Le verset Terouma 25, 2 dit : «Parle aux enfants d'Israël et qu'ils prennent pour Moi un prélèvement(1)» et l'on peut s'interroger, à ce propos. Pourquoi cette Paracha est-elle introduite par la nécessité de ce prélèvement, alors qu'elle ne précise que par la suite qu'elle servira à édifier le Sanctuaire(2) ?

N'aurait-il pas été plus logique de commencer par l'Injonction d'édifier un Sanctuaire, ainsi qu'il est dit : «Ils Me feront un Sanctuaire et Je résiderai parmi eux»(3), puis, uniquement après cela, d'expliquer de quelle manière devaient être obtenus les matériaux nécessaires à cette construction ?

On peut penser qu'il en est ainsi parce que la collecte de ces prélèvements, auprès des enfants d'Israël, exprime l'essence même de ce qu'est le Sanctuaire. Celui-ci était, en effet, le lieu de Résidence de la Présence divine, ainsi qu'il est dit : «Je résiderai parmi eux».

Certes, la Présence divine s'était déjà révélée dans le monde au préalable, lors du don de la Torah, ainsi qu'il est écrit : «L'Eternel descendit sur le mont Sinaï(4). Mais, cette révélation ne fut que passagère(5), alors que, dans le Sanctuaire, elle devint fixe.

La raison de ce fait nouveau introduit par le Sanctuaire, la révélation de la Présence divine d'une manière fixe, est précisément ce prélèvement qui fut collecté auprès des enfants d'Israël, pour son édification(6).

La révélation de D.ieu, lors du don de la Torah, fut à Son initiative, sans que le monde soit prêt pour cela. Elle fut, en quelque sorte, imposée au monde, si l'on peut se permettre cette expression. Elle ne le pénétra donc pas profondément(7) et, de ce fait, elle ne pouvait être qu'éphémère.

L'édification du Sanctuaire, à l'inverse, fut possible grâce aux prélèvements qui furent apportés par les enfants d'Israël. Chacun d'entre eux préleva alors une partie de ses biens matériels afin d'édifier un Sanctuaire pour le Saint béni soit-II. Grâce à ces prélèvements, le monde fut ainsi rehaussé et affiné(8). C'est de cette façon qu'il se prépara à recevoir la révélation de la Présence divine d'une manière fixe.

C'est pour cette raison que la Paracha de l'édification du Sanctuaire commence par l'Injonction : «qu'ils prennent pour Moi un prélèvement», qui est le fondement de cette construction d'un endroit fixe pour la révélation de la Présence divine(9).

De ce fait, la Paracha qui traite de l'édification du Sanctuaire s'appelle Terouma, prélèvement(10), non pas Michkan, le Sanctuaire, ni Mikdach, le Temple, car l'aspect essentiel de ce Sanctuaire est le prélèvement(11) personnel, permettant que la Présence divine s'y révèle, ainsi qu'il est dit : «Je résiderai parmi vous(12)».

(Discours du Rabbi, Likouteï Sithot, tome 21, page 146)

Notes :
(1) Quinze ou dix-sept matériaux, selon les deux avis qui sont donnés à ce sujet, devant être utilisés pour l'édification du Sanctuaire.
(2) S'agissant d'un appel aux dons, cette précision aurait pu être plus incitative.
(3) Terouma 25, 8.
(4) Yethro 19, 20.
(5) Limitée au temps de la révélation divine. Ainsi, le verset Yethro 19, 13 dit : «alors que la corne sonnait, ils montèrent sur la montagne». Après le retrait de la Présence divine, comme l'indique Rachi, à cette même référence, il fut permis de monter sur la montagne, car la révélation de la Présence divine fut uniquement passagère.
(6) En d'autres termes, c'est la contribution des hommes, par leurs forces propres, qui conféra un caractère de fixité à ce qui, lors du don de la Torah, n'avait été qu'éphémère.
(7) En l'absence de tout effort, de la part de l'homme.
 (8) Car, il avait apporté sa propre contribution, sans se limiter à recevoir la révélation céleste, venue d'en haut.
(9) Ceci nous permettra de comprendre une autre différence qui peut être constatée entre ces deux révélations. Celle du don de la Torah eut un effet identique sur toutes les parties du monde. Comme le disent nos Sages, dont la mémoire est une bénédiction, dans le Midrash Chemot Rabba, à la fin du chapitre 29 : «aucun oiseau n'a gazouillé... aucun boeuf n'a mugit... aucune créature n'a parlé». Les animaux, les végétaux, les minéraux en subirent l'influence, car cette révélation fut à l'origine de D.ieu et elle ne dépendait pas d'une préparation du monde. Elle ne tenait pas compte des différences entre les diverses créatures. Lors du prélèvement pour le Sanctuaire, en revanche, la Torah souligne que tous n'étaient pas identiques, puisqu'il est dit : «tout homme dont le coeur sera généreux». Chacun apportait donc sa contribution en fonction de la générosité de son coeur, plus ou moins importante. En l'occurrence, ce prélèvement émanait des créatures elles-mêmes et il dépendait donc du niveau personnel de chacun.
(10) Conditionnée par l'effort des hommes.
(11) Il est de coutume que le nom d'une Paracha soit constitué de ses premiers mots. Pour autant, ce nom exprime bien l'ensemble de son contenu, de la manière la plus globale, comme cela est expliqué à différentes références.
(12) Par l'intermédiaire de ce Sanctuaire.