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Samedi, 16 mars 2019

  • Vayikra
Editorial

 Dès aujourd’hui, pour demain

Pourim, c’est bien clair, est une fête qu’il faut savoir préparer et elle est, à présent, bien proche. Chacun a évidemment en tête les préparatifs matériels généraux imposés par toute célébration et ceux particuliers attachés à celle-ci. Mais, l’idée en a déjà été soulignée, il en existe bien d’autres, peut-être encore plus essentiels. C’est qu’un jour comme Pourim, à la spiritualité si élevée, ne peut être, pour ainsi dire, rencontré par inadvertance. Il doit être vécu pleinement, en conscience, avec toutes les valeurs dont il est porteur. Et sans doute faut-il l’avoir pensé au préalable pour y entrer de toute son âme. Il est vrai que les idées véhiculées par ce jour sont bien nombreuses et revêtent toutes une importance sans pareille : la fidélité à notre héritage, la confiance en D.ieu, le don de soi etc. En un tel cas, à quoi s’intéresser en premier lieu ? La réponse est connue : sachons d’abord regarder l’autre, c’est ainsi que le regard porté sur soi sera meilleur et plus complet.

Notons-le : parmi les commandements spécifiques de la fête, nous trouvons l’envoi de cadeaux composés de deux aliments à un ami au minimum ainsi que des dons à au moins deux pauvres. Donner à celui qui est dans le besoin, offrir des cadeaux sont autant d’habitudes juives. Pourtant, voici que Pourim les fait ressortir avec éclat, donnant ainsi à ces actes un statut différent. C’est que nous allons vivre là une fête où il ne peut y avoir d’exclus du bonheur. Nous allons vivre une célébration qui ne peut que laisser un goût d’insatisfaction si nous la traversons seuls, préoccupés uniquement de nous-mêmes. Lors des événements historiques de Pourim en Perse, la longue année que dura l’épreuve ne fut surmontée que parce que notre peuple sut rester uni dans sa confiance et sa conviction. C’est justement cette unité qu’il nous faut faire grandir d’année en année.

C’est donc vers un temps fort de l’amour du prochain que nous nous dirigeons rapidement. Et le concept ne peut pas rester simplement théorique, il doit être pris de la façon la plus concrète. Donner toute sa place à l’autre, convaincu qu’il n’est pas plus loin de nous que nous-mêmes. Faire en sorte que l’accès à la fête soit ouvert à tous. En un mot, partager le bonheur et la joie. Il y a ici comme le secret d’une félicité plus grande. En un temps où, dans les esprits, les questions montent, où, pour certains, l’avenir semble prendre les couleurs de l’incertitude, un tel Pourim donne les seules réponses qui vaillent : se soucier de l’autre, c’est donner au monde un espoir renouvelé.

Etincelles de Machiah

 La Techouva au temps de Machia’h

Le Zohar (III, 153b) enseigne : « Machia’h viendra pour que les Justes fassent Techouva ». La définition du « Juste », du « Tsadik » étant précisément qu’il n’a pas commis de faute, pourquoi devrait-il revenir à D.ieu, faire Techouva, en ce nouveau temps ?

En fait, quand Machia’h viendra, c’est un niveau si élevé de la Divinité qui se révèlera que, en comparaison, même le degré le plus haut de la Sagesse Divine sera considéré comme aussi bas que le monde matériel. Du fait de l’intensité et de la grandeur de cette révélation, les Justes ressentiront un sentiment de Techouva. Bien entendu, celui-ci ne correspondra à aucune faute mais à la pure volonté de s’approcher de D.ieu.

(d’après Likoutei Torah, Chir Hachirim, p. 50b)

Vivre avec la Paracha

 Vayikra

D.ieu appelle Moché depuis la Tente d’Assignation et lui communique les lois des Korbanot, offrandes animales et alimentaires apportées dans le Sanctuaire.

Elles incluent :

. « L’holocauste » (Olah), entièrement consacré à D.ieu, par un feu, en haut de l’autel.

. Cinq variétés d’ « offrandes alimentaires » (Min’ha), préparées avec de la farine fine, de l’huile d’olive et des encens.

. « L’offrande de paix » (Chelamim) dont la viande est consommée par celui qui apporte l’offrande, une fois que certaines parties en ont été brûlées sur l’autel et d’autres données aux Cohanim (Prêtres).

. Les différents types de « sacrifices expiatoires » (‘Hatat), apportés pour expier les transgressions commises de façon accidentelle par le Grand Prêtre, toute la communauté, le roi ou un Juif ordinaire.

. « L’offrande de culpabilité » (Acham) apportée par celui qui s’est approprié, de façon indue, d’un bien du Sanctuaire, qui a un doute d’avoir transgressé une interdiction divine ou qui a commis une « trahison contre D.ieu » par un faux serment pour escroquer un autre homme.

La richesse de chaque Juif

Un parmi tous

Il suffit de jeter un bref coup d’œil sur notre peuple pour révéler une grande hétérogénéité car il n’existe pratiquement aucun pays où les Juifs n’aient vécu. Ils ont pris une grande place dans pratiquement toutes les civilisations et se sont ainsi adaptés à ces différents environnements.

Il ne s’agit pas seulement des lieux dans lesquels notre peuple était installé mais également de la nature de chaque individu qui varie grandement. Nos Sages commentent, dans le Talmud Sanhédrin, que tout comme les visages de deux personnes ne sont pas similaires ainsi en va-t-il de leur processus intellectuel.

Cependant, cette diversité n’entrave pas l’unité fondamentale qui lie tous les membres de notre peuple, quel que soit le pays où il habite et son époque. Chaque Juif, homme, femme ou enfant, possède une âme qui est « une réelle partie de D.ieu » et qui imprègne chaque dimension de son être. A propos de ce peuple, D.ieu déclare : « J’ai créé ce peuple pour Moi-même ; ils réciteront Ma louange. »

Chaque Juif est le dépositaire de l’héritage spirituel de notre peuple. Une chaîne d’or court à travers les générations, remontant jusqu’à nos Patriarches, Avraham, Its’hak et Yaakov, et nos Matriarches, Sarah, Rivka, Ra’hel et Léa. Chaque Juif de la génération présente est un représentant de toute la collectivité telle qu’elle a existé et évolué à travers l’histoire. En tant que tel, D.ieu le chérit comme un père chérit son fils unique.

La proximité avec D.ieu

L’amour exceptionnel que porte D.ieu au Peuple juif apparaît au début de notre Paracha où on lit : « Et Il appela Moché et D.ieu lui parla ». Avant que D.ieu ne parle à Moché, Il l’appela, lui témoignant ainsi une mesure supplémentaire d’affection, commente Rachi. D.ieu n’appela pas Moché pour lui transmettre une information. Bien au contraire, Il l’appela pour lui exprimer l’amour absolu qu’Il éprouve pour notre peuple. (Car bien que Moché seul fut appelé, cet appel s’adressait à lui en tant que dirigeant de notre peuple, une entité.)

La nature divine inhérente que nous possédons de façon perpétuelle nous « appelle » constamment, cherchant à s’exprimer. Cela transparaît dans le sujet de la Paracha : les offrandes en sacrifice. Le mot hébreu pour sacrifice, Korban, partage la même racine que le mot Karov qui signifie « proche ».

Les sacrifices permettent donc de faire surgir à la surface le potentiel spirituel du Juif, rapprochant plus encore de D.ieu notre peuple et chaque individu.

L’amour et la proximité

Ces concepts sont essentiels quand il s’agit des relations entre les Juifs, même avec ceux dont la conduite (présente) est éloignée de ce que préconise notre héritage. D’abord et avant tout, nous devons apprécier qui est véritablement la personne en face de nous. Lorsque nous nous adressons à un Juif, nous devons réaliser que nous parlons à une âme qui est « une réelle partie de D.ieu ».

Nul n’est besoin de se concentrer sur les traits négatifs de la conduite d’autrui mais il faut mettre en lumière son potentiel positif, lui faisant prendre conscience de l’étincelle divine qu’il possède. Nous devons nous inspirer de l’exemple que nous donne la Paracha et témoigner à notre prochain un degré tout particulier de proximité, l’invitant à se joindre à des activités qui encouragent l’expression de son intériorité divine.

Nous devons mener cette approche avec confiance car il s’agit là de l’essence-même de notre prochain. « Aucun Juif ne désire se séparer de D.ieu ». Aussi, quand il est invité à affirmer son héritage avec chaleur et ouverture, s’ouvre-t-il, « se rapprochant de D.ieu » à son propre rythme. Puisqu’il appartient à la nation créée, selon les paroles de D.ieu, « pour Moi-même », il est inévitable qu’il finira par « chanter Sa louange », en suivant le chemin de la Torah et des Mitsvot.

Chercher le bon côté

La tendance naturelle nous pousse à être impatients, à presser la personne pour qu’elle observe parfaitement la Torah et les Mitsvot, et peut-être à la critiquer quand elle hésite ou fait marche arrière. La Torah n’approuve pas cette approche. Quand le prophète Yechayahou prononça des paroles dures à propos du Peuple juif, D.ieu le lui reprocha sévèrement bien que ses paroles fussent justifiées. Au lieu d’être critiques, nous devons prendre la résolution d’apprécier et de toujours mettre en valeur les qualités positives que possède chaque membre de notre peuple. Car, en réalité, l’existence-même de chaque Juif est une expression de l’amour de D.ieu, quel que soit le service divin qu’il accomplit.

Bien que les Juifs soient « un agneau parmi soixante-dix loups » et que nous ayons affronté de dures persécutions, nous avons résisté alors que des nations qui paraissaient infiniment plus nombreuses et puissantes ont disparu. Cela montre clairement que D.ieu a investi une dimension de Son éternité dans Son peuple. Notre existence continue, en tant que peuple et en tant qu’individus, est une expression de la Providence Divine.

Au jour d’aujourd’hui, chaque Juif est un miracle vivant.

Cela est particulièrement d’actualité, à peine une génération après la Shoah. Le fait que nous ayons été capables de traverser cette période terrible et de donner naissance à une nouvelle génération (quelles que soient les faiblesses spirituelles qu’elle puisse posséder) révèle l’œuvre de D.ieu.

La louange ultime

Le potentiel divin que chacun d’entre nous et tout notre peuple possédons ne restera pas en sommeil. Son épanouissement conduira à une ère où la Divinité, latente dans le monde, deviendra manifeste : l’Ère de la Délivrance. A cette époque, le Peuple Juif « chantera la louange (de D.ieu), d’une manière entière », « témoignant de notre gratitude pour les miracles accomplis pour nous ».

Que cela se produise immédiatement !

Le Coin de la Halacha

 La Tsédaka : guide pratique

- Combien donner ?

Selon la stricte loi de la Torah, chacun doit donner au moins un dixième de ses gains à la Tsédaka. Cependant, il est préférable de donner un cinquième.

Celui qui estime qu’il n’a pas les moyens de donner la Tsédaka devrait considérer que cela ne rend que plus urgente la nécessité de donner la Tsédaka. En effet, c’est la meilleure assurance que D.ieu lui fournira sa subsistance.

Il arriva parfois que le Rabbi conseille à des gens de mettre à part un dixième de leurs gains, d’en mettre la moitié à la Tsédaka et « d’emprunter » l’autre moitié pour leurs besoins personnels – quitte à rembourser cette autre moitié dès qu’ils disposeraient de davantage d’argent.

De nos jours, tranche Rabbi Chnéour Zalman, la Tsédaka agit comme un médicament et sauve de la mort : de même qu’on est prêt à dépenser toute sa fortune pour acheter des médicaments indispensables à la guérison, de même on doit être capable de donner bien au-delà de ses moyens pour obtenir la purification de son âme.

- Comment donner ?

Maïmonide cite huit niveaux de donateurs : le plus remarquable est quand le donateur et le bénéficiaire sont anonymes. L’usage de la boîte de Tsédaka toujours disponible permet cet anonymat. Cependant, le Rabbi décourageait le don anonyme de nos jours :

1) Les gens vont croire qu’on ne donne pas la Tsédaka et prendront prétexte de l’anonymat pour ne pas donner eux-mêmes.

2) C’est souvent une excuse pour donner moins que ce qu’on devrait donner ou pour ne pas donner du tout…

Le Rabbi recommandait de placer des boîtes de Tsédaka dans toutes les pièces de la maison (afin que la maison soit considérée comme une maison de Tsédaka), au travail (afin d’apporter la bénédiction dans les affaires), dans la voiture (afin d’en protéger les usagers)… (à suivre)

(d’après A Chassidisher Derher)

Le Recit de la Semaine

 Le Mikvé de Zagreb

Zagreb, la Croatie… Vous connaissez ? Bienvenue dans ce pays situé au bord de la mer adriatique, avec des hivers enneigés et des étés pluvieux, réapparu après le démantèlement de l’ancienne Yougoslavie. Une petite communauté juive d’environ 6000 personnes parvient petit à petit à se structurer – grâce aux efforts conjoints de plusieurs organisations et du Chalia’h (émissaire) du Rabbi, Rav Pin’has Zaklas. Ainsi, celui-ci a réussi à obtenir les fonds nécessaires pour construire un bâtiment de cinq étages : synagogue, jardin d’enfants, bureaux, cuisine communautaire ultra-moderne et enfin, un Mikvé (bain rituel), le premier du pays.

(Et comment faisait-on avant la construction de ce Mikvé ? Il fallait voyager quatre heures en voiture (ou sept heures en train) pour trouver le Mikvé le plus proche : on peut imaginer les difficultés occasionnées par cette situation !).

Enfin un Mikvé ! Construit selon les normes les plus exigeantes en matière de cacherout et de confort, de luxe même. Chacun a apporté sa contribution financière et il ne manquait plus que l’eau de pluie. Étés pluvieux ? Oui mais justement l’année dernière, il n’a presque pas plu à Zagreb : il a plu dans les villes alentour mais pas dans la capitale. Étrange ! A un moment donné, on se demanda s’il était possible ou souhaitable – selon certaines opinions rabbiniques – d’apporter des tonnes de neige des montagnes proches de la ville pour qu’elles fondent dans le bassin réservé à stocker l’eau de pluie mais Rav Zaklas avait confiance qu’il finirait bien par pleuvoir ! Pourtant, l’hiver approchait et le bassin restait presque vide : chaque jour, on allait vérifier le niveau de l’eau du réservoir mais en vain. On guettait les bulletins météo comme si on était des marins perdus dans l’océan… C’est alors que Mme Zaklas se souvint que, dans des cas similaires, le Rabbi avait conseillé dans ses lettres de faire vérifier la cacherout du Mikvé. Celui-ci avait pourtant été construit selon les normes les plus pointilleuses de la Hala’ha, la loi juive, selon les opinions les plus strictes, sous la direction attentive de nombreuses autorités rabbiniques.

« J’ai contacté un spécialiste mondialement reconnu en matière de Mikvé, raconte Rav Zaklas ; il m’a conseillé de filmer exactement tous les détails de la construction et même de tourner plusieurs clips avant qu’il ne vienne sur place constater de visu. C’est ce que j’ai fait. Il s’avéra que l’architecte local avait – en toute bonne foi – effectué une minuscule erreur qu’il fallait absolument réparer, ce qui fut fait sous la direction attentive de ce spécialiste. J’en étais malade ! Du coup, même le peu d’eau de pluie qui s’était amassée dans le réservoir devenait problématique et, du point de vue strict de la Hala’ha, il fallait peut-être s’en débarrasser et même assécher le bassin alors qu’elle avait presqu’atteint le niveau suffisant et que nous avions tant prié pour elle ! Les donateurs que nous avions sollicités pour ce Mikvé commençaient à s’impatienter devant notre réticence à l’inaugurer enfin alors qu’il était prêt depuis presqu’un an !

Le soir même où nous avons reçu la réponse de ce spécialiste et où nous avions procédé à la réparation, les média annoncèrent qu’une tempête s’approchait de Zagreb… Elle arriva sur la ville deux jours plus tard et remplit le réservoir jusqu’au bord. Nous avons enfin pu ouvrir le Mikvé devant de nombreux invités et les donateurs.

L’histoire ne se termine pas là. Une de mes cousines est Chlou’ha en Californie. Son fils va se marier dans quelques mois. Comme tout fiancé, il cherche à éditer un fascicule contenant vraiment quelque chose de spécial, un « scoop » jamais édité jusqu’à présent et, justement, il avait trouvé ! Une lettre du Rabbi écrit en langue croate ! Une lettre de trois pages…

Incroyable ! Quelle chance sur dix milliards de trouver une lettre du Rabbi en langue croate ? Nous habitons ici depuis 14 ans et jamais nous n’avions entendu parler d’une lettre du Rabbi écrite dans cette langue (ou en chinois ou en japonais d’ailleurs…). Je ne pouvais pas y croire… jusqu’à ce que le cousin me l’envoie par mail pour que je la lui traduise en hébreu.

C’est une lettre écrite exactement pour les Juifs de Zagreb, dans leur langue de tous les jours, à propos d’une loi du Rambam (Maïmonide) sur la manière d’identifier le Machia’h. Le Rabbi conclut en exhortant les Juifs croates à se renforcer dans l’étude de la Torah et la pratique des Mitsvot. Nous avons reçu cette lettre à quatre heures du matin, précisément le jour où devait avoir lieu l’inauguration officielle du Mikvé ! Et ce jour n’avait pas été choisi au hasard : c’était le 22 Chevat, le jour de l’anniversaire du décès de la Rabbanit ‘Haya Mouchka, l’épouse du Rabbi ! Vous l’avez deviné, le Mikvé porte son nom !

Jamais nous n’aurions pu rêver d’une plus belle participation du Rabbi à cette entreprise si stressante ! Nous ne savons pas si c’est le Rabbi lui-même qui a écrit cette lettre ou s’il avait demandé à quelqu’un de la traduire pour lui mais, quand on la lit, on remarque que le Rabbi connaissait bien les Juifs de Yougoslavie (dont faisait partie la Croatie à l’époque) ».

Et, si vous voulez lire cette lettre, essayez de vous faire inviter au mariage du cousin en Californie…

‘Haïm Gil – Kfar Chabad N° 1795

Traduit par Feiga Lubecki