Rav Yaakov Biderman est un Chalia’h, l’émissaire du Rabbi en Autriche.

Peu après la terrible catastrophe nucléaire de Tchernobyl en 1986, Rav Biderman reçut un coup de fil urgent de New York : un des secrétaires du Rabbi, Rav Leibel Groner lui transmit un appel du Rabbi. Non loin de là où habitait Rav Biderman – en Ukraine exactement – la centrale atomique de Tchernobyl avait explosé, libérant dans l’atmosphère à des kilomètres à la ronde, des radiations nucléaires cent fois plus puissantes que la bombe d’Hiroshima. Tous les habitants de cette région étaient en danger de mort, particulièrement les enfants en pleine croissance.

«Rav Biderman ! Le Rabbi m’a dit de vous appeler pour que vous agissiez le plus vite possible : vous devez évacuer un maximum d’enfants juifs de la région de Tchernobyl et les faire émigrer en Israël. Le Rabbi précise que c’est une question de vie ou de mort. Chaque minute qui passe, ce sont des vies qui sont perdues ! Faites tout ce que vous pouvez pour les sauver ! Chalom ! »

Et le secrétaire raccrocha.

Pétrifié, Rav Biderman essayait de comprendre ce qui lui arrivait : pourquoi le Rabbi faisait-il appel à lui ? Comment pouvait-il, lui qui venait à peine de s’installer à Vienne pour répandre le judaïsme, dans un environnement apathique, sauver des milliers d’enfants en Ukraine ? Mais surtout : contrairement à d’autres émissaires du Rabbi, il n’avait absolument aucun contact avec l’URSS ou Israël ! Il ne savait même pas par où commencer !

Ce soir-là, il devait se rendre à un mariage important avec son épouse. Mais perturbé par le coup de fil qu’il venait de recevoir, il n’avait même pas envie d’y aller. Cependant, il ne pouvait se permettre cet impair.

Assis à la table d’honneur, il ne parvenait pas à apprécier la musique, les plats élaborés, l’atmosphère joyeuse…

«Que se passe-t-il, Monsieur le Rabbin ? lui demanda l’un des convives. Vous ne vous sentez pas bien ? C’est pourtant une Mitsva de réjouir les mariés !»
L’homme d’affaires prospère qui lui parlait l’avait souvent aidé avec des dons significatifs pour ses activités communautaires.

Soudain, Rav Biderman eut une idée. Une idée folle…

«Dites-moi, Monsieur R… Si je vous disais qu’un train bondé d’enfants juifs roulait vers Auschwitz, vers une mort certaine et que vous pouvez les sauver, que feriez-vous ?»

L’homme regarda Rav Biderman, comme pour comprendre s’il était sérieux ou non puis répondit : «Ce que je ferais ? Je donnerais tout ce que je possède pour empêcher cette horreur ! C’est terrible !»

«C’est exactement ce qui se passe actuellement, avec tous ces enfants juifs de Tchernobyl qui sont en danger de mort ! Vous pouvez agir pour les sauver !»
Ce soir-même, l’homme promit de donner un million de dollars (!) pour commencer à sauver les enfants de cette région sinistrée.

La même nuit, Rav Biderman téléphona à des amis en Israël et bien vite on le mit en relation avec la personne capable de mener à bien cette entreprise : Rav Yossef Its’hak Aharonov, directeur de la Jeunesse Loubavitch en Terre Sainte.

Bravant toutes les difficultés (financières, bureaucratiques, sanitaires…), le mouvement Loubavitch israélien a réussi à ce jour à faire évacuer vers Israël des milliers d’enfants juifs de la région de Tchernobyl. Dans le village de Kfar ‘Habad, on a créé des institutions scolaires à leur intention. Là, ils reçoivent également les soins nécessaires pour leur guérison ainsi que la nourriture saine qui leur avait fait cruellement défaut.

Petit à petit, les parents rejoignent leurs enfants.

Mais ce n’est que la première partie de l’histoire.

Depuis que le mouvement Loubavitch répand des émissaires à travers le monde, la coutume a été instituée que si l’un d’entre eux obtient un don important pour un autre, celui-ci doit rendre un tiers de la somme pour le premier émissaire, pour ses projets éducatifs.

C’est ainsi que Rav Aharonov informa Rav Biderman que trois cent mille dollars lui revenaient de droit. C’était une somme importante que Rav Biderman saurait certainement utiliser pour son école en Autriche.

Mais Rav Biderman n’hésita pas.

«Je ne veux pas d’argent ! Je veux une bénédiction du Rabbi ! Rav Aharonov, je veux que vous demandiez au Rabbi une bénédiction pour mon Beth ‘Habad. Ce sera mon salaire ! Dites au Rabbi que je ne veux pas de pourcentage mais une bénédiction pour un succès miraculeux, au-delà de toutes prévisions !»

Rav Aharonov appela le secrétariat du Rabbi, exposa la requête tout à fait inhabituelle de son collègue en Autriche et, quelques heures plus tard, reçut une réponse du Rabbi qui accordait sa bénédiction.

A partir de ce jour, il sembla qu’un nouveau monde s’était ouvert devant Rav Biderman, comme si tous les obstacles qu’il rencontrait auparavant s’étaient évanouis. Il se lança dans un projet énorme : une université juive à Vienne ! C’était ce qu’il fallait pour retenir les étudiants juifs prêts à s’assimiler dans les facultés et grandes écoles de l’Etat. Rav Biderman était prêt à tout pour sauver encore d’autres jeunes Juifs.

Avant la bénédiction du Rabbi, cela avait semblé impossible. Mais maintenant c’était différent. Dès qu’il exposa son idée en public, les fonds et les aides affluèrent de toutes parts. Des gens que, dans ses rêves les plus fous, il n’aurait pas sollicités lui offraient spontanément leur aide ; même des personnalités auparavant hostiles à sa personne et au judaïsme orthodoxe qu’il représentait s’intéressaient à son projet et intercédaient en sa faveur auprès des autorités. Le regretté Simon Wiesenthal l’aida activement.

C’est ainsi que Rav Biderman a pu construire un complexe universitaire juif d’une valeur de plusieurs millions de dollars dans le cœur de Vienne.

En s’adressant à Rav Biderman, le Rabbi avait sauvé non seulement les enfants de Tchernobyl mais aussi ceux d’Autriche.

Rav Tuvia Bolton
www.ohrtmimim.org
traduit par Feiga Lubecki