Par la grâce de D.ieu,
19 Tévet 5722,
Brooklyn,
Au grand Rav, distingué ‘Hassid qui craint D.ieu,
empli d’empressement, aux multiples accomplissements,
le Rav T. H.(1),
Je vous salue et vous bénis,
J’ai bien reçu votre livre, le second tome du commentaire de la Torah, du Ramban. Je vous remercie beaucoup d’avoir pensé à me l’envoyer. Comme je l’avais dit dans la lettre que je vous avais adressé, à l’époque(2), puisse D.ieu faire que, dans le calme et l’enthousiasme, vous poursuiviez ce commentaire, que vous précisiez et expliquiez les propos des premiers Sages, comparables aux anges, en particulier ceux qui ont commencé la révélation de la dimension cachée de la Torah, parmi lesquels le Ramban occupe une place particulière. Il est, en effet, l’un des derniers Sages véritables de la Kabbala, jusqu’à l’époque du Ari Zal, comme nous le préciserons. Son ouvrage est également vrai, droit, juste et pérenne. Par la suite, en revanche, après le Ramban, cette sagesse resta cachée, jusqu’à ce que le Ari Zal entreprenne de la révéler, comme l’explique Rabbi ‘Haïm Vital, dans son introduction au Chaar Ha Hakdamot, que vous consulterez. Bien plus, notre génération, une génération orpheline, en laquelle la pénombre est intense et profonde, a particulièrement besoin de la révélation de cette lumière de la Torah. Avec mes respects et ma bénédiction,
Dans l’exemplaire que j’ai reçu de votre livre, il manque, semble-t-il, la deuxième moitié de ma seconde lettre.
N. B. : Selon mon habitude, je reproduis ci-après quelques notes portant sur le second tome de votre livre. Et, nos Sages donnent l’assurance(3) qu’au final, la paix règne entre les sages. Or, “ tout va d’après la conclusion ”(4) et la fin.
Au début, à la page 281, Vayéchev 37, 1(5), ce qui veut dire : On consultera le Midrash Béréchit Rabba, chapitre 82, au paragraphe 13, qui dit : “ à cause de l’acte d’engagement selon lequel il serait étranger ”. On peut s’interroger sur ce que dit le Ramban, à cette référence, si l’on consulte son commentaire, avant cela, à propos du verset 36, 6.
A la fin(6), à la page 413 et à la seconde ligne de la page 153b : qui énonce la version exacte et dans la note, basé sur un manuscrit : “ Ces fossoyeurs ”(7). Ceci semble faire également allusion à ce qui est dit au préalable : “ Nos Sages enseignent : l’esprit… les instruments seront placés dans le dépôt… et l’âme de mon maître sera… ”. Telle est bien la signification essentielle. En effet, ces fossoyeurs constatèrent la matérialité du corps qu’ils touchaient. Il faut admettre que l’on parle bien ici de corps, au sens littéral et non du vêtement d’écarlate dont le Ramban fait mention à cette référence. C’est ce que l’on peut déduire de la question posée par le Talmud : “ Il est dit : ‘Tu es poussière’. Il ne doit donc pas y avoir de jalousie… ”. La vie que Yaakov possédait est donc bien celle qui est définie par Rabbi Ovadya de Bartenora, c’est-à-dire celle que l’on possède jusqu’à la fermeture de la fosse ou bien jusqu’à la putréfaction de la chair. Or, il en est ainsi pour tous les hommes et non uniquement pour les Justes. Le Be’hayé, par contre, considèrent que ces fossoyeurs saisirent effectivement le vêtement d’écarlate, mais je n’ai pas eu le mérite de comprendre son interprétation. En effet, si elle était la bonne, comment comprendre l’objection qui est soulevée à partir du verset : “ Tu es poussière ” ? Celui-ci ne s’accomplit-il pas lorsque le corps est porté en terre ? Et, il en est de même pour toutes les questions qui sont posées ici.
A la même référence(8), à la note 98 : De temps à autre : cela veut dire d’une veille du Chabbat à l’autre, ou bien d’un Yom Kippour à l’autre. Cette explication est celle du Be’hayé. Néanmoins, il faut rechercher la référence de l’interprétation qui dit : “ d’un Yom Kippour à l’autre ”. Peut-être est-ce le sens du coucher du soleil dont il est question au traité Ketouvot 103a, ce qui inclut le coucher du soleil de Yom Kippour, qui est aussi : “ dans la bouche de chacun ”, selon l’expression de Rachi, à cette même référence. On peut, toutefois, s’interroger sur cette formulation, car pourquoi n’est-il pas dit : “ d’une veille du Chabbat à l’autre ” ? Mais, peut-être y a-t-il là une faute d’imprimerie, dans le texte du Be’hayé, de sorte qu’il aurait fallu lire : “ d’une fête à l’autre ”. D’une part, son coucher du soleil est bien “ dans la bouche de chacun ”. En outre, cette lecture est conforme à ce que dit le Séfer ‘Hassidim, à propos du récit, rapporté par le traité Ketouvot, selon lequel Rabbi revenait(9) prononcer le Kiddouch pour les membres de sa famille. En effet, il pouvait le faire également pour les fêtes, mais non à Yom Kippour.
A la même référence, à la note 100, d’après le manuscrit : Rabbi Yossi le galiléen rentrait chez lui tous les vendredis soirs. On peut se demander quelle est la source de cette affirmation. Il est donc nécessaire de consulter encore une fois le manuscrit et d’analyser le contexte. Peut-être ce nom, dont seules les initiales étaient mentionnées au préalable, est-il celui de Rabbi, cité au paragraphe précédent. Par la suite, le copieur aurait fait une erreur. S’agissant du vêtement de l’âme, précédemment cité, on consultera le Kountrass Néfech Roua’h Nechama, figurant dans le Séfer Chaareï Zohar, du Rav Margolis, à la page 134, de même que les références qui y sont citées.
A la fin des additifs se trouvant au début de ce volume : Comme le cite le Ramban, dans son commentaire du verset Béréchit 2, 9, nos Sages constatent que : “ trois parlèrent de vérité et disparurent du monde ”. Dans différentes versions du Ramban, on trouve le texte suivant : “ Il s’agit du serpent, des explorateurs et de Doëg l’édomite de Beérot ”. En revanche, les chapitres de Rabbi citent : “ les explorateurs, Doëg et les fils de Rimon de Beérot ”. Et, l’on pose, à ce propos, les questions suivantes :
1) Il faut admettre que le Ramban, mentionnant le serpent, n’accepte pas la version qui est parvenue jusqu’à nous des chapitres de Rabbi.
2) En outre, pourquoi parler de Beérot à propos de Doëg ?
A mon sens, il se pose, sur notre version des chapitres de Rabbi, les questions suivantes :
1) Les fils de Rimon de Beérot ne disparurent pas du monde et encore moins du monde futur, du fait de ce qu’ils déclarèrent, comme l’indique le verset Chmouel 2, 4.
2) Si l’on compte les fils de Rimon, il faut citer également celui qui annonça à David la mort de Chaoul. Bien plus, il aurait même été nécessaire de le mentionner le premier, comme le dit David lui-même, aux versets Chmouel 2, 4, 10-11. On doit en conclure qu’il convient d’écarter les fils de Rimon. On peut, toutefois, s’interroger sur l’origine de cette erreur. Mais, peut-être est-il possible d’expliquer que nos Sages mettent en évidence ici un fait surprenant, de quelle manière la vérité a pu avoir pour effet qu’un homme soit perdu du monde. C’est donc pour souligner cet aspect surprenant qu’est également mentionnée la qualité de Doëg. La version devant être retenue est donc : “ le serpent, les explorateurs et Doëg l’édomite, puissant parmi les bergers ”, selon les termes du verset Chmouel 1, 21, 8, ou encore : “ Doëg l’édomite, chef du tribunal ”, selon l’expression de nos Sages. Le copieur manquait vraisemblablement de connaissances. Il n’a donc pas compris tout cela et il a introduit l’expression : “ de Beérot ”, dont les lettres sont semblables, dans le manuscrit. Par la suite, il a découvert le lien entre “ de Beérot ” et les fils de Rimon. Il a alors introduit cette “ précision ” de sa propre initiative.
Notes
(1) Le Rav Tsvi Hirsch Eisenstadt, de Brooklyn. Voir, à son sujet, les lettres n°2654 et 6603.
(2) Peut-être à l’occasion de la parution du premier tome.
(3) Dans le traité Kiddouchin 30b.
(4) Selon le traité Bera’hot 12a.
(5) “ Pour quelle raison Yaakov s’installa-t-il dans le pays où résidait son père ? Il se dit que les chefs d’Esav résidaient dans les contrées qui leur avaient été imparties, comme le dit le verset 36, 43, c’est-à-dire dans la région qu’ils avaient obtenue à titre d’héritage éternel. Mais Yaakov était étranger, comme son père, dans une terre qui ne lui appartenait pas, ce qui veut dire qu’ils firent le choix de résider dans le pays élu et que s’accomplit ainsi pour eux ce qui avait été énoncé au verset 15, 13 : ‘Ta descendance sera étrangère dans un pays qui ne leur appartiendra pas’, ce qui, en revanche, ne fut pas le cas pour Esav. En effet, seul Yaakov était considéré comme descendance d’Avraham ”.
(6) “ Il a rendu l’âme et il a été réuni : Il n’est pas question de mort, à son propos et, de fait, nos Sages expliquent, dans le traité Taanit 5b, que notre père Yaakov n’est pas mort. Ce Midrash veut dire que les âmes des Justes s’insèrent dans le faisceau de la vie et les entourent ainsi tout au long du jour, formant, de la sorte, comme un habit d’écarlate, afin d’éviter la nudité de Yaakov. Ce vêtement peut aussi n’être porté que de temps à autre. On comprendra tout cela en fonction de ce qui est dit dans les traités Chabbat 142b et Ketouvot 103a ”.
(7) “ Ces fossoyeurs creusaient la terre de Rav Na’hman Bar Its’hak. Celui-ci vit qu’il y avait quelque chose et il dit : Veuillez entrer dans la maison ”.
(8) Rabbénou Be’hayé dit : “ Il en est ainsi d’une veille du Chabbat à l’autre ou encore d’un Yom Kippour à l’autre ”.
(9) Après sa mort.