Lettre n° 1715

Par la grâce de D.ieu,
20 Tamouz 5712,
Brooklyn,

Au grand Rav, distingué ‘Hassid qui craint D.ieu
et érudit, le Rav Avraham Yaakov(1),

Je vous salue et vous bénis,

J’ai reçu votre lettre, il y a quelques temps. Du fait de mes nombreuses occupations, je n’ai pas eu le temps de répondre comme il l’aurait fallu. Encore à l’heure actuelle, je ne dispose pas du temps nécessaire pour vous répondre longuement. Je le ferai donc brièvement.

Vous citez, dans votre lettre, le Beth Yossef qui, au chapitre 262, cite le Ritva, au nom de son maître, le Reéh, selon lequel, en un jour nuageux(2), celui qui n’entend pas s’en remettre au fait que "D.ieu protège ceux qui sont candides" sera autorisé à différer une circoncision qui aurait dû être pratiquée en son temps(3). Il précise même qu’il est judicieux d’agir ainsi. Et, vous demandez pourquoi il ne cite pas cet avis dans son Choul’han Arou’h, d’autant qu’il s’agit bien d’une situation de danger(4). Vous ne proposez pas de réponse à cette question.

A mon sens, votre interrogation ne doit pas être formulée de cette façon. On ne peut se demander pourquoi il n’a pas retenu, ni même cité, un avis isolé dans son Choul’han Arou’h. En effet, aucun des premiers Sages n’adopte l’avis du Ritva, puisque, dans leurs ouvrages, ils n’évoquent pas les jours nuageux ou venteux. C’est en particulier le cas du Rif, du Rambam et du Roch, qui sont les autorités sur lesquelles se fonde le Beth Yossef.

D’autres Sages discutent ouvertement l’avis du Ritva, comme Rabbénou Yerou’ham et Rabbi Manoa’h, que cite le Beth Yossef. Et, si l’on se demande pourquoi ces Sages n’acceptent pas le principe de différer une circoncision qui devrait être pratiquée en un jour nuageux, on peut simplement considérer qu’ils adoptent la conclusion de la Guemara selon laquelle "D.ieu protège ceux qui sont candides".

On peut en citer pour preuve le traité Yebamot 71b, dans lequel Rav Papa aurait pu dire qu’au moment de l’action(5), le jour était nuageux et que ces nuages se sont dissipés par la suite, même si cette explication est quelque peu difficile à accepter.

Et, pourquoi la Guemara elle-même donne-t-elle cette explication? C’est qu’il y a lieu de craindre qu’un jour nuageux nuise à l’enfant ayant subi la circoncision, lequel est alité à la maison, comme l’explique le Tséma’h Tsédek, dans ses décisions hala’hiques sur le Yoré Déa, au chapitre 263.

De plus, il est permis de pratiquer la circoncision, même si l’on sait le danger que représente un jour nuageux. En effet, nombreux sont ceux qui adoptent une telle pratique et "D.ieu protège ceux qui sont candides".

C’est, au sens le plus simple, ce qu’indique le traité Yebamot 12b et le passage de la Guemara qui fait l’objet de notre propos. Bien plus, le Ritva lui-même dit que l’on est autorisé à différer(6). On peut donc également s’en remettre au fait que "D.ieu protège ceux qui sont candides".

En plus de tout cela, vous consulterez également les responsa ‘Haïm Chaal, tome 1, au chapitre 59, celles du Tséma’h Tsédek, Even Haézer, fin du chapitre 11, le Sdeï ‘Hémed, recueil de lois, à l’article "circoncision", chapitre 2, paragraphe 13. A cette dernière référence, vous verrez que la controverse faisant intervenir le Ritva est le prolongement de celle qui porte sur les trois femmes autorisées à avoir une relation avec un tampon(7). Les autres Décisionnaires n’en font pas mention.

J’ai vu que vous citez votre grand-père, dans l’introduction de votre livre. Je reproduis donc ici les propos de mon beau-père, le Rabbi, que j’ai notés et qui vous intéresseront sûrement. Les voici:

"Le Rav Zalman Neimark était rabbin à Stradov. Lorsque l’on voulut accuser mon grand-père, le Rabbi Maharach, de crime rituel, il endossa personnellement la responsabilité de l’affaire, se disant: ‘C’est le moment’. Il passa, de ce fait, plusieurs années en prison.

Lorsqu’il entendit le discours ‘hassidique intitulé "quiconque participe(8)", du Rabbi Rachab, il dit : "Je n’ai pas besoin de ce qui n’est pas l’Essence de D.ieu. Je n’ai pas besoin du Machia’h(9). Je vais devenir partie intégrante de l’Essence divine".

Après le repas, nous nous sommes rendus au bain rituel. Mon père, le Rabbi Rachab, y est entré seul et nous l’avons tous attendu à l’extérieur. Rav Zalman répéta alors les termes du Rambam : "Ce n’est pas...(10), ni le Mikwé qui purifie, mais un Décret...(11)". Il dit : ‘Au même titre que je suis un Juif, c’est le Mikwé qui a besoin de lui(12) et non lui qui a besoin du Mikwé(13). Néanmoins, il s’agit bien d’un Décret édicté par D.ieu’."

Je vous joins un fascicule qui a été édité pour les jours propices de la fête de la libération du 12-13 Tamouz. Il vous intéressera sûrement. Et, vous voudrez bien m’excuser pour la lenteur de ma réponse, qui a été retardée jusqu'à maintenant.

Avec ma bénédiction,

Notes

(1) Le Rav A. Y. Neimark, de Tel Aviv.
(2) Ce qui est un mauvais présage.
(3) Au huitième jour.
(4) Pour l’enfant si la circoncision est pratiquée ainsi.
(5) Lorsque la circoncision de l’enfant devait être pratiquée.
(6) La circoncision, mais cela n’est pas une obligation.
(7) Contraceptif.
(8) A un festin de mariage.
(9) Le Rabbi note, en bas de page : "On peut comprendre cette affirmation d’après la conclusion du Michné Torah : Les Sages ne souhaitèrent la venue du Machia’h que pour avoir accès à la connaissance de D.ieu. On consultera également le Tanya, à la fin du chapitre 3".
(10) Le contact avec le mort qui rend impur.
(11) Décidé par D.ieu.
(12) Du Rabbi.
(13) Car, le Rabbi n’a nul besoin de purification.