Par la grâce de D.ieu,
23 Tévet 5712,
Brooklyn,
Je vous salue et vous bénis,
J’ai bien reçu votre lettre du 18 Tévet, de même que la précédente, avec la demande de bénédiction qu’elle contenait et dont j’ai donné lecture près du tombeau de mon beau-père, le Rabbi. A n’en pas douter, il invoquera la miséricorde divine pour que vous ayez une bonne santé.
Vous avancez que vous m’avez peut-être causé du déplaisir par votre précédente lettre, en me disant que vous n’étiez pas satisfait de ma réponse. Que D.ieu me garde qu’il en soit ainsi ! Il n’y a aucun déplaisir de ma part, mais plutôt une certaine forme de découragement, car le sens de ma réponse allait exactement à l’encontre de votre interprétation.
J’affirmais clairement la grande valeur des promesses formulées par les Justes. Je disais qu’au final, elles devaient inéluctablement se réaliser. Vous deviez donc en tirer les conclusions pour votre propre cas, avoir la certitude qu’il en serait bien ainsi, comme le souligne, en particulier, le Rav I. M. de Poltava.
Or, vous avez interprété ma lettre d’une manière opposée à celle-ci et j’en suis donc moi-même embarrassé. Je ne sais que vous répondre de plus. Le Rabbi Maharach dit que les mots expriment l’essence de l’âme et mon beau-père, le Rabbi, précise qu’une réponse se formule parfois d’elle-même. Les ‘Hassidim ajoutent que la manière d’interpréter cette réponse, par celui qui la reçoit, est déterminante, surtout si celui-ci est à même de formuler un avis, s’il est sûr de lui, comme le dit la Michna, au début du traité Horayot : "Voici la règle générale : celui qui fait dépendre de lui-même...".
En tout état de cause, les excuses que vous demandez dans votre lettre n’ont nullement lieu d’être. Il est clair que vous ne devez en aucune façon vous sentir écarté, ce qu’à D.ieu ne plaise. S’il n’a jamais été question de mettre quiconque à l’écart, combien plus est-ce le cas à notre époque, en cette période du talon du Machia’h. Il convient, en effet, d’aller à sa rencontre et, comme le dit le Tséma’h Tsédek, c’est en étant unis et soudés que les ‘Hassidim accueilleront le Machia’h.
J’ai appris avec plaisir, par le Rav, distingué ‘Hassid qui craint D.ieu et se consacre aux besoins communautaires, Rav Ben Tsion Chem Tov, que vous enseignez la Torah publiquement. Mais, celui-ci m’a dit aussi qu’il a pu constater votre découragement. Pensez donc à l’immense responsabilité que vous a confiée notre maître. Dès lors, qui pourrait se comparer à vous ? Le fait d’assumer une telle mission évoque, d’une certaine façon, l’affirmation suivante de Rabbi Chimeon Ben Yo’haï, commentée par la ‘Hassidout : "Je ne suis qu’une indication(1)". En effet, celui-ci ne possédait aucune personnalité propre(2) et il pouvait donc dire qu’il n’agissait pas par lui-même, que son Maître se révélait à travers lui.
Certes, c’est à ce propos qu’il est dit : "J’ai vu ceux qui sont susceptibles de connaître l’élévation. Ils sont peu nombreux"(3). Et, qui peut prétendre accéder à un tel niveau ? Néanmoins, chaque ‘Hassid possède en lui la force du Rabbi(4). Son comportement est donc ce qu’il doit être, au moins potentiellement. Bien plus, il est aisé de révéler ce potentiel et chacun dispose de l’aplomb nécessaire pour cela. Il suffit de demander à D.ieu d’en faire bon usage, en particulier pour l’étude de la Torah.
Vous connaissez, en effet, la différence entre l’étude de la Torah et la prière. Celle-ci, en particulier pendant les jours de semaine, s’élève vers D.ieu. Elle émane de l’étroitesse(5), alors que la Torah, en particulier la ‘Hassidout, "arbre de vie", est une révélation céleste et large.
Avec ma bénédiction pour une bonne santé et pour avoir de bonnes nouvelles, toujours et tous les jours, de ce qui vous concerne, en général et de votre état de santé, en particulier,
Je vous joins ma lettre, adressée à tous, à l’occasion de "la fête de toutes les fêtes", le 19 Kislev.
Notes
(1) De ce qui se passe dans les sphères célestes, sans introduire aucun message personnel.
(2) Sa soumission à D.ieu était totale.
(3) Il est donc bien clair que le niveau qui vient d’être décrit n’est pas accessible à chacun. Dès lors, comment l’exiger ?
(4) Il reçoit ainsi la force de s’élever au dessus du niveau qui est réellement le sien.
(5) Elle provient d’un effort de l’homme qui cherche à s’élever vers D.ieu.