Les patriarches dans notre vie

« Mon nom sera perpétué par eux et le nom de mes pères, Avraham et Ist’hak » (Bénédiction de Yaacov aux enfants de Yossef. Beréchit 48 :16)

Le Peuple juif a trois « pères » : Avraham, Its’hak et Yaacov, parce qu’il existe trois modèles de perfection qui caractérisent notre mission dans la vie. Chacun de ces trois patriarches sert de précédent qui nous instruit et nous donne la force d’atteindre son mode personnel de perfection.

Avraham : la croissance

La grandeur d’Avraham réside dans le fait qu’il construisit sa vie, en s’investissant, étape par étape, partant de commencements déficients pour parvenir à un statut de grande élévation.

Maimonide décrit la vie d’Avraham, le premier Juif né dans une société dépravée et païenne : « Il n’avait ni maître ni de guide pour l’instruire mais il était submergé dans la folie des idolâtres d’Our Casdim. Son père, sa mère et la société toute entière adoraient des idoles et il les servait avec eux. Mais son cœur était en quête et en contemplation, jusqu’à ce que, en sondant sa propre sagesse, il comprit la vérité et sut qu’il y avait un D.ieu unique. Il arriva à réaliser que le monde entier était dans l’erreur… ». Courageusement, Avraham prit en charge le monde entier et commença à enseigner à ses prochains la vérité d’un D.ieu unique, omnipotent et infini et la morale et le code de valeurs que cela impliquait.

(L’un des sens du mot Ivri, « l’Hébreu » (littéralement : « de l’autre côté ») attaché au nom d’Avraham (Beréchit 14 :13) signifie que « le monde entier était d’un côté et qu’Avraham était de l’autre »)

Its’hak : la pureté

La vie de Its’hak, le premier à être né Juif contraste avec l’histoire spirituelle d’Avraham qui l’avait hissé de la pauvreté à la richesse.

Its’hak ne représente pas une perfection atteinte après des décades de lutte avec l’imperfection mais apparaît comme une ligne droite de pureté spirituelle, depuis sa naissance jusqu’à la fin de sa vie. Alors qu’Avraham fut circoncis à l’âge de quatre-vingt-dix-neuf ans, atteignant enfin, à cet âge avancé de sa vie, l’état de « complétude », c’est au huitième jour de sa vie que Its’hak le fut.

Quand Its’hak envisagea de s’aventurer temporairement en dehors de la Terre d’Israël, D.ieu lui dit : « Ne descends pas en Égypte. Réside dans la terre que Je t’ai désignée ». Nos Sages expliquent que D.ieu signifiait à Its’hak : « Tu es une « offrande parfaite » et les terres situées en dehors de la Terre Sainte ne sont pas adéquates pour toi ».

Its’hak n’affronta rien de négatif. Il voyait tout dans sa lumière la plus profonde, n’établissant de relation qu’avec le bien quintessentiel. Il est caractéristique qu’il ne vit que le bien dans son fils corrompu, Essav. Le mal n’appartenait tout simplement pas à son monde.

Yaacov : la vérité

L’ultime marque de perfection, cependant, n’est pas le fait d’éviter la faute mais de réussir à gérer toutes les situations que nous présente l’existence, y compris celles qui sont déficientes et négatives.

Lisons les mots de Rabbi Chalom Dov Ber de Loubavitch :

« Un individu complet et parfait est celui qui, en pratique, rejette le mal et fait le bien avec une totale perfection, qui n’est sujet ni au changement ni à la fluctuation. Les conditions de l’époque et du lieu n’ont aucune incidence sur lui, grâce à la force et l’intégrité de ses convictions… Ces facteurs ne constituent pas même un ‘test’ pour lui, parce qu’il ne conçoit aucune autre approche… »

Le troisième patriarche, Yaacov, représentait cette constante inébranlable dans sa vie. Yaacov était né dans la sainteté et avait passé la première partie de sa vie comme « un homme complet, celui qui réside dans les tentes de l’étude ». A contrario de Its’hak, cependant, Yaacov allait s’aventurer au-delà des frontières du parfait et du saint. Au cours de sa vie, Yaacov dut affronter Essav, le meurtrier, Lavan, le fourbe, et les sociétés idolâtres de ‘Haran et de l’Égypte. Et pourtant, il en émergea complet et indemne. Où qu’il se rende, il surmontait tous les défis que lui lançait le monde. Il exploitait le bien dans les circonstances les plus négatives, sans jamais compromettre l’intégrité de sa propre pureté.

C’est la raison pour laquelle Yaacov est toujours identifié à l’attribut de « vérité ».

La vérité implique la consistance. Quelque chose est vrai quand c’est une réalité objective, quand sa validité ne se trouve pas affectée par des circonstances ou des conditions extérieures. L’héritage de Yaacov est une perfection qui ne nécessite pas d’être enfermée dans des frontières qui l’isolent pour qu’elle reste intègre mais qui transcende et transforme les imperfections qu’elle rencontre.

Trois défis

Les différentes approches caractérisées par la vie d’Avraham, de Its’hak et de Yaacov sont toutes les trois présentes dans notre vie de Juif.

Chacun d’entre nous est appelé à construire à partir de débuts chaotiques et de se diriger vers un moi meilleur. Nous expérimentons tous la nécessité de sauvegarder la pureté intérieure que nous possédons. Enfin chacun affronte le défi du monde en général, pas seulement pour préserver notre propre intégrité morale et spirituelle mais aussi pour la répandre dans notre environnement.