Lettre n° 9080
Par la grâce de D.ieu,
25 Tévet 5726,
Brooklyn, New York,
Je vous salue et vous bénis,
J’ai reçu votre lettre avec énormément de retard. De mon côté également, ma réponse a été retardée, du fait de mes nombreuses activités et vous voudrez bien m’en excuser. Vous m’écrivez que ‘Habad organise un séminaire de formation des enseignants, qui est destiné aux élèves de Yechiva. Vous m’en énoncez les raisons et vous m’en soulignez la grande nécessité. Je suis d’accord avec la plupart des raisons que vous invoquez, mais, néanmoins, vous m’excuserez de devoir dire que cela n’est pas le rôle de ‘Habad, pour plusieurs raisons également, y compris certaines que vous admettrez, à mon sens, même si, sur le principe, nul ne peut contester l’intérêt d’une telle initiative.
En effet, si l’on disposait de moyens humains plus importants, en général et, chez ‘Habad, en particulier, si, en outre, tout ce qui ne peut pas être fait par les autres et doit être pris en charge par ‘Habad était déjà réalisé, on pourrait peut-être envisager un tel projet, mais, malheureusement, tous les mouvements orthodoxes, y compris ‘Habad, souffrent d’un terrible manque de moyens humains. De ce fait, la priorité doit être accordée à ce qui concerne, en premier chef, les personnes de ‘Habad. Car, avec toute l’abnégation dont ils font preuve pour leur mission et tout leur travail, il leur reste encore beaucoup à faire. Il faut ajouter, élargir. A l’opposé, lorsque tous reconnaissent l’intérêt d’un certain projet et que nombreux sont ceux qui peuvent le mener à bien, je pense que ‘Habad n’a pas le droit de s’y consacrer, d’après les principes de la justice et, avant tout, d’après la Torah. La Guemara l’établit clairement, dans le traité Moéd Katan 9a-b et elle conclut que, par référence à une Mitsva dont on peut confier la pratique à quelqu’un d’autre, on peut dire de la Torah(1) que : “ toutes les valeurs ne l’égalent pas ”(2). Et, la Guemara n’introduit pas de distinction selon qu’il n’y ait qu’une seule Mitsva ou plusieurs, ou encore en fonction de la nature de cette Mitsva. En revanche, il n’en est pas de même pour les Mitsvot dont on ne peut pas confier la pratique à quelqu’un d’autre. Même de moindre importance, celles-ci restent prioritaires et il est nécessaire de les respecter. A quelqu’un comme vous, il est sûrement inutile d’en dire plus.
C’est sur tout cela qu’est fondée ma position, en la matière. L’enseignement et l’éducation ont toujours été des domaines primordiaux et le sont encore plus, à notre époque et en notre Terre Sainte. Pour autant, il reste impossible de repousser une Mitsva, y compris moins importante, si d’autres ne la mettront pas en pratique. Avec mes respects et ma bénédiction,
Me fiant à notre rencontre et à notre échange épistolaire, je me permettrai d’exprimer le souhait que vous avez bien célébré le jour propice du 19 Kislev. Vous connaissez sûrement le récit de ce jour, l’emprisonnement et la délivrance(3).
Notes
(1) Michlé 8, 11.
(2) L’étude de la Torah est donc prioritaire par rapport à l’accomplissement d’une telle Mitsva.
(3) De l’Admour Hazaken, des prisons tsaristes.