Editorial
TsunamiC’est une de ces tragédies qui marquent les esprits pour longtemps. Même si elle s’est déroulée bien loin de nos côtes, elle présente ce caractère irrésistible qui a toujours effrayé les hommes. Des lieux que chacun connaissait comme des paradis sur papier glacé sont subitement devenus un cadre de cauchemar. “La mer a envahi la terre” ont annoncé les médias et cette seule phrase suffit sans doute à dire toute l’horreur de l’événement, le sentiment d’impuissance aussi face à une catastrophe d’une telle ampleur, comme un raz-de marée sur l’orgueil des hommes. Alors que le bilan définitif n’est pas encore connu et que la compassion reste sans doute le seul sentiment qui maintienne vivante notre humanité, il peut être bon de réfléchir à tout ce que, au-delà des terres concernées, le monde vient de connaître.
Voici, en effet, que nous nous trouvons ramenés à une situation que nous avions parfois tendance à effacer de nos consciences : l’impuissance absolue face aux grandes forces de la nature. Au temps où l’humanité n’en était encore qu’aux balbutiements de la connaissance, tout événement naturel prenait une dimension quasi-mystique. En ces temps d’avant l’analyse rationnelle, on s’en remettait à une sorte de Providence confuse pour prévenir ou soulager les maux dont on était affligé. Puis l’homme a grandi. Il a peu à peu appris à maîtriser son environnement. Créé par D.ieu comme souverain de ce monde, il est parvenu, au fil des siècles, à assumer toujours davantage son orgueilleuse condition. Au point qu’il en est parfois venu à oublier son infinie fragilité. Maître de la terre et des mers, conquérant de l’espace, il a pu croire qu’il détenait, en toute chose, la réponse ultime. Voici que le monde lui rappelle que tout cela reste profondément relatif. Voici que, brutalement, nous revenons à cette condition plus humble, bien connu de nos ancêtres.
Certes, des systèmes seront mis en place, l’homme progressera encore afin que cela ne se reproduise plus jamais mais peut-être entendra-t-il toujours l’ancienne phrase de nos Sages : “Il y a un Maître à cette demeure”, le Créateur.
Etincelles de Machiah
L’importance de l’actionOn connaît l’accent mis sur la pratique concrète des commandements de D.ieu et, plus généralement, sur toutes les formes de l’action dans le judaïsme alors même que ce dernier a toujours souligné la grandeur de l’étude et de la réflexion. La ‘Hassidout répond à cette question. Elle relève que, si le Talmud (traité Kidouchin 40b) indique que “l’étude prévaut” en notre temps, il n’enseigne pas moins que, lorsque le Machia’h viendra, c’est “l’action qui prévaudra” Or nous nous trouvons justement au seuil de la Délivrance. Aussi, l’idée que “l’action est le principal” (traité Avot 1 :17) revêt une importance toute particulière.
(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch - Chavouot 5744)
Vivre avec la Paracha
Vaéra : La liberté en cinq dimensions Nos Sages parlent de la proche relation qui unit l'individu et l'histoire du Peuple Juif, comme elle est décrite dans la Torah. Les événements importants de l'esclavage égyptien et de la sortie d'Egypte relatés dans notre Paracha peuvent avoir lieu dans le monde personnel de chaque homme et de chaque femme d'aujourd'hui.
L'un de ces exemples est offert par les plaies que l'on peut lire dans la Paracha de cette semaine. Lors de la fête de Pessa'h, lorsqu'on lit la Haggadah, nous en chantons la liste, en versant une goutte de vin pour chacune d'entre elles. Et puis la Haggadah rappelle une discussion à leur propos qui eut lieu entre deux Sages, Rabbi Eliézer et Rabbi Akiva.
Rabbi Eliézer dit que chacune des plaies consistait en fait en quatre plaies. Rabbi Akiva dit: "non pas quatre mais cinq". Assis à la table du Séder, lisant la Haggada dans nos livres tachés de vin, nous nous empressons de manger la Matsa, les herbes amères et le repas. Mais que nous disent ces deux Sages aujourd'hui ?
C'est à ce point que nous pouvons découvrir un enseignement qui s'applique à un niveau personnel et intérieur, à propos du processus de la sortie d'Egypte.
La fonction des Dix Plaies, dans l'histoire, fut de briser la puissance malfaisante de l'Egypte et de Pharaon, le tyran qui asservit le Peuple Juif. Intérieurement les dix plaies représentent notre désir de briser notre situation d'esclavage. A quoi ou à qui sommes-nous asservis? A nos propres tendances et désirs négatifs, notre égocentrisme.
Et dans notre propre esclavage se discernent quatre niveaux, selon Rabbi Eliézer et cinq niveaux selon Rabbi Akiva. En les comprenant, nous serons mieux aptes à appliquer la leçon des plaies "pour libérer notre véritable moi".
Le premier niveau se montre lorsque le négatif en nous a tant de force qu'il peut nous mener à faire quelque chose de mal. C'est le niveau simple de la vie quotidienne où la personne se bat pour garder le contrôle de son comportement
Le second niveau, plus subtil, est celui où la personne ne fait pas ce qui est bien. Mais elle est perpétuellement inquiète du "qu'en dira-t-on". Elle est rattrapée dans sa propre conception de la société.
Le troisième niveau est encore plus ténu. L'individu ressent le sens de la liberté et se moque des opinions d'autrui. Pourtant il reste limité par son propre intellect et sa propre compréhension. Il reste froid, sans passion. A l'inverse, le Judaïsme demande de nous la possibilité de dépasser ces limites: "tu aimeras D.ieu avec tout ton cœur, toute ton âme et toute ta force". Certaines situations demandent plus qu'une rationalisation froide.
Le quatrième niveau est celui où l'homme peut aller au-delà de la compréhension. Il agit dans un esprit de sacrifice de soi. C'est pour Rabbi Eliézer le niveau le plus élevé que l'on peut atteindre.
Mais Rabbi Akiva voit encore un problème possible. La personne peut continuer à être prise par le sens de sa propre valeur: "Je me sacrifie! Ne suis-je pas extraordinaire?" Pour Rabbi Akiva, le cinquième niveau est celui où la personne est totalement libérée de la conscience de son moi.
Elle peut alors se dévouer réellement au service de D.ieu, apportant finalement la Rédemption non pas seulement pour elle-même mais pour le monde entier.
La pluie, une rivière et la glace
La veille de leur entrée en Terre Sainte, Moché décrivit aux Enfants d'Israël la nature de leur nouvelle patrie en ces termes :
"Car la terre où vous allez entrer n'est pas comme la terre d'Egypte d'où vous venez…c'est une terre de collines et de vallées, qui boit l'eau de la pluie des cieux" ( Devarim 11:10)
Nos Sages expliquent que c'est cela qui distingue la Terre d'Israël de "la terre d'où vous venez" puisque "la terre d'Egypte ne boit pas les eaux de pluie; mais le Nil monte et l'irrigue" Rachi, Beréchit 47:10).
La pluie représente la relation réciproque entre le ciel et la terre. Les enseignements 'hassidiques citent la description de la Torah (Genèse 2 :6) de la première pluie: "une vapeur monte de la terre" vers les cieux et les cieux la renvoient en pluie qui "hydrate la surface de la terre". Cela, expliquent les maîtres 'hassidiques, représente la vérité spirituelle selon laquelle "un éveil d'en bas suscite un éveil d'En Haut": D.ieu répond aux efforts de l'homme, renvoyant à nos prières, nos aspirations et nos actes, de la nourriture d'En Haut.
Mais la pluie seule ne suffit pas pour apporter la floraison à la terre et donner des fruits. Le sol doit être travaillé, labouré et aplani, avant de pouvoir recevoir les graines et absorber la pluie. Spirituellement, cela signifie qu'il ne suffit pas d'envoyer des "vapeurs" de sentiments spirituels et des travaux virtuels; il faut d'abord "labourer" son ego, écraser les mottes de trivialité et d'arrogance dans sa personnalité, pour que sa vie puisse devenir réceptive au flot de nourriture divine d'En Haut.
En Terre d'Israël, on laboure et l'on est nourri par la pluie. Mais en "Egypte", les choses étaient différentes. L'Egypte était nourrie non par une pluie qui descendait mais par les crues du Nil qui inondaient périodiquement la terre. Il n'était pas non plus nécessaire de labourer le sol: les crues du Nil laissaient derrière elles une couche très fertile qu'il n'était pas besoin de travailler avant les semailles.
L'Egyptien spirituel est celui qui ne reconnaît pas les sources de bénédictions dans la vie. Il croit que tout est produit d'en bas, que tout ce qu'il a ou ce qu'il a accompli vient de ses propres forces. Il ne voit pas non plus le besoin de " labourer " sa personnalité, il est bien comme il est, avec ses "lourdes mottes" etc.
La pluie pervertie
Quand il pleut effectivement en Egypte, il tombe de la grêle, une grêle de glace à l'extérieur et de feu à l'intérieur. Aussi la Torah nous décrit-elle la septième des "dix plaies" qui visitèrent les Egyptiens, de la manière suivante:
Et D.ieu fit tomber de la grêle sur la terre d'Egypte. Et il y eut de la grêle et du feu brûlant à l'intérieur de la grêle… Chemot 9:23-24
Nous parlons souvent de personnalités "chaudes" ou "froides". Une personne "chaude" est un individu passionné, aimant et tourné vers l'extérieur, toujours prêt à tendre la main et à sourire à autrui. Une personne "froide" est réservée, centrée sur elle-même et indifférente au sort des autres. Mais l'individu froid est aussi enflammé par son amour propre et ses passions égoïstes. En fait, c'est son excès de chaleur intérieure qui provoque sa glaceur extérieure.
Quand la pluie tombe en Egypte, elle est faite de grêle emprisonnant du feu. Dans cette terre non labourée, où la source divine de son eau est ignorée et méconnue, la nourriture qui descend d'En Haut est pervertie comme une source d'amour excessif de soi-même et d'une plus grande aliénation entre l'homme et son prochain.
Le Coin de la Halacha
Comment se prépare-t-on à la prière ?Contrairement à d'autres Mitsvots (commandements divins), la prière exige la ferveur, la reconnaissance de " Celui devant lequel tu te tiens ". Il ne suffit pas d'adopter une certaine posture ou de prononcer certaines phases mécaniquement. Pour cela, il convient (selon Maïmonide) de " vider son cœur de toute autre pensée et de se représenter comme si on se tenait devant la Présence Divine ".
Nombreux sont ceux qui se purifient au Mikvé (bain rituel) avant la prière du matin.
Par ailleurs, on s'éloignera de toute conversation futile et on se concentrera sérieusement sur " la Grandeur de D.ieu et la petitesse de l'homme. On ne pensera à aucun des plaisirs terrestres ". on priera en étant persuadé que D.ieu peut accomplir tout ce qu'on Lui demande et que D.ieu veut le bien de l'homme.
Pour cela, il est recommandé, avant la prière, d'étudier la 'Hassidout qui développe les notions spirituelles comme la Providence Divine, la valeur de l'âme juive et le lien entre D.ieu et le peuple juif. La 'Hassidout 'Habad développe ces thèmes à l'aide d'exemples, de citations et de façon progressive. De nombreux livres de 'Hassidout sont maintenant disponibles en français.
Bien entendu, il est recommandé de prier avec un Minyane (quorum de dix hommes) car alors la Présence Divine est plus manifeste.
On ne prie pas par cœur mais toujours avec un livre de prières car la sainteté des lettres aide à purifier l'esprit.
Si on s'est préparé correctement pour la prière du matin, on pourra se contenter d'une préparation plus courte pour la prière de Min'ha (l'après-midi) et de Maariv (le soir).
F. L. (d'après Rav Yitzchak Ginsburgh)
De Recit de la Semaine
PROVIDENCE DIVINE… DANS LE CIELJusqu'à il n'y a pas si longtemps, j'étais obligé de beaucoup voyager pour ramasser des fonds pour mes institutions d'étude de la Torah. Le but de ces voyages était bien défini, mais il me semble qu'à chaque fois D.ieu m'a permis de les utiliser également pour d'autres bonnes actions : rétablir la paix dans un foyer, réconforter un malade, aider une orpheline pour son mariage…
Voilà ce qui m'est arrivé, il y a environ dix ans. Je revenais de la côte ouest des Etats-Unis vers New York où je devais reprendre l'avion pour rentrer en Israël.
Au bout de deux heures et demi de vol, un steward fit une annonce angoissée au micro : " Y-a-t-il un médecin à bord ? Qu'il se signale à nos hôtesses ! " Un homme et une femme se levèrent et se dirigèrent vers le fond de l'avion.
Deux minutes plus tard, une hôtesse s'approcha de moi. Elle avait remarqué ma Kippa et, bouleversée, elle me demanda si je parlais l'hébreu. Je répondis que oui et elle m'invita à la suivre. Au fond de l'avion, un vieux couple d'Israéliens était entouré d'hôtesses et de médecins.
La femme semblait souffrir énormément, son visage était livide et elle tenait sa tête entre ses mains comme si chaque mouvement lui causait des douleurs atroces. Ni lui ni elle ne parlaient l'anglais et les médecins ne pouvaient donc pas les aider correctement. C'est pourquoi on m'avait demandé de faire l'interprète.
Le médecin examina la femme, lui demanda - par mon intermédiaire - ses antécédents médicaux. A un moment donné, il me tendit sa carte de visite : c'est ainsi que j'appris que se tenait devant moi un neurologue réputé, patron d'un des plus importants hôpitaux de New York.
D'après lui, la femme souffrait d'une inflammation de la boîte crânienne. " Il est très difficile de diagnostiquer une maladie sans les instruments adéquats ", s'excusa-t-il. Mais pour lui, il n'y avait qu'une chose à faire : atterrir au plus vite et hospitaliser la malade.
" Donnez-lui un comprimé pour atténuer la douleur et permettre à l'avion de continuer sa route " implora le mari.
Mais le spécialiste refusa : " Dans certains cas, ce genre de comprimés peut être fatal ! "
On fit venir le capitaine de bord. Il discuta sérieusement avec le médecin et, d'après ce que je compris, il lui expliqua combien il était compliqué (et coûteux), de procéder à un atterrissage d'urgence. Mais le médecin était catégorique : " Voulez-vous atterrir à New York avec un cadavre ? "
On annonça alors aux voyageurs que l'avion s'apprêtait à atterrir à Colombus (Ohio) d'ici quelques minutes. C'était la ville la plus proche d'un aéroport et d'un hôpital spécialisé pour traiter ce cas. On me demanda de rester auprès du couple si jamais on avait encore besoin de mes services.
Je m'assis donc à côté du mari qui se mit à me raconter sa vie : " J'ai combattu dans toutes les guerres d'Israël. Nous ne nous sommes jamais accordé de véritables vacances. C'est la première fois que nous nous rendons à l'étranger et voilà que tout s'écroule ! " Je tentai de le réconforter en lui faisant remarquer que, grâce à D.ieu, il se trouvait dans l'avion un médecin justement spécialisé en neurologie, que grâce à son conseil, on avait évité d'administrer à son épouse un antalgique fatal et qu'on allait atterrir incessamment. Sa femme s'en sortirait et, avec l'aide de D.ieu, tout irait bien.
A côté de nous, se trouvait une vieille dame, apparemment juive. Elle se tourna brusquement vers moi et me demanda : " Monsieur le rabbin, n'avez-vous pas l'habitude de prier pour la guérison des malades ? " Elle avait raison et je la remerciai de sa remarque. Je pris dans ma poche un petit livre de Psaumes et je proposai au mari de s'associer à ma prière pour le bien-être de la malade. Il me lança un regard dur et écarta le livre que je lui tendais : " Je n'ai pas besoin de cela ! " déclara-t-il.
Ce n'était pas le moment de discuter et je me mis à lire moi-même. Au bout de quelques minutes, le mari éclata en sanglots et, malgré mes efforts, je ne parvins pas à le calmer. D'une voix tremblante, il me dit : " Toute ma vie, j'ai nié l'existence de D.ieu mais maintenant j'ai besoin de Son aide ! "
Durant les quelques minutes qui restaient jusqu'à l'atterrissage, je lui suggérai d'adopter au moins trois Mitsvot, trois commandements principaux : l'observance du Chabbat, la cacherout des aliments et la mise quotidienne des Téfilines sur le bras gauche et la tête. Par ailleurs, je lui remis le nom d'un de mes amis qui occupe le poste de rabbin à Colombus et qui pourrait l'aider de diverses manières.
Dès l'atterrissage, une équipe médicale pénétra dans l'avion avec une civière sur laquelle on plaça la malade qu'attendait une ambulance. Avant de sortir de l'avion, le mari se retourna et me cria, du fond du cœur : " Continuez de prier ! "
Par la suite, je renouai le contact avec le mari qui était retourné en Israël car il m'avait laissé son numéro de téléphone. Il s'avéra que le diagnostic du spécialiste rencontré dans l'avion avait été exact et que, grâce à son insistance à faire atterrir l'avion au plus vite, la femme avait eu la vie sauve.
Après m'avoir remercié pour ma sollicitude, le mari m'annonça un grand secret : " Sachez que grâce à vous, nous respectons maintenant le Chabbat et la cacherout. Et chaque jour, je mets les Téfilines ! "
Rav Shlomo Goldhaber - Jérusalem
Si'hat Hachavoua
Traduit par Feiga Lubecki