. En d’autres termes, sa mort apparaît dès le début de sa vie. C’est également le sens du verset : "Au jour où tu en mangeras, tu mourras".

Voici pour ce qui concerne la dimension matérielle.

D.ieu consulta la Torah pour créer le monde et tout ce qui s’y trouve doit donc trouver sa source en elle. Et, l’on peut ainsi comprendre la question que posent nos Sages, au traité ‘Houlin 139b : "Où trouve-t-on, dans la Torah, une allusion à Haman ?". En effet, rien ne peut exister dans le monde qui n’ait sa source dans la Torah.

La faute de l’arbre de la connaissance du bien et du mal eut un effet similaire, de même que, par la suite, celle du veau d’or. On sait, en effet, que les enfants d’Israël, près du mont Sinaï, furent blanchis et délivrés de leur impureté, qu’ils retrouvèrent après la faute du veau d’or. Il en résulta l’oubli de la Torah, comme le dit le traité Erouvin 54a : "Si ce n’était la faute du veau d’or, les Juifs n’auraient pas oublié la Torah".

Spirituellement, l’oubli correspond à la mort.

Matériellement, la mort intervient après soixante dix ans et même, si l’on fait intervenir l’attribut de rigueur, après quatre vingts ans. Bien plus, il est dit que "sa vie sera de cent vingt ans". Néanmoins, pourquoi la mort est-elle envisageable ? Parce que le corps de l’enfant commence à se dessécher depuis sa naissance, comme le disait le Be’hayé.

Il en est de même pour l’étude de la Torah. Comment l’oubli est-il possible, par la suite ? Parce que d’emblée, l’étude n’a pas été ce qu’elle aurait dû être. Ainsi, nos Sages disent, au traité Erouvin 54a : "si elle pénètre les 248 membres de ton corps, elle se maintiendra". Vous consulterez, à ce propos, le Tanya, au début du chapitre 37, qui souligne que l’on doit étudier la Torah de cette manière.

Au sein de la Torah, on distingue deux parties, que le Zohar appelle "corps de la Torah", terme que l’on retrouve dans la Michna et "âme de la Torah", qui en est la dimension profonde.

Celui qui entre en relation avec le corps d’un homme se trouve effectivement en rapport avec lui. Néanmoins, pour vivifier cette relation, pour qu’elle soit positive et fructueuse, il faut connaître la structure de ce corps, les détails qui le constituent et méditer à l’existence de l’âme, à ce qui la composent. C’est uniquement de cette manière que l’on peut avoir une bonne connaissance du corps.

Ce qui vient d’être dit s’applique, de la même manière, à ce qui fait l’objet de notre propos.

Il fut un temps où tous les Juifs étaient en bonne santé, pour tout ce qui concerne la Torah et les Mitsvot. Or, la Torah envisage la situation majoritaire. Selon le principe qu’énonce le Rambam, les enfants d’Israël doivent manger et boire, au même titre qu’un corps en bonne santé. En d’autres termes, ils doivent étudier la partie révélée de la Torah et son sens simple. Et, seuls ceux qui se consacrent aux membres intérieurs du grand corps que constitue le peuple juif, en particulier au cerveau et au cœur, avaient accès à l’enseignement profond de la Torah.

Puis, le temps passa et, "du fait de nos fautes, nous avons été renvoyés de notre terre". L’obscurité du monde devint de plus en plus forte. Les cœurs et les cerveaux s’affaiblirent, de sorte que, selon l’expression du prophète, "de la plante des pieds à la tête, rien n’est plus intact". Dès lors, il ne suffit plus de boire et de manger. Il faut, en outre, prendre des médicaments.

Plus l’obscurité est intense, plus le danger est grand pour le malade et plus il est nécessaire de suivre un traitement. Il convient avant tout de mettre en éveil la vitalité qui se trouve au profond de l’âme juive. Ainsi, on peut se maintenir, surmonter les épreuves, les voiles et les difficultés. Comme on l’a dit, la Torah prend en compte la situation majoritaire. Chacun de nous doit donc étudier l’enseignement profond de la Torah, la ‘Hassidout, qui apporte la guérison au monde. C’est ce qu’explique le Rabbi Rachab, dans son Kountrass Ets ‘Haïm.

Ce qui découle de ce développement est énoncé par nos Sages, au traité Chabbat 31a, "on introduit la foi dans le temps, la crainte de D.ieu est un trésor". Celui qui a étudié les six ordres de la Loi Orale ne peut pas, pour autant, se passer de craindre D.ieu. Et nos Sages disent encore que, si ce n’est pas le cas, il est préférable de ne pas apprendre la Torah.

Tout ceci concerne le temps et le lieu où il était possible d’accéder à la Torah sans effort particulier, de manière naturelle. Et, combien plus en est-il ainsi, à l’époque actuelle. On peut, en effet, constater que, lorsque l’on étudie la ‘Hassidout, partie profonde de la Torah, on maintient, en général, sa crainte de D.ieu. A l’opposé, les jeunes qui disent ne posséder que la Torah, sont, bien souvent, malheureusement, l’illustration des propos de nos Sages, au traité Yebamot 109b : "Celui qui prétend ne posséder que la Torah ne possède pas même la Torah".

Ce qui vient d’être dit concerne tous les Juifs.

A fortiori, ceux dont les parents sont des ‘Hassidim, qui évoluent dans un environnement où la ‘Hassidout est présente, où l’on respecte les pratiques ‘hassidiques, reçoivent ainsi clairement un message divin, leur soulignant la bonne part qui leur a été confiée, sans effort de leur part, de par leur naissance, en sachant que ceci leur appartient, qu’il leur revient d’étudier la ‘Hassidout.

En pareil cas, on étudiera la ‘Hassidout d’une manière totalement différente. Bien plus, on vivifiera l’étude de la partie révélée de la Torah, dont on supprimera les difficultés et les voiles, les questions et les troubles. Il est essentiel, en effet, que l’étude soit enthousiaste, que l’on mette en pratique l’affirmation selon laquelle "Israël, la Torah et le Saint béni soit-Il ne font qu’un".

J’aimerais savoir quel est le texte de la ‘Hassidout que vous étudiez. A n’en pas douter, vous intensifierez cette étude. Nos Sages disent, en effet, que "l’on s’élève dans la sainteté et l’on ne redescend pas", principe qui, selon de nombreux avis, est instauré par la Torah elle-même.

J’attends de vos bonnes nouvelles. Or, il n’est de bon que la Torah et son luminaire. Je conclus en vous adressant ma bénédiction de réussite pour étudier la Torah avec la crainte de D.ieu,