Rambam 1 Chapitre

Notons que bon nombre de ces lois ne sont pas la halakha, c'est-à-dire la pratique observée dans les communautés juives. Elles ne sauraient donc en aucun cas être prises comme référence. Veuillez noter également que cette version est un premier essai qui fera l'objet de corrections ultérieures.

30 Nissan 5785 / 04.28.2025

Lois relatives aux dommages [causés] par les biens [d’une personne] : Chapitre Treize


1. Si des « ustensiles » tombent dans une fosse et se brisent, le propriétaire de la fosse est exempt, ainsi qu’il est dit [Ex. 21, 33] : « et qu’un bœuf ou un âne y tombe » ; par tradition orale, les Sages ont appris [que cette loi concerne] un bœuf et non un homme, un âne et non des ustensiles [cf. supra ch. 12 § 16 et note 8]. Même si un bœuf tombe [dans une fosse] avec ses ustensiles [son harnachement, par exemple] qui se brisent, le propriétaire de la fosse doit répondre du [dommage causé à] l’animal et est exempt [de la réparation du dommage causé aux] ustensiles.

2. La « fosse » fait partie des catégories principales de dommages, et ses dérivés ont le même statut : ils sont mouad dès le début [c'est-à-dire qu’ils sont reconnus comme des sources de dommages, et dès le premier accident, la responsabilité est totale].
Quiconque pose un obstacle [dans le domaine public], cela est un dérivé de la « fosse ». Si un homme ou un animal subit un dommage du fait de cet obstacle, celui qui a posé l’obstacle paye [la réparation de] l’entier dommage, qu’il se soit désisté ou non de son droit de propriété sur l’obstacle. [En revanche,] si des ustensiles sont endommagés du fait de cet obstacle, celui qui a posé l’obstacle est exempt.

3. Comment cela ? Quand une personne pose sa pierre, son couteau, sa paille, sa charge ou quelque chose de semblable dans le domaine public, et qu’un homme ou un animal subit un dommage du fait de ceux-ci, le responsable est tenu de [réparer] l’entier dommage.
De même, s’il les pose dans son domaine et se désiste de son droit de propriété sur son domaine, mais non de son droit de propriété sur ceux-ci, puis qu’un homme ou un animal trébuche sur le sol et se heurte sur l’obstacle, subissant un dommage du fait de celui-ci, le propriétaire de l’obstacle est tenu pour responsable. Si des ustensiles [ou des vêtements] sont endommagés ou salis du fait de tous ceux-ci, il est exempt [il n’est pas tenu à la réparation du dommage].

4. Si quelqu’un fait entrer son bœuf dans une cour privée sans autorisation, puis que l’animal défèque et que les vêtements du propriétaire [de la cour] se salissent avec les excréments, il est exempt.
En effet, ces excréments sont un dérivé [du cas] de la fosse ; or, on ne trouve pas de [cas où le propriétaire d’]une fosse doit répondre [de la détérioration] des ustensiles.

5. Si une cruche est posée dans le domaine public, et qu’un passant trébuche dessus et la brise, ce dernier est exempt, car il n’est pas dans l’habitude des gens de contempler la route quand ils marchent.
Si le passant subit un dommage du fait de la cruche, le propriétaire de la cruche doit répondre des dommages causés par celle-ci, même s’il s’est désisté de son droit de propriété sur la cruche. En effet, quiconque se désiste de son droit de propriété sur une source de dommages [qu’il abandonne] à un endroit où il n’est pas autorisé à le faire depuis le début, doit répondre [des dommages], comme s’il ne s’était pas désisté de son droit de propriété.

6. Si quelqu’un pose sa cruche à un endroit où il y est autorisé, comme les coins des pressoirs à vin [publics] ou un [endroit] semblable, puis qu’un passant trébuche dessus et la brise, ce dernier est tenu pour responsable.
Si le passant subit un dommage du fait de la cruche, le propriétaire de la cruche est exempt, car le passant aurait dû regarder [où il marche, des cruches étant souvent laissées à cet endroit].
S’il faisait obscur, ou si toute la route a été remplie de cruches, le passant est exempt pour le bris des cruches. [Dans ce cas,] s’il trébuche sur une cruche, le propriétaire de la cruche est tenu pour responsable.
Il en va de même pour tout cas semblable.

7. Si la cruche d’un homme se brise dans le domaine public [par exemple, en portant sa cruche, il trébuche et la casse], si bien qu’un autre glisse sur l’eau ou se blesse avec les tessons, le propriétaire de la cruche est exempt selon la loi des hommes, parce qu’il a été victime d’une force majeure [et n’a pas brisé sa cruche intentionnellement]. Mais il est tenu pour responsable par la loi du Ciel [c’est-à-dire qu’il a une obligation morale de réparer le dommage], parce qu’il n’a pas enlevé les tessons.
[Le tribunal ne le condamne pas à la réparation du dommage, malgré sa négligence pour ne pas avoir ramassé les tessons parce que] les tessons et l’eau sont considérés comme sans propriétaire, et il n’a renoncé à son droit de propriété [sur ceux-ci] qu’après avoir été victime d’une force majeure [et non en abandonnant intentionnellement son bien dans le domaine public comme dans le cas du § 5], aussi est-il exempt. S’il a eu l’intention d’acquérir les tessons et qu’un autre ait subi un dommage du fait de ceux-ci, il est tenu pour responsable.
Identique est la loi si un chameau tombe et que son propriétaire ne le relève pas [de sorte qu’une autre personne ou qu’un autre animal trébuche et se blesse], ainsi que pour tout cas semblable.
Si des ustensiles sont endommagés par tous ces obstacles, le responsable est exempt, qu’il ait renoncé ou non à son droit de propriété [sur les obstacles], comme nous l’avons expliqué.

8. Si deux potiers marchent sur la route l’un après l’autre et que le premier trébuche et tombe, puis que le second trébuche sur le premier, [la règle suivante est appliquée :] si le premier avait [le temps de] se relever et ne l’a pas fait, il doit répondre du dommage causé au second. En effet, bien qu’il fût dans un cas de force majeure au moment de la chute, il n’était pas dans un cas de force majeure en étant étendu sur la route et pouvait se relever.
S’il n’avait pas [le temps de] se relever, il est exempt, bien qu’il n’ait pas averti [le second] qui a trébuché sur lui, parce qu’il était occupé avec lui-même [à cause de sa situation].

9. Dans quel cas dit-on que le premier doit répondre des dommages causés au second ? Si le second a subi un dommage corporel. Mais si ses ustensiles [ou ses vêtements] ont été endommagés, le premier est exempt.
Car le propriétaire d’une fosse ne doit pas répondre des [dommages causés aux] ustensiles dans la fosse ; et tout obstacle est un dérivé de la « fosse », comme nous l’avons expliqué.

10. [Soit le cas d’un carambolage où] des potiers, des verriers ou des [personnes] semblables marchent l’un derrière l’autre ; le premier trébuche et tombe, puis le second trébuche sur le premier, et le troisième sur le second, chacun d’eux ayant [le temps nécessaire pour] se relever et ne s’étant pas relevé.
[Dans pareil cas,] le premier doit répondre des dommages corporels causés au second, que celui-ci ait subi un dommage du fait du corps du premier étendu sur le sol ou du fait de sa charge. Le second doit répondre des dommages corporels causés au troisième, si celui-ci a subi un dommage du fait du corps du second. Mais si le troisième a subi un dommage du fait de la charge du second qui est tombée, le second est exempt. En effet, le second peut [dans ce cas] dire [au troisième] : « Cette fosse [c'est-à-dire cet obstacle] qu’est ma charge, ce n’est pas moi qui l’ai creusée [en d’autres termes, je n’en suis pas responsable] », car le premier a fait tomber le second avec sa charge.
S’ils se sont avertis l’un l’autre, tous sont exempts [aucun d’eux n’est tenu responsable des dommages causés à l’autre].

11. Si le premier tombe et [reste] étendu sur la largeur de la route, puis qu’une personne trébuche sur sa tête, une [seconde] sur ses pieds et une [troisième] sur son ventre, le premier tombé doit répondre des dommages causés à tous les autres, dès lors qu’il avait [le temps nécessaire pour] se relever et ne l’a pas fait.

12. Si de l’eau est versée dans le domaine public et qu’une personne subisse un dommage du fait de cette eau, celui qui l’a versée doit répondre des dommages causés.
Si les vêtements de la victime se salissent, celui qui a versé l’eau est exempt [il n’est pas tenu de réparer ce dommage], comme nous l’avons expliqué.
Si l’eau est absorbée dans le sol et que le sol reste glissant, puis qu’une personne glisse, tombe et subisse un dommage avec [sa chute sur] le sol, celui qui a versé l’eau doit répondre des dommages causés.

13. Tous ceux qui [sont autorisés à créer des obstacles dans le domaine public, à savoir ceux qui] ouvrent leurs tuyaux de vidange [pour évacuer les eaux usées dans le domaine public] ou déblaient leurs fosses septiques , n’ont [toutefois] pas le droit de verser l’eau dans le domaine public en été [la saison sèche, parce que les routes sont alors propres]. Mais en hiver (la saison des pluies), ils en ont le droit. Cela étant, si un homme ou un animal subit un dommage du fait de l’eau, ils sont tenus de [réparer] l’entier dommage.

14. Un homme ne doit pas sortir sa paille et sa grosse paille dans le domaine public afin que les passants et les animaux les foulent et qu’ils deviennent du « fumier » pour lui [la paille fermente sous l’action du piétinement et devient un engrais pour le champ].
S’il sort [sa paille et son chaume], les Sages l’ont pénalisé [en décrétant] que ceux-ci soient considérés comme sans propriétaire, [si bien que] quiconque [les prend] en premier les acquiert. [Cette permission s’applique] à partir du moment où ils ont été foulés et ont été améliorés [la paille ayant fermenté devient un engrais]. Si une personne en prend possession avant, à partir du moment où ils ont été sortis dans le domaine public [avant même d’être foulés], on ne [les] lui retire pas.
Bien qu’ils soient considérés comme sans propriétaire, si un homme ou un animal subit un dommage à cause d’eux, celui qui [les] a sortis est tenu d’[en] payer [la réparation].

15. Tout homme a le droit de sortir du fumier et les excréments [des animaux] dans le domaine public à l’époque [de l’année] où le fumier est sorti , et de les y amasser pendant trente jours afin qu’ils soient écrasés par les pieds des hommes et les pattes des animaux. Cependant, s’il cause un dommage, il est tenu de payer.
On est coupable de vol pour [la prise de] ces excréments. Etant donné qu’ils n’ont pas d’amélioration s’ils sont foulés, les Sages n’ont pas pénalisé [celui qui les sort].

16. Dans le domaine public, il ne faut ni tremper de l’argile [dans de l’eau pour la ramollir et la rendre malléable], ni fabriquer des briques [parce qu’il faut les y laisser longtemps pour qu’elles sèchent].
En revanche, on peut, dans le domaine public, malaxer de l’argile [avec de l’eau, en vue de l’utiliser immédiatement dans la construction], mais non (pour) des briques.

17. Construire [un bâtiment] dans le domaine public [n’est autorisé que si] celui qui apporte les pierres le fait [sur le champ] et celui qui bâtit le fait [immédiatement, c'est-à-dire que le constructeur dispose dans l’édifice les pierres que le porteur lui donne, sans les laisser traîner dans le domaine public].
Tous ceux-ci, s’ils causent un dommage, sont tenus de payer [la réparation de] l’entier dommage.

18. [Une fois qu’]un carrier a extrait une pierre [d’une carrière] et l’a remise au tailleur de pierres, [dès lors, si] un homme ou un animal subit un dommage du fait de celle-ci, le tailleur de pierres est tenu pour responsable.
[Une fois que] le tailleur de pierres a remis [la pierre] à l’ânier, celui-ci doit répondre [des dommages causés].
[Une fois que] l’ânier [l’]a remise au porteur [qui va la livrer au constructeur], le porteur doit répondre [des dommages causés].
[Une fois que] le porteur l’a remise au constructeur, celui-ci doit répondre [des dommages].
[Une fois que] le constructeur l’a remise à celui qui arrange le positionnement [des pierres] dans la construction , celui-ci doit répondre [des dommages].
Si la pierre tombe après avoir été placée sur l’assise [de pierres dans la construction] et cause un dommage, [la règle suivante est appliquée : s’]ils travaillaient par entreprise , tous sont tenus pour responsables. Et [s’ils étaient liés par un contrat de] louage [de services] , le dernier [celui qui a positionné la pierre] est tenu pour responsable et tous [les autres] sont exempts.

19. Si un mur ou un arbre tombe dans le domaine public et cause un dommage, le propriétaire est exempt de payer [la réparation du dommage] , [et ce,] même s’il s’est désisté à son droit de propriété sur celui-ci . En effet, l’arbre et le mur ne sont pas similaires à une fosse, car ils ne sont pas depuis le début [sujets à] causer des dommages [et, contrairement à la fosse, leur présence ou leur construction est autorisée].
S’ils sont branlants, le tribunal fixe un délai au propriétaire pour abattre l’arbre ou pour démolir le mur. Combien de temps [lui est-il accordé] ? Trente jours. Si le mur ou l’arbre tombe durant ce [laps de] temps et cause un dommage, le propriétaire est exempt. S’il tombe après ce [laps de] temps, il est tenu pour responsable, parce qu’il les a laissés [au-delà du délai imparti par le tribunal].

20. [Telle est la loi relative à] celui qui cache une épine ou [un éclat de] verre [dans le domaine public], ou fait une haie d’épines saillissant dans le domaine public : si une personne subit un dommage du fait de celles-ci, il est tenu de [réparer] l’entier dommage.
S’il fait une haie d’épines confinées dans son domaine [de sorte que les épines ne font pas saillie dans le domaine public], il est exempt, car les gens n’ont pas l’habitude de se frotter contre les murs.

21. Quand une personne cache ses épines ou ses [éclats de] verre dans le mur d’autrui, puis le propriétaire du mur vient et le démolit, [si bien qu’]il tombe dans le domaine public et les épines ou les éclats de verre causent un dommage, [la règle suivante est appliquée :] si le mur était branlant, celui qui [y] a caché [les épines ou les éclats de verre] est tenu pour responsable [car il fallait prévoir que le mur serait démoli]. Si c’était un mur robuste, le propriétaire du mur est tenu pour responsable .

22. Les [hommes] pieux d’antan cachaient les épines et les [éclats de] verre dans leurs champs à une profondeur d’[au moins] trois paumes dans le sol, afin qu’ils ne soient pas remontés par la charrue. D’autres les brûlaient au feu. Et d’autres les jetaient dans la mer ou dans un fleuve, afin que personne ne subisse de dommage à cause d’eux.

23. Un homme ne doit pas débarrasser les pierres de son domaine dans le domaine public. Il ne faut pas faire de cavité en dessous du domaine public, ni fosse, ni fossé, ni cave [cf. supra ch. 12 § 10]. [Et ce,] bien [que le recouvrement soit assez solide pour] qu’une voiture chargée de pierres puisse passer dessus, de crainte que le recouvrement se gâte par en dessous sans qu’on [le] sache [et finisse par s’effondrer].
[Toutefois,] creuser une fosse [c'est-à-dire une citerne où l’eau de pluie est retenue] pour les besoins communautaires est autorisé.

24. Il ne faut faire sortir ni saillies, ni balcons dans le domaine public, à moins qu’ils ne soient situés au-dessus [de la hauteur d’]un chameau avec son cavalier. Et ce, à condition de ne pas obscurcir la route aux passants du domaine public.
S’il [le] désire, un propriétaire peut faire un retrait [du mur] à l’intérieur [des limites] de sa [propriété, de manière à ce qu’il reste suffisamment de place pour la saillie et le balcon] et [les] faire saillir [à l’intérieur de sa propriété]. S’il a fait un retrait [du mur] et n’a pas fait saillir [la saillie ou le balcon], il pourra [les] faire saillir à tout moment s’il le désire. Mais [dorénavant] il ne pourra jamais restituer le mur à sa place [initiale, c'est-à-dire à la limite de la propriété], car toute limite dont le public a pris possession, il est défendu de la ruiner.

25. Quand on achète une cour comprenant des saillies et des balcons faisant saillie dans le domaine public, elle garde son statut [bien que personne ne puisse le certifier, les poutres et les balcons sont présumés avoir été construits de manière conforme à la loi par le vendeur, c'est-à-dire à l’intérieur de sa propriété]. Si le mur tombe, on peut le reconstruire comme auparavant [avec ses saillies].

26. Quand le feuillage d’un arbre penche sur le domaine public, il faut [le] couper de sorte qu’il y ait [en dessous l’espace vide] suffisant pour qu’un chameau puisse passer avec son cavalier.
[Il faut] laisser, sur les deux berges d’un fleuve, un espace dégarni [d’arbres sur une largeur] qui correspond à la largeur des épaules des marins qui y descendent et tirent le bateau. Tout arbre qui se trouve sur cette largeur, doit être coupé immédiatement, sans [même] avertir le propriétaire, parce qu’il empêche [le passage des bateliers] qui tirent le bateau.

27. [Soit le cas d’]un homme qui, ayant une route publique passant dans son champ , prend [possession de] cette route pour lui-même et donne au public [une autre route] sur le côté [de son champ].
[La règle est la suivante :] ce qu’il a donné est [effectivement] donné et le public l’acquiert [autrement dit, cette route devient publique], et la route [qu’il voulait] capter, il ne l’acquiert pas [en vertu du principe évoqué au § 24. Ainsi, les deux routes sont maintenant publiques].
Quelle est la largeur d’une route publique ? Pas moins de seize coudées.