Lettre n° 3566

[19 Sivan 5715]

Je fais réponse à votre lettre de la veille du temps du don de notre Torah et à celle qui la précédait et exprimait vos vœux, à l'occasion de la fête. Or, quiconque bénit est lui-même béni, de la bénédiction du Saint béni soit-Il, ainsi qu'il est dit: "Je bénirai ceux qui te béniront", comme l'explique le traité Sotta 31b. Car, ce verset ne fait pas uniquement allusion à un Cohen. Et, l'on trouve la même affirmation dans le Midrach Ha Gadol et aussi dans le Yerouchalmi Bera'hot, chapitre 8, cité par le traité 'Houlin 49a, où il est dit que "l'intérêt(1) dépasse le capital".

Vous m'interrogez sur les additifs à la Haggadah de Pessa'h, publiée aux éditions Kehot(2):

A) Concernant le nom du Chabbat Ha Gadol(3), vous consulterez la Torah Cheléma, tome 11 et ses additifs, qui indiquent plusieurs références traitant de ce sujet.

B) Le Rabbi Rachab disait: "Cette année, nous sommes ici, l'an prochain, nous serons en Erets Israël", en levant le ton pour les mots "l'an prochain", signifiant ainsi qu'il s'agit du passé. Vous me demandez comment il faut comprendre cette affirmation.

Je n'ai reçu aucune explication, à ce sujet. Néanmoins, il me semble, que ces mots font référence, très simplement, à une période qui a déjà commencé, en ce Pessa'h. Et, l'on dit ensuite, "l'an prochain, nous serons libre", en appuyant, cette fois-ci, sur "l'an prochain", car on fait, cette fois-ci, allusion au futur.

Pour bien comprendre tout cela, surtout dans la dimension spirituelle, il faut préciser que la réalisation de la promesse selon laquelle "l'an prochain, nous serons en Erets Israël" ne dépend que de l'homme lui-même, lequel possède le libre arbitre, en particulier pour tout ce qui est moral. Erets Israël est l'endroit que D.ieu protège en permanence, "du début de l'année à la fin de l'année". Il faut, pour cela, ne pas s'écarter de la Volonté de D.ieu, mais, bien au contraire, "marcher dans Mes Décrets".

En conséquence, lorsque l'on dit et que l'on décide "l'an prochain en Erets Israël", on peut le faire aussitôt et même au plus vite. Etre libre, en revanche, délivré de la servitude, requiert, d'après la partie révélée de la Torah, un acte d'affranchissement ou toute autre procédure similaire. Dans le domaine spirituel, cela signifie que "seul le Saint béni soit-Il peut égorger le mauvais penchant" afin que l'homme soit réellement libre. Nos Sages disent, en effet: "Ne lis pas 'Harout, gravé sur la pierre, mais 'Hérout, liberté".

* * *

Concernant ce qui vient d'être dit, concernant "l'an prochain", vous consulterez le Zohar, tome 1, page 265a et le Rambam, lois de la Techouva, fin du chapitre 8.

* * *

C) Vous proposez d'expliquer la différence de formulation du Rambam, qui écrit tantôt Merorim, herbes amères, au pluriel, tantôt Maror, au singulier, en appliquant la première expression à l'époque du Temple et la seconde, après sa destruction.

Or, c'est précisément pour écarter cette interprétation, à laquelle j'avais également pensé, que j'ai cité une autre référence du Rambam, les lois du 'Hamets et de la Matsa, chapitre 1, paragraphe 4, qui dit Maror, au singulier, alors que, dans sa Haggadah, il écrit Merorim, ce qui contredit cette interprétation.

D) Concernant la lecture que vous faites de la Tossefta, vous consulterez le Tsafnat Paanéa'h, qui est également cité dans l'additif.

E) Il est dit, dans cet additif(4), que l'étude du huitième jour a été instaurée après le don de la Torah. Ceci est lié à la question suivante. L'Injonction de la circoncision a-t-elle été uniquement réitérée, sur le mont Sinaï(5)?

A mon avis, cette affirmation n'est pas exacte. C'est pour cela que je cite les Tossafot et non le traité Chabbat, car on a pu réitérer, lors du don de la Torah, que les Préceptes qui avaient déjà été donnés auparavant et, en l'occurrence, pour la circoncision, il s'agit de ce qui a été dit dans la Parchat Le'h Le'ha. Il n'en est pas de même pour le huitième jour, dont le principe a été énoncé après le don de la Torah.

F) Vous citez le Ifat Toar, selon lequel ils furent circoncis dans la journée de la veille de Pessa'h et non la nuit. Le Riva, à la Parchat Bo, énonce une affirmation encore plus forte, puisque, selon lui, ils pratiquèrent la circoncision à partir du 10 Nissan.

Néanmoins, on ne peut retrouver cette interprétation dans le Midrach Chemot Rabba, à la référence que je citais. Ce texte dit, en effet, qu'ils se circoncirent après avoir senti l'odeur du sacrifice de Pessa'h que Moché faisait griller. Il faut en conclure qu'il y a là des explications Midrachiques divergentes ou bien que chaque groupe(6) pratiqua autrement.

Vous demandez comment ils s'inscrivirent pour le Pessa'h(7) et le consommèrent et vous comparez tout cela à une conversion. Je n'accepte pas cette comparaison. En effet, tous étaient astreints, en Egypte, à offrir le sacrifice de Pessa'h et ils consommèrent celui de Moché parce qu'il les avait tous inclus dans le sien. En pareil cas, il est permis de conférer un mérite à quelqu'un, en agissant de cette façon. C'est en particulier le cas pour le Pessa'h offert en Egypte, qui présentait quelques particularités. Cette situation était liée à la délivrance et à la protection de la plaie des premiers-nés. En effet, il est dit que "D.ieu fit un bond au dessus de la porte" et ceci concernait bien chacun.

* * *

Il est dit, dans l'additif, et ceci a été rappelé au préalable, qu'ils pratiquèrent la circoncision la nuit, parce que la Parchat Tazrya n'avait pas encore été énoncée(8). Or, je viens de trouver cette explication dans le commentaire du Rachach sur le verset Chir Hachirim 1, 12.

Notes

(1) De cette bénédiction.
(2) C'est sous cette forme que furent publiés, dans un premier temps, les commentaires du Rabbi. Par la suite, ceux-ci furent mis en parallèle au corps du texte.
(3) Qui précède la fête de Pessa'h.
(4) Cette explication est énoncée, dans la Haggadah du Rabbi, à propos de la coupe du prophète Elie. Voir, à ce sujet, le Likouteï Si'hot, tome 17, à partir de la page 125.
(5) Ayant déjà été énoncée auparavant, ou bien la pratiquons-nous parce qu'elle a été ordonnée lors de la révélation du Sinaï.
(6) Le sacrifice du Pessa'h était offert par groupes.
(7) Afin de constituer un groupe.
(8) Qui demande de la pratiquer le jour.