Par la grâce de D.ieu,
16 Chevat 5722,
Brooklyn,
Au grand Rav, distingué ‘Hassid qui craint D.ieu, aux
multiples accomplissements, empli d’empressement,
le Rav C. I.(1),
Je vous salue et vous bénis,
J’ai bien reçu votre lettre(2), qui m’est parvenue pendant le saint Chabbat 15 Chevat. Bien entendu, j’ai été très satisfait d’apprendre que vous étudiez la sagesse de la vérité(3) et que vous vous y consacrez. On connait(4) l’explication de mon beau-père, le Rabbi, dont le mérite nous protégera, sur le traité Bera’hot 63b, qui dit : “ Ils s’occupèrent de la Torah ”. Celle-ci souligne que l’étude de la Torah doit effectivement être une “ occupation ”(5). Il faut s’efforcer de trouver des personnes qui en feront l’acquisition, la diffuser. On doit s’investir en cela avec le plus grand effort, dans toute la mesure du possible et cette diffusion se fera également à l’extérieur.
J’ai formulé une remarque à ce sujet, dans mon précédent courrier, précisément pour que tout cela soit intensifié, grâce aux explications qui sont mentionnées dans les livres de la Kabbala, en soulignant la grande importance, selon l’Injonction et la mise en garde du Baal Chem Tov, qui est mentionnée dans le Chorech Mitsvat Ha Tefila(6), à la fin du second chapitre, comme je le citais dans mon précédent courrier. Vous m’interrogez, dans votre lettre, sur la raison de cette mise en garde du Baal Chem Tov, la nécessité de l’abstraction comme il le dit lui-même. Il est clair qu’une courte explication n’est pas suffisante. Or, c’est ce que l’on trouve dans les ouvrages qui figurent dans votre lettre. En outre, la Torah est unique et il en est bien ainsi pour l’étude de sa partie révélée. On ne peut se contenter de la Michna, sans apprendre la Guemara. De même, on n’étudie pas le Rambam sans ses commentateurs. A quelqu’un comme vous, il est assurément inutile d’en dire plus.
Vous m’indiquez que de telles explications ne sont pas à la portée de tous. Vous m’excuserez de vous faire remarquer que cette conception n’est pas exacte, comme différents textes permettent de l’établir. Nombreux sont ceux qui demandent que l’on diffuse l’enseignement profond de la Torah, d’une manière sans cesse accrue, en éclairant de plus en plus, précisément en nos générations. De fait, “ le Saint béni soit-Il n’agit pas avec félonie envers Ses créatures ”(7) et “ les Justes sont à l’image de leur Créateur ”(8). En effet, ils exigent cette étude, en montrent la nécessité une fois, puis une seconde et encore une troisième. Il est donc certain que quiconque porte le nom d’Israël a la possibilité de “ s’occuper ”(9) de cette étude. Je ne veux pas dire qu’il faille uniquement le faire soi-même. Comme je le précisais auparavant, on doit faire comme si l’on conduisait une affaire. Du reste, on peut aussi l’établir à partir des propos de nos Sages, dans leur Michna(10) : “ Qui est le sage ? Celui qui apprend de tout homme ”. Et, l’on connaît l’enseignement du Baal Chem Tov sur cette Michna, qui est reproduite dans les mémoires de mon beau-père, le Rabbi, à la page 344.
A la fin de votre lettre, vous faites allusion au Rambam et vous me dites qu’il n’a pas étudié la Kabbala(11). C’est, en effet, ce que disent le Chaar Ha Guilgoulim, dans la trente-sixième introduction et Rabbi Chlomo Elkabets, dans son commentaire du Chir Hachirim. Vous verrez aussi le Chem Ha Guedolim du ‘Hida, à l’article “ Rambam ”. A ce propos, je me suis toujours interrogé sur ce que m’a dit mon beau-père, le Rabbi, au nom de son grand-père(12), fils du Tséma’h Tsédek. Celui-ci fit état d’une tradition familiale, transmise d’un Rabbi à l’autre depuis le Baal Chem Tov, selon laquelle le Rambam possédait effectivement une profonde connaissance de la Kabbala. Néanmoins, il s’efforçait de ne pas le révéler, “ pas même par une allusion ”, selon l’expression de Rachi, car, à l’époque, il était dangereux de dévoiler les idées de la Kabbala, y compris d’une manière allusive.
Mais, peut-être est-il possible d’expliquer qu’il le fit à la fin de sa vie, et uniquement de manière surajoutée(13), se démarquant ainsi du Ramban(14). De fait, différents textes indiquent que le Rambam se consacra, à la fin de sa vie, à la Kabbala, le Migdal Oz, dans ses lois des fondements de la Torah, aux chapitres 1 et 2, les responsa du Maharam Alchaker, au chapitre 117, le Avodat Ha Kodech, tome 2, au chapitre 13, le Levouch, dans le Levouch Pinat Ikrat, tome 1, au chapitre 53. On verra aussi le Chomer Emounim, première discussion, au paragraphe 13 et le commentaire du Ram Boutril sur le Séfer Yetsira, chapitre 4, au paragraphe 3. Avec mes respects et ma bénédiction pour renforcer cette “ occupation ”, en bonne santé, dans la joie et l’enthousiasme,
Notes
(1) Le Rav Chimeon Israël Pazen, de Brooklyn, Rabbi de Shafran. Voir, à son sujet, la lettre n°8275.
(2) Se trouvant également dans son livre Torah A’hat, tome 3, lettre n°10, à partir de la page 39.
(3) La Kabbala.
(4) Voir, à ce sujet, les lettres n°5454 et 6313.
(5) Voir, à ce sujet, la lettre n°8352.
(6) Dans le Dére’h Mitsvoté’ha du Tséma’h Tsédek. Le Baal Chem Tov demande à ceux qui n’ont pas le sens de l’abstraction de ne pas étudier les livres de Kabbala, par crainte qu’ils en aient une perception trop matérialisée.
(7) Selon le traité Avoda Zara 3a.
(8) Selon le Midrash Bamidbar Rabba, chapitre 10, au paragraphe 5.
(9) Le Rabbi souligne ce mot.
(10) Dans le traité Avot, chapitre 4, à la Michna 1.
(11) Voir, à ce sujet, la lettre n°7582.
(12) Le Rabbi Maharach.
(13) Textuellement : “ comme par une gestation ”.
(14) Qui s’y consacra d’une manière profonde, tout au long de sa vie.