Par la grâce de D.ieu,
12 Adar 5721,
Brooklyn, New York,
Au distingué ‘Hassid qui craint D.ieu et se consacre
aux besoins communautaires, le Rav Moché
qui est appelé docteur Munk(1),
Je vous salue et vous bénis,
Je fais réponse à votre lettre du 20 Chevat, de même qu’à celle qui la précédait. Je vous remercie d’avoir pensé à m’écrire à propos des écoles ‘Habad de Terre Sainte, puisse-t-elle être restaurée et rebâtie. J’espère que vous continuerez à le faire, à l’avenir et je vous en sais gré d’avance. Il est absolument certain qu’à l’avenir, vous continuerez à aider ces institutions, de même que celles qui leur sont rattachées, dans toute la mesure de vos possibilités. Ceci inclut également votre intervention, là où s’étend votre influence, auprès des organismes et des personnes susceptibles de contribuer à leur renforcement et à leur développement. A quelqu’un comme vous, il est sûrement inutile d’expliquer longuement l’importance d’une éducation qui est précisément basée sur les valeurs sacrées.
Je vous apporterai maintenant les précisions concernant les points que vous avez abordés :
A) Vous envisagez que, dans les écoles ‘Habad, ce qui est demandé aux élèves soit trop élevé, du point de vue du niveau d’étude comme du standard de comportement. Certains pourraient donc être effrayés par ce joug et, de la sorte, être exposé au danger d’une éducation qui n’est pas souhaitable(2) ou, en tout état de cause, qui l’est moins. Or, tout d’abord, vous dites vous-même que, si l’on réduit les exigences sur le niveau des études, les bons élèves et même les moyens s’en trouveront privés. Et, il y a tout lieu de penser que ce que l’on gagnera sera largement compensé par ce que l’on perdra. Mais, il est encore un autre point, essentiel également. Les écoles ‘Habad ont un caractère qui leur est propre. Leur nom même indique et fait savoir à qui veut l’entendre que l’on y adopte un certain comportement, que l’on y étudie à un certain niveau. Pour une large part et, au moins, pour leurs principes fondamentaux, toutes les écoles ‘Habad du monde entier sont identiques, de ce point de vue. En abaissant les standards et les niveaux dans un endroit, on induira donc des effets similaires dans les autres écoles ‘Habad, non seulement dans le même pays, mais aussi à l’étranger.
Un autre point doit, en outre, être mentionné, selon une remarque que j’ai entendue de mon beau-père, le Rabbi. En effet, il existe une certaine hiérarchie dans la société, constituée par les hommes. Si, à un certain stade, est constatée une descente, il peut en être de même, en cascade, à tous les niveaux suivants. Même si la première chute s’effectue du Saint des Saints vers le Saint, il en résultera automatiquement, par la suite, une descente du Saint vers le profane puis, encore plus bas que cela, du permis vers l’interdit. Mon beau-père, le Rabbi, expliquait, de cette façon, que chacun, à son niveau, doit s’élever dans le domaine de la sainteté et, bien évidemment, ne pas connaître la chute, même si, à l’issue de celle-ci, il domine encore son entourage. Vous comprendrez ce qui en résulte pour ces écoles.
Ce qui vient d’être dit serait vrai même s’il n’y avait pas eu une certaine pratique, qui existe depuis quelques années et qui est donc devenue un fait accompli. Combien plus est-ce le cas, en l’occurrence, puisque l’on constate effectivement une telle pratique. Il n’y a donc nullement lieu d’envisager que l’on abaisse le niveau, d’autant que ceci sera interprété comme une évolution, induisant de nouvelles règles et donc de nouvelles exigences. Bien plus, en Terre Sainte, puisse-t-elle être restaurée et rebâtie, plusieurs bonnes écoles n’attendent pas de leurs élèves ce que vous mentionnez, dans votre lettre. Il n’y a donc pas à craindre que les candidats qui ne seront pas reçus dans les écoles ‘Habad intègrent nécessairement celles qui sont radicalement différentes, ce qu’à D.ieu ne plaise. Ils pourront fréquenter des écoles dont le programme n’intègre pas de telles exigences. J’ai eu, il y a quelques temps, une discussion comme celle-ci et j’ai répondu à celui qui m’interrogez qu’une directive claire, en la matière, peut être découverte dans les propos de nos Sages. Selon leur habitude, ceux-ci énoncent un bref dicton, qui décrit une telle situation avec la plus grande précision. C’est le suivant : “ Rav trouva une brèche et la clôtura ”, ce qui veut dire que Rav découvrit un point que l’on négligeait. En conséquence, il adopta une attitude plus rigoriste, ajouta des barrières et des précautions, en la matière. Or, on pourrait penser que, de la sorte, certains s’éloigneront ou même qu’on les repoussera vers un stade encore plus bas. Pour autant, l’enseignement qui est délivré va à l’encontre de cette position et il commande de leur conseiller l’empressement, l’attitude la plus rigoriste, précisément dans le domaine où la brèche a été constatée. C’est bien évident.
B) S’agissant des explications qui peuvent être données aux adolescents et aux adolescentes à propos du mauvais penchant, de la vie sexuelle et de tout ce qui est lié à cette question, il est difficile d’adopter une position tranchée, en la matière, car, malgré le commentaire que font nos Sages du verset que vous citez dans votre lettre, “ lorsqu’un homme a un souci en son cœur, il en parlera ” aux autres, ce qui s’applique, en l’occurrence, à la jeunesse, les mêmes Sages n’en disent pas moins que : “ l’homme possède un petit membre. Quand il l’affame, il est rassasié. Quand il le rassasie, il est affamé ”. Or, de telles discussions sont, à proprement parler, un moyen de le rassasier, sauf si elles sont conduites par le spécialiste le plus remarquable, qui saura éviter certaines expressions et certains associations d’idées. En fonction de ce que j’ai pu constater en différents endroits, la bonne solution consiste, en concertation avec les professeurs qui se trouvent sur place, à adopter une attitude et une manière de s’adresser à chaque garçon ou à chaque fille. Tout au plus, en regroupera-t-on deux ou trois, dans la mesure où cela est envisageable. Bien entendu, les garçons et les filles seront séparés. En revanche, on évitera la publicité autour de cela, selon la pratique qui existe en différents endroits. Mais, même en pareils cas, de larges précautions restent nécessaires si l’on ne veut pas trébucher, transgresser un Interdit de la Torah ou même des Sages, en suscitant la réflexion à tout cela, comme le dit le Choul’han Arou’h, Even Ha Ezer, chapitre 23, au paragraphe 3. Et, vous consulterez également le chapitre 11 du Tanya.
Je dois exprimer ici ma profonde peine en constatant qu’il y a quelques années, avec l’immigration massive de nos frères, les Sefardim, en notre Terre Sainte, puisse-t-elle être restaurée et rebâtie, on a “ jugé bon ” de relever l’âge de leur mariage(3), à l’opposé de la pratique qu’ils avaient adoptée dans leurs contrées d’origine. Lorsque cette décision a été prise, on pouvait se demander s’il en résulterait un gain ou une perte. Mais, du fait de nos nombreuses fautes, cet usage a eu des conséquences amères, pendant toutes ces années et, à notre grande douleur, le plus grand dommage en a découlé. Bien entendu, mon propos n’est pas de me plaindre du passé. Néanmoins, de temps à autre, on envisage des dispositions nouvelles, en la matière, on souhaite abaisser cet âge ou bien le relever. En fonction de ce qui vient d’être dit, vous comprendrez ma position tranchée, sur ce sujet et D.ieu fasse que les Ashkenazim eux-mêmes s’habituent à se marier dès le plus jeune âge, conformément à l’avis de Rav ‘Hisda, qui est exprimé au traité Kiddouchin 29b.
Nous sommes à la veille de Pourim, lorsque tout “ fut transformé ”. Puisse donc D.ieu faire que les éléments qui dérangent et qui sont négatifs se transforment en lumière, en joie, en allégresse et en honneur, au sens littéral et comme on peut le comprendre, d’après l’interprétation suivante de nos maîtres(4) : “ La lumière, c’est la Torah… ”. Avec mes respects et ma bénédiction pour un joyeux Pourim,
Notes
(1) Voir, à son sujet, la lettre n°7371.
(2) En se rendant dans d’autres écoles.
(3) Voir, à ce sujet, la lettre n°6916.
(4) Sur le verset : “ Pour les Juifs, ce fut lumière, joie, allégresse et honneur ”.