Par la grâce de D.ieu,
25 Adar Cheni 5714,
Brooklyn,
Je te salue et te bénis,
J’ai bien reçu ta lettre du 24 Adar Cheni et je dois commencer ma réponse en te disant que j’ai été choqué par le contenu de ta lettre, après l’avoir été par ce qui s’est passé, de façon générale(1).
Il est sûrement inutile de te répéter ce qui est bien évident et a déjà été expliqué plusieurs fois, pendant les réunions ‘hassidiques. D.ieu n’a rien créé d’inutile, dans le monde. On doit donc se servir de ses capacités de la manière définie par la Guemara, à la fin du traité Kidouchin : “ Je n’ai été créé que pour le service de mon Créateur ”(2).
Or, tu as la capacité d’exercer une influence positive sur ton entourage et de guider tes amis(3). J’étais donc convaincu que tu agissais effectivement en ce sens, conformément à l’explication de nos Sages qui vient d’être rappelée, que tu rapprochais tes amis du service de D.ieu.
Puis, l’on s’est plaint des conseils que tu as donnés, on a dit que tu adoptais la position inverse de celle qui vient d’être décrite. D’après ce que tu m’écris, je constate que cela a bien été le cas. J’en ai été choqué, comme je le disais plus haut.
Il est dit que “ il n’est pas d’homme sur la terre, qui soit juste et ne commette pas de faute ”. J’en ai déduit, qu’il y avait là un échec, comme tu le dis toi-même dans ta lettre et que tu en tirerais les conséquences. Pour se libérer d’une situation malencontreuse ou d’un échec, il ne suffit pas de l’oublier et de ne plus y penser. Car, ce qui s’est passé a une conséquence. Il en résulte une punition. Tu dois donc avoir la force de dire : “ Puisque je suis coupable, je mérite cette punition ”.
Même si tu penses que la punition est disproportionnée par rapport à la faute, tu dois, au moins, reconnaître qu’étant personnellement en cause, tu ne peux pas avoir un avis objectif. Tu cherches donc à minimiser l’acte qui a été commis.
De plus, même si, après s’être dit tout cela, la punition reste sévère, il faut aussi tenir compte de l’âge de celui qui a commis la faute(4) et, bien plus, du fait qu’il évolue au sein d’un groupe dont il est considéré comme le dirigeant, donnant des conseils aux autres. Une telle personne doit être plus exigeante envers elle-même, ne pas attendre un traitement de faveur par rapport à ses amis.
Ta lettre indique que tu considères la punition comme une atteinte délibérée à ton honneur et à ta personne. Tu souhaites donc réagir en quittant la Yechiva.
En troisième lieu, vient ce qui m’étonne et me choque le plus. J’étais certain que toi et les autres élèves, considériez la Yechiva comme on doit la voir, c’est-à-dire non pas comme une institution dans laquelle on est “ invité ”, on poursuit des études pendant quelques temps, puis l’on dit au revoir au “ maître de maison ” et l’on s’en va.
Je pensais que l’on comprendrait tout cela. Une Yechiva n’est pas uniquement bâtie sur des enseignants et des guides spirituels, mais aussi sur des jeunes gens, des élèves. Ceux-ci doivent la percevoir comme un édifice moral, dont chacun supporte une partie. Il ne s’agit pas d’une activité accessoire. On ne peut pas considérer que, pendant son temps libre, on est libéré de tout engagement envers la Yechiva. Bien au contraire, on doit se consacrer pleinement à elle, être convaincu qu’elle est son propre bien, que l’on bâtit, à travers elle, son propre édifice.
Bien évidemment, si tous avaient une telle optique, il ne viendrait à l’idée de personne de ruser avec la Yechiva et ses dirigeants, en la quittant.
Une image illustrera tout cela, lorsqu’un homme cogne son pied gauche contre son pied droit, il ne cherchera pas à punir le pied droit, mais bien à prendre toute mesure pour que cela ne se reproduise plus.
Bien évidemment, je ne t’écris pas tout cela pour te faire de la morale, mais pour t’exprimer ma consternation et mon espoir que les forces qui ont été investies en toi et les capacités que D.ieu t’a accordées permettront que le mauvais penchant ne puisse te vaincre et te convaincre d’abandonner la Yechiva dans laquelle tu as la possibilité d’étudier la partie révélée de la Torah et la ‘Hassidout, avec crainte de D.ieu.
D.ieu fasse que tu sois un exemple pour tes amis.
Avec ma bénédiction pour une crainte de D.ieu pure,
Notes
(1) Voir, sur le contenu de cette lettre, la lettre n°2574.
(2) Voir également la lettre n°2547.
(3) Cette lettre est adressée à un élève de la Yechiva.
(4) Vraisemblablement l’un des plus grands élèves de la Yechiva.