Imprimer cette page

Samedi, 4 février 2017

  • Bo
Editorial

 Toujours nouveau 10 Chevat

Et si l’on parlait, une fois n’est pas coutume, d’une « histoire ancienne » ? Cela se passait en 5711 – 1951, il y a soixante-six ans. Dans ce monde si proche encore des horreurs de la guerre, la communauté juive cherchait partout les chemins de sa reconstruction. Le précédent Rabbi de Loubavitch, Rabbi Yossef Its’hak Schneersohn, avait quitté ce monde le 10 Chevat de l’année précédente. Dès son arrivée aux Etats-Unis, dix ans plus tôt, il avait posé les principes de son action, en avait jeté les bases. Il y avait tant à faire. Son décès avait bouleversé chacun : qu’allait-il arriver ? L’œuvre pourrait-elle continuer sans son inspirateur ? Un an était donc passé et rien ni personne ne pourrait décrire cette période et cette longue incertitude. Le 10 Chevat 1951 arriva alors et tous surent que le gendre du précédent Rabbi, Rabbi Mena’hem Mendel Schneerson, acceptait de prendre la fonction de Rabbi de Loubavitch. Ce jour-là, un nouveau temps commença, comme une nouvelle naissance.
Ce n’est décidément pas le terme d’ancien qui convient pour qualifier cette histoire. Dès sa première prise publique de parole, celui que tous allaient bientôt connaître sous le simple nom de « Rabbi » indiquait la voie à suivre. S’adressant à chacun, il confia une « mission » qui ne devait plus s’interrompre : aller à la rencontre de l’autre, partager le judaïsme avec lui, donner accès à la tradition juive à celui que les circonstances en avaient privé, faire progresser chacun, et le monde avec lui, jusqu’à l’accomplissement ultime : la Délivrance. Cette mission est celle qui continue de conduire l’effort de tous. Elle commença il y a à présent soixante-six ans.
Soixante-six ans, est-ce, pour une telle entreprise, l’âge du repos, le temps mérité d’une certaine sérénité ou d’un retrait quelconque de l’impétuosité de l’action ? En aucun cas. Car ce qui est vivant ne peut jamais que grandir et se développer. C’est même là sans doute le trait marquant de la vie. Alors que soixante-six ans se sont écoulés depuis la prise de fonction du Rabbi, que soixante-six ans d’initiatives ont profondément fait évoluer le judaïsme mondial, le 10 Chevat est le jour privilégié où, prenant pleinement en charge la tâche qui nous incombe, nous en concrétisons tous les possibles, jusqu’au cœur : l’avènement des temps messianiques.

Etincelles de Machiah

 Une prière à voix haute

La ‘Hassidout explique (Torah Or, fin de Parchat Vayigach) que l’on dira la prière de la Amida à voix haute dans les temps messianiques.
L’origine de cet enseignement peut être retrouvé dans un texte du Zohar qui commente le verset décrivant la prière adressée par Rachel à D.ieu en faveur du peuple juif : « Une voix est entendue à Ramah ». Le mot Ramah » est, en première lecture, un nom de lieu. Toutefois, il peut également être traduit par « à voix haute ». Le Zohar apporte alors son commentaire (I, 210a) : « cela fait allusion au monde futur. »

(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch, Chabbat Parchat Vayigach 5746)

Vivre avec la Paracha

 Bo

Les trois dernières plaies accablent l’Egypte : une armée de sauterelles dévore les cultures et la végétation ; une obscurité épaisse, palpable enveloppe le pays et tous les premiers-nés de l’Egypte sont tués aux coups de minuit, le 15 du mois de Nissan.

D.ieu ordonne la première Mitsva au Peuple d’Israël : celle d’établir un calendrier basé sur le renouvellement de la lune. Les Hébreux sont également enjoints d’apporter une « offrande pascale » à D.ieu : un agneau ou un chevreau doit être abattu et son sang aspergé sur les jambages ou les linteaux de chaque demeure des Hébreux, pour que D.ieu « passe par-dessus » ces foyers quand Il viendra tuer les premiers-nés égyptiens. La viande rôtie de l’offrande sera consommée en cette nuit avec la Matsa (pain non levé) et les herbes amères.

La mort des premiers-nés finit par briser la résistance du Pharaon et il renvoie littéralement les Enfants d’Israël de sa terre. Ils doivent s’en aller dans une telle hâte que leur pâte n’a pas le temps de lever et les seules provisions qu’ils emportent sont ce pain non levé. Avant de partir, ils demandent à leurs voisins égyptiens de leur remettre de l’or, de l’argent et des vêtements, réalisant ainsi la promesse faite à Avraham que ses descendants quitteraient l’Egypte avec de grandes richesses.

Les Enfants d’Israël reçoivent le commandement de consacrer tous les premiers-nés et de célébrer chaque année l’anniversaire de l’Exode, en se débarrassant de tout le levain en leur possession pendant sept jours et de raconter leur rédemption à leurs enfants. Ils sont également enjoints de mettre les Téfilines sur le bras et la tête en souvenir de l’Exode et de leur engagement à D.ieu.

La lecture de la Paracha de cette semaine décrit l’Exode, la sortie d’Egypte. Avant que le Peuple juif ne soit libéré, ils durent offrir le sacrifice pascal. D.ieu présenta le commandement d’apporter un sacrifice par la déclaration : « Ce mois sera pour vous le commencement des mois ».

Nos Sages interprètent ces paroles comme signifiant l’injonction de sanctifier la nouvelle lune, comme le début d’un nouveau mois. Bien que, au bout de quelques années, une jonction soit faite avec le calendrier solaire, ce sont les phases de la lune qui déterminent quand commence le nouveau mois du calendrier juif. Dès lors que le Peuple juif voyait la nouvelle lune et en témoignait au tribunal (rabbinique), débutait le nouveau mois.

Les fêtes que nos célébrons aujourd’hui dépendent des jours du mois. Il ne s’agit pas simplement de célébrations qui ont lieu dans le monde concret mais d’événements qui produisent des changements dans le royaume spirituel. C’est, pour ainsi dire, comme si D.ieu et la cour céleste attendaient que les juges du monde matériel déterminent le jour où commencent les mois.

Il ne s’agit pas seulement d’un concept hala’hique (de la Loi Juive). Au niveau de l’intériorité de chacun est également présente une force de renouvellement. Quelle que soit la situation dans laquelle nous nous trouvons, nous avons les capacités de nous régénérer. Il nous est possible de pénétrer l’essence Divine, dans notre cœur, et d’y trouver les ressources profondes qui peuvent opérer des changements radicaux dans notre vie et dans les circonstances qui l’entourent.

Car chaque Juif possède une âme qui est une réelle partie de D.ieu. Tout comme D.ieu règne au-dessus de l’ordre naturel qu’Il manipule selon Son bon vouloir, chaque Juif a le potentiel de s’élever au-dessus de ses tendances naturelles et de ses habitudes pour amorcer une nouvelle phase de son développement personnel.

Dans le verset que nous avons cité, « pour vous » que l’on traduit en hébreu par La’hem, partage la même racine que le mot Mélè’h, signifiant « roi ». Nos Sages statuent que Roch ‘Hodech Nissan, la date où fut ordonné ce commandement, représente la date à partir de laquelle sont comptées les années du règne d’un nouveau roi. Au niveau individuel, cela signifie que de la même façon qu’un roi dirige la nation par des édits, chacun d’entre nous peut être comparable à un roi, contrôler tranquillement sa vie et en changer, s’il le veut, les circonstances.

Nos Sages notent que ce commandement constitue la première Mitsva collective donnée à notre peuple et une opinion soutient que la Torah aurait dû commencer par ce passage.

Car ce potentiel de renouvellement est de la plus grande des priorités. Il modela l’identité de notre peuple au moment de l’émersion de l’esclavage égyptien et il forme l’identité de chacun d’entre nous lorsque nous émergeons de notre « maison d’esclavage » personnelle.

Nissan, le moment où fut enjoint ce commandement, est le mois du printemps, ce qui illustre la façon dont le renouvellement pénètre également le cadre naturel dans lequel nous vivons. L’on y voit des arbres bourgeonner et des fleurs commencer à s’épanouir. L’on réalise alors ce que nous avons été et que ce que nous avons fait dans le passé n’est pas aussi important que ce que nous pouvons être et ce que nous pouvons faire.

Nous ne devons pas accepter nos limites présentes. Bien au contraire, notre potentiel divin est infini et à chaque instant, nous pouvons exercer notre aptitude au renouvellement, au changement radical de notre situation.

Perspectives

Quand elle décrit le sacrifice pascal, la Torah statue : « Ainsi devrez-vous le manger, vos hanches ceintes, vos chaussures à vos pieds et votre bâton à la main. Vous le consommerez en hâte ».

Par contre, en ce qui concerne la Rédemption Ultime, l’Ecriture indique : « Vous ne quitterez pas en hâte pas plus que vous ne fuirez ».

Les Juifs devaient fuir l’Egypte car ils se sauvaient d’eux-mêmes. Une partie de leur personnalité n’était ni raffinée ni élevée et ne présentait que peu de différences avec celle des Egyptiens. Tout au long des années de servitude, ils avaient été esclaves et n’avaient pas eu l’opportunité d’opérer un développement personnel. C’est la raison pour laquelle, ils n’étaient pas prêts pour la Rédemption et durent l’accepter sans y être préparés. S’ils n’avaient pas fui, l’Egypte les aurait attirés et ils ne seraient pas partis.

Tout au long des siècles qui conduisent à la Rédemption Ultime, par contre, notre peuple s’est raffiné, a élevé son environnement, préparant le monde à la venue du Machia’h. Lentement, douloureusement aussi, l’exil purifie l’humanité de ses traits indésirables. C’est pour cela que lors de la venue du Machia’h, nous n’aurons aucun besoin de fuir. Nous l’accepterons avec joie et gratitude.

Le Coin de la Halacha

Peut-on changer le prénom hébraïque d’un malade ?

Nos Sages affirment : « Par quatre actions, on peut déchirer le décret qui plane sur un malade : augmenter la Tsedaka (dons aux nécessiteux), le cri (la prière), le changement de prénom et le changement dans la manière de vivre ».
Le Rambam commente : « Tsedaka : selon ses moyens ; la prière : celui qui désire retourner à une vie de Torah prie constamment en pleurant et suppliant ; le changement de prénom : comme pour indiquer qu’il est maintenant différent et n’est plus celui qui a mal agi ; le changement de vie : agir toujours pour le bien et dans la bonne direction ».
De là provient la coutume d’ajouter un prénom au malade quand sa situation s’aggrave. On choisit alors un prénom qui est une allusion à la longue vie (par exemple ‘Haïm (la vie), Alter (le vieux) ou Raphaël, l’ange préposé à la guérison). D’habitude cela s’effectue devant un Séfer Torah : on annonce alors le nouveau prénom. Il est recommandé de le faire trois fois. Certains récitent aussi des chapitres de Tehilim (Psaumes). On appellera alors la personne en question d’abord par son nouveau prénom puis par l’ancien : ainsi, par exemple, celui qui s’appelait Moché sera dorénavant appelé Raphaël Moché. Le malade insistera pour se faire toujours appeler ainsi – surtout quand on prie pour lui, quand on l’appelle à la Torah et quand il doit signer un document.
Si, malgré cela, le malade décède dans les trente jours, on ne mentionnera pas ce nouveau prénom sur la pierre tombale ou pour les bonnes actions entreprises pour son mérite.
Il existe une tradition de Rabbi Mikhaël de Zlotchov (un disciple du Baal Chem Tov) que seul un Tsaddik qui connaît les mystères des âmes change le prénom car ceci affecte le transit de la vitalité vers cette âme. Rav Leibl Groner, le secrétaire du Rabbi, a confié que telle était aussi l’opinion du Rabbi.

(d'après Rav Yossef Ginsburgh - Sichat Hachavoua N°1568)

Le Recit de la Semaine

 La bonne décision

Nous sommes partis en Chli’hout à Memphis en 1994. Après avoir passé deux ans dans un appartement, nous avons acquis une maison avec un vaste garage qui nous laissait beaucoup de place : c’est devenu une petite synagogue et un Beth ‘Habad. Nous avions l’intention de trouver un autre endroit, plus grand et plus fonctionnel dans les années suivantes mais cela ne se passa pas si vite.
De fait, nous sommes restés dans cette maison près de douze ans. Nous avons investi beaucoup d’argent et d’efforts dans différents projets mais, à chaque fois que nous approchions de la conclusion d’une affaire, cela ne se concrétisait pas, pour une raison ou pour une autre. Bref, nous avons expérimenté beaucoup de déceptions et de désillusions pendant dix ans.
Finalement, en 2007, après huit tentatives ratées, nous avons remarqué un terrain à vendre : grand, avec un parking qui nous convenait parfaitement. Il appartenait à un établissement non-juif qui connaissait de grosses difficultés financières. Ses propriétaires tentaient de le vendre au plus tôt pour payer leurs dettes, ce qui signifiait que nous pourrions l’acquérir pour un bon prix.
Le seul problème était l’endroit – qui était un peu en-dehors de notre quartier. Chaque institution juive de la ville était située soit dans la rue principale soit un peu au nord. Mais cette propriété se trouvait à deux kilomètres au sud du centre-ville. Mes supporters étaient divisés et moi aussi, j’hésitai car tout le reste était idéal.
Je me rendis alors à New York pour le Congrès des Chlou’him et, selon mon habitude, j’avais l’intention de prendre un taxi depuis l’aéroport jusqu’au Ohel. Comme le vol durait plusieurs heures, je décidai d’écrire ma lettre au Rabbi dans l’avion, en indiquant tout ce qui me préoccupait : je déversais vraiment mon cœur dans cette lettre, d’une manière qui m’était tout à fait inhabituelle.
Je commençai ma lettre avec les mots : « Très prochainement, cela fera treize ans que nous sommes arrivés à Memphis et nous n’avons toujours pas trouvé un endroit permanent qui conviendrait à nos besoins ». Je décrivais toutes nos désillusions de ces douze années ainsi que les derniers développements avec ses pour et ses contre. J’étais prêt à investir tout le temps, l’énergie, l’argent et les efforts nécessaires mais je voulais d’abord être sûr que c’était la bonne direction. Trop souvent, j’avais cru être sur la bonne route mais nos projets avaient échoué : je ne voulais pas recommencer pareille mésaventure.
Je demandais donc une bénédiction pour que tout ce qui m’arriverait soit une réussite et je concluais la lettre encore une fois de façon inhabituelle : auparavant, chaque fois que j’écrivais au Rabbi pour des problèmes de ce genre, je demandais une bénédiction à la fin de la lettre. Mais cette fois-ci, pour la première fois depuis Guimel Tamouz (date du décès du Rabbi), je terminais en demandant au Rabbi de me montrer « un signe » pour décider si je devais continuer dans cette voie ou non : « Est-ce vraiment la bonne initiative ? ».
Après le Ohel, je me rendis à Crown Heights. Alors que je me trouvais dans la maison de mes parents, mon père, Rav Binyamine Klein (de mémoire bénie) qui avait longtemps été le secrétaire du Rabbi, se souvint de quelque chose. Il avait retrouvé un papier portant une réponse du Rabbi, écrite à la main, qu’il souhaitait me remettre. J’étais très surpris parce que, bien que mon père ait été le secrétaire personnel du Rabbi, il était très inhabituel de sa part de me donner quelque chose venant du Rabbi, même si cela me concernait.
Je suis né le 13 Tamouz, le jour de la fête de la libération de prison du Rabbi précédent. Chaque année, le Rabbi marquait cet événement par un Farbrenguen (réunion ‘hassidique) la nuit du 12 au 13 Tamouz. Ma Bar Mitsva eut lieu en 1980 et, cette année-là, le 13 Tamouz tombait un vendredi, ce qui signifiait que le Farbrenguen du Rabbi serait le jeudi soir.
Bien que le Rabbi estimât que la célébration de la Bar Mitsva devait se tenir aussi près que possible de la date effective de l’anniversaire, mes parents décidèrent qu’à cause du Farbrenguen, ils fêteraient ma Bar Mitsva le dimanche. Mon père avait écrit au Rabbi une lettre à ce propos, demandant s’il devait enclencher les préparatifs dans ce sens et avait terminé sa lettre avec ces mots : « Est-ce vraiment la bonne initiative ? ».
La réponse du Rabbi était écrite à la main sur ce même papier. Et le Rabbi avait ajouté : « Que tout ceci se déroule dans un moment bon et fructueux. Je le mentionnerai sur le Tsione (le tombeau du Rabbi précédent) ».
Mon père me tendit le papier en me disant que je pouvais le garder.
Le cœur battant, je le regardai de plus près. Je fus immédiatement frappé par le fait que le début et la fin de la lettre de mon père ressemblaient tellement à ce que j’avais moi-même écrit dans l’avion : « Mon fils Lévi Its’hak aura bientôt treize ans » et « Est-ce vraiment la bonne initiative ? ».
J’étais stupéfait. Pour moi, il était évident que la lettre que je tenais en main était exactement la réponse à la question que je venais de poser au Rabbi le jour-même ! J’étais absolument convaincu d’avoir reçu l’accord et la bénédiction du Rabbi pour continuer mes efforts en vue d’acheter ce bâtiment : certainement, tout se passerait de la meilleure manière possible.
Quand je rentrais chez moi après le Congrès, nous avons immédiatement entrepris des négociations avec les propriétaires et, grâce à la bénédiction du Rabbi, tout s’est déroulé sans problèmes. Nous avons pu acheter le bâtiment pour un très bon prix et entreprendre les travaux.
A ce jour, cela fait presque dix ans que nous sommes installés dans ce bâtiment et tous les doutes à propos de sa mauvaise location se sont avérés sans fondement. Comme la ville s’agrandit, notre Beth ‘Habad est tout à fait intégré dans le paysage urbain et son emplacement est vraiment idéal...

Rav Lévi Klein - Chassidisher Derher Traduit par Feiga Lubecki