Les spécialistes de l’aviation en France connaissent bien M. Mickaël Allouche, ingénieur expert dans la construction d’avions et lauréat du prestigieux prix international UVS. Depuis de nombreuses années, M. Mickaël Allouche s’est rapproché du mouvement Loubavitch et, suite au décès de Rav Yossef Wineberg, il raconte comment il a été personnellement touché par la personnalité de ce ‘Hassid hors du commun.

«Je suis arrivé de France à Johannesburg en Afrique du sud en hiver 1988 avec ma femme et mes enfants. Pour cela, j’avais reçu en son temps l’accord et la bénédiction du Rabbi. On m’avait proposé, de façon tout à fait inattendue, ce poste d’ingénieur conseil dans les industries locales et c’était une opportunité à ne pas laisser passer.
Le 13 Tévet, nous avons emménagé dans un quartier à forte population juive ‘hassidique. L’ancien propriétaire nous a fait visiter la maison en nous expliquant qu’il était essentiel de bien fermer la maison chaque soir : non seulement les portes qui donnaient vers l’extérieur mais même les portes qui séparaient les chambres à coucher de la salle à manger. Il insista : «Si vous entendez que quelqu’un a fait irruption dans la maison pendant la nuit, ne tentez pas de vous approcher ! Restez bien enfermés dans les chambres à coucher et faites semblant que vous continuez à dormir. Dans ce pays, les voleurs ne se contentent pas de voler, ils n’hésitent pas à tuer !»
Bien que nous soyons arrivés là avec la bénédiction du Rabbi, il est évident qu’une telle «réception» nous fit froid dans le dos : nous ne pouvions plus nous sentir en sécurité ! Je me suis immédiatement assis pour écrire une lettre au Rabbi : je racontai combien nous nous sentions angoissés et je demandai une bénédiction «pour parvenir à surmonter notre peur».
Une heure plus tard, un des Loubavitch qui avait entendu parler d’une famille juive qui venait d’arriver de l’étranger pour s’installer dans la ville nous a téléphoné pour nous inviter : «Rav Yossef Wineberg, Chalia’h (émissaire) personnel du Rabbi se trouve actuellement dans notre ville ! Il va animer un Farbrenguen, une réunion ‘hassidique, chez moi avec quelques personnes ! Venez vous joindre à nous !»
Cette invitation me réjouit, c’était pour moi l’occasion de faire connaissance avec ma nouvelle communauté.
Rav Wineberg commença par expliquer pourquoi la date du 13 Tévet était particulièrement importante pour lui personnellement : c’était l’anniversaire de la dernière entrevue qu’il avait eue en 1950 avec le Rabbi Précédent, Rabbi Yossef Yits’hak Schneersohn de mémoire bénie, quelques semaines avant son décès. Il raconta tout ce que le Rabbi lui avait affirmé alors sous l’emprise d’un Roua’h Hakodèch, une inspiration sainte évidente, prédisant même des événements qui ne devaient lui arriver effectivement que vingt ans plus tard.
Puis Rav Wineberg se mit à chanter des Nigounim, des mélodies ‘hassidiques poignantes ; toute sa personnalité reflétait une croyance profonde, une assurance parfaite dans les paroles des Rebbeim. Ceci m’impressionna profondément. A la fin de la soirée, Rav Wineberg qui avait compris que je venais d’arriver de France et qui craignait que je ne comprenne pas l’anglais me demanda dans un français hésitant : «Vous avez compris tout ce que j’ai raconté ?» Je répondis timidement : «Je crois que oui !»
En vérité, non seulement j’avais très bien compris mais j’avais retiré de cette réunion une assurance renouvelée : avec tous mes membres, j’avais déduit le point essentiel de son message ! Je partis de là le cœur léger : j’avais reçu une bénédiction du Rabbi pour m’installer en Afrique du sud, je n’avais rien à craindre !
Quand je rentrai plus tard à la maison, j’eus un peu honte de moi : comment pouvais-je envoyer au Rabbi une lettre en demandant «une bénédiction pour me rassurer» alors que son émissaire personnel venait de nous parler d’une façon aussi impressionnante ? Je décidai de ne pas envoyer la lettre ! Je considérai que j’avais déjà reçu la réponse du Rabbi par l’intermédiaire de son Chalia’h !
J’ai conservé cette lettre «qu’apparemment» je n’avais pas envoyée au Rabbi mais je n’avais jamais raconté cette histoire à qui que ce soit.
Quelques années plus tard, après que nous ayons fait notre Alya et que nous nous soyons installés en Israël, ma fille aînée partit étudier au séminaire Beth Hanna de Melbourne. Elle me téléphona un jour en racontant que Rav Wineberg allait donner une conférence devant toutes les élèves : je lui demandai de raconter au Rav la profonde impression qu’il m’avait faite un certain 13 Tévet à Johannesburg. Elle transmit mon message et Rav Wineberg remarqua alors, étonné et comme soulagé d’avoir enfin compris un mystère : «Le fait est que je voulais arriver en Afrique du Sud déjà au mois d’Elloul. Maintenant que j’entends cette histoire, je comprends enfin pourquoi le Rabbi m’avait demandé plusieurs fois de repousser mon voyage !»
La force de l’émissaire (que lui-même ne soupçonne pas) !

Aharon Dov Halperin – Kfar Chabad n°1469
Traduit par Feiga Lubecki