Rambam 1 Chapitre

Notons que bon nombre de ces lois ne sont pas la halakha, c'est-à-dire la pratique observée dans les communautés juives. Elles ne sauraient donc en aucun cas être prises comme référence. Veuillez noter également que cette version est un premier essai qui fera l'objet de corrections ultérieures.

7 Mena'hem Av 5782 / 08.04.2022

Lois relatives au vol (guézel) et à l’objet perdu (avéda) : Chapitre Neuf

Après l’étude des lois régissant le vol d’un bien meuble, le cas du bien immeuble est maintenant abordé. A la différence d’un bien meuble, le bien immeuble est toujours présumé appartenir à son propriétaire et sa détention ne vaut pas titre. La vente du bien par le voleur est donc nulle. Toutefois, comme il sera expliqué, si le voleur, après avoir vendu illicitement un champ, le rachète au propriétaire initial, le champ revient à l’acheteur, non au voleur.
On conclura sur le cas de l’oppresseur (ochek) qui, après avoir volé un champ, contraint le propriétaire à le lui vendre.


1. Qui vole le bien immeuble d’un autre et le détériore, par exemple, [s’il s’agit d’un champ,] y creuse des fosses, des fossés ou des caves ou [encore] coupe les arbres, détruit les sources, ou [s’il s’agit d’une maison,] démolit la construction, est tenu de lui fournir une maison ou un champ qui soit comme auparavant au moment du vol ou de payer la dépréciation qu’il a causée.
Mais si le champ s’est détérioré tout seul, par exemple, s’il est inondé par un fleuve ou est brûlé par un feu descendu du ciel [la foudre], le voleur peut dire au propriétaire : « Voici ce qui t’appartient devant toi ». En effet, un bien immeuble reste en la possession de son propriétaire ; [par conséquent,] le voleur n’est pas tenu responsable de la détérioration, à moins qu’il [l’]ait détérioré de sa main, ce qui n’est pas le cas pour les biens meubles, comme nous l’avons expliqué [le voleur d’un bien meuble en a l’entière responsabilité, même en cas de force majeure].

2. Quand un homme vole un champ et que des oppresseurs [investis de] pouvoir par le roi le lui prennent, s’il s’agit d’un fléau [qui affecte tout] le pays, par exemple, si le roi a pris les champs ou les maisons de tous les habitants du pays, le voleur peut dire au propriétaire : « Voici ce qui t’appartient devant toi » [et n’est pas tenu de lui rembourser son champ].
Si le champ a été pris du fait du voleur , ce dernier est tenu de fournir au propriétaire un autre champ.

3. Si le roi contraint le voleur en lui disant : « Montre-nous tout ce que tu possèdes » et que le voleur montre ce champ qu’il a volé parmi ses champs, [dans ce cas,] si le roi le prend, le voleur est tenu de fournir au propriétaire du champ volé un autre champ semblable ou d’en donner la [contre-]valeur.

4. [Dans le cas du] vol d’un champ abîmé par le voleur de sa [propre] main, lorsque le propriétaire du champ perçoit la dépréciation causée par le voleur, il la perçoit sur les biens libres [du voleur, c'est-à-dire les biens lui appartenant, et non sur les biens aliénés], parce que cela est considéré comme un prêt verbal [non appuyé par un titre de créance ].
Mais si le voleur a vendu [ses biens] après avoir comparu en justice et avoir été condamné à payer, le propriétaire du champ peut percevoir [la dépréciation] sur les biens aliénés [sur lesquels il a un droit de suite].

5. Si un homme a volé un champ et a joui des fruits, il doit payer tous les fruits dont il a joui avec des biens « libres » [non aliénés].
S’il a volé [un champ] et l’a bonifié, on évalue [l’augmentation de valeur], et il est en position d’infériorité : si la plus-value est supérieure aux impenses, il perçoit seulement la plus-value du volé. Et si les impenses sont supérieures à la plus-value, il ne [perçoit] que les impenses [jusqu’au] montant de la bonification.

6. [Dans le cas d’]un champ volé et vendu, qui a été bonifié par l’acheteur, si la plus-value est supérieure aux impenses, l’acheteur perçoit les impenses du propriétaire du champ et le principal ainsi que le reste de la plus-value du voleur.

7. L’acheteur [qui se voit retirer le champ qu’il avait acheté à un voleur] perçoit le principal sur les biens aliénés [du voleur] et le reste de la plus-value sur ses biens « libres » [c'est-à-dire ses biens qui n’ont pas été vendus].
Si l’acheteur savait que le champ était volé lorsqu’il l’a acheté, il ne perçoit du voleur que le principal et perd le reste de la plus-value excédant [le montant des] impenses.
Si les impenses sont supérieures à l’augmentation de la valeur [du champ], que l’acheteur ait su ou non que le champ était volé, il n’a droit qu’aux impenses [jusqu’]au montant de la bonification ; il perçoit [cette somme] du propriétaire du champ, et le principal sur les biens aliénés du voleur.

8. Si un homme vole un champ et le vend, et que l’acheteur jouisse des fruits, on fait le compte de tous les fruits dont il a joui et il [les] paye au propriétaire du champ. [Puis,] il revient et perçoit [cette somme] sur les biens « libres » du voleur.
Si l’acheteur savait [au moment de l’achat] que le champ était volé, il n’a pas [droit au remboursement] des fruits ; il ne perçoit du voleur que le principal.

9. Celui qui vend un champ ne lui appartenant pas, sa vente n’est pas une vente [effective] et l’acheteur n’acquiert rien, comme nous l’avons expliqué [supra ch. 8 § 14].
[Toutefois,] si, après avoir vendu le champ, le voleur revient et l’achète à son propriétaire [initial], il est maintenu dans la main de celui qui l’a acheté au voleur.
Même si le voleur lui avait fait don du champ lorsqu’il était volé dans sa main, étant donné qu’il est revenu et l’a acheté [au propriétaire], il est maintenu en la possession du donataire. Car [on considère que] c’est pour cela que le voleur a pris la peine de l’acheter, afin de maintenir sa crédibilité.

10. C’est pourquoi, [l’application de ce principe dépend des circonstances]. [Soit le cas suivant :] un acheteur poursuit un voleur [en justice] pour lui avoir vendu un champ ne lui appartenant pas ; le voleur est condamné [par le tribunal] à payer [mais n’obéit pas]. [Quatre-vingt-dix jours après le jugement,] le tribunal commence la publication [de la mise en vente aux enchères] des biens du voleur afin de percevoir sur ceux-ci [ce qu’il doit à] l’acheteur. [Toutefois,] après que le tribunal a commencé la publication [de la mise en vente aux enchères], le voleur achète [le champ volé] au propriétaire.
[Dans ce cas,] le champ n’est pas maintenu dans la main de l’acheteur. En effet, dès lors que le tribunal a publié [la mise en vente] des biens du voleur, il appert qu’il n’est pas digne de foi ; il ne l’a [donc] pas acheté au propriétaire en vue de le maintenir en la possession de l’acheteur.

11. Si le voleur achète le champ à son propriétaire après l’avoir vendu [à un premier acheteur] alors qu’il était volé et le vend de nouveau à un autre, ou en fait don ou le lègue [à l’un de ses enfants], il dévoile [par cela] son intention, [à savoir] qu’il ne désire pas maintenir le champ en la possession du [premier acheteur] qui le lui a acheté lorsqu’il était volé.
De même, si un voleur, [après avoir vendu le champ qu’il a volé, le] reçoit en héritage , il n’est pas maintenu en la possession de celui qui le lui a acheté.

12. Quand, [après avoir volé un champ et l’avoir vendu,] un voleur perçoit [le recouvrement de] sa créance sur ce champ, [la règle suivante est appliquée :] si le volé possède un autre champ et que le voleur lui ait dit : « Je perçois ce [champ] pour [recouvrer] ma créance », [on en conclut qu’]il a l’intention de le maintenir en la possession de l’acheteur.
Si le volé n’a pas d’autre champ que celui-ci, [on suppose que] le voleur a [seulement] l’intention de recouvrer sa créance [et non de maintenir le champ en la possession de l’acheteur].

13. Si le propriétaire fait don du champ volé au voleur, l’acheteur [qui l’avait acheté alors qu’il était volé] l’acquiert . En effet, si le voleur ne s’était pas donné de la peine pour [trouver grâce auprès du] propriétaire, il ne le lui en aurait pas fait don ; [on suppose que] c’est pour cela qu’il s’est donné de la peine, afin de l’acquérir légalement, de maintenir sa crédibilité et pour que le champ reste en la possession de l’acheteur.

14. [Soit le cas d’]un homme qui vole un champ puis, après l’avoir volé et avoir été reconnu comme voleur de ce champ, revient et l’achète au propriétaire initial. Le volé prétend : « J’étais contraint au moment où je le lui ai vendu ; je l’ai vendu contre mon gré du fait que c’est un voleur [dangereux, par crainte de représailles] ».
[Dans ce cas,] le voleur ne l’acquiert pas, bien qu’il ait des témoins [attestant] qu’il l’a acheté en leur présence ; le champ revient au propriétaire [initial] et la somme d’argent versée par le voleur lui est restituée.

15. Dans quel cas dit-on [que cette somme lui est rendue] ? Lorsque les témoins attestent qu’il a compté les pièces d’argent en leur présence.
Mais s’ils témoignent que le propriétaire du champ [l’]a vendu au voleur, ayant admis au voleur en leur présence que le voleur lui a donné telle [somme] d’argent, tandis que le volé prétend que le voleur ne lui a pas donné l’argent [et explique] avoir admis [le paiement du voleur en présence de témoins] par crainte [de représailles de sa part,] le voleur n’a [droit à] rien. Plutôt, on lui retire le champ sans [lui donner d’]argent, parce qu’[on admet que] le propriétaire n’a reconnu [avoir reçu le paiement] que par crainte, comme il l’a affirmé. [Aucun crédit n’est accordé aux propos du voleur], dès lors qu’il a été reconnu comme voleur de ce champ.

16. Le propriétaire d’un champ [agissant sous la contrainte] n’a pas besoin de faire une déclaration [informant les témoins de la situation] concernant cette vente [pour l’annuler] . [En effet,] étant donné que cet [homme] a été reconnu comme voleur de ce champ, la preuve qu’il produit n’est pas une preuve [valide] et il n’est pas nécessaire [au propriétaire] de faire une déclaration.
La loi [qui régit] le brigand n’est pas la même que celle [relative au] malfrat qui contraint autrui et le suspend [ou lui cause d’autres souffrances] jusqu’à ce qu’il lui vende [un bien]. En effet, celui qui contraint [autrui à la vente] ne désire pas voler [le bien sans le payer] et n’a encore rien volé. C’est pourquoi, [dans ce cas,] si le vendeur contraint n’a pas fait de déclaration [préalable informant les témoins de sa situation avant la vente], la vente est effective.