Se développer autrement

C'est à une ancienne idée que nous vous proposons de réfléchir, ou plutôt à une idée à la fois ancienne et nouvelle: la Chemita. Certes, l'actualité l'impose puisque l'année que nous vivons, qui porte le numéro 5775, est justement une année de Chemita. Mais posons tout d'abord les repères.
 La Chemita est cette année particulière désignée par la Torah, qui revient tous les sept ans et qui impose l'arrêt de tout travail agricole sur la Terre d'Israël. C'est précisément ce dernier point qui paraît surprenant. Si cela ne concerne que cette région particulière du monde, si proche de notre cœur mais où nous ne sommes pas physiquement présents — au moins pour le moment — pourquoi s'attacher à la description de cette année à part, au-delà du pur intérêt de la connaissance ?

 C'est que c'est sans doute là une année précieuse pour chacun, où qu'il vive, car elle remet les choses en place. L'homme moderne a conquis, peu à peu, le domaine que Dieu lui avait confié. Il a d'abord découvert puis soumis la planète. Il l'a aménagée comme il l'entendait et est ainsi parvenu à développer les moyens d'une prospérité dont ses ancêtres n'avaient pas même rêvé. Poussé toujours plus loin, plus haut, par les avancées de sa technologie, il a entrepris la conquête de l'espace et plus aucune barrière ne lui semble apte à le retenir.
La conscience, la morale, le simple équilibre à préserver deviennent alors les témoins impuissants d'une course sans trêve vers un avenir incertain et surtout indéterminé. Pourrait-il en être autrement quand cette course s'auto justifie par son existence seule ?

 Voici que vient la Chemita et elle rappelle que la terre appartient à D.ieu et que l'homme n'en est que le dépositaire. L'homme a ainsi œuvré pendant six ans mais, quand arrive la septième année, il prend conscience qu'il doit se retirer de son champ. La terre se repose... et lui aussi. Le monde matériel et la puissance de l'homme cessent alors d'être les seuls déterminants. Et, par ce retrait, tout reprend sens : le travail a donc un but et la vie n'est pas que la poursuite sans fin d'un but que nul ne sait définir.
Le monde trouve enfin un équilibre qui résonne en harmonie avec ceux qui y vivent. L'homme n'est plus jamais le destructeur de ce qu'il touche mais le bâtisseur de sa demeure.
 Cela, dit-on, s'appelle aujourd'hui " écologie" ou encore "développement durable".

 Haim Nisenbaum

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