Lettre n° 7333

Par la grâce de D.ieu,
14 Sivan 5720,
Brooklyn,

Au grand Rav, distingué ‘Hassid qui craint D.ieu et se
consacre aux besoins communautaires, au multiples
connaissances, le Rav C. Y.(1),

Je vous salue et vous bénis,

Je fais réponse à votre lettre express du 12 Sivan, fin de la période de conclusion de la fête de Chavouot(2). Ma réponse vous est donc également adressée en express. En consultant vos courriers, je me suis aperçu que je n’avais pas encore répondu à ce que vous m’aviez écrit, concernant l’application de la règle selon laquelle “ le dixième sera sacré ”(3), lorsque les animaux quittent l’étable. Dans ma lettre(4), a été omise la référence au Likouteï Ha Chass, du Ari Zal, au traité Be’horot, qui dit, pour ce qui concerne notre propos : “ Le dixième est consacré en sortant par la porte. Comprends cela ”. Vous me faites remarquer que, d’après la partie révélée de la Torah, l’animal peut aussi être consacré quand il se trouve encore à l’intérieur de l’étable.

Il faut d’abord préciser que certains points sont définis, de la manière dont ils doivent être réellement, par l’enseignement profond de la Torah. On peut en citer pour exemple le point le plus général, le fait que chaque Mitsva s’accomplit par la pensée, ce que l’on doit avoir à l’esprit, par la parole, la bénédiction et par l’action, son application effective. Or, pour différentes Mitsvot, il n’est pas nécessaire d’avoir une quelconque idée à l’esprit. En outre, l’omission de la bénédiction ne fait pas obstacle à la pratique de la Mitsva. Je précise bien qu’il s’agit d’un exemple car, a priori, on doit effectivement avoir les pensées nécessaires et dire cette bénédiction.

Il n’en est pas de même pour la sortie de l’étable. En effet, on pourrait, d’emblée, considérer que celle-ci n’est pas nécessaire. En fait, ce n’est pas le cas. Bien au contraire, selon la Torah, il est une Mitsva que les animaux quittent l’étable et qu’on les compte au moyen d’un bâton, à l’occasion de cette sortie. A mon humble avis, y compris si l’on a d’ores et déjà procédé de la sorte, telle n’est pas, en réalité, la Hala’ha, qui doit être retenue, selon la partie révélée de la Torah. Voici sur quoi je me base pour l’affirmer :

A) On peut poser la question suivante, à propos du traité Be’horot 58b. Nos Sages affirment, comme un fait évident, que “ le dixième sera sacré ” en tout état de cause, même s’il n’a pas été désigné comme tel. Il n’en est pas de même pour la sortie de l’étable. En effet, des preuves sont recherchées, la concernant, qui semblent même s’équilibrer.

B) Le Rambam, dans ses lois des aînés, chapitre 8, au paragraphe 8, justifie la possibilité de s’acquitter de son obligation avec le compte des animaux qui convient, ce qui semble confirmer la nécessité de les faire sortir de l’étable, selon la question qui est posée par le Lé’hem Michné.

C) Les commentateurs de la Guemara, au traité Be’horot 58b et 59b, précisent qu’un compte valable inclut toutes les bêtes en mesure de sortir de l’étable, même si, concrètement, elles ne la quittent pas.

D) Point essentiel, comment considérer que l’animal qui n’est pas sorti de l’étable serait pleinement consacré ? A quel moment s’appliquerait cette consécration ? Si l’on fait sortir le dixième animal par une autre porte, en effet, celui-ci ne serait pas consacré, car il ne s’ajouterait pas aux neufs autres. En outre, sur quelle base distinguer la mort, qui est une perte définitive de la vie de la sortie d’un animal vivant par une autre porte ?

Or, on peut répondre à toutes ces objections si l’on admet que le dixième, restant dans l’étable, n’en est pas moins consacré, uniquement dans la mesure où, par la suite, il sortira, vivant, par la même porte que les autres. En pareil cas, il est rétroactivement établi que celui-ci avait bien été consacré. Il n’en est pas de même, en revanche, si le dixième animal est mort dans l’étable, auquel cas la Boraïta ne dit pas qu’il est consacré. Comme on l’a rappelé, cette situation peut être comparée à celle où l’animal sortirait par une autre porte. Les neuf premiers animaux sont alors dispensés de toute obligation de dîme parce que le compte a bien été établi de la manière qui convient.

Rachi, commentant le traité Be’horot 59b, réunit le cas du dixième animal mort dans l’étable et celui de sa sortie par une autre porte. Et, il en donne la raison : le compte a, en pareil cas, été établi de la manière qui convient. Pour ce qui fait l’objet de notre propos, cela veut bien dire qu’une sortie de l’étable est nécessaire, au moins à titre de clarification. A ce propos, le Likouteï Ha Chass du Ari Zal, qui m’a conduit à établir cette distinction, souligne qu’il est impossible de dire, à propos de l’Attribut de Mal’hout, que tout se fait de soi-même, comme on l’affirme à propos de l’Attribut de Bina, qui transcende l’enchaînement des mondes. C’est ce que je vous écrivais dans ma précédente lettre.

Vous m’écrivez aussi à propos de la manière de soulever le Séfer Torah(5) et je suis un peu surpris, à ce sujet, que vous ne mentionniez pas la coutume de ‘Habad dans l’article correspondant de l’Encyclopédie talmudique(6). En effet, nous déposons le Séfer Torah sur la table de lecture après l’avoir soulevé et avant de l’avoir rhabillé. Et, l’on peut constater un fait nouveau, en la matière. C’est précisément le Arou’h Ha Choul’han, qui légitime une telle manière de procéder et qui en fait l’éloge. J’ai lu, avec plaisir, à la fin de votre lettre, ce qui y est dit à propos du bicentenaire(7) et les actions que vous avez menées, en la matière. Bien que vous ne le précisiez pas, j’ai bon espoir que vous avez souligné, avec toute l’énergie nécessaire, la nécessité d’écarter l’erreur selon laquelle le Baal Chem Tov serait venu…(8) pour les Mitsvot que l’on met en pratique de la meilleure façon. L’une des raisons pour lesquelles je vous écris, à ce sujet, est la suivante. Il est bon de fournir cette précision à tout moment et vous le ferez donc, au moins à l’avenir. En effet, nombreux sont ceux qui commettent une telle erreur, même si certains le font parce qu’ils le veulent bien. Je vous remercie d’avoir adressé ici le contenu de la conversation que vous mentionnez à la fin de votre lettre et surtout le contenu des discours prononcés au cours de cette réunion. De fait, ils ne m’avaient pas encore été transmis.

M. Schneerson,

Notes

(1) Le Rav Chlomo Yossef Zevin, de Jérusalem. Voir, à son sujet, la lettre n°7066.
(2) Dont les sacrifices pouvaient être offerts jusqu’à cette date.
(3) Voir, à ce sujet, la lettre n°7356.
(4) Il s’agit de la lettre n°7199.
(5) Après sa lecture, pour le montrer à tous. Voir, à ce sujet, la lettre n°7282.
(6) Dont le Rav Zevin est l’auteur.
(7) Du Baal Chem Tov, célébré à Chavouot.
(8) Pour alléger la pratique des Mitsvot. Voir, à ce sujet, la lettre n°7052.