Rambam 3 Chapitres

Notons que bon nombre de ces lois ne sont pas la halakha, c'est-à-dire la pratique observée dans les communautés juives. Elles ne sauraient donc en aucun cas être prises comme référence. Veuillez noter également que cette version est un premier essai qui fera l'objet de corrections ultérieures.

23 'Hechvan 5785 / 11.24.2024

Lois relatives aux dommages [causés] par les biens [d’une personne] : Chapitre Trois

Ce chapitre étudie les dommages relevant de la catégorie générale dite de la « dent ».
On envisage différentes hypothèses de dommages résultant de la présence d’un animal dans une propriété privée, avec ou sans l’autorisation du propriétaire.


1. Un animal est [considéré comme] mouad pour [l’action de] consommer des produits [du champ], des légumes et ce qui est semblable.
C’est pourquoi, si un animal, entré dans le domaine de la victime du dommage, a consommé des produits qu’il mange habituellement, le propriétaire de l’animal doit payer [la réparation de] l’entier dommage, ainsi qu’il est dit [Ex. 22, 4] : « [en envoyant son bétail] paître dans le champ d’autrui, [il paiera] du meilleur de son champ… »
Si l’animal a mangé [les produits d’autrui] dans le domaine public, le propriétaire est exempt. Et si l’animal a tiré un profit , son propriétaire doit payer le profit qu’il a tiré, non [la réparation du] dommage causé.

2. Comment cela ? Si l’animal est entré dans le domaine de la victime du dommage, et a mangé des graines de sésame, des châtaignes ou quelque chose de semblable, de la valeur d’un dinar, le propriétaire de l’animal doit payer un dinar [au maître des lieux].
[En revanche,] si l’animal a mangé ces produits dans le domaine public et en a tiré un profit, on considère [ces produits consommés] comme de l’orge ou des épis d’orge , et le propriétaire de l’animal doit payer [selon] le prix bas des épis d’orge ou de l’orge.

3. Si l’animal a consommé des aliments qui lui sont nuisibles, par exemple, s’il a mangé du blé, étant donné qu’il n’en a pas tiré de profit, son propriétaire est exempt.
Si l’animal a mangé des choses qu’il ne mange pas habituellement, par exemple, un vêtement ou des ustensiles, que ce soit dans le domaine de la victime du dommage ou dans le domaine public, son propriétaire doit payer [la réparation de] la moitié du dommage, car cela est une déviation [de la norme, donc un cas dérivé de « la corne ». Par ailleurs, on ne peut exempter le propriétaire de l’animal en invoquant le principe mentionné au ch. 2 § 19 (d’un comportement anormal à l’égard d’une personne qui s’est elle-même écartée de la norme) car en l’occurrence, la victime n’a pas dévié de la norme. En effet,] il est dans l’habitude des gens de poser leurs ustensiles ou leurs vêtements dans le domaine public le temps de se reposer un peu.

4. Si un animal arrache des produits [agricoles] du domaine public et les mange, alors qu’il se trouve dans le domaine de la victime du dommage [le propriétaire des produits], ce cas fait l’objet d’un doute [dans le Talmud].
C’est pourquoi, le propriétaire de l’animal ne doit payer que le profit tiré. [Toutefois,] si la victime se saisit [d’un bien appartenant au propriétaire de l’animal d’une valeur égale à la réparation] du dommage causé, on ne [doit] pas [le] lui retirer, car l’animal a mangé [les fruits] dans son domaine.

5. Si un chien entre dans une cour [privée], prend du pain ou de la viande, [puis] les sort dans le domaine public ou dans une autre cour [qui appartient à d’autres personnes], et les mange à cet endroit, le propriétaire du chien doit payer le profit tiré [par son chien et non le prix de la nourriture consommée] .
Si le chien consomme [ces aliments] dans un champ qui appartient au propriétaire de la cour [où il les a pris], le propriétaire du chien doit payer [la réparation de] l’entier dommage, comme si le chien avait mangé à l’intérieur de la cour. Car il [les] a mangés [finalement] dans le domaine de la victime du dommage. Il en va de même pour tout cas semblable.

6. Si un animal consomme des aliments qu’il ne mange pas habituellement, mais qu’il [peut] consomme[r] par nécessité [s’il ne trouve rien d’autre], par exemple, si une vache mange de l’orge, un âne des vesces ou du poisson, un porc un morceau de viande, [ou encore] si un chien lèche de l’huile, un chat mange des dattes, et de même pour tout cas semblable, [la règle ci-après est appliquée].
Si l’animal a mangé [la nourriture] dans le domaine de la victime du dommage, le propriétaire de l’animal paye [la réparation de] l’entier dommage.
Et [si l’animal l’a mangée] dans le domaine public, son propriétaire est exempt. [Toutefois, dans ce dernier cas,] si l’animal [en] a tiré un profit, son propriétaire doit payer le profit tiré.

7. Si un animal « sauvage » (‘haya) déchire et mange un animal ou [mange] de la viande dans le domaine de la victime du dommage où il est entré, son propriétaire doit payer [la réparation de] l’entier dommage, car c’est là son comportement ordinaire.
Mais s’il s’agit d’un chien qui a mangé des agneaux [même] petits ou d’un chat qui a mangé de grands coqs, le propriétaire doit [seulement] payer [la réparation de] la moitié du dommage, un tel comportement étant une déviation [de la norme].

8. [Soit le cas suivant :] un panier contenant du pain [se trouve dans une propriété privée] ; un âne entre, casse le panier et mange le pain. [Dans ce cas,] le propriétaire de l’âne doit payer, pour le panier [cassé] ainsi que pour le pain [mangé], [la réparation de] l’entier dommage, car tel est le comportement ordinaire [d’un âne].
De même, si un bouc voit un navet ou un [aliment] semblable sur l’ouverture d’une jarre, s’accroche à la jarre, mange le navet et brise la jarre, [le propriétaire du bouc] doit payer, pour les deux [le navet mangé et la jarre brisée], [la réparation de] l’entier dommage. [Cela est considéré comme un comportement ordinaire de la part de l’animal,] car de même qu’il est dans son habitude de manger, de même est-il dans son habitude de se suspendre aux ustensiles et de monter pour manger. Il en va de même pour tout cas semblable.
Mais [dans le premier cas,] si l’âne entre et mange le pain, puis brise le panier, le propriétaire de l’âne doit payer, pour le pain [mangé], [la réparation de] l’entier dommage, et pour le panier [brisé], [la réparation de] la moitié du dommage. Il en va de même pour tout cas semblable.

9. Si un animal mange [des produits se trouvant] au milieu de la rue, [qu’il mange] au cours de la marche ou qu’il s’arrête [pour] manger, le propriétaire de l’animal doit payer le profit que l’animal a tiré [et non le prix de la nourriture ; la rue étant un domaine public, la nourriture n’aurait pas dû être laissée à cet endroit].
[Cette règle s’applique] même si l’animal tourne [sa tête] sur les côtés [de la rue] et mange [des produits qui s’y trouvent alors qu’il est lui-même au milieu de la rue ].
Mais si l’animal quitte la rue, va se tenir sur les côtés de la rue et mange [les produits qui s’y trouvent], le propriétaire de l’animal doit payer [la réparation du] dommage causé [il s’agit dans ce cas d’un dommage causé par « la dent » dans le domaine de la victime] .
Si l’animal mange [des produits] de l’entrée [la devanture] d’une boutique , le propriétaire de l’animal doit payer le profit [tiré par son animal]. [Si l’animal mange des produits] de l’intérieur de la boutique, le propriétaire doit payer [la réparation du] dommage causé.

10. Si un animal, marchant dans le domaine public, a étendu son cou et a mangé [un produit qui se trouvait] sur le dos d’un autre [animal], même s’il s’est arrêté, son propriétaire paye le profit tiré [par son animal et non le prix de la nourriture consommée]. Car c’est le comportement ordinaire des animaux que de manger [ce qui se trouve] sur le dos de l’autre.
[Cependant,] si l’animal a sauté [c'est-à-dire qu’il a redressé ses pattes de devant et s’est tenu sur l’autre animal ] pour manger [un produit se trouvant] sur le dos de l’autre, le propriétaire doit payer [la réparation du] dommage causé, car le dos de l’autre [animal] est considéré comme la cour de la victime du dommage [c'est-à-dire comme son domaine privé ; par conséquent, le propriétaire de l’animal qui a causé le dommage en est tenu à la réparation intégrale, cf. § 2].

11. Si un animal glisse sur une pierre ou sur son urine, tombe dans un jardin potager et se heurte contre des fruits ou des légumes [qui amortissent sa chute], ou mange [les fruits et légumes qui s’y trouvent], le propriétaire de l’animal doit payer [seulement] le profit tiré par son animal. Même si l’animal va d’une plate-bande à l’autre [et abîme les cultures du jardin], et même s’il y reste toute la journée, son propriétaire ne doit payer que le profit tiré [et non le dommage causé dès lors que l’animal y est entré par accident] . Quel profit [l’animal] a-t-il par son choc [sur les fruits ou les légumes] ? Le fait d’avoir trouvé un endroit tendre [pour l’amortir] et que ses organes ne se soient pas écrasés.
Mais si l’animal descend [dans le jardin] de manière normale et mange [des fruits du jardin], son propriétaire doit payer [la réparation du] dommage causé. [Dans ce cas,] même si [l’animal met bas et] souille les fruits avec le placenta [ce qui est un cas de force majeure], son propriétaire doit payer [la réparation du] dommage causé, car [l’incident] a commencé par une négligence [de sa part].
De même, si l’animal est poussé par un autre [animal du troupeau] et tombe, son propriétaire doit payer [la réparation du] dommage causé. [Il en est responsable] parce qu’il aurait dû faire passer les animaux du troupeau un à un pour qu’ils ne se poussent pas l’un l’autre.

12. [Soit le cas suivant :] un animal glisse, tombe [dans un jardin, puis] sort [de ce jardin, le propriétaire ayant pris connaissance de l’incident]. [Si l’animal] retourne au jardin, bien qu’il y retourne sans que le propriétaire en ait connaissance, celui-ci doit payer [la réparation] du dommage causé, parce qu’il aurait dû garder [son animal] pour [éviter] qu’il n’y retourne. Car c’est chose connue : dès lors que l’animal connaît le chemin du jardin, il y retourne de lui-même.

13. Si un potier introduit ses pots dans une cour privée sans autorisation et que l’animal du propriétaire les brise, ce dernier est exempt. Si cet animal subit un dommage avec les pots, le propriétaire des pots est tenu pour responsable.
Si le potier introduit [ses pots dans la cour] avec l’autorisation [du propriétaire, et que l’animal de ce dernier se blesse avec ceux-ci], le potier est exempt.
[Enfin,] si [les pots sont brisés] alors que le propriétaire [de la cour] a pris sur lui de les garder, ce dernier est tenu responsable.

14. De même, si une personne introduit ses produits [agricoles] dans une cour privée sans autorisation et que l’animal du propriétaire les mange, ce dernier est exempt. Si son animal glisse sur les produits et subit un dommage, le propriétaire des produits est tenu pour responsable.
[En revanche,] s’il introduit [ses produits] avec l’autorisation [du propriétaire de la cour, et que l’animal de ce dernier glisse et se blesse], il est exempt. Si le propriétaire [de la cour] prend sur lui de garder les produits [et que son animal les abîme], le propriétaire [de la cour] est tenu pour responsable.
S’il introduit ses produits sans [en avoir reçu l’]autorisation et que l’animal du propriétaire les mange, subissant un dommage à cause de cette consommation, le propriétaire des produits est exempt, car l’animal n’aurait pas dû les manger.
S’il introduit [ses produits dans la cour] avec l’autorisation [du propriétaire] et que le propriétaire de la cour laisse [le propriétaire des produits] autorisé dans la cour pour la garder, [puis,] que l’animal du propriétaire mange les produits et subit un dommage à cause de cette consommation, le propriétaire des produits est tenu pour responsable. En effet, dès lors qu’il a vu l’animal manger des produits qui lui sont nuisibles et l’a laissé [faire], il est tenu pour responsable, le propriétaire [de la cour] n’étant pas présent pour éloigner l’animal des produits.
Une fois , une femme entra dans la maison de ses voisins pour cuire [une pâte] dans le four. Ils la laissèrent et se retirèrent [par pudeur] pour ne pas la voir [les bras découverts] pendant qu’elle pétrissait et cuisait [la pâte]. La chèvre du propriétaire vint, mangea la pâte et mourut. Les Sages condamnèrent la femme à payer la valeur de la chèvre. Il en va de même pour tout cas semblable.

15. Si une personne fait un tas de gerbes dans le champ d’autrui sans en avoir [reçu] l’autorisation, et que l’animal du propriétaire du champ les mange, ce dernier est exempt.
Si l’animal du propriétaire glisse [sur les gerbes] et subit un dommage, le propriétaire des produits [les gerbes] est tenu pour responsable. [Toutefois,] si l’animal du propriétaire mange [les gerbes], et subit un dommage à cause de cette consommation, le propriétaire des gerbes est exempt.
S’il fait un tas de gerbes [dans un champ] avec l’autorisation [du propriétaire], ce dernier doit répondre [des dommages causés par son animal], bien qu’il ne se soit pas engagé à garder [les produits]. [La différence entre ce cas et les précédents est la suivante :] le gardien des aires de battage , dès lors qu’il permet à quelqu’un d’y faire un tas [de gerbes], est considéré comme s’il lui avait dit : « [Tu peux] faire un tas de gerbes ici et je [les] garderai pour toi ».

Lois relatives aux dommages [causés] par les biens [d’une personne] : Chapitre Quatre

Ce chapitre définit la notion de négligence dans la garde d’un animal.
Il aborde aussi la part de responsabilité du gardien (dépositaire, emprunteur, locataire…) et celle du propriétaire, et conclut par la méthode d’évaluation des dommages.


1. [Telle est la loi relative à] celui qui introduit des moutons dans un parc et les enferme avec une porte pouvant résister à un vent ordinaire : si [malgré cela,] un mouton sort et cause un dommage, il est exempt.
Si la porte du parc ne peut pas résister à un vent ordinaire ou si les murs du parc sont branlants, [on considère que] le propriétaire des moutons ne les a pas enfermés correctement ; [par conséquent,] si un mouton sort et cause un dommage, le propriétaire des moutons est tenu pour responsable. [Et ce,] même si le mouton sort en creusant [en dessous de la porte ou de la clôture, selon le cas, la faisant tomber, ce qui est un cas de force majeure]. [Plus encore,] même si une brèche s’ouvre dans la clôture pendant la nuit, ou si des bandits font une brèche, le propriétaire des moutons est tenu pour responsable [des dommages causés par les moutons sortis].
[En revanche,] dans le cas d’une clôture solide, si une brèche s’ouvre pendant la nuit ou est faite par des bandits, [puis] qu’un mouton sort et cause un dommage, le propriétaire est exempt. Si les bandits font [eux-mêmes] sortir le mouton et qu’il cause un dommage, les bandits sont tenus pour responsables.

2. [Soit le cas suivant : un bandit] fait une brèche dans la clôture devant l’animal d’un autre [pour le faire sortir, dans le but de voir le propriétaire payer les dommages causés par l’animal, et non dans l’intention de le voler comme dans le cas du § précédent] .
[Dans ce cas,] si la clôture est solide, le bandit doit répondre [des dommages causés par l’animal].
Si la clôture est branlante, il est exempt « selon la loi humaine » [c'est-à-dire qu’il ne peut être condamné par un tribunal rabbinique. C’est le propriétaire des moutons qui doit réparer le dommage pour avoir été négligent dans la garde de son animal]. [En revanche,] il est tenu responsable selon « la loi du Ciel » [c'est-à-dire qu’il a l’obligation morale de rembourser le propriétaire].
De même, celui qui place un poison mortel devant l’animal d’autrui est exempt selon la « loi humaine », mais est tenu responsable selon la « loi du Ciel ».

3. Celui qui place l’animal d’autrui sur la récolte sur pied d’un tiers est tenu de payer [la réparation du] dommage causé [par l’animal].
De même, s’il frappe l’animal avec un bâton jusqu’à ce qu’il aille sur la récolte sur pied d’un tiers et cause un dommage, il est tenu pour responsable .

4. Quand on confie son animal à [l’un des quatre « gardiens », à savoir] un gardien bénévole, un gardien rémunéré, un locataire ou un emprunteur, ce dernier prend la place du propriétaire ; [en conséquence] si l’animal cause un dommage, le gardien est tenu pour responsable.
Dans quel cas cela s’applique-t-il ? Quand le gardien n’a pas du tout gardé l’animal.
En revanche, s’il a gardé l’animal d’une garde parfaite, comme il convient [c'est-à-dire avec une porte pouvant résister à un vent inhabituel], et que l’animal soit sorti et ait causé un dommage, le gardien est exempt et le propriétaire doit répondre [du dommage] , même si l’animal tue un homme.
Si le gardien a gardé l’animal d’une garde médiocre [c'est-à-dire qu’il l’a enfermé avec une porte qui ne peut résister qu’à un vent ordinaire], [la règle suivante est appliquée :] s’il s’agit d’un gardien bénévole, il est exempt. S’il s’agit d’un gardien rémunéré, un locataire ou un emprunteur, il est tenu responsable .

5. Quand un animal un animal est laissé [dans son parc] exposé au soleil, même s’il creuse [sous la clôture, pourtant solide, en la faisant tomber , puis] sort et cause un dommage, celui qui a laissé l’animal à cet endroit est tenu responsable.
[En effet,] dès lors que l’animal reste exposé au soleil, il souffre et s’enfuit, faisant tout ce qui est en son possible.

6. Si une personne a confié son animal [un bœuf] à un sourd-muet, à un aliéné ou à un mineur , bien que le bœuf fût attaché, elle est tenue responsable [des dommages causés]. En effet, il est ordinaire pour un bœuf et les [animaux] semblables de défaire le nœud , de sortir et de causer un dommage.
Même si la personne inapte en question a assuré une garde parfaite de l’animal [c'est-à-dire, l’a enfermé dans un parc avec une porte pouvant résister à un vent inhabituel] et qu’il ait creusé [sous la clôture, en la faisant tomber], soit sorti et ait causé un dommage, le propriétaire est tenu responsable [car ce cas de force majeure a commencé par une négligence de sa part ].

7. [Soit le cas suivant :] une personne confie son bœuf à cinq [autres] personnes ; l’une d’elles est négligente, le bœuf sort et cause un dommage.
[Dans ce cas,] si le bœuf ne pouvait être gardé que par toutes les cinq personnes [réunies], celle qui a été négligente dans sa garde est tenue pour responsable. Et si le bœuf pouvait être gardé par les [quatre] autres [personnes seulement], elles aussi sont tenues pour responsables.

8. [Soit le cas suivant :] une personne emprunte un bœuf avec la présomption qu’il est tam ; il se trouve être mouad [pour ce qui est d’encorner et commet un dommage en donnant un coup de cornes.]
[Dans ce cas,] si l’emprunteur savait que le bœuf était sujet à encorner [mais non qu’il avait le statut de mouad], le propriétaire [du bœuf] doit payer [la réparation de] la moitié du dommage ; en effet, partout où le bœuf va, le nom de son maître est sur lui [il garde donc le statut de mouad] . L’emprunteur doit payer [la réparation de] la moitié du dommage, car même si le bœuf était tam (comme il pensait), il aurait [quand même dû] payer [la réparation de] la moitié du dommage, sachant que le bœuf était sujet à encorner.
Si l’emprunteur ignorait que le bœuf était sujet à encorner, il n’est aucunement tenu [à la réparation du dommage] et le propriétaire doit payer [la réparation de] l’entier dommage.

9. Un bœuf, emprunté avec le statut de tam et devenu mouad dans la maison de l’emprunteur [c'est-à-dire pendant la durée de l’emprunt], reprend son statut de tam quand il est restitué à son propriétaire.
[La raison est la suivante :] dès lors que le domaine du bœuf change, le statut de mouad est annulé. [Ainsi, en cas de dommage causé par l’animal après retour chez son propriétaire,] le propriétaire doit payer [la réparation de] la moitié du dommage et l’emprunteur est exempt, puisqu’il l’a rendu.

10. Si un gardien assume uniquement la garde du corps d’un animal, mais non la garde [juridique, c'est-à-dire la responsabilité pour les] dommages causés par l’animal, et que l’animal cause un dommage, le gardien est exempt et le propriétaire est tenu pour responsable.
Si le gardien assume la garde [juridique, c'est-à-dire la responsabilité pour les] dommages causés par l’animal, [mais non la garde de l’animal même,] et que l’animal cause un dommage, le gardien est tenu pour responsable. [Dans ce dernier cas,] si l’animal subit un dommage, le gardien est exempt et le propriétaire [peut] intenter un procès contre l’auteur du dommage.

11. Quand un gardien confie [un animal dont il a la garde] à un autre gardien, le premier gardien est tenu de payer [la réparation des dommages causés par l’animal] à la victime du dommage. Car un gardien qui confie [l’objet dont il a la garde] à un autre gardien est tenu pour responsable [en cas de dommage, même à cause d’une force majeure]. [En effet,] la victime peut dire au gardien : « Pourquoi n’as-tu pas gardé toi-même [l’animal], et l’as-tu confié à un autre ? Paye-moi, toi, et intente [ensuite] un procès contre le gardien à qui tu as confié [l’animal] » .
[Cependant,] si le gardien confie l’animal à son fils, à une personne de sa maisonnée ou à son aide, ces derniers prennent la place du gardien et sont tenus pour responsables [des dommages causés, car il est ordinaire qu’un gardien confie à son fils ou à l’un des membres de sa maisonnée un objet dont il a la garde].

12. [Telle est la loi pour] tout gardien qui est tenu de payer [la réparation d’un dommage causé par l’animal dont il a la garde] et n’a pas de quoi payer, quand l’animal qui a causé le dommage est tam [pour ce type de dommage], cas où l’auteur du dommage paye [la réparation de] la moitié du dommage avec le corps de l’animal qui a causé le dommage [cf. ch. 1 § 2 et 3] : la victime du dommage perçoit le paiement [de son indemnité] sur l’animal qui a causé le dommage, et la somme perçue par la victime du dommage restera une dette du gardien envers le propriétaire de l’animal.

13. [Telle est la loi pour] tout animal qui abîme des produits [du champ] attachés [à la terre, c'est-à-dire non cueillis] : on évalue le dommage qu’il a causé par rapport à [une surface égale à] soixante [fois la surface endommagée], et celui qui est tenu de payer [la réparation du dommage] – le propriétaire [de l’animal] ou le gardien [selon le cas, cf. supra] – paye [la somme ainsi évaluée à titre de réparation du dommage].
Comment cela ? Si l’animal mange [les produits du champ sur] un beit séa , on évalue combien valait [un terrain] de soixante beit séa dans ce champ avant [les dégâts causés sur un beit séa] et combien il vaut maintenant après que le beit séa a été détérioré ; le propriétaire ou gardien de l’animal [selon le cas] paye la différence.
Il en va de même si l’animal mange [les produits du champ sur un beit] kav ou [sur] le quart [d’un beit kav]. [Plus encore,] même [si l’animal mange] une seule tige, on évalue [le dommage] par rapport à [une surface où poussent] soixante [tiges].

14. Si l’animal mange des produits mûrs qui n’ont plus besoin de la terre [mais qui n’ont pas encore été cueillis], son propriétaire doit payer la valeur exacte des produits mûrs : si [l’animal a consommé] un séa [de produits], [le propriétaire doit payer] la valeur d’un séa [de produits] ; si [l’animal a consommé] deux séas [de produits], [le propriétaire doit payer] la valeur de deux séas [de produits] .
Si l’animal mange les fruits d’un palmier et, de même, si une personne cueille les fruits du palmier d’autrui et les mange, [la règle suivante est appliquée :] si c’est un palmier romain ou un [palmier] semblable, dont les dattes ne sont pas belles, on évalue le palmier par rapport à un terrain [qui comprend] soixante [palmiers, de la manière expliquée au § 13]. Si c’est un palmier persan ou un [palmier] semblable, dont les dattes sont très belles, on évalue le palmier séparément, [c'est-à-dire qu’on évalue] combien il valait avant [que les fruits aient été consommés], et combien il vaut maintenant [après la consommation des fruits, et le responsable paie la différence].

Lois relatives aux dommages [causés] par les biens [d’une personne] : Chapitre Cinq

Ce chapitre commence par expliquer qu’il est parfois possible d’abattre un animal susceptible de causer un dommage après en avoir dûment averti le propriétaire. Il enchaîne sur l’interdiction faite par les sages d’élever du petit bétail en Terre d’Israël pour y éviter les dommages. A cet égard, on évoque les conditions stipulées par Josué lors du partage de la Terre d’Israël, puis par le Roi Salomon. Il conclut sur les lois relatives à la garde du bétail en Terre d’Israël et à l’élevage d’autres animaux susceptibles de causer des dommages ailleurs.


1. Quand un animal qui pâture s’écarte et entre dans les champs ou les vignobles [d’autrui], bien que l’animal n’ait pas encore causé de dommage, on adresse un avertissement à son propriétaire, par trois fois. [Dès lors,] s’il ne garde pas son animal et ne l’empêche pas de pâturer [dans le champ d’autrui], le propriétaire du champ a le droit d’abattre l’animal d’une façon rituellement valide. Il peut dire [ensuite] au propriétaire de l’animal : « Viens, et vends ta viande ». Parce qu’il est défendu à un homme de causer [délibérément] un dommage et [même s’il a l’intention] de payer [la réparation de ce] dommage ; même occasionner [indirectement] un dommage est défendu.

2. C’est pourquoi, les Sages ont défendu d’élever des animaux du menu bétail [comme le mouton ou le bouc] et des petits animaux sauvages [comme le cerf ou le renard] en Terre d’Israël là où se trouvent les champs et les vignobles [car ces animaux endommagent les récoltes] ; [cela est permis] seulement dans les forêts et les déserts de la Terre d’Israël.
[En revanche,] en Syrie , [il est permis d’]élever [de tels animaux] partout.

3. Josué, avec son tribunal, stipula dix conditions [dix règles] lorsqu’il procéda au partage de la Terre [d’Israël entre les tribus] . Les voici :
- Première condition : on peut faire paître le menu bétail dans les forêts [privées] dont les arbres sont épais [sans que le propriétaire soit en droit de protester], mais on ne doit pas y faire paître le gros bétail. [En revanche,] dans une forêt dont les arbres sont fins, on ne peut faire paître le gros ou le menu bétail qu’avec le consentement du propriétaire.
- Deuxième condition : tout homme a le droit de recueillir du bois du champ d’autrui, à condition que ce soit du bois de peu de valeur, presque comme des épines, par exemple, la bugrane et le sainfoin. Et ce, pourvu que le bois soit humide [et non sec, parce qu’il peut alors servir à la combustion] et soit attaché [à la terre, non déjà coupé], et sous réserve de ne pas déraciner. Mais [recueillir] d’autres bois est défendu.
- Troisième condition : tout homme a le droit de cueillir les herbes qui poussent d’elles-mêmes en tout lieu [car ces herbes sont nuisibles aux produits], sauf dans un champ de fenugrec ensemencé pour [nourrir] un animal [où elles constituent aussi une bonne pâture pour les animaux].
- Quatrième condition : un homme peut couper à tout endroit un plant [d’arbre en vue de le repiquer], sauf [de la souche restante de] deux paumes d’un olivier. On ne peut couper des arbres :
- pour un olivier, qu’[un plant qui ne dépasse pas la taille d’]un œuf ;
- pour les roseaux et les vignes, que [la partie qui se trouve] à partir du nœud et au-dessus ;
- pour les autres arbres, qu’[une branche qui se trouve à] l’intérieur [de l’arbre, c'est-à-dire à hauteur moyenne, là où les branches sont les plus denses], mais non de sa partie supérieure [c’est-à-dire la branche centrale, la plus haute].
Et lorsqu’il permit de couper [un plant], il ne permit [de le couper] que d’une [branche] nouvelle [ayant poussé durant l’année et] ne produisant pas de fruits, mais non d’une vieille [branche] qui produit des fruits. [Enfin,] on ne peut couper [un plant] que d’un endroit [de l’arbre] qui n’est pas exposé au soleil.
- Cinquième condition : les habitants d’une ville peuvent s’approvisionner [en eau] d’une source ayant émergé nouvellement dans les limites [de la ville], bien que [la source] ne prenne pas son origine dans leur territoire. Et les autres ne peuvent pas s’approvisionner [en eau] de cette source avec eux.
- Sixième condition : tout homme a le droit de pêcher des poissons dans la mer de Tibériade, à condition de pêcher à la ligne uniquement . Mais seuls les membres de la tribu [de Naftali], qui ont reçu la mer [de Tibériade] dans leur part [de la Terre d’Israël], peuvent établir un gord et empêcher [ainsi] le passage des bateaux.
- Septième condition : tout homme [voyageur] qui doit [satis]faire ses besoins [naturels] peut s’écarter de la route, entrer [dans le champ] derrière la clôture [en pierre] qu’il rencontre [sur son chemin] et [satis]faire ses besoins à cet endroit, même si c’est un champ rempli de safran [plante odorante, endommagée par l’odeur nauséabonde des selles]. Il peut prendre une pierre de la clôture pour s’essuyer.
- Huitième condition : quiconque s’égare au milieu de vignes ou de [terrains] semblables peut frayer un chemin [en coupant les sarments gênants] et monter, ou frayer un chemin et descendre, jusqu’à ce qu’il retrouve sa route.
- Neuvième condition : lorsqu’il y a beaucoup de boue ou de creux [remplis] d’eau sur les routes publiques, les passants ont le droit de s’écarter sur les côtés des routes et de marcher à cet endroit, bien qu’ils marchent [alors] sur un chemin privé.
- Dixième condition : un mort [dont l’enterrement] est une mitsva [qui incombe à chacun, c'est-à-dire une dépouille humaine étendue en chemin, et il n’y a personne pour s’occuper de son enterrement] « acquiert » l’emplacement où il se trouve et doit être enterré à cet endroit même, à condition qu’il ne se soit étendu ni en travers du chemin, ni à l’intérieur des limites de la ville [sur un rayon de deux mille coudées tout autour de la ville]. Mais s’il se trouve en travers d’un chemin ou à l’intérieur des limites de la ville, on doit l’amener au cimetière.

4. [Le roi] Salomon institua que les passants aient le droit, en été [au terme de la moisson, une fois qu’il ne reste plus de produits dans les champs], de marcher dans les chemins des champs privés [et ce,] jusqu’à ce que tombe la « seconde » pluie [d’automne, c'est-à-dire jusqu’au 23 ‘Hechvan].

5. Toutes ces dispositions s’appliquent en tout lieu, même hors de la Terre [d’Israël].

6. En Babylonie, dès que la rosée est tombée, il est défendu de marcher sur les chemins privés.

7. Bien que l’on ne doive pas élever de menu bétail en Terre d’Israël [là où se trouvent des champs et des vignes ,], il est permis de garder un animal du menu bétail trente jours avant une fête de pèlerinage [pour les sacrifices] ou trente jours avant le festin [de mariage] d’un fils.
Un boucher [qui achète des animaux et les vend après les avoir abattus] peut acheter [des animaux du menu bétail] et [les] abattre, ou acheter [des animaux du menu bétail] et [les] retenir pour [les] abattre peu à peu, sous réserve qu’ils ne sortent pas et ne pâturent pas avec le troupeau. Plutôt, quiconque retient [un animal du menu bétail] doit le faire dans sa maison, afin qu’il ne cause pas de dommages.

8. Les Sages donnèrent à la Babylonie le même statut que la Terre d’Israël pour l’interdit d’y élever des animaux du menu bétail ou des petits animaux sauvages, parce que la majorité des champs et des vignobles [de ce pays] appartenaient à des juifs à cette époque.

9. De même, les Sages ont interdit d’élever des porcs en tout lieu. [On n’a pas] non plus [le droit d’élever] un chien, à moins qu’il soit attaché avec une chaîne. Mais on peut élever des chiens dans une ville proche de la frontière [entre Israël et une nation idolâtre, site qui doit être protégé] : on les attache [alors] le jour et on les détache la nuit [pour garder la ville].
Les Sages ont dit : « Maudit soit celui qui élève des chiens et des porcs », car les dommages qu’ils causent sont importants et fréquents.

10. Si un berger se repent [et décide de ne plus élever d’animal du petit bétail], on ne l’oblige pas à vendre [ses animaux] immédiatement ; plutôt, il peut [les] vendre petit à petit.
De même, celui qui reçoit en héritage des chiens et des porcs, on ne l’oblige pas à [les] vendre immédiatement ; plutôt, il peut [les] vendre peu à peu.