Un homme venait de quitter ce monde. Il y laissait la réputation d’un érudit qui était parvenu à amasser de larges connaissances dans la sphère du niglé, le domaine exotérique de la Torah et, en particulier, de la hala’ha, la loi religieuse.

On sollicita Rabbi Na’hman : accepterait-il de prononcer l’éloge funèbre ? « Comment le louerons-nous, répondit-il. Hélas, un sac plein de livres a été perdu ! »(Megilah 28b et le commentaire de Rachi).

Le défunt avait, en effet, étudié des textes difficiles et son érudition n’était pas contestable. Profondément pourtant, il ne les avait pas compris vraiment. Au sens précis de ce mot, il ne les avait pas assimilés. Bien sûr, il était capable de citer de mémoire des versets, des chapitres entiers. Mais lui et les textes demeuraient deux entités séparées. Absolument distinctes.

La hala’ha est le « corps » même de la Torah. Mais les serviteurs véritables du Roi nous dit le Zohar cherchent son âme, la quintessence de toute chose.

Pour ces « serviteurs » la hala’ha cependant conserve son importance primordiale. Bien plus, elle prend pour eux une place inégalée : elle est vécue vraiment. Car, lorsque la dimension profonde, l’âme de la Torah, est étudiée, le rôle cosmique, les processus dynamiques à l’échelle de tous les mondes, inclus dans le respect d’une « simple » loi, deviennent peu à peu perceptibles. Et chaque commandement devient alors la chance d’une transformation personnelle pour celui qui l’accomplit.

Rabbi Leib Sarah’s, l’un des grands Maîtres du ‘Hassidisme disait que s’il avait voyagé si loin pour voir son propre Maître, le Magguid de Mézeritch, « ce n’était pas pour entendre de lui des paroles de Torah mais pour voir comment il laçait et délaçait ses chaussures ! » : le Magguid était parvenu à une élévation telle que le moindre de ses gestes exprimait déjà la Torah


David-Méir KRIEF