Lettre n° 8810

Par la grâce de D.ieu,
Nissan 5724,

Au distingué ‘Hassid qui craint D.ieu, le Rav Naphtali(1),

Je vous salue et vous bénis,

Je fais réponse à votre question(2). Vous me demandez la signification du terme Che’hina, désignant la Présence divine(3), qui apparaît, à maintes reprises, dans les propos de nos Sages. Ceci est particulièrement bien expliqué dans les livres de ‘Hassidout et les discours ‘hassidiques, dans de nombreux textes. Vous en trouverez les références dans les index figurant, en particulier, à la fin du Tanya, du Torah Or et du Likouteï Torah. Néanmoins, je répondrai ici, au moins brièvement, bien entendu sans rechercher l’exhaustivité, ce qui est impossible dans ce cadre.

D.ieu est le sommet de la perfection, transcendant toute limite et toute entrave. Il en résulte, comme le dit l’Admour Hazaken(4), que la création des mondes n’est pas l’aspect essentiel de la Divinité. Simultanément, pour reprendre la formulation du Rambam(5), dans ses lois des fondements de la Torah, “ Il est à l’origine de toute existence et tous ceux qui existent ne sont que par la vérité de Son Existence ”. Tous ceux qui existent ont besoin de Lui et, tout comme une créature ne peut pas réellement comprendre la création à partir du néant, elle ne peut pas non plus percevoir la Divinité, y compris en la création du monde et en l’existence de tous les êtres. Pour reprendre l’affirmation des philosophes d’Israël, “ si je Le comprenais, je serais Lui ”.

Certes, on perçoit, on comprend qu’aucun être ne se crée lui-même et l’on doit en conclure que l’existence créée a une source, à l’origine de son existence. Mais, cette idée n’est qu’une prise de conscience de l’existence du Créateur, non une compréhension, même s’Il est à l’origine de la création. L’expression du Rambam, précédemment citée, d’après laquelle tous ceux qui existent ont besoin de lui signifie qu ce besoin est lié non seulement à l’essence même de l’existence, mais aussi à tout ce que celle-ci implique, à la vitalité, au moindre détail. En tout cela, chaque être a besoin de D.ieu. Néanmoins, d’après la ‘Hassidout(6), à la différence de ce que dit le Guide des égarés, la Providence s’applique jusqu’au moindre détail, y compris le plus insignifiant, car D.ieu voulut qu’il en soit ainsi. Sa Volonté fut(7) d’accorder Sa Providence et Sa révélation ici-bas, y compris en ce que l’homme perçoit par son intellect.

Comme le dit le chantre d’Israël(8), “ quand je vois Tes cieux… Tes doigts… ”, ceci délivre un enseignement à l’homme, dans le service du Créateur, “ levez les yeux vers les hauteurs et voyez Qui a créé tout cela ”(9), comme l’explique longuement Rabbi Yo’hanan Ben Zakaï(10), commentant ce verset. C’est aussi l’introduction et le fondement du Séfer Ha ‘Hakira du Tséma’h Tsédek, petit-fils et successeur de l’Admour Hazaken. Ainsi, lorsque la Divinité se révèle ici-bas, au point d’être perceptible aux créateurs, on parle de Che’hina, terme qui désigne, étymologiquement, Celui Qui réside, Qui s’introduit. Et, il y a bien là un point essentiel, de sorte qu’il n’y a pas lieu de distinguer chaque détail, ce qu’à D.ieu ne plaise. Seul l’être créé qui réfléchit peut constater qu’il comprend un aspect mais ne saisit pas l’autre. Néanmoins, dans la réalité, il n’y a nullement là des aspects, au pluriel, mais bien une existence unique, totalement infinie.

Et, l’on peut avancer le raisonnement “ a fortiori ” suivant(11) : si l’âme d’un homme, bien qu’elle ne puisse être segmentée en deux cent quarante huit parties, ni en trois cent soixante cinq ou en six cent treize, n’en est pas moins perceptible à l’œil de l’homme, qui distingue la vitalité du pied de celle du cerveau, alors que l’une et l’autre sont identiques, que l’âme vivifie tout le corps, combien plus en est-il ainsi pour D.ieu Lui-même, sans qu’aucune comparaison ne soit pas possible, en la matière ! En conséquence, quand on dit que la Che’hina réside dans le Temple, il n’y a là aucun sens limitatif, ce qu’à D.ieu ne plaise. Cela souligne uniquement que la Présence de D.ieu réside, s’introduit en cet endroit, au point d’y être perceptible à l’œil physique. Là, l’arche sainte n’occupait pas de place et dix miracles s’y produisaient.

Comme je l’ai indiqué ci-dessus, ceci n’est qu’un aspect de l’explication que l’on peut donner à propos de la Che’hina. Il y en a de très nombreuses autres et, même sur cet aspect, différentes autres précisions pourraient être apportées, que l’on trouve dans les livres de ‘Hassidout et dans les discours ‘hassidiques. J’espère que vous avez un temps fixé pour l’étude de la ‘Hassidout, chaque jour et, d’une manière accrue, pendant le Chabbat qui est saint pour D.ieu. Avec mes respects et ma bénédiction pour une fête de Pessa’h cachère et joyeuse,

Notes

(1) Le Rav N. Josephson, de Tel Aviv.
(2) Voir le Likouteï Si’hot, tome 11, à la page 317.
(3) Voir, à ce sujet, la lettre n°8555.
(4) Voir, en particulier, le Torah Or, Meguilat Esther, à la page 99b et le Likouteï Torah, Chir Hachirim, à la page 8a.
(5) Voir le Likouteï Si’hot, tome 27, page 263 et dans les références citées à la note 26.
(6) Voir, à ce sujet, la lettre n°94.
(7) Voir le Likouteï Si’hot, tome 29, à la page 30 et dans les références indiquées à la note 35*.
(8) Le roi David. Tehilim 8, 4.
(9) Ichaya 40, 26.
(10) Voir les additifs du Séfer Ha ‘Hakira, à partir de la page 101.
(11) Voir, à ce sujet, le chapitre 51 du Tanya.