Lettre n° 8895

[début de Mar’hechvan 5725]

Vous(1) m’interrogez sur l’enseignement de nos Sages selon lequel on n’oublie pas un défunt en son cœur(2) pendant une période de trente jours, selon le traité Moéd Katan 8a et de douze mois selon le traité Bera’hot 58b. Le contexte fait la preuve que le traité Moéd Katan parle ici de l’oubli de sa douleur et le traité Bera’hot, de l’oubli de la personne.

Ceci nous permettra de comprendre pourquoi un tel oubli est un décret(3), comme le souligne Rachi, dans son commentaire du verset Vayéchev 37, 35, de même que le changement de formulation adopté par nos Sages, qui ajoutent, dans le traité Bera’hot, le terme : “ seulement ”(3), remettant en cause ce qui avait été exposé au préalable. En effet, il est naturel qu’il en soit ainsi.

Néanmoins, j’ai toujours été surpris qu’en la matière, on ne fasse pas un cas particulier du père et de la mère, puisque l’obligation(3) du deuil, les concernant, est de douze mois, de même que la peine qu’on éprouve, laquelle doit être distinguée de la souffrance dont fait mention le commentaire de Rachi sur le traité Soukka 25a, puisque celle-ci n’est pas imposée. Et, l’on adopte une conclusion positive.

Notes

(1) Cette lettre est adressée au Rav Hillel Medalyé, par la suite rabbin d’Anvers, Belgique et rédigée à même son courrier, qui est daté de la veille du 26 Tichri 5725. Voir, à son sujet, la lettre n°7612.
(2) Le Rav Medalyé écrivait : “ J’introduirai la précision suivante dans le but de manifester ma grande affection : le traité Moéd Katan 8a enseigne : ‘On ne doit pas prononcer d’oraison funèbre trente jours avant une fête’ et il est précisé, à ce propos : ‘Pourquoi trente jours ? Rav Kahana a dit au nom de Rav Yehouda, s’exprimant lui-même au nom de Rav : Il est arrivé qu’un homme ait mis de l’argent de côté pour se rendre au pèlerinage. Quelqu’un qui prononçait des oraisons funèbres se plaça devant sa porte, son épouse prit cet argent, le lui donna et le mari fut incapable d’effectuer ce pèlerinage. Chmouel dit : c’est parce qu’on n’oublie pas un défunt en son cœur pendant trente jours. Et, il y a une différence entre ces deux explications dans le cas où l’oraison funèbre est prononcée gratuitement’. On peut se demander pourquoi Rav ne craint pas que cette oraison funèbre soit prononcée pendant la fête, y compris quand elle est gratuite. En outre, se pose également la question qui est soulevée par les Tossafot. Mon père, de mémoire bénie, explique, à ce propos, que Rav maintient ici une conception qu’il a déjà adoptée par ailleurs, dans le traité Bera’hot 58b : ‘On n’oublie le défunt en son cœur qu’au bout de douze mois’. Peu importe donc qu’il s’agisse de cette fête ou de la suivante. Sur la base de tout cela, on pourrait autoriser cette oraison funèbre quand elle est gratuite et, en l’occurrence, elle est interdite uniquement à cause du récit ayant été rapporté par le traité Moéd Katan ”.
(3) Le Rabbi souligne les mots : “ décret ”, “ seulement ” et “ obligation ”.