Lettre n° 7193

Par la grâce de D.ieu,
16 Chevat 5720,
Brooklyn, New York,

A l’attention de monsieur Yossef,
qui est appelé docteur Goldschmidt(1),
directeur du département pour l’éducation
religieuse, auprès du ministère de l’éducation,

Je vous salue et vous bénis,

Après une interruption particulièrement longue(2), j’ai bien reçu votre lettre du 17 Tévet, dont l’acheminement a été retardé, au-delà de l’accoutumée et qui ne m’est parvenue que dernièrement. Bien entendu, vous avez raison de dire que le métier d’enseignant requiert une formation initiale, puis complémentaire. Croyez-le bien, je déplore tout autant que vous que cette formation complémentaire ne soit pas plus répandue et plus large. En effet, il reste toujours possible de se perfectionner, surtout quand il s’agit d’éducation, laquelle a une incidence sur toute la vie de l’élève. A quelqu’un comme vous, il est sûrement inutile d’en dire plus. De même, il est évident que les hommes de ‘Habad en Terre Sainte, de façon générale, ceux qui se consacrent à l’éducation, en particulier et les enseignants, avant tout, doivent avoir la meilleure formation, comme vous le soulignez. Ils en ont conscience et s’en désolent, tout autant que moi et peut-être même plus. En effet, ils sont en contact quotidien avec leurs élèves. De ce fait, nous seulement ils sont pleinement disposés à se perfectionner, dans toute la mesure du possible, mais, en outre, ceci renforce l’espoir qui les anime de connaître la réussite, en la matière.

Je dois, encore une fois, réagir à un point figurant dans votre lettre qui, me semble-t-il, a été abordé au cours de notre entretien, lorsque vous étiez ici. C’est le suivant. A notre époque qui se caractérise par ses multiples revirements et sa différenciation des valeurs, on ne peut, bien sûr, renoncer à un minimum d’exigence envers l’enseignant et l’éducateur. Mais, au-delà de ce minimum, il est important que ce professeur ait une vision du monde large, de l’abnégation et un sentiment de sacrifice envers toutes les valeurs sacrées de notre peuple, ayant une incidence sur son mode de vie. C’est à cette condition qu’il sera capable de forger une attitude forte, chez son élève, bénéficiant de l’éducation qu’il lui dispense, afin que celui-ci ne soit pas troublé quand il sera confronté à des mutations et des évolutions, dans la rue et parfois même à la maison. Nos Sages appellent tout cela : “ les souffrances de la fronde(3) ”. Parfois, cette modification va même d’une extrême à l’autre, de sorte que l’élève, recevant cette éducation, peut être confronté à des événements se modifiant de l’extrême gauche à l’extrême droite.

Encore maintenant, j’ai bon espoir, me fondant sur notre rencontre et sur ce que je lis dans votre lettre, au moins entre les lignes, que votre sympathie pour l’éducation ‘Habad ne s’est pas affaiblie, bien au contraire, qu’il en est de même pour l’aide et les subventions que l’on peut attendre de votre part. Celles-ci seront fortes, à tous les sens du terme. Il en résulte qu’un enseignant doit être considéré non pas uniquement dans sa situation actuelle, mais aussi en ce qu’il sera après par la suite, avoir consenti l’effort nécessaire pour se perfectionner, en se vouant pleinement à la sainte mission qui lui est confiée, celle de l’éducation basée sur les valeurs sacrées. Je souligne encore une fois que mon but n’est pas de dispenser quiconque de l’effort nécessaire pour se perfectionner et pour parfaire sa formation, mais bien de clarifier la situation et, comme je l’ai dit, de vous transmettre encore une fois ma position, par écrit. Comme le souligne la Michna, la sagesse se perpétue uniquement chez celui qui fait passer sa crainte de D.ieu avant elle. Un bilan moral permettra de vérifier qu’il en est bien ainsi, en particulier dans les écoles élémentaires.

Vous évoquez les écoles secondaires ou l’éducation secondaire, dans le cadre des écoles ‘Habad. Je ne pense pas qu’il soit possible d’y insérer des écoles secondaires intégrales(4), pour différentes raisons. A ce sujet, je pense qu’il est de mon devoir de vous préciser plus clairement ma pensée, qui est la suivante. A mon sens, il n’y a pas lieu d’introduire le programme d’une école secondaire dans le cadre d’une Yechiva, qui doit être entièrement consacrée à D.ieu, à l’étude de la Torah et à la pratique des Mitsvot, au point que, si quelques élèves ou groupes d’élèves se doivent de suivre le programme d’une école secondaire pour une quelconque raison, il leur incombe de le faire à l’extérieur de l’enceinte de la Yechiva. Mais, de fait, chez ‘Habad, cette question ne se pose pas, au moins à l’heure actuelle, pour différentes raisons. Les confusions et la perte des valeurs, auxquelles nous ne pouvons remédier, sont suffisantes et il n’y a donc pas lieu d’ajouter un autre domaine de trouble et de désordre qui, par nature, ne se présentent pas simultanément, dont la conjonction n’a nullement un effet souhaitable. Font exception à cette règle les écoles professionnelles, par exemple l’école d’imprimerie et de technique qui se trouve à Kfar ‘Habad. Ceci ne concerne pas la Yechiva. Nous sommes au lendemain du nouvel an des arbres(5) et le verset dit : “ Car l’homme est tel l’arbre du champ ”. Je me suis donc rappelé des vœux que je vous ai adressés à l’occasion de la nouvelle année(6). J’espère que vous les avez reçus en leur temps et, avant tout, qu’ils s’accompliront pleinement. Avec mes respects et ma bénédiction,

Notes

(1) Voir, à son sujet, les lettres n°6506 et 7402. En fonction de ce qui est dit ici, il semble que la date exact de la lettre n°6506 soit la veille de Roch Hachana 5720, c’est-à-dire le 29 Elloul 5719. Dans cette lettre, le Rabbi parle de “ ma lettre adressée à tous ”, qui doit donc être la lettre n°7014.
(2) En l’occurrence, près de quatre mois.
(3) Par référence à la “ fronde ” dans laquelle une âme est placée, quand elle quitte ce monde. Elle est ensuite projetée d’une extrémité de la terre à l’autre, afin d’être purifiée des fautes commises ici-bas.
(4) Respectant l’intégralité du programme officiel.
(5) Tou Bi Chevat, le 15 Chevat.
(6) Pour Roch Hachana.