Lettre n° 1767

Par la grâce de D.ieu,
10 Mena’hem Av 5712,
Brooklyn,

Aux dirigeants de Kfar ‘Habad,
que D.ieu vous accorde longue vie,

Je vous salue et vous bénis,

A) J’ai bien reçu vos lettres des 3, 4, 6 et 24 Tamouz, de la veille du Chabbat Pin’has et du 5 Mena’hem Av, avec ce qui y était joint.

B) Je constate avec beaucoup de peine que l’on se refuse à écouter et que le désordre règne donc au Kfar. Je ne sais pas exactement quelle est la solution. De fait, il semble qu’il n’y ait rien d’autre à faire qu’à prendre conscience de ce qui se passe. Or, il est expliqué, par ailleurs, qu’une prise de conscience est, en fait, une compréhension profonde. Il faut, en l’occurrence, se pénétrer de l’idée que le Kfar porte le nom de ‘Habad.

Lorsqu’il a été fondé, le Kfar a reçu la bénédiction de mon beau-père, le Rabbi et vous savez ce qu’il a dit, à ce sujet, alors qu’il vivait encore dans ce monde. Il a précisé qu’il en prenait personnellement la direction. Vous devez donc considérer tout ce qui concerne le Kfar comme directement lié au désir, à la volonté et au nom de mon beau-père, le Rabbi et non comme une affaire personnelle.

Ce qui vient d’être dit a deux conséquences. Du côté droit(1), tout ceci le concerne et il est le chef de la génération, lui accordant toutes les bénédictions et toutes les révélations dont elle a besoin, non seulement de manière spirituelle, mais aussi dans le domaine matériel. Car, tel est le rôle du chef de la génération, qui lui révèle toutes les bénédictions, sans aucune exception. C’est la raison pour laquelle, dans la génération du désert(2), la distribution de viande devait également se faire par l’intermédiaire de Moché, qui dit pourtant : "D’où ai-je de la viande(3)?" et la ‘Hassidout explique le sens de cette expression.

Si l’on adopte les canaux qui conviennent à son désir et sa volonté, on obtient ses bénédictions efficaces, c’est-à-dire surnaturelles et l’on en fait usage de manière saine et joyeuse.

Du second côté(4), si l’on adopte un mauvais comportement, on renforce le domaine du mal, non seulement dans ses quatre coudées personnelles, mais aussi dans celles du chef de la génération. Tout cela concerne donc la communauté, de manière encore plus affirmée que par le fait de la responsabilité collective d’Israël.

Il est sans doute inutile d’en dire plus, tant cela est évident, surtout pour ceux qui ont étudié la ‘Hassidout et qui ont le sens de l’attachement(5).

C) Il y a quelques temps, je vous ai déjà écrit pour vous souligner l’immense importance de mener une campagne afin d’augmenter le nombre des habitants du Kfar. Même si vous êtes, pour l’heure, à l’étroit, vous m’avez écrit, dernièrement, pour m’annoncer que vous ajoutiez des maisons. Il faut donc commencer au plus vite cette campagne.

D) Lorsque monsieur Chazar m’a rendu visite, il m’a présenté comme une évidence qu’un accord avait déjà été donné pour que vous restiez dans l’endroit où vous êtes localisés maintenant(6) et que vous seriez aidés, de toutes les manières possibles. Je ne comprends donc pas pourquoi vous formulez cette question, dans votre lettre, comme si le doute subsistait encore.

E) J’ai écrit, il y a quelques temps, à l’association des ‘Hassidim ‘Habad(7) pour souligner la grande importance,
1. de l’école professionnelle,
2. de l’Alya agricole des jeunes.

L’école professionnelle dépend essentiellement de la Yechiva de Lod mais, pour différentes raisons, elle se trouvera au Kfar et, d’une certaine façon, vous êtes donc également concernés. Bien plus, il y a bon espoir que vous en tiriez un moyen de subsistance, au même titre que de la maison agricole, pour plusieurs familles.

Je suis donc surpris et me demande pour quelle raison les négociations, à ce propos, sont menées avec tant de nonchalance. Puisse D.ieu faire que vous n’interveniez pas trop tard et que vous fassiez plein usage de l’opportunité qui s’offre à vous.

F) Je vous ai écrit à propos de la subvention que vous avez reçue pour la septième année(8). Ma surprise ne portait pas sur cette subvention proprement dite, dont le montant est, du reste, particulièrement modeste, mais plutôt sur le fait que j’avais obtenu cette information de manière indirecte et fortuitement, c’est-à-dire par un effet de la divine Providence.

Or, je vous ai maintes fois souligné que, pour le bon fonctionnement, il faut que les informations soient transmises ici le plus rapidement possible. Très souvent, il en résulte, ici même, une conséquence directe. Je ne demande pas que l’on me marque de l’honneur, ce qu’à D.ieu ne plaise. Je suis simplement étonné que tout cela n’ait pas encore été mis en ordre.

G) Je suis peiné que le Kfar et, de façon générale, nos institutions en Terre Sainte se comportent tous comme des entités indépendantes. Chaque directeur d’une institution considère toutes les autres comme des concurrentes et des opposantes. Certes, il doit, avant tout, s’intéresser à sa propre institution et c’est là sa mission essentielle. Pour autant, il doit savoir également que le développement d’une institution ‘Habad, en Terre Sainte, quelle qu’elle soit, participera presque à coup sûr à l’essor de la sienne.

Bien plus, parfois il faut savoir renoncer à son propre bien au profit d’une autre institution et la perte qui en résultera ne sera que passagère. Il est certain qu’avec le temps, celui qui l’a subi y trouvera son propre bien.

Je ne fais pas allusion ici à ce qui transcende la logique. La rationalité des hommes établit qu’il doit en être ainsi. Du reste, les non-Juifs procèdent de la même manière. Il est possible et parfois même probable que l’institution de laquelle on attend un effort puisse être suspectée d’un manque d’objectivité. En tout état de cause, il doit être possible, à chaque fois, de découvrir des ‘Hassidim neutres dans ce domaine et de leur soumettre la question qui est posée par les deux partis.

Ainsi, comme le dit l’Admour Haémtsahi, lorsque l’on se confie à quelqu’un d’autre, on ligue deux âmes divines(9) contre une seule âme animale(10). J’ai bon espoir qu’au moins à l’avenir, on réparera tout cela, dans le Kfar comme dans les autres institutions.

La raison pour laquelle je souligne tout cela est la suivante :

H) Il y a quelques temps, je vous ai écrit, en constatant que l’école de filles du Kfar ne se développait pas. Je comprends l’indifférence des ‘Hassidim envers cette question, car ils n’ont pas été habitué à accorder de l’importance à l’éducation des filles, lorsque celles-ci sont déjà formées.

Mais, nous devons nous en tenir à l’enseignement de mon beau-père, le Rabbi qui, déjà à Riga(11), apportait la plus grande importance à l’éducation des filles. Dès 5700(12), il y a accordé une attention accrue, y a investi son ardeur et ses forces cachées, bien au delà de ce que l’on sait.

Il y a là un enseignement pour nous, relatif aux besoins du moment, surtout en Terre Sainte, ces tous derniers temps. L’éducation des filles est, dernièrement, devenue primordiale. Chacun d’entre nous doit donc modifier ou, tout au moins, orienter son habitude, dans ce domaine, puis décider pour lui-même ce qu’il doit faire, qu’il comprenne tout cela ou non.

En effet, mon beau-père, le Rabbi a demandé qu’il en soit ainsi. La logique établit donc la nécessité de tout cela et l’action concrète est primordiale. J’apprends que le plus grand obstacle au développement d’une école de filles, dans le Kfar, est le manque d’un endroit convenable. Je propose donc et je demande encore et encore que l’on choisisse l’endroit qui convient le mieux pour cette école, afin que celui-ci soit connu avant la rentrée des classes. Il serait bon également d’avoir un jardin d’enfants plus grand, pour les garçons et pour les filles.

Avec ma bénédiction de réussite matérielle et spirituelle, pour chacun d’entre vous,

Notes

(1) Celui de la bonté.
(2) Celle qui quitta l’Egypte.
(3) Pour tout ce peuple.
(4) Celui de gauche, de la sévérité.
(5) Au Rabbi.
(6) Voir, à ce propos, la lettre n°1566.
(7) Voir, à ce propos, les lettres n°1536 et 1649.
(8) Le Chabbat de la terre, en l’occurrence 5712, année au cours de laquelle les travaux agricoles étaient interdits.
(9) Celle de l’homme qui se confie et de celui à qui il se confie.
(10) Celle de l’homme qui se confie uniquement.
(11) Voir les lettres du précédent Rabbi, tome 3, lettre n°818 et introduction du tome 4, page 10 à 13.
(12) 1940.