Lettre n° 691

Par la grâce de D.ieu,
23 Mena’hem Av 5710,

Au Rav, distingué ‘Hassid, qui craint D.ieu,
le Rav D. M.(1), le Cho’het,

Je vous salue et vous bénis,

J’ai bien reçu votre lettre et j’ai appris, avec plaisir, que l’état de santé de votre épouse s’améliore. Puissiez-vous toujours n’annoncer que de bonnes nouvelles, Amen.

Vous m’interrogez sur la séquence de discours ‘hassidiques Maïm Rabim, de 5636(2):

A) Le chapitre 33 fait une différence entre la création nouvelle et le renouvellement de ce qui existait auparavant, d’après le Midrach Béréchit Rabba, 68, 4, qui dit: "Que fait-Il depuis la création?".

Vous considérez que ce texte ne peut être interprété au sens littéral, que la création a duré six jours. Mais, votre question n’affaiblit nullement cette preuve, puisque ce Midrach introduit clairement une distinction entre la création, pendant ces six jours et celle qui est réalisée par la suite.

Brièvement, voici comment il faut comprendre ce Midrach. La question qui se pose ici est la suivante. D.ieu, Qui transcende la création, s’y révèle au travers des dimensions du temps et de l’espace. Dès lors, en combien de temps créa-t-Il le monde? Le Midrach répond qu’Il le fit en six jours. Puis, le texte demande ce qu’Il fait depuis lors, c'est-à-dire de quelle manière Il révèle Sa Lumière au monde.

La raison pour laquelle D.ieu est appelé "Saint béni soit-Il" est expliquée par le Likouteï Torah Tazrya 22c et d’autres textes.

B) Le chapitre 34 explique comment D.ieu, Qui est infini, créa un monde fini. Il cite, à ce propos, l’image d’une source qui s’écoule en permanence et permet cependant d’emplir des récipients ayant des dimensions précises.

Vous faites remarquer que la lumière de D.ieu modifie la création, lorsqu’elle la reçoit, alors que le récipient n’est pas changé par l’eau qu’il contient. Vous pensez donc que la seconde image, celle du grand érudit qui transmet sa sagesse à l’humble disciple, est plus appropriée.

A différentes reprises, par exemple dans le Biyoureï Zohar Vaychla’h, la ‘Hassidout cite cette première image, mais en parlant d’un fleuve et d’une manière un peu plus détaillée, en précisant que l’onde rince le récipient.

Le discours ‘hassidique de Roch Hachana 5706(3) définit trois issues possibles:
1. L’ustensile peut en être brisé.
2. Il peut se casser et ne plus pouvoir contenir, alors que cela est sa raison d’être. L’eau qui y pénétrera en ressortira donc.
3. L’eau peut aussi ne pas entrer dans l’ustensile, puisque l’onde est infinie.

En conséquence, le récipient qui reçoit l’eau est bien modifié par celle-ci. Néanmoins, la source s’écoule goutte à goutte et ces trois possibilités ne la concernent donc pas.

On peut aussi approfondir cette idée en se demandant la nécessité de citer ces deux images, qui assurément, ne sont pas données par hasard. Or, qu’apporte la seconde de plus que la première?

Très brièvement, l’explication est la suivante. A priori, l’infinité possède ce caractère parce que sa source n’est pas limitée, ni dans le don proprement dit, ni dans la nature de celui qui donne. Or, ce n’est pas le cas, pour deux raisons.

Et, c’est pour cela que sont énoncées ces deux images. La première présente une source, qui s’écoule en permanence, mais ce qu’elle donne est limité à des gouttes. La seconde est celle de l’érudit qui n’enseigne pas en permanence. Pour autant, le concept reçu par le disciple est bien infini, par rapport à ses possibilités. Celui-ci doit, en effet, attendre quarante ans pour percevoir pleinement l’enseignement de son maître. Passé ce délai et grâce aux progrès qu’il a fait entre temps, il comprendra toute la profondeur de la sagesse qui lui avait alors été transmise.

Pour ce qui fait l’objet de notre propos, il y a peut-être là ce qui distingue les planètes, qui sont immuables et n’enfantent pas et les espèces de la terre, qui sont mortelles, mais enfantent selon un processus continu.

Les planètes n’accordent pas leur influence en permanence, mais celle-ci possède bien un caractère infini, comme le dit le chapitre 33. Les espèces terrestres n’exercent qu’une influence limitée, mais celle-ci est permanente.

Tout ceci pourrait être développé, mais ce qui a été dit suffit au sage.

Vous consulterez également le Sefer Ha’hakira, du Tséma’h Tsédek, au début du premier tome.

Avec ma bénédiction de bonne santé physique et morale, pour vous-même et pour votre épouse,

Rav Mena‘hem Schneerson,

Notes

(1) Le Rav David Meïr Shulman.
(2) 1876, du Rabbi Maharach.
(3) 1945, du précédent Rabbi.