Lettre n° 579

Par la grâce de D.ieu,
10 Nissan 5710,

Au distingué ‘Hassid qui craint D.ieu,
le Rav I.(1),

Je vous salue et vous bénis,

Vous avez sans doute reçu, en son temps, le fascicule édité pour le 2 Nissan. Vous trouverez ci-joint celui qui parait à l’occasion de Pessa’h. Votre générosité vous a sûrement permis et vous permettra encore de mettre ces textes à la disposition de votre entourage et, bien plus, de les "poser devant eux", selon le commentaire de nos Sages, dans la Me’hilta, au début de la Parchat Michpatim, que Rachi cite dans son commentaire de la Torah: "Ne pense pas que tu peux te contenter de leur enseigner la Loi sans leur en faire comprendre la signification et la portée. Celle-ci doit, bien au contraire, être comme une table dressée devant eux, prête pour que tous y mangent". Le verset dit, en outre: "Ta Torah se trouve au fond de mes entrailles" et vous consulterez, à ce propos, le chapitre 5 du Tanya.

Pour reprendre cette image, la nourriture, pour être convenable et bénéfique, doit être adaptée à son but, qui est de lier l’âme au corps et d’assurer la vitalité de l’homme. De même, l’enseignant et le guide spirituel doivent garder présent à l’esprit que la finalité et l’aspect fondamental de ce qu’ils transmettent est une forme de résurrection des morts, un apport à l’homme vivant d’une vitalité profonde, dont la source apparaît à l’évidence, comme le dit le chapitre 41 de cette causerie(2).

Bien évidemment, pour vivifier les autres, il faut soi-même être vivant. C’est dans ce domaine qu’intervient le mauvais penchant, qui objecte: "Pour qui te prends-tu? De quelle manière pourrais-tu vivifier les autres? Contente-toi déjà de le faire pour ta propre personne!".

A ce propos, mon beau-père, le Rabbi, répond, dans sa causerie, au paragraphe 43: "Ces propos sont vrais, mais déplacés. Car comment définir la condition de soldat? C’est l’homme qui doit tirer, faire don de sa personne, bien plus, le faire joyeusement. C’est ainsi qu’il obtient la victoire."

Le soldat n’est pas chargé de fabriquer le fusil. Il n’est pas capable de le faire. Il ne comprend pas comment celui-ci est capable de tirer. Plus généralement, il ne connaît pas les stratagèmes de la guerre. Mais, il fait don de sa personne et de sa propre volonté à l’officier. Il le fait joyeusement et c’est ainsi qu’il obtient la victoire.

Concrètement, on peut voir qu’à la base de tout cela, il y a la foi, la confiance en le chef d’état-major, qui est le roi et le dirigeant. Pour ce qui est de la guerre spirituelle, il s’agit du chef de la génération, c'est-à-dire, pour la nôtre, de mon beau-père, le Rabbi, qui a mis chacun et chacune d’entre nous à la place qui lui convient, sur le champ de bataille contre les forces du mal.

De façon générale, la foi doit être affermie, de temps à autre. Un effort particulier est nécessaire pour qu’elle ne demeure pas superficielle, mais, bien au contraire, domine concrètement toutes les forces de la personnalité, les pensées, les paroles et les actions, dans l’existence quotidienne.

Durant la fête de Pessa’h, on peut obtenir la révélation de tout cela, en particulier en mangeant de la Matsa, qui est appelée "nourriture de la foi", comme l’explique le second paragraphe de cette causerie. Différents textes de ‘Hassidout développent longuement cette notion.

Vous consulterez, en particulier, la séquence de discours ‘hassidiques Veka’ha 5637(3), à la fin du paragraphe 60, qui dit que la Matsa matérielle révèle l’Essence de D.ieu. C’est ainsi que l’on est nourri, de là que l’on tire sa vitalité physique.

C’est la raison pour laquelle, la vie de l’homme, y compris dans sa dimension matérielle, est particulièrement élevée. Et, ce texte introduit une idée nouvelle, en soulignant qu’il en est ainsi, non pas seulement le premier soir de Pessa’h, mais bien pendant tous les jours de la fête.

Puisse D.ieu nous accorder une foi entière et que s’accomplisse la promesse selon laquelle "comme aux jours de ta sortie d’Egypte (dont nos ancêtres furent libérés grâce à leur foi), Je te montrerai des merveilles", très prochainement.

En vous souhaitant une fête de Pessa’h cachère et joyeuse,

M. Schneerson,

* * *

J’ai bien reçu votre lettre du 9 Nissan(4) et vous trouverez une brève réponse, à mon humble avis, à tout ce que vous m’y demandez dans mon introduction au fascicule édité après le décès(5) et dans la présente lettre.

Vous remarquez que l’on ne peut plus interroger mon beau-père, le Rabbi, lorsque l’on ne sait quel comportement adopter. Néanmoins, si vous restez profondément attaché à lui, sans vous affecter face aux attaques du mauvais penchant, si vous adressez votre question auprès du tombeau de mon beau-père, le Rabbi, il trouvera le moyen de vous répondre.

Notes

(1) Cette lettre fut adressée à plusieurs personnes. Certaines la reçurent datée de "E’had Adar", mot dont la valeur numérique est 13. Voir, à ce propos, la lettre n°481.
(2) Imprimée dans le fascicule accompagnant cette lettre.
(3) 1877, du Rabbi Maharach.
(4) Ce paragraphe fut ajouté à la lettre destinée au Rav Chalom Pozner. Voir, à son propos, la lettre n°426.
(5) Voir, à ce propos, les lettres n°557, 561, 573.