Lettre n° 7200

Par la grâce de D.ieu,
23 Chevat 5720,
Brooklyn,

Je vous salue et vous bénis,

Je fais réponse à votre lettre du 20 Chevat et à celle qui la précédait. Je reprends, dans l’ordre, les questions que vous m’avez posées(1) :

A) Il est dit que : “ tu aimeras ton prochain comme toi-même ” et ceci est : “ un grand principe de la Torah ”. Il en résulte qu’un Juif doit s’intéresser à ce qui advient à un autre Juif. Bien plus, selon les termes du verset : “ Chacun viendra en aide à son frère ”.

B) Ma manière de répondre aux questions qui me sont posées est la suivante. Il nous a été enjoint d’être clair, comme le soulignent nos Sages. Parfois, cela nécessite un développement, par exemple pour citer un exemple ou une conclusion que l’on peut conserver pour des domaines similaires ou encore pour la question posée proprement dite. Mais, tous les problèmes personnels et toutes les périodes ne sont pas identiques, de ce point de vue(2).

C) Vous avez rencontré, dans un certain milieu, des personnes d’une grande élévation et il vous semble qu’il n’ont pas leur pareil, dans un autre milieu. Je suis surpris par votre conclusion, car vous connaissez sûrement l’enseignement de nos Sages selon lequel il convient de considérer chacun d’une manière favorable. Vous connaissez également la sentence de nos Sages, qui dit : “ Qui est le sage ? Celui qui apprend de tout homme ”. Vous consulterez également l’enseignement du Baal Chem Tov, qui est imprimé dans les additifs des mémoires de mon beau-père, le Rabbi, à la page 344. Il est clair que de nombreux hommes ont des défauts, parfois même évidents. Pour autant, les termes de la Michna s’appliquent également à eux. Néanmoins, il faut tirer un enseignement de leurs qualités et non de leurs défauts, même apparents. Ceci exprime, globalement, ma position en la matière. Plus précisément, il est dit que : “ dans deux cents pièces, il y en a cent ”. Il en est ainsi, bien entendu, dans tous les domaines. Il en résulte que, lorsqu’un certain milieu apprend tout ce qui est étudié dans un autre milieu, mais, en outre, intègre à son programme une autre matière, qui renforce la crainte de D.ieu, il est inconcevable, selon le bon sens immédiat, que cette étude supplémentaire remette en cause l’ensemble du programme. Bien plus, l’étude de notre sainte Torah conduit à l’action, ce qui veut dire que la situation ne peut pas être celle que vous décrivez. Vous avez seulement l’impression qu’il en est ainsi et la raison en est vraisemblablement celle qui est énoncée au début de ce paragraphe. Quand vous rencontrez un érudit, c’est-à-dire quelqu’un qui se consacre à la compréhension, vous recherchez en lui les qualités d’un homme qui prie avec ferveur, de la meilleure façon. De même, quand vous observez quelqu’un qui prie avec ferveur, vous vérifiez s’il se distingue par sa compréhension(3).

D) Vous me demandez si vous devez être l’ami de telle personne et correspondre avec elle. Or, vous lui trouvez de nombreuses qualités, desquelles vous pouvez tirer un enseignement. Il est donc bien évident qu’une telle correspondance est justifiée.

E) Vous citez le sentiment que l’on éprouve, pendant la prière, envers le mal dont on pense s’être libéré, un tel résultat émanant des Bienfaits célestes et cachés, comme l’explique, en particulier, une lettre de l’Admour Hazaken. Comme je le disais dans ma précédente lettre, différents textes définissent la prière et la requête d’être délivré du mal. De fait, tel est bien son objet essentiel, mais cela ne contredit pas l’explication que vous citez, selon laquelle un homme doit effectivement prier pour en être libéré. S’il en est ainsi, il faut l’accepter avec joie, comme un bienfait évident, puisque ce résultat a alors été obtenu. Il s’agit donc d’un bien émanant du monde caché. Mais, avant que l’on sache si l’on a été exaucé, cette possibilité demeure(4), pour une quelconque raison. Si l’on prie, on peut en annuler la cause et ne pas devoir recourir à la purification qui est définie par Iguéret Ha Kodech, au chapitre 22, dès lors que “ la souillure des filles de Tsion ” a disparu, grâce à cette prière et à cette requête. Vous consulterez ce texte d’Iguéret Ha Kodech selon lequel on ne peut fuir, trouver de l’aide ou faire intervenir un avocat. En revanche, il n’exclut nullement que le fils s’adresse directement à son Père. Bien au contraire, il souligne que cette démarche est essentielle. Selon le rituel bien connu de la prière, “ La faute que j’ai commise devant Toi, efface-la par Ton immense miséricorde, mais non par…(5) ”. C’est l’idée qui est développée ici.

F) Avez-vous le droit de porter un jugement sur votre prochain, d’affirmer qu’il prie avec ferveur ou qu’il ne le fait pas ? Il est clair que cela est permis dans la mesure où cela présente un intérêt pour soi-même ou pour l’autre. Vous consulterez, à ce sujet, l’enseignement du Baal Chem Tov sur l’affirmation de nos Sages, précédemment citée : “ Qui est le Sage ?...(6) ”.

G) Il est bien évident qu’une réflexion précise permet d’expliquer un concept à son âme animale et, bien au contraire, telle est la finalité véritable de la prière ou, plus globalement, le service de D.ieu qui est attendu de l’homme. Celui-ci est assumé : “ de tout ton cœur ”, c’est-à-dire : “ par tes deux penchants ”(7). La Torah et les Mitsvot doivent être accomplies au moyen de ce qui se trouve ici-bas, car il est dit que : “ elle ne se trouve pas dans le ciel ”.

H) Un moyen de méditer à la signification des mots(8) ou bien de les ressentir est le suivant. Tout d’abord, il est clair que, si on lui consacre plus de temps, ce sentiment se développe. Par ailleurs, s’il est impossible de lui accorder plus de temps, on peut répartir une méditation en plusieurs étapes. On connaît, par exemple, le récit de mon père, le Rabbi(9) sur la manière dont priaient les ‘Hassidim appartenant à la première catégorie. Chaque jour, ils méditaient à une certaine partie de la prière, de la manière la plus profonde, puis, le lendemain, ils choisissaient un autre passage.

I) Vous dites que vous avez un doute sur la manière dont je considère telle personne, qui réunit…(10). Je suis surpris et même peiné que vous me soupçonniez de cela, alors que la Hala’ha est clairement tranchée par le Choul’han Arou’h selon laquelle “ la voix d’une femme…(11) ” et “ la mixité…(12) ”. J’en suis d’autant plus surpris que je l’ai écrit et souligné, à maintes reprises. Il y a là un point fondamental de la Torah de D.ieu et de ses Mitsvot, en particulier de la ‘Hassidout, soulignant que l’on doit aimer les créatures et les rapprocher de la Torah, mais non rapprocher la Torah d’elles, ce qu’à D.ieu ne plaise, en l’adaptant à ce qu’ils sont en mesure d’accepter. J’ai ajouté, en outre, qu’une décision hala’hique de la Torah est l’expression de la Volonté de D.ieu. Différents textes de notre sainte Torah et, en particulier, de la ‘Hassidout, l’établissent clairement. Il est bien évident qu’un homme de chair et d’os ne peut pas faire commerce de la Volonté du Saint béni soit-Il.

En un moment propice, je mentionnerai votre nom près du saint tombeau de mon beau-père, le Rabbi, dont le mérite nous protégera. Et, ce que vous déciderez pour le centre de vacances des enfants connaîtra la réussite, à la fois matérielle et spirituelle. Avec ma bénédiction pour donner de bonnes nouvelles,

Notes

(1) Voir, à ce sujet, la lettre n°7141.
(2) Certains s’y prêtent plus, d’autres moins.
(3) Chez celui qui se distingue par son intellect, on recherche, avant tout, l’émotion et vice versa.
(4) Le mal peut conserver sa force.
(5) Des souffrances et des terribles maladies.
(6) Celui qui reçoit l’enseignement de tous.
(7) Le bon et le mauvais.
(8) De la prière.
(9) Voir, à ce sujet, les lettres n°6628 et 6654.
(10) De très nombreuses personnes, à ses concerts.
(11) Est considérée comme un état de nudité.
(12) Des hommes et des femmes est rigoureusement interdite.