Par la grâce de D.ieu,
jours de Seli’hot 5723,
cent cinquantième anniversaire du
décès - Hilloula de l’Admour Hazaken,
Brooklyn, New York,
Aux fils et filles d’Israël,
partout où ils se trouvent,
que D.ieu vous accorde longue vie,
Je vous salue largement et vous bénis,
Les jours de Roch Hachana commencent, jours redoutables qui introduisent la nouvelle année, approchant, pour nous et pour tout Israël, pour le bien et pour la bénédiction. Ils emplissent chaque cœur juif d’émotions sacrées.
Le sentiment que mettent en éveil ces jours redoutables est beaucoup plus profond que la crainte de la punition, par exemple. Il est, en fait, une peur inspirée par la grandeur de D.ieu, que l’on met en éveil en sachant que le couronnement du Roi, Roi suprême, le Saint béni soit-Il, approche et que l’on y prendra part personnellement(1).
Tel est, en effet, la teneur de Roch Hachana, comme le contenu de chaque prière, récitée en ce jour, permet de l’établir : “ Règne sur le monde ! ”. Et, l’on conclut cette bénédiction, y compris dans le Kiddouch, par : “ Roi de toute la terre ”(2).
Le couronnement du Créateur du monde comme “ Roi de toute la terre ”, que les Juifs demandent et qu’ils obtiennent effectivement, à Roch Hachana, renouvelle le lien personnel que chacun entretient avec D.ieu. Car, chacun, à titre individuel et non uniquement en tant que membre de la communauté, a bien une relation directe et profonde avec D.ieu. Le couronnement est la conséquence immédiate de la requête formulée par chacun et chacune d’entre nous, pour que D.ieu accepte d’être le Roi. De cette manière est forgée l’attache selon laquelle “ nous sommes Ton peuple et Tu es notre Roi ”(3).
La conscience et le sentiment de ce couronnement s’expriment, plus particulièrement, dans la prière, qui dit : “ Notre D.ieu et D.ieu de nos pères, règne sur le monde entier, par Ton honneur et élève Toi. Que chaque créature sache que Tu l’as créée. Que quiconque respire proclame : L’Eternel, D.ieu d’Israël règne et Sa royauté s’exerce sur tous ”.
Toutes les créatures(4) et surtout les hommes, qui possèdent une âme, reconnaissent la royale suprématie de D.ieu et se soumettent à elle. Cette prière souligne donc bien ce sentiment de peur qu’inspire la grandeur de D.ieu et sa conséquence inéluctable, la nécessité de se tenir prêt à mettre en pratique les attentes du Roi.
Ainsi, Roch Hachana marque l’introduction des dix jours de Techouva, le début de cette période. En ce jour, on ne dit pas le Ta’hanoun et l’on ne confesse pas ses fautes(5). En effet, un homme est alors pénétré du désir de s’unifier au Roi, par l’intermédiaire de ce couronnement. Aussi douloureuse que puisse être la conscience de ce que l’on a fait auparavant, le sentiment dominant reste donc la peur, face à la grandeur de D.ieu(6).
Par ailleurs, la Techouva, à un stade plus accompli, est également un retour vers la source(7). On retrouve bien là le contenu profond de Roch Hachana, jour qui est lié à cette notion de couronnement.
Puis, après Roch Hachana, sont introduits les autres aspects de la Techouva(8). Dès lors, on regrette le passé, on prend un engagement pour l’avenir, on confesse ses fautes et l’on sollicite le pardon. Tout cela est la conséquence directe du couronnement de Roch Hachana. La prise de conscience de la nécessité de renouveler et de renforcer le lien et l’union avec le Roi suscite la volonté et la résolution d’en être digne. Dès lors, l’homme met de côté tout ce qui va à l’encontre de ce lien, ses fautes, ses transgressions, y compris celles qui sont commises par inadvertance.
* * *
Une précision doit être donnée. Pour différentes raisons, il y a eu des époques et des lieux, en lesquels on n’a pas profité, comme il l’aurait fallu, de l’élévation morale qu’apportent Roch Hachana et les dix jours de Techouva. Les jours redoutables sont passés. Dans quelques communautés et chez certains individus, la motivation a disparu, de sorte qu’il n’y a pas eu de changement, pas d’amélioration de l’existence quotidienne, comme on aurait été en droit de l’attendre, de la part de chaque Juif, homme ou femme(9). En pareil cas, un tel progrès manquera également à la vie communautaire.
L’une des raisons essentielles d’une telle situation est la suivante. On ne profite pas de l’élévation et de l’inspiration qu’apportent ces jours redoutables, au point d’en être soi-même touché. On s’en sert uniquement pour ce qui concerne les autres. Il n’est pas rare de consacrer cette période à des considérations d’ordre générale et à des problèmes de dimension planétaire. On délivre donc des “ messages ” qui ne concernent personne, en tout cas pas ceux qui sont présents dans les quatre coudées où l’on se trouve. Malgré cela, chacun s’en satisfait et l’on est même en mesure de justifier une telle attitude en rappelant que Roch Hachana concerne bien l’ensemble de la création. Et, il y a, dans le monde, suffisamment de “ grands ” problèmes, qui doivent être résolus ou, tout au moins, améliorés.
Traiter de ces sujets, se passionner pour eux, prendre de fermes résolutions concernant des questions de portée mondiale, alors qu’en général, on ne peut rien accomplir, en ces domaines, est un moyen confortable et “ esthétique ” de se convaincre que l’on ne peut pas accorder l’attention nécessaire et indispensable à son bilan moral personnel et à son existence quotidienne, alors qu’une ferme décision pourrait effectivement le modifier.
Une mise en garde, en la matière, est faite par la Mitsva du Chofar, la seule qui soit spécifique à Roch Hachana. On ne l’accomplit pas au moyen de différents instruments de musique. On n’en prend qu’un seul(10). Et, celui-ci est dépourvu de toute sophistication. Il n’émet pas de compositions, d’une grande musicalité.
Le Chofar est uniquement une corne d’animal. Et, tous les sons que l’on peut en tirer permettent de s’acquitter de la Mitsva(11). Il souligne que l’on doit, avant tout, se préoccuper de la dimension individuelle, de sa propre personne, qu’il faut mettre l’accent sur la nécessité de sanctifier les préoccupations les plus banales et les plus habituelles de l’existence courante de chacun, puis celles de la vie communautaire, avec la place respective qui y est occupée par chacun.
Puisse D.ieu faire que chacun et chacune, en particulier les responsables spirituels, se servent(12) de ces moments sacrés et de l’inspiration des âmes, en ces jours redoutables, non pas pour résoudre les problèmes du monde ou de l’ensemble du pays, qui, aussi importants qu’ils puissent être, ne concernent pas Roch Hachana et les dix jours de Techouva, ni pour l’individu, ni pour la communauté, mais bien pour entendre l’appel qui est lancé par ces jours, “ Proclamez Mon règne sur vous ”, pour faire de D.ieu son Roi personnel. De la sorte, on entendra également l’appel de la Techouva, de la prière, de la Tsedaka. Et, tout cela doit commencer par sa propre personne, puis se répandre autour de soi, dans sa communauté et au-delà de celle-ci.
L’inspiration morale et l’encouragement de ces jours illumineront et pénétreront tous les jours de l’année(13). De la sorte, chaque Juif raffermira son attachement à D.ieu et lui donnera une expression dans son existence quotidienne, conforme à la Torah et aux Mitsvot de D.ieu. Et, l’amélioration de l’existence spirituelle provoquera également celle de la vie matérielle(14). De la sorte, l’année qui vient sera bénie en tous les domaines. Avec ma bénédiction, afin d’être inscrit et scellé pour une bonne et douce année, d’un bien visible et tangible,
Mena’hem Schneerson,
Notes
(1) Le Rabbi note, en bas de page : “ Ce sentiment est particulièrement intense, car c’est alors l’honneur de D.ieu qui se révèle, comme l’explique le Likouteï Torah, Devarim, aux pages 48b, 48d et 49d ”.
(2) Le Rabbi note, en bas de page : “ Rachi et le Ma’hzor Vitry soulignent que l’on dit, dans la prière : ‘le Roi saint’, y compris dans Arvit. En effet, D.ieu a dit : ‘Proclamez Mon règne sur vous, à Roch Hachana’, car le verset précise : ‘Je suis l’Eternel, votre D.ieu ” puis, tout de suite après cela, ‘Et, le septième mois’. La première Mitsva de ce jour est, en outre, le Chofar et Rabbi Saadya Gaon, cité par le Abudarham, souligne, à son propos : ‘Nous proclamons la royauté du Créateur’ ”.
(3) Le Rabbi note, en bas de page : “ Ainsi, les Pirkeï de Rabbi Eléazar, au chapitre 11, disent : ‘L’homme alla et le couronna le premier’ et la Michna du traité Sanhédrin, à la fin du chapitre 4, précise : ‘C’est pour cela que l’homme fut créé unique’ ”.
(4) Le Rabbi note, en bas de page : “ De même que tous les mondes, Atsilout, Brya, Yetsira, Assya, comme l’explique le Siddour du Ari Zal ”.
(5) Le Rabbi note, en bas de page : “ Comme le souligne le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, chapitre 584, au paragraphe 2, d’après le Zohar, le Colbo et le Beth Yossef. Voir aussi le Chaareï Techouva ”.
(6) Le Rabbi note, en bas de page : “ Certes, le son du Chofar fait allusion à la Techouva, comme le dit le Rambam, dans ses lois de la Techouva, chapitre 3, au paragraphe 4 et Roch Hachana appartient effectivement aux dix jours de Techouva. Pour autant, cette notion n’apparaît pas dans les prières et les requêtes essentielles de cette fête. De même, on ne confesse pas ses fautes, alors que cette pratique est partie intégrante de la Techouva, comme le précise le Rambam. Or, on ne peut supprimer une Mitsva uniquement dans le but de ‘ne pas fournir d’argument à l’accusateur’. De même, on ne fait pas de sacrifices de Techouva. En effet, la Techouva de Roch Hachana a pour seul objectif de faire accepter le couronnement. Ce n’est donc pas le moment de confesser ses fautes, de réparer ce qui a fait défaut. Ceci sera accompli pendant les dix jours de Techouva, après Roch Hachana. Bien plus, pourquoi pleurer, en ce jour, alors que l’on souhaite, avant tout, se trouver près du Roi ? Et, même lorsque l’on ‘se confesse à voix basse’, on ne fait qu’exprimer la nostalgie que l’on éprouve, comme le souligne le Likouteï Dibbourim, à la page 102 ”.
(7) Le Rabbi note, en bas de page : “ Comme le dit le Likouteï Torah, au début de la Parchat Haazinou ”.
(8) Le Rabbi note, en bas de page : “ Comme l’explique le Baal Chem Tov, commentant le verset : ‘Si nous n’avions pas pris du retard’. Voir le Kovets Mi’htavim sur Tehilim ”.
(9) Le Rabbi note, en bas de page : “ Selon l’explication du Kountrass Ha Avoda, à partir du chapitre 5 ”.
(10) Le Rabbi note, en bas de page : “ Comme le dit le Choul’han Arou’h, Ora’h ‘Haïm, au chapitre 586 et celui de l’Admour Hazaken, au paragraphe 10 ”.
(11) Le Rabbi note, en bas de page : “ Selon le traité Roch Hachana 27b ”.
(12) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, chapitre 429, à la fin du paragraphe 2 ”.
(13) Le Rabbi note en bas de page : “ Tout comme la tête vivifie et dirige les membres du corps, selon l’explication figurant au début d’Atéret Roch ”.
(14) Le Rabbi note en bas de page : “ En effet, le jugement de Roch Hachana porte, de la même façon, sur tous les domaines matériels, comme le souligne le Ramban. Et, ceci dépend également du couronnement, qui adoucit la sévérité et permet d’avancer ‘à la lumière de la Face du D.ieu de vie’, comme l’explique le Likouteï Torah, Bamidbar, à la page 72b ”.