Lettre n° 7153

Par la grâce de D.ieu,
13 Tévet 5720,
Brooklyn,

Au distingué ‘Hassid qui craint D.ieu et se consacre
aux besoins communautaires, le Rav Aryé(1),

Je vous salue et vous bénis,

Je fais réponse à votre lettre de ce dimanche soir, dans laquelle vous m’interrogez sur le changement de formulation que l’on constate entre le commentaire de Rachi sur la Torah, au verset Vaygach 46, 28 et le Midrash Béréchit, au chapitre 95. En effet, Rachi dit(2) : “ duquel émanerait l’enseignement ”, alors que le Midrash préfère : “ dans lequel on apprend des Paroles de la Torah ”. Or, il est établi que certains Midrashim, que consultèrent Rachi et les premiers Sages, ne sont pas parvenus jusqu’à nous et, de ceux que nous possédons, il existe plusieurs versions. Ainsi, en la matière, le Midrash Tan’houma dit : “ dans lequel il délivrerait son enseignement ”. Pourquoi Rachi a-t-il choisi la formulation du Midrash Tan’houma plutôt que celle du Midrash Rabba ? On peut le justifier aisément, selon le sens simple du verset, qui parle d’enseignement plutôt que de ce que l’on apprend. C’est la différence qui peut être faite entre l’étude de la Torah et la capacité de trancher la Hala’ha, que l’on acquiert par la suite. Rachi, dans son commentaire de la Torah, recherche systématiquement l’explication la plus proche du sens simple du verset, alors que le Midrash opte parfois pour son sens analytique. C’est une évidence.

Peut-être est-il donc possible d’avancer que Rachi énonce ici le sens simple du Midrash Rabba. La différence entre ces deux interprétations est la suivante. Il s’agissait, en l’occurrence, d’étudier la Torah en cet endroit. Or, une telle étude peut être envisagée sans qu’il ne soit nécessaire de trancher la Hala’ha. A l’opposé, s’il s’agit effectivement de la trancher, une étude de la Torah est, au préalable, nécessaire. C’est pour cela que Rachi parle d’enseignement, notion qui est effectivement plus proche des termes du verset et, en outre, qui s’applique à tous, y compris à l’étude de la Torah, car, “ en deux cents pièces, il y a effectivement cent pièces ”. De fait, nous avons entendu le mot de l’Admour Hazaken sur la Sidra de Vaye’hi, “ Et, Yaakov vécut ” et sur le commentaire de Rachi, auquel vous faites allusion. Vous en prendrez connaissance en consultant le Hayom Yom, à la date du 18 Tévet. D.ieu fasse que chacun d’entre nous agisse, au sein de sa propre Egypte, comme le dit l’explication de l’Admour Hazaken et qu’il en soit ainsi avec exaltation et chaleur, avec l’enthousiasme ‘hassidique. Avec ma bénédiction pour donner de bonnes nouvelles,

Notes

(1) Le Rav A. Shpeizman, de la Barbade. Voir, à son sujet, la lettre n°7319.
(2) A propos de la maison d’étude que Yaakov fit créer en Egypte.



7153*

[14 Tévet 5720]

La ‘Hassidout, dans le Séfer Ha Maamarim 5629(1), du Rabbi Maharach, au discours intitulé Vaygach, à la page 18, fait une différence entre le Tabernacle(2) et le Temple(3), la même que celle qui existe entre Yossef et Yehouda. C’est pour cela que le Tabernacle était confectionné en bois de Chittim(4). Or, vous vous interrogez à ce propos car, à Shilo(5) également, il y avait un édifice de pierres. L’explication est la suivante. Le commentaire de ce Séfer Ha Maamarim, s’appuyant sur le Raz, dans le Yerouchalmi, à la fin du chapitre 11 du traité Meguila, faisant référence à la Michna du traité Zeva’him : l’édifice de pierre ne faisait que dix Tefa’h(6) et sur lui étaient appuyées les poutres et les planches.

Et, il est sûrement envisageable que personne ne conteste cette interprétation. De fait, on peut, en tout état de cause, s’interroger sur la version rapportée par le Midrash Tehilim, à la fin du chapitre 78 et par le Midrash Chmouel, au chapitre 3. Le Rambam ne la cite pas, au début de ses lois du Temple, car celles-ci sont rédigées d’une manière très concise. Selon lui, en effet, on ne revient pas sur le passé. Il faut dire aussi, comme cela est expliqué par ailleurs, que l’on retrouve la même différence entre le Tabernacle du désert et celui du Shilo. Vous consulterez, à ce propos, le Likouteï Torah, Parchat Bera’ha, à la page 99d et le Séfer Ha Maamarim de l’Admour Hazaken, Hana’hot Ha Rap, à la page 81. Selon ces textes, c’est à partir de la période de Shilo que l’on commença à parler de repos, ce qui n’était pas le cas dans le désert. Le Séfer Ha Maamarim précise, en outre, qu’il(7) se trouvait dans la part de Yossef. De fait, à Shilo, il présenta conjointement les deux aspects puisqu’il fut appelé à la fois Temple et Tabernacle, comme le précisent nos Sages. C’est bien évident.

Note : Dans le Likouteï Torah, à la même référence et dans les notes du Rabbi Rachab, imprimées à la fin du Likouteï Torah, qui est paru aux éditions Kehot, il semble qu’il y ait une faute d’imprimerie. C’est aussi le cas du Séfer Ha Maamarim de l’Admour Hazaken. Il y est dit, en effet, qu’il n’y avait pas, à Shilo, de bois saillant. Le Rambam en retient donc le principe pour la construction du Temple. De fait, il n’y a pas lieu de s’interroger sur le Séfer Ha Maamarim. Ainsi, la ‘Hassidout commente le second paragraphe du Chema Israël, dans lequel on fait passer : “ vous attacherez ”(8) avant : “ vous enseignerez ”(9). Or, il en sera bien ainsi dans le monde futur, lorsque l’action concrète aura la préséance(10). Ceci ne correspond pas à l’explication qui est donnée par le traité Bera’hot 35b, selon laquelle le second paragraphe du Chema s’applique : “ quand on ne met pas en pratique la Volonté de D.ieu ”. Il faut donc préciser que, dans le monde futur également, il y aura plusieurs catégories d’hommes, des “ plus grands ” aux “ plus petits ”, ainsi qu’il est dit : “ le jeune homme âgé de cent ans mourra ”, même si globalement, il est question, en l’occurrence, d’unir les sphères célestes entre elles et de révéler ici-bas les lumières les plus hautes, transcendant le monde d’Atsilout, comme l’explique Iguéret Ha Kodech, de l’Admour Hazaken, à la fin du chapitre 26.

Notes

(1) 1868.
(2) Provisoire, dans le désert.
(3) Définitif, à Jérusalem.
(4) Alors que le Temple était en pierre.
(5) Où l’arche sainte séjourna après l’entrée en Erets Israël et avant l’installation définitive, à Jérusalem.
(6) Soit environ un mètre.
(7) La Tabernacle de Shilo.
(8) Les Tefillin sur votre bras.
(9) Les Paroles de la Torah à vos enfants.
(10) Par rapport à la théorie et à l’étude.