Lettre n° 9266

[Jeudi 23 Tévet 5727]


Vous m’interrogez(1) sur la consolation d’un endeuillé au moyen d’une lettre(2). Cette Mitsva, comme son nom l’indique, doit permettre à l’endeuillé d’être consolé. Bien plus, le Rambam écrit, dans ses lois du deuil, au début du chapitre 14, que ceci constitue un acte de bienfaisance, ce qui est envisageable également par écrit. De fait, la bienfaisance peut être faite par un intermédiaire, selon le verset Chmouel 2, 10, 3, qui établit que l’on ne doit pas nécessairement l’accomplir personnellement. Certes, le Rambam, à cette même référence, précise : “ Voici la bienfaisance que l’on met en pratique physiquement ”, mais son but est uniquement de la distinguer de la Tsédaka, qu’il mentionne au paragraphe 3. On peut tirer une preuve également du fait de porter sur l’épaule, ce qui peut être renforcé en fonction de ce qui est dit par la suite, chapitre 14, au paragraphe 6, montrant que la bienfaisance est concevable envers les vivants comme envers les morts. Or, il est clair que, pour ces derniers, il n’y a pas de différence entre une parole et une lettre. Et, l’on consultera, à ce sujet, le traité Chabbat 153a, qui dit : “ un mort n’a pas… ”. On peut donc concevoir une consolation des endeuillés qui ne soit un acte de bienfaisance qu’envers les morts. C’est précisément l’objet de la discussion entre le Rabad et le Rambam, dans les lois du deuil, chapitre 13, au paragraphe 4, mais ce point ne sera pas développé ici.


Certes, il appartient à l’endeuillé de parler le premier(3). Néanmoins, il est logique de penser qu’il n’y a pas lieu de s’adresser à chacun de manière spécifique(4). Parler à l’un permet de consoler également tous les autres, comme l’établit le sens simple du verset sur la nécessité de prendre la parole le premier : “ Nul ne parlait… car la douleur était très grande ”. Par la suite, Job parla, puis : “ Elipaz répondit… ”, selon la fin du chapitre 2 de Job et la fin du traité Moéd Katan. Autre point, qui est essentiel, si l’endeuillé ouvre lui-même la lettre, même s’il a conscience que celle-ci a pour but de le consoler, il n’est pas une meilleure façon de lui faire prendre l’initiative.


En fonction de tout ce qui vient d’être dit, à quelqu’un qui ne peut pas venir personnellement consoler l’endeuillé, pour des raisons indépendantes de sa volonté et malgré son profond désir de le faire, s’offrent deux possibilités. Il peut le faire par un intermédiaire, comme on l’a déduit du verset ou encore par une lettre. De fait, il me semble que de nombreuses responsa commencent ou finissent par la formule de la consolation des endeuillés. Chacune de ces possibilités à son avantage et il est donc préférable de cumuler l’une et l’autre.


Notes


(1) Voir le Likouteï Si’hot, tome 20, à la page 359 et le Torat Mena’hem, Mena’hem Tsion, tome 2, à la page 479.
(2) Cette lettre est adressée au Rav Yossef Dov Ha Lévi Soloveitchik, de Boston, à la suite du décès de sa mère. Voir, à son sujet, la lettre n°8890.
(3) Voir, sur ce sujet, le Torat Mena’hem, Mena’hem Tsion, tome 2, à la page 628.
(4) Le Rabbi souligne l’expression : “en particulier”.