La Paracha de cette semaine est habituellement lue le Chabbat qui suit Youd Teth Kislev (célébré cette année mardi 1er décembre), date qui commémore la libération de prison de Rabbi Chnéor Zalman de Lyadi des prisons de la Russie tsariste. Connu sous le surnom d’Admour Hazaken, il fut le fondateur de l’approche du ‘hassidisme ‘Habad. Sa libération est considérée comme marquant le Roch Hachana du ‘hassidisme parce qu’à partir de ce jour, l’initiative de répandre les sources de la ‘Hassidout prit un nouvel essor.

En effet, un jour, le Baal Chem Tov, fondateur du ‘hassidisme dans son ensemble, s’éleva dans les mondes spirituels. Il y rencontra l’âme du Machia’h et lui demanda : «Quand viendras-tu ?». Le Machia’h répondit : «Quand les sources de ton enseignement se répandront à l’extérieur».

La libération de Rabbi Chnéor Zalman est considérée comme un tournant dans ce processus parce que, grâce à ses enseignements, le ‘hassidisme fut rendu intellectuellement compréhensible et, par là-même, accessible à chaque Juif.

Avant que ne se révèle le ‘hassidisme, la masse du Peuple Juif commençait à perdre contact avec son héritage spirituel. Il est sûr qu’il restait des Juifs fiers, mais la prière et l’étude ne présentaient pas pour eux le même intérêt qu’antan. Une certaine froideur s’était insinuée dans la pratique juive et une distance s’était installée entre certains groupes de la communauté.

Le Baal Chem Tov alluma l’étincelle du feu Divin vibrant dans le cœur de chaque Juif. Car chacun de nous possède une âme, réelle partie de D.ieu, et le Baal Chem Tov montra comment accéder à ce potentiel spirituel et insuffla ainsi de la vie et de la vitalité au Judaïsme.

Rabbi Chnéor Zalman nous donna les outils intellectuels pour comprendre et communiquer la teneur de ces principes. C’est ainsi qu’ils furent mis à la portée de tous les Juifs, y compris de ceux dont le cheminement vers le sentiment spirituel commence avec l’intellect.

Vayéchev

Sur le verset qui ouvre la Paracha de cette semaine : «Et Yaacov résida dans la terre du séjour de son père», nos Sages commentent : Yaacov désirait vivre dans la prospérité. D.ieu le constata et s’exclama : «Ce qui est prévu pour le Juste dans le Monde Futur n’est-il pas suffisant ?». Et tout de suite après, Yaacov fut confronté à l’épreuve de la disparition de Yossef.

Ce passage est difficile à comprendre. Nous aspirons tous à vivre dans la prospérité. Pourquoi cela serait-il refusé au Juste ? Pourquoi recevoir une part du Monde Futur empêcherait-il de vivre une existence confortable dans ce monde ci ?

Pour répondre à ces questions, il nous faut comprendre le processus d’interrelation entre l’existence spirituelle et l’existence matérielle. Chaque entité matérielle possède une force spirituelle qui permet son existence. Sans cette énergie spirituelle, elle ne pourrait tout simplement pas être.

Néanmoins, un chiasme sépare le matériel du spirituel. Bien qu’intellectuellement, nous puissions comprendre qu’existe cette force spirituelle, nous ne pouvons voir, entendre ou sentir cette force vitale par nos sens physiques.

Un Juste tel que Yaacov veut mener une vie d’intégrité, voir le spirituel reflété dans le matériel. Il ne veut pas une simple prospérité matérielle. Mais il désire que ce lien avec D.ieu s’exprime dans toutes les dimensions de sa vie, y compris dans le royaume de la matérialité. Il cherche à ce que le matériel et le spirituel fonctionnent en harmonie, comme le corps et l’âme.

Après ses luttes et ses confrontations avec Lavan et Essav, Yaacov pensait avoir atteint un niveau de conscience où une telle connexion était possible. Sa confiance et sa foi en D.ieu avaient été mises à l’épreuve dans des tribulations variées et il avait appris à voir la main de D.ieu dans toutes les expériences qu’il avait traversées.

Malheureusement, une grande partie de sa vie avait été empreinte de beaucoup d’adversité. Quand on est confronté à la difficulté, il est plus facile de comprendre que toutes les épreuves viennent de D.ieu. En effet, face aux défis de la vie, on est obligé de marquer un temps d’arrêt et de réfléchir. Et quand un Juste tel que Yaacov réfléchit, il prend conscience de la main de D.ieu.

Quand, par contre, les choses vont bien, nous avons une tendance naturelle à en profiter pour ce qu’elles sont et à ne penser à rien d’autre. Il est plus difficile de ressentir le spirituel quand l’on n’y est pas obligé. Yaacov pensait qu’il avait dépassé ce niveau. Il sentait qu’il était désormais prêt à apprécier le spirituel, tout en jouissant de succès et de bien-être.

Mais D.ieu pensait différemment. C’est pourquoi Il lui envoya une autre épreuve, peut-être la plus difficile, car son amour pour Yossef était bien grand. Il lui rappelait sa mère, Ra’hel, qui avait disparu.

Quel but avait le fait de le faire passer par cette angoisse ? Lui apporter la prospérité qu’il désirait. Car comme nous le verrons en dernier ressort, quand Yossef serait établi comme vice-roi d’Egypte, le Pharaon enverrait chercher Yaacov et il vivrait dix-sept années dans le luxe, enseignant la Torah à ses fils et ses petits-fils. Mais pour que Yaacov puisse parvenir à cette harmonie entre le matériel et le spirituel, il avait besoin d’une dernière leçon.

Les perspectives

L’expression ultime de la fusion entre la matériel et le spirituel surviendra avec l’Ere de Machia’h. Car alors, «il n’y aura ni famine, ni guerre, ni envie, ni compétition car les bonnes choses couleront en abondance et tous les plaisirs seront librement accessibles comme la poussière ».

Cependant, une harmonie absolue régnera entre le matériel et le spirituel puisque «l’occupation du monde entier sera exclusivement consacrée à connaître D.ieu» et «la terre sera remplie de la connaissance de D.ieu comme les eaux couvrent le lit de l’océan».

L’expérience de Yaacov sert de modèle à ses descendants en tant qu’entité. Ses épreuves et ses tribulations lui permirent d’apprécier la main de D.ieu dans chaque détail de sa vie et la dimension spirituelle de la prospérité qui serait plus tard la sienne. Par le même cheminement, les épreuves qu’a subies notre Peuple dans l’exil ont aiguisé notre perception et nous ont préparés à l’appréciation directe de la Divinité qui caractérisera l’Ere de Machia’h.