Rambam 1 Chapitre

Notons que bon nombre de ces lois ne sont pas la halakha, c'est-à-dire la pratique observée dans les communautés juives. Elles ne sauraient donc en aucun cas être prises comme référence. Veuillez noter également que cette version est un premier essai qui fera l'objet de corrections ultérieures.

2 Kislev 5783 / 11.26.2022

Lois du louage : Chapitre Neuf

1. Celui qui engage des ouvriers et leur demande d’entamer leur travail tôt le matin et de l’achever tard le soir ne peut les y obliger si cela est contraire à l’usage local. Là où l’usage est de nourrir [ses employés], il devra s’y conformer; si l’usage veut que l’on fournisse ses employés en figues sèches, en dattes ou en d’autres choses semblables, il devra le faire. Le tout doit suivre l’usage du pays (minhag ha-medina).

2. Si celui qui engage un ouvrier lui annonce qu’il le paierait en référence à ce que gagne un ouvrier ou l’autre en ville , on détermine la différence entre le salaire le plus élevé et le salaire le plus bas et l’on verse à l’ouvrier un salaire moyen .

3. [Soit un patron] qui demande à son mandataire (šeluho) d’aller lui engager des ouvriers pour trois pièces [chacun], et que ce dernier les engage pour quatre pièces [chacun]. Si [le mandataire] leur avait dit : “C’est moi qui vous réglerai votre salaire ”, il donnera aux ouvriers quatre pièces, en recevra trois de l’employeur et en paiera donc une de sa propre poche . Si le mandataire leur avait dit : “C’est le patron (ba‘al ha-bayit) qui vous rémunérera”, ce dernier le fera selon l’usage du pays. Si, dans ce pays, certains ouvriers sont payés trois pièces et d’autres quatre pièces, l’employeur ne leur donnera que trois pièces et ils pourront avoir des griefs contre le mandataire . De quel cas parlons-nous ? Du cas où leur œuvre ne peut être estimée; mais si elle peut l’être et qu’elle vaut en effet quatre pièces, le patron leur paiera quatre pièces; en effet, si son mandataire ne leur avait pas annoncé un salaire de quatre pièces, ils n’auraient pas peiné pour réaliser une œuvre valant quatre pièces.

4. Si le patron dit à son mandataire d’aller lui engager des ouvriers pour quatre pièces et que celui-ci les a engagés pour trois pièces, même si leur œuvre vaut quatre pièces, il ne recevront que trois pièces ; en effet, c’est là ce qu’ils avaient accepté et ils pourront avoir des griefs contre le mandataire .

5. Si le patron a dit au mandataire : “pour trois pièces”, que ce dernier a annoncé aux ouvriers quatre pièces et qu’eux-mêmes affirment : “Nous acceptons ce qu’aura décidé le patron”, ils pensent à ce que le patron les rémunère plus que quatre pièces . C’est pourquoi l’on estime le travail qu’ils ont accompli : s’il vaut quatre pièces, ils recevront quatre pièces du patron; si sa valeur n’est pas connue ou que le travail ne vaut pas [quatre pièces], ils n’en recevront que trois.

6. Si le patron a dit au mandataire : “pour quatre pièces”, que ce dernier a annoncé aux ouvriers “pour trois pièces” et qu’eux-mêmes ont affirmé : “Nous acceptons ce qu’aura décidé le patron”, même si leur œuvre vaut quatre pièces, ils n’en recevront que trois car, ayant entendu “trois”, c’est là ce qu’ils ont accepté.

7. Si un patron engage des ouvriers et que ces derniers le trompent ou que lui-même trompe les ouvriers , ils ne pourront qu’avoir des griefs les uns contre les autres . De quel cas parlons-nous ? Du cas où les ouvriers ne se sont pas encore rendus sur le lieu de travail . Mais dans le cas où des âniers se sont rendus à la grange et n’y ont pas trouvé de récolte, ou des ouvriers se sont rendus au champ et l’ont trouvé humide ou ont été engagés pour arroser un champ et l’ont trouvé détrempé : si le patron avait inspecté le lieu de travail la veille et en avait conclu qu’il nécessitait [l’intervention] des ouvriers, ces derniers n’auront rien à lui reprocher : en effet, que peut-il faire ?

8. Mais s’il n’avait pas inspecté le lieu de travail, il doit les payer comme des ouvriers désœuvrés , car [l’ânier] qui vient chargé n’est pas semblable à celui qui vient déchargé, et l’ouvrier qui peine dans son labeur n’est pas semblable à celui qui reste oisif.

9. De quel cas parlons-nous ? Du cas où ils n’ont pas entamé leur travail. Mais dans le cas où l’ouvrier a entamé son travail puis y a renoncé, même au milieu de la journée, il est dans son bon droit. En effet, il est dit : “Car les enfants d’Israël sont Mes serviteurs ” (Lévitique XXV, 55) et non des serviteurs de serviteurs . Et quelle loi applique-t-on à l’ouvrier qui a renoncé à son travail après l’avoir entamé ? On estime ce qu’il a accompli et il est rémunéré en conséquence . Mais s’il s’agit d’un entrepreneur , on estime ce qu’il reste à faire. Que le prix des ouvriers ait été plus bas lorsque le patron les a engagés ou qu’il ne l’ait pas été, que leur travail ait perdu de la valeur après [leur embauche] ou qu’il n’en ait pas perdu, on estime ce qu’il reste à faire . Comment cela ? Si l’on a confié à un entrepreneur une moisson sur pied à moissonner pour deux sela‘im , qu’il en a moissonné une moitié et laissé l’autre moitié, ou que l’on a chargé un employé de broder un habit, qu’il en a brodé une moitié et laissé l’autre moitié, on estime ce qu’il reste à faire : si cela vaut six dinarin , soit on donne aux employés un sicle , soit ils achèvent leur ouvrage . Mais si ce qu’il reste à faire vaut deux dinarin , le patron ne leur paie qu’un sela‘ chacun, puisqu’ils n’ont réalisé que la moitié du travail. De quel cas parle-t-on ? Du cas où le travail n’est pas perdu . Mais dans le cas où il s’agit d’un travail qui est perdu , comme si l’on doit sortir le lin du rouissage ou que le patron a loué un âne afin d’apporter des flûtes pour un mort ou pour une mariée , ou autres choses semblables, que l’employé soit un ouvrier ou un entrepreneur, il ne peut renoncer à son travail que s’il y a force majeure, par exemple s’il tombe malade ou s’il apprend le décès d’un proche ; et s’il renonce à son travail sans qu’il y ait eu force majeure, le patron engage d’autres ouvriers [à leurs dépens] ou bien induit les premiers en erreur.

10. Comment les induit-il en erreur ? Il leur dit : “En vous rémunérant, je vous ai lésés d’un sela‘, venez donc en recevoir deux” [et cela] en vue qu’ils achèvent leur travail; une fois le travail achevé, il ne leur donne que ce qui avait été convenu à l’origine. Et même s’il leur a effectivement donné deux sela‘im, il récupère ensuite le supplément auprès d’eux.

11. Comment engage-t-il d’autres ouvriers aux dépens des premiers ? Il engage d’autres ouvriers qui achèvent le travail [laissé par] les premiers afin qu’il ne soit pas perdu, et tout ce qu’il paiera en supplément aux nouveaux ouvriers, il le retirera aux premiers. Jusqu’à quelle somme [pourra-t-il donner aux nouveaux ouvriers aux dépends des premiers] ? Jusqu’à la totalité du salaire des premiers; et s’ils avaient déposé chez lui une somme d’argent leur appartenant, il emploie de nouveaux ouvriers afin d’achever le travail, jusqu’à hauteur de quarante ou cinquante zuz par jour et par ouvrier, même si le prix habituel d’un jour de travail n’est que de trois ou quatre zuz par ouvrier. De quel cas parle-t-on ? Du cas où le patron ne peut trouver de nouveaux ouvriers pour achever le travail au prix [fixé avec] les premiers. Mais s’il en trouve et que les premiers ouvriers lui disent : “Va engager ceux-là et tu n’y perdras pas”, qu’il s’agisse de journaliers ou d’entrepreneurs, il ne pourra qu’avoir des griefs contre eux et l’on estimera, pour le journalier, ce qu’il a fait, et pour l’entrepreneur, ce qu’il reste à faire.

12. Si un patron engage un ouvrier et que ce dernier est réquisitionné au service du roi , qu’il ne dise pas à son employeur : “Me voici devant toi ”, mais qu’il soit rémunéré en fonction du travail qu’il a accompli.

13. Celui qui engage un ouvrier afin qu’il irrigue son champ avec l’eau d’une rivière et que cette dernière s’est asséchée au milieu de la journée, si [le fait] n’est pas habituel, le patron paiera ses employés selon ce qu’ils auront accompli. De même, s’il est d’usage que les habitants de la ville interrompent le cours de la rivière et qu’ils l’ont interrompu au milieu de la journée, les ouvriers seront rémunérés selon ce qu’ils auront fait, car ils étaient informés de l’usage concernant le cours d’eau. Si, au contraire, il est habituel que le fleuve s’assèche de lui-même, le patron paiera à ses employés le salaire d’une pleine journée, car il aurait dû les en informer.

14. S’il les a engagés pour irriguer un champ et que la rosée est venue et l’a fait, il les paiera selon ce qu’ils auront accompli . Si c’est la rivière qui s’est épaissie et a irrigué le champ, il leur paiera la totalité de leur salaire car ils ont reçu une aide céleste.

15. De quel cas parle-t-on ? Du cas de l’ouvrier. En revanche, celui qui a conclu avec son métayer (ariso ) que s’il arrosait son champ quatre fois par jour il recevrait la moitié de la production alors [que l’usage local est] que les fermiers qui arrosent le champ deux fois par jour n’en reçoivent que le quart, celui-là devra donner [à son métayer] la moitié de la production comme convenu, [même] si la rosée [tombée] avait rendu l’arrosage et l’irrigation inutiles, car le métayer est considéré comme un associé et non comme un salarié.

16. Celui qui a engagé un ouvrier pour accomplir un travail en une journée et que ce travail a été achevé en une demi-journée, si le patron dispose d’un travail équivalent ou de moindre difficulté à confier à son employé, ce dernier l’accomplira pendant le reste de la journée; mais s’il n’a pas de travail à lui confier , il le rémunérera comme un ouvrier désœuvré. Et si l’ouvrier est un terrassier, un agriculteur ou autre, qu’il est habitué à des travaux pénibles et que l’inactivité lui est néfaste , il lui paiera son plein salaire.

17. Si un patron engage un employé afin d’être son mandataire d’un endroit à un autre et qu’à l’endroit en question, l’employé n’a pas trouvé ce qu’il devait ramener, le patron doit le rémunérer pleinement . S’il l’a engagé afin qu’il lui rapporte des roseaux pour sa vigne et que l’employé est parti, n’a pas trouvé de roseaux et n’en a donc pas rapporté, le patron doit le rémunérer pleinement. S’il l’a engagé afin qu’il apporte du chou et des prunes à un malade et que l’employé l’a trouvé mort ou guéri, que le patron ne lui dise pas : “Garde ce que tu a apporté en paiement [de ta peine]” mais qu’il lui verse la totalité de son salaire. De même pour tous les cas similaires.

18. Celui qui engage un ouvrier afin qu’il travaille sur une de ses propriétés, s’il le fait travailler dans la propriété de son prochain, il paiera à son employé un plein salaire et ira récupérer chez son prochain la valeur du travail dont ce dernier a profité.

19. Celui qui engage un ouvrier afin qu’il travaille pour lui de la paille, du chaume ou autres choses semblables, s’il dit à son employé : “Prélève ton salaire sur ce que tu as fait ”, on ne l’écoute pas . Et si, après qu’il a été convenu que l’ouvrier sera payé en nature, le patron lui dit : “Voici ton salaire en espèces, quant à moi, je prélèverai ce qui me revient”, on ne l’écoute pas.

20. Ce que l’ouvrier trouve lui appartient, bien que le patron lui ait dit : “Travaille pour moi aujourd’hui ” et a fortiori s’il lui a dit : “Bêche pour moi aujourd’hui ”. Mais s’il l’a engagé afin de ramasser des choses trouvées, par exemple si le niveau du fleuve a baissé et qu’il l’a engagé afin de ramasser les poissons qui se trouvent dans l’eau stagnante, ce qu’il a trouvé appartient au patron, même s’il a trouvé un sac plein de pièces de monnaie.