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Semaine 48

  • Vayéchev
Editorial
La lumière, enfin!

Mois d’hiver. La nuit semble étendre son emprise sur la terre. Les journées ne cessent de devenir plus courtes comme si la lumière n’avait plus la force de rayonner sur le monde des hommes. Cette obscurité ne mériterait sans doute pas qu’on y accorde plus d’importance qu’il convient à un cycle saisonnier d’une régularité sans faille. Cependant, comment cette montée des ombres n’évoquerait-elle pas celle que connaît aujourd’hui l’ensemble de la planète? Comment ne ferait-elle pas penser aux ténèbres des esprits et des cœurs qui font perdre à l’homme la réalité de sa nature humaine, qui le transforment en un être capable de tuer des innocents, de détruire des vies et de se détruire sans que le moindre scrupule ne le retienne? Comment ne constituerait-elle pas l’image symbolique de l’obscurcissement moral qui fait de nos sociétés des lieux d’où la sérénité est absente?
C’est certes là une bien sombre toile de fond. Mais voici venu le temps de la lumière. ‘Hanouccah est présent dans toute nos maisons; sur les places publiques s’élèvent les lumières de la fête et l’obscurité recule. C’est que cette clarté nouvelle possède une étonnante puissance. Ces petites flammes qui dansent au sommet du chandelier de la fête sont capables de dissiper la plus sombre des nuits: ce sont les lumières d’un combat éternel. Elles ont brillé dans les longues nuits de l’exil, accompagné le peuple juif sur les obscurs chemins de l’histoire. Elles ont incarné avec une force et une joie insurmontables son espoir et sa foi. Lumières de la liberté, hérauts d’une victoire de paix, elles sont le rayonnement autour duquel les hommes se rassemblent. Ils savent alors que la nuit n’a qu’un temps, que, très vite, le jour se lèvera et qu’il dissipera les ténèbres avec la tranquille assurance de celui qui attendait, conscient de son inéluctable victoire.
Alors que cette semaine, nous allumons les chandeliers de ‘Hanouccah, nous sommes conscients du pouvoir de la lumière. Face aux forces de l’ombre, la réponse du peuple juif est toujours la même, rayonnante. Nous savons, selon le mot de nos Sages, que “les lumières de ‘Hanouccah ne disparaîtront jamais” et que bientôt viendra le temps de toute lumière.
Etincelles de Machiah
Le temps de Machia’h selon Maïmonide

Nous venons de conclure le 20ème cycle annuel de l’étude du Michné Torah de Maïmonide et de commencer le 21ème. A cette occasion, cette rubrique analyse le lien entre le début et la fin du texte.

L’œuvre du Maïmonide se termine par le paragraphe suivant: à l’époque du Machia’h, “l’occupation du monde entier sera uniquement de connaître D.ieu... ‘comme l’eau couvre le fond des mers’”. Cela implique que cette recherche sera le fait non seulement du peuple juif mais également de l’ensemble du monde. Or, si le peuple juif a effectivement reçu cette mission de connaissance et l’a assumée depuis toujours, comment peut-on affirmer qu’il en va de même pour le reste du monde?
La réponse se trouve en tout début de l’ouvrage. Celui-ci s’ouvre par les mots: “Le fondement de tous les fondements et le pilier de toute sagesse est de savoir qu’il existe une Existence Première Qui fait venir à l’existence tout ce qui existe; et toute chose qui existe dans les cieux et sur la terre et entre eux n’existe que par la vertu de Son Existence Véritable”. En d’autres termes, c’est de D.ieu que vient toute vie et c’est Lui qui donne constamment à chacun la force lui permettant d’exister.
Or ce fait qui reste masqué aujourd’hui deviendra manifeste lorsque le Machia’h viendra. A ce moment, le monde matériel révèlera sa véritable nature aux yeux de tous et chacun percevra qu’il ne constitue pas une entité autonome. Tous, sans exception, verront alors “la connaissance de D.ieu”, “Son existence véritable”.
Vivre avec la Paracha
Vayéchev : les jumeaux de Tamar

Parmi les nombreuses naissances relatées dans le livre de Beréchit, deux évoquent celles de jumeaux : la naissance des jumeaux de Rivkah : Yaakov et Essav ; et la naissance de Pérets et de Zéra’h, les jumeaux de Tamar et de Yehouda.
Alors que certaines similitudes marquent les deux naissances, certaines différences les opposent également, à la fois dans les circonstances entourant les naissances et dans les caractères des jumeaux.
Yits’hak et Rivkah furent mariés pendant vingt ans sans avoir d’enfants. Ils prièrent, chacun évoquant la rectitude de l’autre dans leur supplique à D.ieu; leur union sacrée produisit deux fils bien différents : Yaakov grandit pour devenir un érudit, bon, Essav un matérialiste grossier et faux.
Les jumeaux de Tamar furent conçus dans des circonstances bien moins élevées. Tamar était à l’origine mariée au fils aîné de Yehouda, Er. A la mort de ce dernier, elle fut donnée, dans un mariage de lévirat, au jeune frère de son défunt mari, Onan; mais celui-ci mourut également sans laisser d’enfant. Quand Tamar réalisa que Yehouda n’avait aucune intention de lui donner son troisième fils, Chélah, elle se déguisa en prostituée et séduisit Yehouda lui-même. Quand il fut apparent qu’elle attendait un enfant, Tamar fut presque mise à mort, sur les ordres de Yehouda, pour mauvaise conduite; ce n’est que lorsqu’elle produisit certains effets personnels de Yehouda que ce dernier réalisa que cette prostituée n’était nulle autre que son ancienne belle-fille et que les jumeaux qu’elle attendait étaient ses enfants.
Et pourtant, contrairement aux fils de Yits’hak et de Rivkah, les jumeaux nés de cette union moralement douteuse furent tous deux des hommes justes. En fait, tous les rois d’Israël, depuis David jusqu’à Machia’h sont issus de ces jumeaux.
Il est fait allusion aux différences entre ces deux grossesses et ces deux naissances dans les versets qui les décrivent. En ce qui concerne Rivkah, la Torah dit: “Ses jours pour donner naissance furent comblés; et, voici, il y avait des jumeaux dans son giron”; en ce qui concerne Tamar, la Torah écrit : “Au moment où elle donna naissance, il y avait des jumeaux dans son giron”. Nos Sages, soulignant la phraséologie différente, expliquent que Rivkah eut une grossesse “remplie” de neuf mois entiers alors que Tamar donna le jour après une grossesse “non remplie” de sept mois.
Nos Sages relèvent également que le mot “jumeaux”, Teomim, est différemment orthographié dans les deux récits. Dans la langue sainte, de nombreux mots peuvent s’écrire soit avec une orthographe “pleine”, soit avec une orthographe “déficiente” (c’est-à-dire manquant de une ou plusieurs lettres). Dans le récit de la naissance de Pérets et Zéra’h, le mot Teomim apparaît dans son orthographe complète; mais dans le récit de la naissance de Yaakov et Essav, il apparaît dans sa forme déficiente, y manquant les lettres Aleph et Youd. Cela, expliquent les commentateurs, fait allusion au fait que les jumeaux de Tamar “étaient tous deux justes, alors que dans le cas (de Rivkah), l’un était juste et l’autre impie”.
En d’autres termes, la grossesse “remplie” de Rivkah produisit un groupe de jumeaux “déficient” alors que la grossesse déficiente de Tamar donna naissance à une progéniture “remplie”.

Les graines du mal ?
Mais la grossesse de Rivkah fut-elle réellement parfaite? Le Midrach semble indiquer que la moitié impie de sa progéniture affirmait déjà son iniquité dans son giron. “Chaque fois qu’elle passait devant une maison d’étude, Yaakov se démenait pour sortir… et quand elle passait devant un lieu de culte idolâtre, Essav se démenait pour sortir”. Rivkah, étonnée de ses deux tendances qui apparaissaient dans sa descendance “chercha le conseil de D.ieu” et il lui fut dit: “Il y a deux nations dans ton giron, deux peuples qui se sépareront de toi”.
Il existe néanmoins d’autres récits midrachiques, qui décrivent Yaakov et Essav partageant la même enfance de justesse dans le saint environnement de la maison de leurs parents et sous la tutelle de leur saint grand-père Avraham, et ce n’est que “plus tard que Essav se détruisit par ses actes”. Cela conforte notre conception initiale d’une grossesse et d’une naissance suivies d’une progéniture “déficiente” attribuée au seul fait que Essav, de son propre libre-arbitre, choisit de suivre le chemin du mal.
Mais on retrouve une contradiction similaire dans les remarques de nos Sages concernant la création du monde par D.ieu. D’une part, nous lisons l’enseignement du Midrach selon lequel “le monde fut créé rempli…”, c’est-à-dire tout à fait mûr et ne manquant de rien. Et pourtant, le monde parfait créé par D.ieu contient un potentiel d’imperfection, voire de mal. En fait, ce potentiel fait partie intégrante de sa perfection. Le Midrach, citant le verset “et D.ieu regarda tout ce qu’Il avait fait et, voici, c’était très bien” commente : il s’agit de l’inclination au bien ; “et voici, c’était très bien”, c’est l’inclination au mal…; “voici c’était très bien”, c’est le paradis; “et voici, c’était très bien”, c’est l’enfer ; “voici, c’était très bien”, c’est l’ange de la vie ; “et voici, c’était très bien”, c’est l’ange de la mort”.

Les deux gourmandises
L’un des principes fondamentaux de la foi juive, écrit Rambam, est que “le libre-arbitre a été accordé à chaque homme: s’il désire se tourner dans la voie du bien et être une personne juste, l’option est entre ses mains; s’il désire se tourner vers la voie du mal et devenir une personne impie, l’option est entre ses mains”. Et pourtant, nous observons que certaines personnes sont plus susceptibles de faire le mal que d’autres. Le Talmud décrit le prototype des victimes du mal, Job, protestant vers D.ieu: “Maître de l’Univers ! Tu as créé des justes et tu as créé des impies!”.
Dans le Tanya, Rabbi Chnéour Zalman de Lyadi explique que D.ieu a en fait créé “les justes” et “les impies”. Les “justes” (Tsaddikim) sont des individus qui, par nature, abhorrent le mal et ne désirent que le bien, soit qu’ils sont nés de cette façon soit qu’ils ont transformé leurs impulsions négatives en positives. Les “impies”, d’autre part, sont ces individus qui sont destinés “non à être réellement impies, à D.ieu ne plaise, mais qui sont confrontés aux actes impies, seulement dans leurs âmes et dans leurs esprits, de sorte qu’ils doivent constamment se battre pour en éloigner leur esprit et supprimer le mal ; car ils ne pourraient l’annihiler complètement, ce qui ne peut être fait que par les justes”.
C’est là le sens profond des “deux nations” dont il fut dit à Rivkah qu’elles reposaient dans son giron. L’attraction au mal montrée par l’un des jumeaux n’était pas une déficience, c’était le potentiel d’une “seconde gourmandise” créée par D.ieu. Ce n’est que plus tard qu’Essav choisit de céder à son inclination au mal plutôt que de la combattre et que la dualité des forces qu’elle enfanta devint un groupe de jumeaux “déficient”.
Comme ils existaient en Rivkah, toutefois, Yaakov et Essav constituaient une grossesse “remplie” contenant les deux potentiels fondamentaux que D.ieu avait implantés dans Sa création: le délice du bien parfait et le plaisir distinct et le sens d’accomplissement qui ne vient que du combat avec l’adversité.
La grossesse de Tamar et la naissance décrivent le processus inverse: la façon dont des circonstances et des actions négatives peuvent être sublimées de sorte que la perfection originelle, dont émerge chaque potentiel dans l’existence, est restaurée. En fait, quand le potentiel du mal, de la souffrance, de l’enfer et de la mort devient réalité, l’opportunité existe pour l’accomplissement d’une perfection encore plus grande, quand ils sont vaincus et transformés en bien.

La montée du Mont Tsion
C’est là le paradoxe de notre existence: la perfection engendre l’imperfection (comme dans la grossesse de Rivkah), car rien ne peut être dit parfaitement juste à moins qu’il ne possède le potentiel du combat, ce qui signifie qu’il peut être vulnérable à l’imperfection. Et l’imperfection donne naissance à la perfection (comme dans le cas de la grossesse de Tamar) quand la vulnérabilité est exploitée pour arracher les récompenses du combat et atteindre la gémellité parfaite du bien absolu et du mal vaincu.
L’ensemble de l’histoire est le noble et difficile progrès vers la résolution de ce paradoxe quand, à l’époque de Machia’h, “les vainqueurs (descendants de Tamar) monteront sur la montagne de Tsion pour juger la montagne d’Essav (de Rivkah)” unissant les vulnérabilités nées de la perfection de la création de D.ieu avec la perfection de ce qui est né des vulnérabilités de la condition humaine.
Le Coin de la Halacha
Comment allume-t-on la première lumière de 'Hanouccah le vendredi soir 29 novembre 2002 et les huit lumières le vendredi 6 décembre 2002 ?

Il convient, avant l'allumage, de faire d'abord la prière de Min'ha. Le maître de maison, et éventuellement tous les garçons de la maison, prononceront d'abord les deux bénédictions suivantes :
(1) “ Barou'h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè'h Haolam Achère Kidéchanou Bemitsvotav Vetsivanou Lehadlik Ner Hanouccah ” - Béni sois-Tu, notre D.ieu, Roi de l’Univers qui nous as sanctifiés par Ses commandements et nous as ordonné d’allumer les lumières de ‘Hanouccah.
(2) “Barou'h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè'h Haolam Chéassa Nissim Laavoténou Bayamime Hahème, Bizmane Hazé” - Béni sois-Tu, notre D.ieu, Roi de l’Univers qui as fait des miracles pour nos pères en ces jours-là, en ce temps-ci.
(Le vendredi 29 novembre, on ajoutera :
(3) Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè'h Haolam Chéhé’héyanou Vékiyémanou Véhiguiyanou Lizmane Hazé - Béni sois-Tu, notre D.ieu, Roi de l’Univers qui nous as maintenus en vie, nous as préservés et nous as permis d’atteindre ce moment-ci.
On allumera d'abord la mèche ou la bougie située le plus à gauche puis celle qui la précède etc… à l'aide de la bougie appelée “Chamach”.
On aura pris soin de mettre assez d'huile dans les godets (ou d'avoir prévu des bougies assez grandes) pour durer jusqu'à une demi-heure après la nuit, c’est-à-dire jusqu’à environ 18h 20 (heure de Paris). Après l'allumage, on récite le passage “Hanérot Hallalou”.
Ensuite, les jeunes filles allumeront leurs bougies de Chabbat (après avoir mis quelques pièces dans la boîte de Tsédaka, charité); les femmes mariées allumeront au moins deux bougies. Elles diront la bénédiction habituelle (“Barou'h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè'h Haolam Achère Kidéchanou Bemitsvotav Vetsivanou Lehadlik Ner Chel Chabbat Kodèch” - Béni sois-Tu, Eternel notre D.ieu qui nous as sanctifiés par Ses commandements et nous as ordonné d’allumer la lumière du saint Chabbat).
Tout ceci devra être terminé avant 16h 38 (heure de Paris) le 29 novembre et avant 16h 35 le 6 décembre.
Une jeune fille (ou une femme) qui habite seule devra elle aussi procéder d'abord à l'allumage des lumières de 'Hanouccah puis des bougies de Chabbat, avec les bénédictions appropriées.

A partir de mercredi soir 4 décembre, on modifie le texte de la prière de la Amida et on demande: “Vetène Tal Oumatar” - “Et donne la rosée et la pluie”.

F. L.
De Recit de la Semaine
Le Tanya à Téhéran

Chaque année, le 19 Kislev, les ‘Hassidim recommencent l’étude quotidienne du Tanya, œuvre maîtresse de Rabbi Chnéour Zalman.
Le Tanya, appelé également “Le livre des hommes intermédiaires”, est sans doute le livre juif qui a connu le plus grand nombre d’éditions de par le monde. En effet, le Rabbi de Loubavitch avait demandé de le faire imprimer dans toute ville où habitent des Juifs, afin de leur donner l’occasion d’acheter et d’étudier ce livre qui constitue véritablement la “Torah écrite de la ‘Hassidout”. L’édition n° 119 eut lieu à Téhéran, capitale de l’Iran, en 1978.

“Environ un an avant la révolution islamique, deux émissaires du Rabbi arrivèrent en Iran pour y imprimer le Tanya, avec l’accord du Conseil de la Communauté juive. Il fut même décidé d’en imprimer un grand nombre afin d’en distribuer un exemplaire à chaque membre de la Communauté.
Le processus d’impression fut beaucoup plus long que prévu. Entre-temps, la révolution de Khomeïni bouleversa le pays. Comme j’étais responsable spirituel, je m’efforçais de faire sortir de l’imprimerie tous les exemplaires du Tanya qui étaient déjà prêts et je les fis transporter dans la grande salle de la bibliothèque où on les entassa dans un désordre indescriptible.
A cette époque, le gouvernement issu de la révolution islamique décréta une nouvelle loi : l’épuration. Il s’agissait, en moins d’un mois, de détruire tous les papiers, documents et livres où figuraient les armoiries du royaume, le symbole de Cyrus, le nom de l’ancien souverain (le “Shah”) etc… Chaque citoyen, chaque organisation devait s’acquitter de cette tâche sous peine d’un châtiment sévère pouvant aller jusqu’à la mort.
Nous, responsables de la communauté, nous étions confrontés à un problème insurmontable. En effet, nous possédions des archives de plus de cent ans qui portaient pour la plupart des emblèmes royaux et le nom du Shah. Par exemple la communauté possédait un stock de pièces d’or qu’elle avait fait frapper spécialement à l’occasion des fêtes du 2500ème anniversaire du couronnement de Cyrus. D’un côté, il y avait le symbole de la Ménorah et de l’autre, l’emblème du Shah, de Cyrus ou de la couronne.
Vu la valeur inestimable de ces objets, il nous était difficile de “purifier” la bibliothèque et les archives ; mais même quand nous dûmes nous rendre à l’évidence et entamer la destruction, il nous fut impossible d’accomplir cela en si peu de temps.
A la fin du mois, avant même que nous ayons pu commencer quoi que ce soit, mon secrétaire entra précipitamment dans mon bureau et m’annonça que deux fonctionnaires du gouvernement s’étaient présentés pour vérifier que nous avions bien appliqué la “Loi de Purification”.
Cette nouvelle me glaça le sang. Je savais que j’allais être jeté en prison et qu’un grand danger planait sur toute la communauté. Déjà je murmurai les mots de confession et le Chema Israël comme le récite celui qui risque de mourir. Quand les fonctionnaires entrèrent, j’étais comme paralysé par la peur mais je décidais, sans trop savoir pourquoi, de les amener dans la bibliothèque.
Ce qui les frappa d’emblée, c’était les caisses de livres qui traînaient un peu partout. Un des fonctionnaires se baissa pour ramasser un des livres. C’était justement un Tanya. Il me demanda de quoi il traitait et j’entrepris de lui expliquer qui était Rabbi Chnéour Zalman, Rabbi Israël Baal Chem Tov, ce qu’étaient la ‘Hassidout et, en particulier, le mouvement Loubavitch. Je soulignais que le Tanya était le livre de base de la philosophie ‘Habad. Il ouvrit le livre et me demanda d’en traduire une page “au hasard” : c’était précisément la première page de “La Porte de l’Unité et de la Croyance”. Je traduisis et expliquai aussi bien que je pus les profonds concepts présentés par Rabbi Chnéour Zalman. Quand j’eus fini, le fonctionnaire ferma le livre, l’embrassa et déclara, impressionné : “Dans un endroit où se trouvent de tels livres, il n’est pas nécessaire d’en demander davantage…!”
Nous étions stupéfaits. Quand je retrouvai mes esprits, je lui demandais, avant qu’il ne parte, de bien vouloir écrire quelques mots et apposer sa signature sur le Livre d’or de la Bibliothèque, ce qu’il fit avec beaucoup de respect.

Rav Yéhouda Ezra’hian
traduit par Feiga Lubecki