Lettre n° 6903

Par la grâce de D.ieu,
23 Sivan 5719,
Brooklyn,

Au grand Rav, distingué ‘Hassid qui craint D.ieu,
aux multiples accomplissements, empli d’empressement,
aux bons comportements, grand érudit,
le Rav Mena’hem Mendel(1),

Je vous salue et vous bénis,

Je reproduis ici quelques remarques formulées par le Rabbi Chlita, à propos du livre Tsafnat Paanéa’h sur le traité Makot, qui vous intéresseront sûrement :

Remarque d’ordre général :

Ceux qui ont réalisé ce recueil et ce commentaire ne disposaient vraisemblablement pas du Maré Cohen, le livre du Rav Chmaryahou Menaché Ha Cohen Adler, de Londres, dont plusieurs éditions ont été publiées. J’en possède, pour ma part, la troisième édition qui fait référence, à la page 3, au traité Makot 7a, 26, 3 et 7. Dans les autres éditions, ont, à n’en pas douter, été également imprimées quelques lettres du Gaon de Ragatchov. En effet, il a correspondu avec les érudits et les Grands de sa génération, comme le montre son livre.

Page 1, première colonne, note 2 :

On peut réellement s’interroger sur l’explication selon laquelle il est ici fait référence au traité Ketouvot 26a. Il semble, en effet, que l’on ait confondu les pages 14 et 26. En outre, par la citation qui est faite du Rambam, on ne précise pas plus clairement ce que dit la Guemara. De fait, ceci n’est pas fréquent, dans les références mentionnées par le Gaon de Ragatchov, y compris quand il en énumère plusieurs. En effet, l’une ne rajoute rien à l’autre. En outre, il ne cite pas couramment le Rambam, sauf s’il en découle une précision supplémentaire, comme le montrent différents passages de ses livres et de ses responsa. Avant tout, je suis surpris que cette référence n’ait pas été interprétée selon son sens simple, en relation avec le traité Ketouvot 14, qui traite du cas d’un homme dont la validité du statut de Cohen est remise en cause et qui se tait quand cette accusation, à son encontre, est portée devant lui. La Guemara énonce plusieurs avis, à ce sujet et le Rambam tranche la Hala’ha, en la matière. Sa formulation montre qu’il écarte l’avis du Rabad et celui du Rachba, comme le dit le chapitre 19 de ses lois des relations interdites.

Certes, la référence au “ chapitre 20 ” est courante, dans les écrits du Gaon de Ragatchov. Néanmoins, il n’en va pas de même selon qu’il s’agisse d’un chapitre ou d’une page. Dans ce même livre, vous consulterez la page 1, troisième colonne, à la note 15. On retrouve cette même formulation dans différents passages de ses livres et de ses responsa. Et, il s’exprimait de la même façon oralement, selon le récit de ceux qui ont entendu ses commentaires de la Torah. Bien entendu, la présente référence précise le sens de ce qui est exposé ici ou, tout au moins, donne une indication, à ce sujet. C’est le cas, par exemple, de la première référence au traité Kiddouchin 66b. Selon la formulation de la Michna, on peut comprendre qu’il n’y a pas de différence, selon que cet homme se tait quand le témoignage est porté devant lui ou non. Ceci a une incidence sur le cas ou, par la suite, les témoins auraient été confondus. On devra alors tenir compte du fait qu’il s’est tu quand on a remis en cause son statut de Cohen. Certes, on peut avancer qu’il n’en est pas de même lorsque l’accusation émane de deux témoins. On peut alors dire qu’il se tait parce qu’il sait que sa réponse ne sera d’aucune utilité. Pour autant, ce sujet doit effectivement être analysé sur la base de ce que dit le Talmud, à propos d’un homme qui se tait quand son statut de Cohen est remis en cause. Combien plus en est-il ainsi selon le Rambam, qui écarte l’avis du Rabad et du Rachba, en la matière. C’est bien évident.

A la fin du traité, page 88, première colonne :

S’agissant de la différence qui peut être faite entre le quatre et le trois, on consultera les livres de Kabbala, soulignant que le Séfer Yetsira ne parle que de trois éléments fondamentaux, bien qu’il y en ait quatre(2). De fait, le Gaon de Ragatchov a également étudié la Kabbala, comme le savent plusieurs de ceux qui ont conversé avec lui(3), même s’il ne cite pas clairement de tels ouvrages, sauf dans son commentaire du Rambam, lois de l’idolâtrie, chapitre 12, au paragraphe 6. C’est, pour l’heure, la seule référence que j’ai trouvée. Mais, là encore, le fait que je n’en ai pas vu d’autre ne constitue pas une preuve. Il faut donc rechercher de telles références, surtout dans ses manuscrits sur la Torah. Il faut citer également l’heure de lecture du Chema Israël, dont l’essentiel est le premier paragraphe, dans lequel il est dit : “ de tout ton pouvoir ”, alors que n’y figure pas l’expression : “ Tu engrangeras ton blé ”, selon le traité Bera’hot 35b. Rabbi Chimeon Ben Yo’haï lui-même interrompait son étude pour lire le Chema. Or, le Chema est dit pendant les trois premières heures du jour, alors que la prière, permettant à l’homme de formuler ses besoins à D.ieu, est dite pendant les quatre premières heures.

A la page 89, seconde colonne, note 42 :

Je suis surpris que l’on cite le commentaire de Rabbénou Ephraïm, à propos de l’Attribut de miséricorde qui est remplacé par celui de la rigueur. En effet, il est très difficile d’adopter une telle interprétation, dans ce texte, dont le sens est clair et évident. Car, le Nom Avaya transcende la nature alors que la valeur numérique du Nom Elokim est celle de Ha Téva, la nature(4). On mentionne donc ici les forces d’Elokim qui se révèlent à travers la nature. A ce sujet, on consultera, en particulier, le Guide des Egarés, tome 2, chapitre 6, au paragraphe 30 et le Choul’han Arou’h, Ora’h ‘Haïm, au chapitre 5. Il est ensuite fait référence à ce qui est dit au préalable : “ Yaakov voulut que tout y soit ”, non pas de manière naturelle, mais par une intervention de D.ieu se substituant à la nature.

A la page 98, troisième colonne, dans le commentaire du Tan’houma :

On peut ici réellement s’interroger, car on peut simplement admettre que le Midrash Tan’houma se conforme à l’avis de Rabbi Ichmaël, énoncé au début du chapitre 3 du traité Makot. En effet, ceux qui sont condamnés à mort peuvent recevoir la flagellation, au même titre que ceux qui sont punis de Karet. Mais, peut-être cette explication n’a-t-elle pas été retenue, parce que le début de ce texte cite la Michna : “ Tous les hommes punis de Karet qui ont subi la flagellation ”. En tout état de cause, on peut s’interroger sur l’explication qui est donnée ici(5), car :
A) celui qui passe outre aux propos du prophète n’est pas puni de flagellation, comme le dit le Rambam, dans ses lois du Sanhédrin, chapitre 19, au paragraphe 3.
B) pour être considéré comme passant outre aux propos du prophète, il n’est pas nécessaire de les avoir entendu directement de sa bouche. Il en est ainsi pour tous ceux qui sont concernés par cette prophétie. Mais, peut-être ce texte considère-t-il qu’il faut entendre ces propos directement du prophète. Vous consulterez, à ce propos, le Min’hat ‘Hinou’h, au paragraphe 516 et les notes du Rav Y. P. Perla, à cette référence.

A la page 102, quatrième colonne, qui cite le Torah Cheléma, tome 17, paragraphe 543 :

Au paragraphe 543, figure le commentaire du Gaon de Ragatchov sur la Tossefta du traité Kélim, chapitre 1, au paragraphe 6, qui dit : “ Le chien du Grand Prêtre est plus précieux que toi ”. On peut cependant se demander pourquoi il est ici question précisément de son chien, d’autant que, dans plusieurs passages, y compris dans le même contexte, il est question de son bœuf. On peut donc expliquer que cette Tossefta fait référence à l’entrée dans le Temple, ce qui établit une relation directe avec le Grand Prêtre, concernant même son chien, bien qu’il soit dit, à propos du prix de ce chien : “ Tu ne le conduiras pas dans la maison de l’Eternel ton D.ieu ”. Mais, en fait, l’interdiction est uniquement d’en faire un sacrifice, comme le précise le Sifri, à cette référence. Le Torah Cheléma, tome 15, à la fin de page 147, interdit l’entrée d’un chien à la synagogue(5), mais aucune preuve n’est citée, à ce sujet. Vous consulterez le Choul’han Arou’h, Ora’h ‘Haïm, chapitre 153, au paragraphe 21. A l’opposé, les responsa Iguerot Moché, au chapitre 45, du Gaon, Rav Moché Feinstein, considèrent comme un fait certain qu’un chien n’est pas moins qu’un âne. Mais, il ne mentionne pas le fait que : “ le chien du Grand Prêtre est plus précieux que toi ”, ce qui est surprenant.

Vous me confirmerez sûrement avoir reçu cette lettre. Je vous en remercie. Avec mes respects et ma bénédiction,

Le secrétaire,

Notes

(1) Le Rav M. M. Kosher, de New York, auteur du Torah Cheléma.
(2) Le feu, le vent, l’eau et la terre. A ce propos, le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le ‘Hayat Be Maare’het, au début du chapitre 3, le Pardès de Rabbi Moché Cordovero, porte 9, au chapitre 3 et le discours ‘hassidique intitulé : ‘Au commencement, D.ieu créa’, de 5655, du Rabbi Rachab. On verra aussi le Zohar, tome 1, à la page 5b ”.
(3) Le Rabbi étant l’un d’eux.
(4) Le Rabbi note, en bas de page : “ Pardès de Rabbi Moché Cordovero, porte 12, chapitre 2. Chneï Lou’hot Ha Berit, porte des lettres, à la page 89a, au nom du Zohar ”.
(5) Voir, à ce sujet, la lettre n°6936.