Dans la bénédiction qu'il accorda à la tribu d'Acher, notre père Yaakov dit : «le pain d'Acher est huileux». Rachi explique le sens de ce verset(1) et il indique qu'il y aura beaucoup d'huile dans la partie de la Terre sainte qui sera attribuée à la tribu d'Acher(2). En outre, Moché, notre maître, donna lui-même une bénédiction similaire(3) à la tribu d'Acher : «il trempe son pied dans l'huile».

La Guemara explique que l'huile fait allusion à l'attribut de sagesse, 'Ho'hma, qui est l'aspect le plus élevé de la personnalité humaine(4). A l'inverse, le pied est la partie la plus basse du corps de l'homme(5). Ainsi, le verset : «il trempe son pied dans l'huile» signifie que le pied, partie la plus basse du corps, se servira de l'huile, qui en est la partie la plus haute(6).

On retrouve la même idée également à propos du Machia'h. Un verset du livre de Ze'harya affirme, en effet, que : «ce jour(7), ses pieds se tiendront sur le mont des oliviers». Car, l'huile est produite avec des olives et le mont des oliviers est le lieu sur lequel poussent les olives. Le Machia'h possèdera donc une si grande élévation que ses pieds, la partie la plus basse de son corps, se trouveront au-dessus du mont des oliviers et ils seront, de la sorte, plus hauts que la source de l'huile(8).

Tout ce qui vient d'être dit permet d'établir que le pied, partie la plus basse du corps, n'en possède pas moins une immense élévation, dont on ne trouve pas l'équivalent, y compris dans l'huile, faisant allusion à la sagesse, 'Ho'hma. C'est précisément du fait de cette qualité que le pied peut se servir de l'huile.

Pour bien comprendre la supériorité du pied, par rapport à l'huile, il convient de définir, au préalable, la symbolique de l'huile et du pied, dans le service de D.ieu.

Dans le service de D.ieu, l'huile fait allusion à l'étude de la Torah et à la pratique des Mitsvot dans le plaisir et en en possédant une bonne compréhension(9). Tout comme l'huile donne un bon goût à l'aliment, la compréhension et le plaisir apportent un «goût» et un enthousiasme à l'étude de la Torah et à la pratique des Mitsvot.

Le pied, à l'inverse, symbolise un service de D.ieu empreint de soumission, sans enthousiasme. Car, le pied ne comprend pas et il ne ressent pas. Or, c'est précisément ce service de D.ieu basé sur la soumission qui possède deux qualités dont est dépourvue la pratique des Mitsvot dans le plaisir. C'est pour cette raison que l'huile doit servir le pied.

La première de ces deux qualités est la suivante. L'intellect et la compréhension de l'homme sont limités, alors que D.ieu est infini(10). Il est donc impossible de percevoir rationnellement le Créateur. Seule la soumission totale à D.ieu permet à l'homme de révéler pleinement Sa Présence(11).

A ceci s'ajoute une seconde qualité. Lorsque l'on sert D.ieu uniquement selon une approche rationnelle, on peut faire fausse route(12). Seul un service basé sur une soumission totale permet d'avoir la certitude que l'on ne s'écartera pas du droit chemin(13).

Telle est donc la signification de cette bénédiction reçue par la tribu d'Acher. Même si cette tribu possédait beaucoup d'huile, beaucoup de sagesse, elle considérait, néanmoins que celle-ci était accessoire au pied(14). C'est ainsi que tous les membres de cette tribu pouvaient baser leur service de D.ieu sur la soumission.

(Discours du Rabbi, Likouteï Si'hot, tome 1, page 102)

 Notes :
(1) En quoi est-il une bénédiction ?
(2) Donc beaucoup d'oliviers, puisqu'il s'agit, en l'occurrence, d'huile d'olive.
(3) Avant de quitter ce monde, dans la Parchat Ve Zot Ha Bera'ha.
(4) En effet, `Ho'hma est comparée à un éclair qui transperce l'obscurité. C'est l'étincelle du savoir, qui est profondément cachée en la phase préalable d'incompréhension, au même titre que l'huile est cachée au fin fond de l'olive.
(5) Bien plus, sa partie inférieure est le talon, appelé : «l'ange de la mort se trouvant en l'homme».
(6) Ce qui veut dire que l'élément le plus haut est au service de l'élément le plus bas et il faut donc comprendre comment il peut en être ainsi.
(7) Lors de la délivrance.
(8) On retrouve donc ici la même idée, selon laquelle l'huile est au service du pied.
(9) L'huile enfouie dans l'olive correspond, comme on l'a vu, à l'attribut de ‘Ho'hma, à l'origine de la compréhension. En outre, l'huile donne un bon goût aux aliments et, en ce sens, elle évoque le plaisir. Le service de D.ieu, à la façon de l'huile, suppose donc la compréhension de ce que l'on fait et que l'on en éprouve du plaisir.
(10) C'est à ce propos que les Tikouneï Zohar disent : «Aucune pensée ne peut Te saisir».
(11) Car, la soumission transcende toutes les limites et elle permet à l'homme de faire totalement abstraction de sa propre personne.
(12) A cause des limites de l'intellect et de tout ce qu'il ne peut pas saisir.
(13) Il est clair que celui qui est soumis se conforme strictement à la Volonté de D.ieu.
(14) Que la compréhension devait passer après la soumission.