Lettre n° 1940

Par la grâce de D.ieu,
16 Kislev 5713,
Brooklyn

Au grand Rav, distingué ‘Hassid qui craint D.ieu
et se consacre aux besoins communautaires,
le Rav Efraïm Eliézer Hacohen(1),

Je vous salue et vous bénis,

J’ai reçu, avec plaisir, votre lettre, rapportant le récit du Maguid, Rabbi Israël de Kognits(2). Celui-ci est particulièrement précieux, d’autant qu’il concerne un Juste, un maître de la ‘Hassidout. De fait, les maîtres de la ‘Hassidout ont souligné l’importance de tels récits, qui présentent ces Justes et véhiculent l’âme, “ l’âme de l’âme ” de la Torah.

Or, le Saint béni soit-Il agit “ mesure pour mesure ”(3) et ces Justes ont donc personnellement le mérite que leurs propres récits, même s’ils semblent n’être qu’un vêtement recouvrant le corps, puissent illuminer “ l’âme de l’âme ”. Comme vous le savez, selon le Zohar, tome 3, page 152a, cette expression fait allusion à la fois à ‘Haya(4) et à Ye’hida(5).

La question suivante vous a été posée(6). A Roch Hachana, la dimension profonde de la vitalité reçoit une élévation. C’est ce qui est appelé “ l’élévation des lumières ”, dans le Séfer Hamaamarim 5703(7), à la page 38. A ce propos, vous consulterez également Igueret Hakodech, au chapitre 14. Pendant le Chabbat, en revanche, c’est la dimension extérieure de la vitalité qui s’élève. C’est alors “ l’élévation des réceptacles ”, comme l’indique le Kountrass A’haron du Tanya, à la page 157b. Dès lors, vous a-t-on demandé, de quelle stade de la création émane la vitalité lorsque Roch Hachana est un Chabbat(8) ?

De fait, une question similaire peut être posée à propos de chaque Chabbat. La partie superficielle de la vitalité connaît alors l’élévation. En conséquence, pourquoi le monde ne s’en trouve-t-il pas modifié ?

On peut déduire la réponse à cette question d’un échange qui se produisit entre le Tséma’h Tsédek et son grand-père, l’Admour Hazaken. En effet, le Tséma’h Tsédek écrit, dans son Séfer Hamitsvot, à la fin de la Mitsva de ne pas allumer du feu pendant le Chabbat, que l’élévation de ce jour porte sur la force profonde que contient l’aliment. C’est la raison pour laquelle aucun changement extérieur n’en résulte.

On peut en conclure que l’élévation superficielle du Chabbat porte, en fait, sur la partie profonde de l’aspect superficiel. Bien évidemment, un observateur extérieur ne verra aucun changement, car la matérialité tire sa vitalité d’une source qui n’est pas modifiée. Il en est donc de même lorsque Roch Hachana est un Chabbat.

De plus, vous savez que la dimension profonde et le stade superficiel comptent, l’une et l’autre, de nombreux niveaux, comme le disent le Ets ‘Haïm, première porte, deuxième feuille et Igueret Hakodech, au chapitre 29 : “ L’un est le cerveau de l’autre et l’autre l’écorce de l’un ”. Il est des domaines de portée générale et d’autres plus précis.

On peut ainsi comprendre que, lorsqu’une fête a lieu au milieu de la semaine, elle conserve effectivement un caractère de jour de semaine et l’on dit alors(9) : “ C’est aujourd’hui le premier jour de la semaine ”, “ C’est aujourd’hui le second jour de la semaine ”. Car, chaque jour possède un contenu spécifique. Parallèlement, celle-ci est bien une fête, ayant une portée générale, qui concerne toute l’année.

Par ailleurs, certaines célébrations sont liées à la date dans le mois. C’est pour cela que l’on parle de Roch ‘Hodech(10), jour qui révèle une vitalité collective, pour tout le mois, laquelle s’insère ensuite dans les jours qui le constituent, de la manière qui est nécessaire à chacun d’entre eux.

Vous consulterez également le Nahar Chalom, qui est imprimé à la fin du Ets ‘Haïm, édité à Varsovie en 5651(11), page 39c, aux paragraphes commençant par “ On sait ce qu’écrit le Rav ” et “ Ainsi, chaque jour ”. Vous verrez également les références citées par ce texte, dans les notes et les commentaires. Vous y retrouverez la base de tout ce qui vient d’être dit.

Je vous joins un fascicule(12), qui vient de paraître. Il s’agit d’un texte du Rabbi Rachab et vous le mettrez sans doute à la disposition du plus grand nombre. De fait, ce texte explique que la nourriture des Cohanim(13) est plus élevée que la consommation d’un sacrifice, car elle met en évidence une lumière nouvelle, transcendant l’enchaînement des mondes.

Avec ma bénédiction à l’occasion de la fête de la libération(14),

Notes

(1) Le Rav E. E. Yalles, de Philadelphie. Voir, à son propos, la lettre n°1893.
(2) Voir, à ce propos, les lettres n°1949, 2040 et 2118.
(3) A la mesure de l’effort des hommes envers Lui. En l’occurrence, il en est de même pour les Justes, qui sont “ à l’image de leur Créateur ”.
(4) Quatrième partie de l’âme juive, qui ne se révèle que dans des occasions exceptionnelles, par exemple lors du dévoilement prophétique. Celle-ci est le stade premier de la compréhension et induit une soumission profonde.
(5) Essence de l’âme juive, qui en est aussi la cinquième partie, directement liée à l’Essence de D.ieu. Elle constitue, à proprement parler, la parcelle de D.ieu résidant dans le corps physique.
(6) Voir, à ce propos, le Likouteï Si’hot, tome 9, page 220 et tome 14, page 377.
(7) 1943, du précédent Rabbi.
(8) Puisqu’il y a alors retrait à la fois de la dimension profonde et de l’aspect superficiel.
(9) Dans le Cantique du jour, qui fait partie de la prière quotidienne du matin.
(10) Textuellement la tête du mois, qui gouverne tous les membres du corps, lesquels sont, en l’occurrence, les jours.
(11) 1891.
(12) Le discours ‘hassidique intitulé “ Il se tenait devant eux ”, prononcé en 5663-1903.
(13) Le destinataire de cette lettre est un Cohen.
(14) Le 19 Kislev.