Lettre n° 8298

Par la grâce de D.ieu,
à l’issue du saint Chabbat
9 Tévet(1) 5722,
Brooklyn, New York,

Aux participants du cours de Guemara, avec ses
commentaires, en la synagogue Adat Yaakov,
à Brooklyn, que D.ieu vous accorde longue vie,

Je vous salue et vous bénis,

J’ai appris avec plaisir, par le distingué ‘Hassid qui craint D.ieu, aux multiples accomplissements, le Rav Moché Pin’has Ha Cohen(2), que votre groupe conclura, à l’issue du saint Chabbat Parchat Vaye’hi, l’étude du traité Taanit, puis qu’il commencera celle du traité Roch Hachana. Conformément à la coutume juive, on récite alors une formule de conclusion et l’on prononce aussi des propos d’encouragement, quand on achève un ouvrage de la Torah, un traité talmudique. Je voudrais donc, par la présente, prendre part à votre joie, grâce aux quelques lignes suivantes, qui portent sur la conclusion du traité Taanit.

Les trois familles(3) dont il est question dans ce texte(4) correspondent aux trois enseignements de Rabbi ‘Hya(5) : “ Une femme se distingue avant tout par sa beauté ”, “ une femme se distingue avant tout par ses enfants ”, “ une femme se distingue avant tout par ses bijoux ”. En effet, commentant le verset : “ Couronnez-vous de pièces d’or ”, Rachi explique : “ Donnez-nous des bijoux ”. Ces trois enseignements ont un même auteur et il est donc clair qu’ils ne se contredisent pas. En fait, chacun fait allusion à une catégorie spécifique de femmes et l’on peut en déduire ce qui en résulte pour le service de D.ieu des âmes juives, que le verset appelle : “ filles de Sion ”. Celles-ci s’adressent, chaque jour, à Chlomo, le “ Roi qui possède la paix ” et lui demandent de les choisir, de les élire, lors du don de la Torah(6), “ jour de Son mariage ”. Ceci permet de mieux comprendre la conclusion de la Michna du traité Taanit et la suite logique des idées : “ Elles disaient : jeune homme… De même, il est dit : Sortez et voyez, filles de Sion… le jour de Son mariage, c’est le don de la Torah ”.

Il est donc trois catégories d’âmes et trois formes du service de D.ieu. Il y a, tout d’abord, les plus belles, qui “ sont belles et n’ont pas de défaut ”. Celles-ci servent D.ieu d’une manière désintéressée, sincèrement(7) et avec amour, ainsi qu’il est dit : “ Oublie ton peuple(8) et la maison de ton père ”, car c’est de cette façon que : “ le roi désirera ta beauté ”. En conséquence, elles annoncent, demandent : “ Observe notre beauté, car une femme se distingue avant tout par sa beauté ”, représentant le sommet de la perfection, l’amour de D.ieu désintéressé. Les jeunes filles de bonne famille sont celles qui doivent invoquer le mérite et l’héritage des pères, qui n’ont pas disparu, mais restent intactes. Mais, un tel service de D.ieu n’est pas encore parfait. Il n’émane pas de l’amour de D.ieu duquel il est dit : “ Comme est beau… l’amour dans le plaisir ”(9), mais seulement de l’amour qui est enfoui dans le cœur de chaque Juif et qui est effectivement un héritage des pères. C’est ainsi qu’elles mettent en pratique toutes les Mitsvot de la Torah(10). De ce fait, elles disent, elles demandent : “ Observez la famille ”, se rattachant ainsi à “ Avraham, celui qui M’a aimé ”. En effet, “ une femme se distingue avant tout par ses enfants ” et “ les descendances des Justes(11) sont essentiellement les Mitsvot ”. Or, “ tout Ton peuple est constitué de Justes ”. Car, l’âme est descendue ici-bas dans le but de transformer(12) le corps par la pratique des Mitsvot.

Quant aux jeunes filles laides, elles ont consumé le mérite, Ze’hout, des ancêtres, de la même étymologie que Za’h, pur. Leur amour, hérité des pères, est caché, occulté(13), investi dans le sac des forces du mal. Que disaient-elles et que demandaient-elles ? “ Faites votre acquisition pour le Nom de D.ieu ”, “ Agis pour Toi et non pour nous ”, à condition de nous “ couronner de pièces d’or ”. En effet, “ les filles d’Israël(14) sont gracieuses ”. Les Juifs sont “ croyants, fils de croyants ”(15). Ils veulent s’attacher à D.ieu et non se séparer de Lui, ce qu’à D.ieu ne plaise. Pour autant, “ la pauvreté les rend laides ”. Or, “ il n’est de pauvreté que par l’esprit ”(16) et celle-ci masque leur beauté, leur désir véritable(17). Elles souhaitent donc obtenir la richesse, être incitées d’en haut à la Techouva, ainsi qu’il est dit : “ Eternel, fais-nous revenir vers Toi ” et, de la sorte, “ nous reviendrons ”.

De façon générale, il convient de distinguer trois catégories, les Justes, les “ hommes moyens ”et les impies. Et, ce qui vient d’être exposé permet de mieux comprendre la suite de la Guemara, après cette Boraïta : “ Oula enseigne : Le Saint béni soit-Il organisera une danse pour les Justes ”. Or, “ tout Ton peuple est constitué de Justes ”. Dès lors, “ chacun Le désignera du doigt ”. En effet, “ aucun d’entre eux ne sera écarté ”. D.ieu accèdera à la requête et à la demande de toutes les catégories des enfants d’Israël, “ Je suis à mon Bien-Aimé et mon Bien-Aimé est à moi ”.

Ce qui vient d’être dit introduit une allusion et un lien entre la conclusion et l’introduction du traité Roch Hachana : “ Il est quatre débuts d’année. Le 1er Nissan est le nouvel an des rois ”. Ceci concerne spécifiquement le roi d’Israël, qui “ a pour but et pour objet d’élever la vérité ”, de la conduire à la perfection, “ d’emplir le monde de justice ”, de Torah et de Mitsvot, les “ enfants ” précédemment définis, “ de briser le bras des impies ”(18), des femmes laides. Tout ceci s’applique au service de D.ieu, permet à l’homme de gravir l’échelle dont la base est plantée en terre et dont le sommet parvient jusqu’au ciel. Il faut alors se hisser du plus simple vers le plus complexe, monter, effectuer un pèlerinage(19), ce qui veut dire, comme le précise la Guemara, qu’il existe un ordre de ces fêtes, celle des Matsot, lorsque les enfants d’Israël étaient “ nus et dépourvus de tout ”, embourbés(20) dans les quarante-neuf portes de l’impureté. Alors, “ se révéla à eux le Roi, Roi suprême, le Saint béni soit-Il et Il les libéra ”. Puis, vient la fête de Chavouot, le don de la Torah, lorsque les enfants d’Israël dirent : “ Nos enfants seront nos garants ”(21). Enfin, la fête de Soukkot est celle de l’engrangement, le sommet de la joie et de la perfection, “ début du compte ”(22), victoire d’Israël(23) dans tous les domaines. Avec mes respects et ma bénédiction,

Notes

(1) Le Rabbi note, en bas de page : “ 9 Tévet : Voir le Tour et Choul’han Arou’h, Ora’h ‘Haïm, lois du jeûne, au chapitre 580, qui dit que l’on doit jeûner, à cette date, mais nos Sages n’en précisent pas la raison. Toutefois, on sait qu’il est une objection soulevée, à cette référence, par le Toureï Zahav et les derniers Sages et qui est exposée par le Dvar Yom Be Yomo, à propos des Seli’hot du 10 Tévet, avançant que, selon différents textes, c’est à cette date qu’est mort Ezra le scribe. Je n’ai cependant pas eu le mérite de comprendre cette objection opposée au Tour. En effet, ses propos sont une citation de la fin du Meguilat Taanit. Il faut en conclure que, selon le Meguilat Taanit, telle n’est pas la raison de ce jeûne, même si l’on admet que cette date est bien celle de la mort d’Ezra. L’objection peut donc, bien au contraire, être soulevée contre l’auteur des Seli’hot. Comment peut-il s’écarter de l’avis du Meguilat Taanit ? Mais, peut-être reproduit-il un autre Midrash, qu’il a trouvé par ailleurs. ” On verra, en outre, à ce sujet, la lettre n°8561.
(2) Le Rav M. P. Kats.
(3) Les belles jeunes filles, les jeunes filles de bonne famille et les jeunes filles laides, comme on le verra plus loin.
(4) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le commentaire du Eïn Yaakov, à cette référence. Le Eïn Yaakov lui-même introduit une quatrième famille, celle des jeunes filles riches. Mais, l’on peut penser qu’il est deux formes de beauté, celle qui est acquise d’emblée et celle que l’on obtient grâce à la richesse. Ceci implique, pour le service de D.ieu, les distinctions suivantes. Le Juste peut être celui qui l’a toujours été ou bien celui qui est parvenu à la Techouva. Pour ce qui est du roi, dont il est question par la suite, il faut distinguer ce qui le caractérise, son empressement et ses désirs, selon le verset ‘Habakouk 1, 9, de sa pensée, c’est-à-dire de sa perception et de sa compréhension. Il en est de même pour les fêtes, la troisième incluant en elle à la fois Soukkot et Chemini Atséret. On examinera attentivement tout cela, mais ce point ne sera pas développé ici. ”
(5) Le Rabbi note, en bas de page : “ Dans le traité Ketouvot 59b ”.
(6) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, à la fin du chapitre 64, qui dit : ‘en prononçant les mots : ‘Tu nous as choisis’, on se souviendra du don de la Torah’. ”
(7) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Rambam, lois de la Techouva, au chapitre 10. ”
(8) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Midrash Béréchit Rabba, au début de la Parchat Le’h Le’ha, le Chneï Lou’hot Ha Berit, à cette référence, à la page 277b, le Torah Or, au début du premier discours ‘hassidique intitulé : ‘Réjouis-toi et sois heureux ”.
(9) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir Iguéret Ha Kodech, de l’Admour Hazaken, au chapitre 18 ”.
(10) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Tanya, à partir du chapitre 18 ”.
(11) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Midrash Tan’houma, le commentaire de Rachi au début de la Parchat Noa’h et le traité Sotta 46a ”.
(12) Le Rabbi note, en bas de page : “ Tanya, au chapitre 37 ”.
(13) Le Rabbi note, en bas de page : “ Selon le Tanya, aux chapitres 19 et 24 ”.
(14) Le Rabbi note, en bas de page : “ D’après le traité Nedarim 66a ”.
(15) Selon le traité Chabbat 97a.
(16) Voir le traité Nedarim 41a.
(17) Le Rabbi note, en bas de page : “ Rambam, lois du divorce, à la fin du chapitre 2 ”.
(18) Le Rabbi note, en bas de page : “ Rambam, lois des rois, à la fin du chapitre 4. La conclusion de ce texte est la suivante : ‘de mener les combats de D.ieu’. Ceci inclut les trois points qui ont été précédemment cités et en énonce la raison. On peut également penser que c’est là le but et l’objet du roi auprès des nations, mais non des enfants d’Israël ”.
(19) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Likouteï Torah, Parchat Bera’ha, à la page 98b. On consultera ce texte ”.
(20) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Zohar ‘Hadach, au début de la Parchat Yethro ”.
(21) Le Rabbi note, en bas de page : “ Midrash Chir Hachirim Rabba, sur le verset : ‘Attire-moi’ ”.
(22) Des fautes dont il faudra obtenir l’expiation lors du Yom Kippour suivant.
(23) Le Rabbi note, en bas de page : “ Midrash Vaykra Rabba, au chapitre 30 ”.