Par la grâce de D.ieu,
Sixième lumière(1),
Veille de la septième 5710,
Au grand Rav, distingué ‘Hassid qui craint D.ieu,
Le Rav Y.(2),
Je vous salue et vous bénis,
Je fais réponse à votre lettre. Il vous a été demandé de clarifier la position exprimée par l’Admour Hazaken, dans le Torah Or, au discours intitulé "le 25 Kislev". Il dit, en effet, que le soir, on allumait les sept lumières(3), "alors que, le jour, il suffisait d’allumer la sixième". On peut en conclure qu’il adopte la position des Décisionnaires selon lesquels le Chandelier est posé d’est en ouest.
Vous vous demandez donc pourquoi l’Admour Hazaken appelle cette sixième lumière, "la lumière occidentale", alors que, selon Rachi, commentant le traité Chabbat 22b, elle est "la seconde lumière". Vous consulterez, à ce propos, les responsa ‘Hatam Sofer Ora’h ‘Haïm, chapitre 186.
De fait, on doit s’interroger sur ce discours ‘hassidique, car l’Admour Hazaken y explique que, le jour, "on allume la sixième lumière après en avoir retiré les cendres, puis on allume la septième" et non uniquement la sixième.
Voici ce que l’on peut répondre à tout cela:
A) J’ai, par ailleurs, expliqué longuement comment était disposé le Chandelier, comment l’on en ôtait les cendres et comment on l’allumait, en particulier d’après la conception du Rambam, exposée dans son commentaire de la Michna et dans le Michné Torah, de même que les modifications introduites dans le second texte par rapport au premier.
Le discours ‘hassidique auquel vous faites allusion suit l’opinion de ceux qui considèrent que:
1. le chandelier était allumé uniquement la nuit, ce qui n’est pas l’avis du Rambam,
2. il était disposé d’est en ouest, comme le dit le Rabad, qui le précise également dans son commentaire du traité Tamid, figurant dans l’édition de Vilna du Talmud,
3. on allumait, le jour, les deux bougies qui se trouvaient à l’est, selon les responsa du Rachba, aux paragraphes 79 et 309, le Ramban commentant le traité Chabbat 22b et le verset Chemot 27, 20.
On peut considérer que les Tossafot, sur le traité Mena’hot 86b, envisagent uniquement l’interprétation de Rachi pour la discuter. En effet, aux traités Chabbat 22b et Mena’hot 86b et 88b, Rachi précise que le miracle se produisait sur une seule lumière. Mais, ce point ne sera pas discuté ici.
4. La "lumière occidentale" est la seconde, de l’ouest vers l’est, c'est-à-dire la sixième, ce qui contredit le commentaire de la Michna du Rambam et l’avis de Rachi, exprimé au traité Mena’hot 98b, selon lequel la "lumière occidentale" est la plus proche du Saint des Saints. Il a déjà été remarqué que Rachi contredit son propre avis, qu’il expose, par ailleurs, sur le traité Chabbat.
B) Rachi stipule, s’agissant de la "lumière occidentale", qu’elle est la seconde, alors que, pour l’Admour Hazaken, elle est la sixième. En effet, Rachi explique pourquoi on allume précisément cette lumière et il indique qu’elle est la première qui vient à portée et la seconde, par rapport à la manière d’entrer.
L’Admour Hazaken, par contre, explique pourquoi il suffit d’allumer cette lumière là. En effet, Yessod, l’Attribut du Fondement, le sixième, est essentiellement à l’origine de l’influence accordée à la création. Il souligne donc que cette lumière est la sixième.
Les Attributs de l’émotion, classés par ordre décroissant, sont ‘Hessed, la bonté, Guevoura, la rigueur, Tiféret, l’harmonie, Nétsa’h, la victoire, Hod, la soumission, Yessod, le fondement et Mal’hout, la royauté. Ainsi, les qualités de la Sainteté, dans le Sanctuaire et dans le Temple, sont classées par ordre décroissant, c'est-à-dire d’ouest en est, de sorte que Yessod, le fondement, correspond à la sixième lumière d’ouest en est, qui est la seconde d’est en ouest.
C) Au début de ce discours ‘hassidique, il est dit que l’on allumait la sixième lumière, alors que l’on allumait également la septième, comme cela est précisé par la suite.
C’est, en effet, les termes du verset qui sont reproduits ici, puisque la Torat Cohanim, le Sifri, le Talmud et différents textes ne parlent que d’une seule bougie.
Néanmoins, le Sage s’exprimant à la fin du troisième chapitre de Tamid précise que l’on doit systématiquement allumer aussi celle qui se trouve à l’est de celle-ci. Toutefois, on le fait uniquement pour que cette lumière puisse être définie comme "occidentale" par rapport à elle, comme le disent le Ramban et le Ramban. Il n’y a pas, en revanche, d’obligation spécifique de l’allumer.
D) Il nous reste à comprendre pourquoi, au début de ce discours, seule la sixième lumière est mentionnée, alors que la septième est introduite uniquement par la suite.
On peut le justifier de la manière suivante. Au début de ce discours, il est question de révéler ‘Ho’hma, l’Attribut de découverte intellectuelle à ceux des sentiments. Il est donc indiqué qu’au commencement du jour, cette révélation peut être limitée à l’Attribut du fondement, Yessod. Celui-ci la transmet ensuite à ‘Hessed, Guevoura et Tiféret. On peut le comprendre en considérant les additifs au Torah Or, à la fin de la Parchat Vaye’hi, commentant le verset "Yossef est venu te voir. Et Israël se renforça".
De ce point de vue, l’allumage de la septième lumière est sans importance et elle n’est donc pas mentionnée. Mais, par la suite, il est dit que l’influence divine parvient aux stades les plus bas de la création, jusqu’à l’Attribut de Mal’hout, jusqu’à la révélation effective, c'est-à-dire jusqu’à la septième lumière. Le Or Hatorah du Tséma’h Tsédek cite, à ce propos, l’interprétation qui est donnée dans le Biyoureï Hazohar, à la fin de la Parchat Balak.
Il est donc dit, par la suite, que l’on allume la septième lumière. Et l’on précise bien "par la suite" car, d’après la partie révélée de la Torah comme d’après sa dimension morale, l’allumage de la septième lumière est une conséquence de celui de la sixième.
E) Vous me demandez comment les jours de ‘Hanouka correspondent-ils aux Attributs de l’émotion. Le discours ‘hassidique intitulé "Béni soit Celui Qui fit des miracles", imprimé dans les additifs du Dére’h Emouna, à la fin du chapitre 4, explique que les sept premiers jours correspondent aux "sept jours antérieurs de Atik Yomin". Quant au huitième, il s’appelle Zot ‘Hanouka et il est lié à Mal’hout. La sixième lumière est donc bien celle de Yessod.
Définis de cette manière, les jours de ‘Hanouka correspondent à ceux de Soukkot, qui présentent, en outre, d’autres points communs avec eux, comme le souligne la ‘Hassidout, dans les discours prononcés à l’occasion de la fête de ‘Hanouka.
Néanmoins, à la fin des résumés du discours ‘hassidique intitulé "car Tu es ma Lumière", qui sont imprimés dans le Or Hatorah du Tséma’h Tsédek, il est dit que "l’on alluma de cette huile pendant huit jours, soit de Bina, l’analyse raisonnée(4), à Mal’hout, la royauté". On pourrait en conclure que c’est le septième jour de ‘Hanouka(5), qui introduit Yessod, mais ce point ne sera pas développé ici.
En vous souhaitant tout le bien,
Rav Mena’hem Schneerson,
Notes
(1) De ‘Hanouka. C’est sur cette lumière que portera l’explication développée dans cette lettre.
(2) Le Rav Yaakov Israël Zuber. Voir les lettres n°207 et 217.
(3) Du Chandelier, dans le Temple.
(4) Qui est donc un Attribut de l’intellect et non de l’émotion, bien qu’il soit à l’origine de tous les sentiments.
(5) Et non le sixième.