Par la grâce de D.ieu,
17 Adar Chéni 5719,
Brooklyn,
Au grand Rav, distingué ‘Hassid qui craint D.ieu et se
consacre aux besoins communautaires, le Rav Nissan(1),
Je vous salue et vous bénis,
Je fais réponse à votre lettre, dans laquelle vous me dites que l’on vous a posé la question suivante. Dans votre synagogue, on a adopté, depuis de nombreuses années déjà, le rite Ari Zal. Or, une grande partie de vos membres utilisent un autre Sidour, selon lequel les bénédictions du matin sont récitées par l’officiant. Une telle pratique n’est pas en usage, dans votre synagogue, mais vous craignez que cela pose problème dans un cas et dans l’autre(2), que ces personnes ne disent pas ces bénédictions dans leur maison puisqu’elles n’en ont pas l’habitude, mais qu’elles ne les disent pas non plus à la synagogue, puisque nul ne le fait. A cause de cela, vous pensez instaurer la lecture de ces bénédictions du matin par l’officiant. Par la suite, la prière se fera selon le rite Ari Zal, comme d’habitude.
En pareil cas, j’éviterai de faire une longue analyse, dans la mesure où je dois m’en remettre à mon propre raisonnement puisque, pour l’heure, je n’ai pas vu que cette question ou une qui lui soit équivalente soient posées dans les livres. De fait, certaines comparaisons pourraient être envisagées, mais je ne les présenterai pas ici. A mon sens, l’idée est la suivante. Quelle que soit l’organisation de la prière qui sera adoptée, il y aura toujours un risque. Si l’on opte pour celle que vous proposez, on pourra constater les points ci-dessous :
A) Ceux qui disent les bénédictions du matin chez eux les répèteront encore une fois avec la communauté, même si cette éventualité est peu probable et qu’elle pourrait même être écartée.
B) Ceux qui disent les bénédictions du matin selon notre rite cesseront de le faire et ils attendront leur venue à la synagogue pour les dire. En pareil cas, il y aura un double risque :
1. S’ils ne prient pas avec la communauté, qu’en sera-t-il de leurs bénédictions du matin ? Bien plus, du fait de nos nombreuses fautes, il y a lieu de craindre, même si cela reste improbable, que celui qui récite le Kaddish, quand il ne vient pas à la synagogue, ne…(3).
2. Il est diverses actions que l’on peut envisager qu’après les bénédictions du matin, par exemple la récitation, par cœur, de certains versets ou bien la lecture ses journaux, selon l’usage qui a été adopté dans ce pays. Or, ces personnes feront tout cela avant de dire ces bénédictions, puisqu’elles sont récitées à la maison ou, tout au moins, avant d’entrer à la synagogue. De fait, ce risque existe aussi chez ceux qui ont le rite séfarade, mais, pour ce qui les concerne, nous n’avons pas les moyens d’intervenir, dès lors qu’ils maintiennent la coutume de leurs ancêtres. Il n’en est pas de même, en revanche, pour ceux qui ont le rite Ari Zal. Si l’on introduit un tel changement, ils modifieront la pratique qu’ils ont eu jusqu’à maintenant, ce qui soulèvera l’un des risques précédemment cité. Et, il n’est pas aisé de prévoir le risque le plus probable. En effet, chacun a sa propre manière de réagir.
Il découle de tout cela qu’à mon avis, dans la mesure où l’on trouve des arguments dans un sens et dans l’autre, il est préférable de ne rien changer par rapport à ce qui a été fait jusqu’à maintenant. Il vaut mieux ne pas intervenir. Bien entendu, si vous craignez que, du fait du rite actuellement en usage, quelques uns ne disent pas les bénédictions du matin, ce qu’à D.ieu ne plaise, vous pouvez en rappeler la nécessité, chaque fois que l’occasion s’en présente, de différentes façons.
Une autre raison essentielle conduit à ne pas introduire ce changement. L’obligation de dire les bénédictions du matin s’applique dès que l’on quitte le lit. Par la suite, on ne fait que remplacer ce qui n’a pas été dit au préalable, selon le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, au début du chapitre 71. Concernant ce que dit le ‘Hatam Sofer, dans une note, à cette référence, vous consulterez le Ma’hatsit Ha Shekel. Je vous adresse ma bénédiction de réussite afin de diriger votre communauté, conformément à la volonté de nos maîtres, en bonne santé et avec largesse d’esprit.
N. B. : Bien qu’à mon avis, il soit préférable de ne rien faire, vous noterez, à ce propos, les éléments suivants :
A) Il est clair, bien entendu, que les bénédictions du matin ont été instaurées par les Sages(4) et l’on s’acquitte de la bénédiction de la Torah, introduite par la Torah elle-même(5), en disant Ahavat Olam, “ Tu nous as aimés d’un amour éternel ”(6).
B) Le fait de répéter deux fois les bénédictions du matin revient à prononcer le Nom de D.ieu inutilement, ce qui, d’après plusieurs avis, est une Interdiction de la Torah, même si l’on peut admettre que la seconde fois n’est, en l’occurrence, pas totalement inutile, dans la mesure où l’on se joint à la communauté et qu’on lui apporte sa participation. En tout état de cause, tous s’accordent pour dire que le principe en est énoncé par la Torah.
Je vous joins ce qui a été publié dernièrement. Ceci vous intéressera sûrement.
Notes
(1) Le Rav N. Telushkin, de Brooklyn. Voir, à son sujet, les lettres n°6159 et 6848.
(2) A la maison et à la synagogue pour ceux qui, de ce fait, ne diront pas du tout les bénédictions du matin.
(3) Prie pas du tout.
(4) Et, ne sont donc pas une disposition de la Torah.
(5) La seule qui le soit de toutes ces bénédictions.
(6) Dans les bénédictions précédant le Chema Israël du matin.