Semaine 26

Editorial
Le remède avant l’épreuve

Le mois de Tamouz présente des côtés surprenants. Il semble fait de facettes multiples, apparemment presque incohérentes. C’est ainsi que, successivement en cette première partie de mois, nous allons trouver deux dates dont les connotations semblent bien éloignées l’une de l’autre : le 12 et le 17 Tamouz. Cinq jours seulement les séparent mais elles paraissent quasiment à un univers de distance. Le 12 Tamouz est le jour où Rabbi Yossef Its’hak Schneersohn, le précédent Rabbi de Loubavitch, fut libéré de l’exil où l’avaient envoyé les autorités soviétiques de l’époque. On le sait, d’abord condamné à mort, il avait vu sa peine commuée en relégation puis se terminer au bout de quelques jours avant d’être autorisé à quitter le pays. Cette date est donc l’anniversaire d’une véritable victoire de la ténacité, de la conscience de soi, des forces de la sainteté sur l’oppression et l’obscurité de l’esprit. Le 17 Tamouz est bien loin de telles réflexions. Il commémore la première brèche faite dans la muraille de Jérusalem par l’envahisseur venu de Babylone à l’époque du second Temple. L’événement allait déboucher, un peu plus tard, sur la destruction du Temple et l’exil du peuple juif. Comment une si courte période du calendrier peut-elle rappeler deux souvenirs si différents : celui de la liberté retrouvée, de la victoire du bien, et celui de la fin d’une époque bénie ? Une unité de temps n’a-t-elle donc d’autre sens que celui du hasard ? Ce serait là une idée bien étrange au regard de la tradition juive.
Il faut aussi relever que, chronologiquement, les événements du 12 Tamouz arrivèrent en Union soviétique, au vingtième siècle, tandis que ceux du 17 Tamouz remontent à l’antiquité. Pourtant, dans le déroulement du calendrier, le 12 Tamouz intervient, par définition, avant le 17. N’y aurait-il pas dû y avoir ici une sorte de plus grande cohérence ? Si toute date est le fait de la Providence Divine, les événements n’auraient-ils pas dû se produire dans un ordre inverse ? C’est justement dans cette interrogation que tient la réponse. A tout drame, il faut un remède. Et, plus le drame est grand, plus le remède doit l’être. La bonté de D.ieu est infinie ; cela veut dire aussi que, parfois, Il envoie le remède avant même le drame. C’est ainsi qu’il faut comprendre la succession d’événements : le 17 Tamouz est une tragédie mais le 12 est une victoire éternelle. Celle-ci arrive d’abord dans le calendrier des souvenirs et des célébrations car elle ne fait pas que nous permettre de surmonter l’épreuve, elle est une clé pour l’avenir. La liberté est devant nous, nous dit-elle, il nous appartient d’en franchir les portes. Par la venue de Machia’h.
Etincelles de Machiah
Même pour les riches
La Torah (Ex. 22 : 24) enseigne qu’il est nécessaire de venir en aide au pauvre, certes sous forme de don mais également sous la forme d’un prêt, évidemment sans intérêt, qui lui permet de reprendre pied dans le cycle social : «Quand tu prêteras de l’argent à mon peuple, au pauvre».
Cependant, de ce même verset, nos Sages déduisent qu’il convient également de prêter de l’argent au riche en tant que de besoin. En effet, le fait qu’il demande un prêt indique que, pour le moment, il a besoin d’argent et que, pour cela, il entre dans la catégorie de «pauvre». Cette idée contient une leçon précieuse : parfois, même une situation favorable peut être considérée comme un état de dénuement par rapport à un avenir infiniment plus positif.
C’est exactement la différence entre toutes les années écoulées et celle de la Délivrance. Même les périodes les plus brillantes, comme celle du roi Salomon, celle du Temple, paraissent « pauvres » par rapport à la grandeur et à la richesse du temps de la Délivrance.
(Extrait d’un commentaire du Rabbi de Loubavitch -
Chabbat Parachat A’harei 5746)
Vivre avec la Paracha
‘Houkat : Pourquoi était-ce si grave de frapper le rocher ?

L’accès refusé
Il n’est pas très confortable de voir une figure d’autorité révérée être obligée de supplier. C’est encore plus difficile de lui voir refuser l’objet de sa requête. Et pourtant c’est ce dont nous sommes les témoins vers la fin des Cinq Livres de Moché, lorsque Moché implore D.ieu de l’autoriser à entrer en Terre sainte et que cela lui est décliné. C’est avec dévouement qu’il avait conduit les Hébreux dans leur ascension vers l’identité nationale. De l’Egypte au Sinaï, il avait subi leurs nombreuses sautes d’humeur et maintenant, il n’assisterait pas à leur arrivée triomphale, à la fin de leur périple ?

Entre un rocher et un endroit dur
Revenons sur la genèse de l’histoire.
Après avoir voyagé quarante ans dans le désert, le Peuple d’Israël était arrivé à Kadech dans le désert de Tsin, à la frontière de la Terre sainte. Dès leur arrivée, ils avaient découvert qu’il n’y avait pas d’eau à Kadech et s’étaient plaints à Moché : «Pourquoi nous as-tu sortis d’Egypte pour nous conduire dans cet endroit maudit ?»
Moché s’était alors tourné vers D.ieu qui lui avait dit : «Prends ton bâton, rassemblez le Peuple, toi et Aharon, ton frère. Tu parleras au rocher devant leurs yeux et il donnera son eau». Quand tous furent assemblés devant le rocher, Moché s’était adressé à eux : «Ecoutez, rebelles ! Devons-nous faire jaillir de l’eau de ce rocher ?» Moché avait levé la main et frappé le rocher deux fois avec son bâton. L’eau avait jailli et le peuple et les troupeaux avaient bu.
C’est alors que D.ieu avait dit à Moché et à Aharon : «Parce que vous n’avez pas cru en moi pour Me sanctifier aux yeux des Enfants d’Israël, vous ne conduirez donc pas cette congrégation dans la terre que je leur ai donnée.»
Tels sont les simples faits. Leur interprétation est plus complexe. Quelle était exactement la nature du «crime» de Moché ? Pourquoi D.ieu punit-Il si sévèrement une erreur qui paraît mineure ?
Les commentateurs offrent de nombreuses réponses mais attardons-nous sur l’une d’entre elles. Na’hmanide explique que Moché pécha en disant au peuple : «Devons-nous faire jaillir de l’eau de ce rocher ?», mots qui semblent impliquer que faire jaillir de l’eau d’un rocher devait être imputé à Moché plutôt qu’à D.ieu.
Cependant, il est évident que ce n’était pas ce que Moché pensait. Il était le serviteur de D.ieu le plus loyal et le plus grand des prophètes. Mais cela ne signifie pas pour autant que ses auditeurs allaient interpréter correctement ses paroles.
En fait, Moché était doté de deux qualités qui, jointes, pouvaient avoir un effet secondaire néfaste. C’était l’homme de la vérité absolue et paradoxalement, il considérait les habitants du monde d’un point de vue idéalisé, comme ils auraient dû être et pas nécessairement comme ils étaient. Si bien que parfois, il avait du mal à concevoir et prévoir la faiblesse et les limites humaines.
Par exemple ici, il ne pouvait tout simplement imaginer la possibilité que ses paroles puissent être reçues comme la déclaration qu’il agissait indépendamment de D.ieu.
En outre, à cause de son intégrité suprême, il avait davantage le souci de ce qui devait être dit plutôt que de la façon dont cela serait reçu. De son point de vue, à partir du moment où un dirigeant commence à penser à la manière dont ses paroles vont être perçues par le peuple qu’il mène, il réduit la distance entre le processus de sa pensée propre et celle du peuple et dès lors, il compromet ce qui le rend apte à diriger, c’est-à-dire l’aptitude à voir d’une perspective plus élevée et plus objective que l’homme moyen.
Cela nous permet de saisir la décision de D.ieu d’empêcher Moché de conduire le peuple en Terre Promise.

Un changement de focalisation
La mystique juive considère le voyage de Sinaï à Canaan non seulement comme un changement de décor mais également une évolution dans la mission et la mentalité.
Le mode de vie des Hébreux dans le désert était d’une nature spirituelle. Son but était de fortifier la vitalité et la constitution spirituelles de cette nation qui allait devoir être une lumière pour le monde.
D.ieu pourvoyait à tous leurs besoins matériels pour leur permettre de se consacrer à l’étude et la prière, libérés de toutes autres contingences. Pouvait-il y avoir une existence plus idyllique que celle-là ?
Canaan serait différent. Il y faudrait faire la guerre, travailler la terre et pratiquer le commerce.
Les Juifs allaient entrer dans le vrai monde, dans toute sa laideur. Il leur fallait donc un dirigeant acceptant un monde défectueux, un dirigeant pouvant concevoir les fragilités et les imperfections d’hommes sur le point d’affronter le plus grand des défis jamais rencontré, un dirigeant leur permettant de franchir ce cap.
Peut-être pouvons-nous concevoir l’emploi du «nous» par Moché, non comme un péché contre D.ieu mais comme une indication qu’il n’était pas celui qui pouvait les mener vers la prochaine étape de leur destinée, parce qu’il ne pouvait imaginer leur démarche intellectuelle.
Avoir l’accès interdit en Terre promise n’était donc pas une punition mais la conclusion logique d’un mode de direction.
Dans le désert, Moché pouvait espérer réussir à faire penser le peuple comme lui. Mais en Canaan, où ils affronteraient les défis du matériel, celui qui les conduirait devrait pouvoir se mettre à la portée de leur manière de penser pour pouvoir y réussir.

Aujourd’hui ?
Dans un domaine ou un autre, nous nous trouvons tous, à certaines occasions, dans la situation d’un dirigeant et d’un communicant exerçant une influence par nos paroles et nos actions.
Mais ce qui est essentiel n’est pas ce que nous disons ou nous faisons mais la manière dont est reçu ce que nous disons ou faisons.
Il ne suffit pas de dire de bonnes choses mais il faut dire des choses justes.
Le Coin de la Halacha
En quoi consiste l’obligation de l’éducation juive ?

- Le père a l’obligation d’enseigner à son enfant la pratique des Mitsvot (commandements), qu’elles trouvent leur origine dans la Torah ou qu’elles aient été prescrites par les Sages.
- Quand le père accomplit une Mitsva, il veillera à le faire devant son enfant afin de lui enseigner comment l’accomplir.
- Si l’accomplissement d’une Mitsva implique une dépense, le père devra débourser l’argent nécessaire.
- La mère est aussi astreinte à l’obligation d’éduquer son enfant et elle est d’ailleurs le principal vecteur de cette éducation du fait qu’elle passe plus de temps avec l’enfant à la maison.
- Les parents adoptifs ont aussi l’obligation d’enseigner la Torah aux enfants qui sont sous leur protection.
- Les parents habitueront l’enfant à aimer tout ce qui a trait à la sainteté, à la crainte (la conscience) et l’amour de D.ieu, à l’acquisition d’un bon caractère.
- Les parents veilleront à ne pas mentir et à ne pas médire ; ils veilleront à ce que l’enfant prenne de bonnes habitudes en ce qui concerne la propreté du langage.
- On habituera le garçon à porter la Kippa afin de lui rappeler qu’il existe un Etre supérieur. On habillera les petites filles de façon Tsniout (discrète et pudique).
- On ne donnera pas à l’enfant des aliments interdits qui nuisent à sa santé physique et mentale.
- On ne fera pas peur à l’enfant en le menaçant avec des animaux ou des récits malsains.
- On veillera à ce que les enfants se lavent les mains rituellement le matin.

F. L. (d’après Hamitsvaïm Kehala’ha)
De Recit de la Semaine
Bon anniversaire !

Eté 2000.
Hôpital Hadassa Ein Karem – Jérusalem.
Madame Rosenberg contemple le berceau, angoissée : elle tente de se raisonner, de se convaincre que : «Pense bien et tout ira bien !»... Combien de miracles ont accompagné cette naissance mais elle est bien obligée de constater l’état de son fils : il est né prématuré et ne pèse qu’un kilo sept cents grammes. A peine plus qu’un kilo de farine, pense-t-elle. Ses poumons ne sont pas encore bien formés et il a du mal à respirer.
Les médecins ne se montraient guère optimistes mais les parents gardaient espoir. Ils avaient écrit au Rabbi et avaient demandé une bénédiction : tout irait bien. Certainement ! Ils avaient participé à l’organisation de la parade des enfants à Lag Baomer, s’étaient dévoués pour sa réussite et les miracles continuaient. Les médecins, étonnés, s’émerveillaient des progrès de l’enfant : il commençait à respirer normalement et avait pu quitter la salle de soins intensifs : «Avez-vous consulté un spécialiste de l’étranger ?» demandèrent les médecins, soupçonneux. Ils cherchaient une explication logique aux miracles qui se déroulaient devant leurs yeux : «Dès que l’enfant commencera à prendre du poids, vous pourrez le ramener à la maison !» affirmèrent-ils.
Le jour tant attendu arriva : à la maison, la chambre était prête, les voisins avaient déjà annoncé leur visite pour admirer la petite merveille…
Mais le pédiatre annonça d’une voix grave : «Urgence ! Apnée du nourrisson ! Impossible de laisser sortir l’enfant !»
Comment décrire la déception, l’angoisse, le stress des parents ? Depuis des semaines, ils avaient attendu ce jour, étaient enfin soulagés d’entrevoir la fin de l’épreuve mais…
Quelques jours plus tard, la bonne nouvelle arriva de nouveau : «Cette fois-ci, nous t’emmenons pour de bon ! murmura Madame Rosenberg à l’oreille du bébé. L’hôpital n’est pas un endroit qui convient aux enfants !» Elle pensait que c’était la fin des visites quotidiennes, des voyages épuisants en autobus…
- Non ! Vous ne pouvez pas encore l’emmener ! déclara le pédiatre.
- Comment ? s’exclamèrent les parents qui se sentaient à bout de force…
- Une nouvelle apnée s’est produite !
Madame Rosenberg contemple son fils : «Pourquoi ? Pourquoi doit-il rester encore à l’hôpital ?»
Soudain elle se souvient : «C’est D.ieu qui guide les pas de l’homme ! Quand un Juif se trouve dans un endroit, c’est pour qu’il y accomplisse des Mitsvot ! Le Juif est un envoyé de D.ieu et s’il se trouve ici, à l’hôpital, c’est qu’il doit y effectuer une mission ! Mais oui ! Je sais ! J’ai fêté dernièrement mon 25ème anniversaire et, entourée de mes amies, j’avais décidé d’inscrire 25 enfants qui achèteraient pour un dollar symbolique une lettre dans le nouveau Séfer Torah qui serait bientôt inauguré. Mais avec la naissance prématurée, j’avais complètement oublié !»
Elle se rendit en hâte au Beth ‘Habad, prit 25 formulaires d’inscription qu’elle fourra dans son sac et, chaque fois qu’elle se rendait à l’hôpital, elle entrait dans les chambres et persuadait les parents d’inscrire leurs enfants dans le nouveau Séfer Torah.
«Aujourd’hui, nous avons inscrit le 25ème enfant ! déclara Madame Rosenberg à son mari en arrivant à la porte de l’hôpital. Peut-être aujourd’hui se produira le miracle ?»
- Vous pouvez emmener votre enfant ! annonça le médecin.
- D.ieu soit loué ! Nous avons pris part à la campagne d’inscription dans le Séfer Torah. Nous avons fait acheté des Otot, des lettres, et nous avons reçu un Ot, un signe du Ciel ! s’exclamèrent avec enthousiasme les parents en serrant leur petit trésor dans leurs bras…

« Ot Besefer Torah »
Traduit par Feiga Lubecki