Notre histoire nous transporte à Szerdahely, alors en Hongrie (maintenant Dunajska Streda en Slovaquie…).
Kalman, le responsable de la synagogue locale, était un homme honnête, sincère, respecté et aimé de tous. Parmi ses nombreuses occupations au service de la communauté, il prenait surtout à cœur l’allumage des bougies pour éclairer les fidèles durant la prière. Pour cela, il se préparait mentalement et prenait soin d’ajuster sa ceinture de prière. Tout en allumant les mèches, il priait dans ses mots simples : « Puisse D.ieu apprécier l’œuvre de mes mains comme lorsque Aharon le Grand-Prêtre allumait la Menorah dans le Sanctuaire ».
Un jour, Barou’h le boucher, un homme simple lui aussi, entra et observa avec quelle conviction Kalman s’activait en allumant les bougies. Comme il aurait voulu lui aussi effectuer cette belle action ! Soudain il eut une idée :
- Je te propose une pièce d’or si tu me laisses le mérite d’allumer les bougies dans la synagogue !
- L’argent ne m’intéresse pas ! s’indigna Kalman, je préfère la Mitsva elle-même !
Mais le boucher persista : chaque jour, il suppliait Kalman de lui céder le droit de le remplacer jusqu’à ce que, lassé, Kalman décide de solliciter l’arbitrage de Rav Aszod. Très étonné par ce litige, le vénérable rabbin réfléchit puis trancha :
- Si vraiment toi, Kalman, tu estimes n’agir que pour le compte du Ciel et que tu ne veux recevoir aucune récompense pour cela, alors sache que c’est aussi une grande Mitsva que d’aimer son prochain ! Je te conseille donc de céder à Barou’h le droit d’allumer les bougies. Cependant, puisqu’il convient qu’il paie pour la Mitsva, tu devras aussi accepter la pièce que le boucher te donnera. Mais ne dépense pas l’argent ! Mets les pièces de côté et, un jour, tu sauras comment les utiliser !
Bien que Kalman ressente un pincement de cœur, il accepta docilement la suggestion du Rav. C’est ainsi que, chaque jour, Barou’h le boucher se rendait à la synagogue, donnait une pièce d’or à Kalman puis allumait les bougies avec ferveur – ignorant le rôle du Rav dans ce soudain revirement de Kalman.
Fidèle à sa parole, Kalman mettait de côté ces pièces.
Les années passèrent et le vent tourna : le boucher toujours si prospère connut des difficultés financières au point qu’au moment de marier sa fille, il n’eut même pas les moyens de payer le mariage et d’honorer sa promesse de subvenir aux besoins du jeune couple. Désespéré, le boucher se rendit chez le Rav pour exposer son problème. Celui-ci ne répondit pas mais convoqua Kalman, en précisant qu’il devait apporter la caisse avec les pièces d’or. Les deux hommes furent très surpris de se retrouver face à face :
- Ouvre la boîte et compte les pièces, ordonna le Rav.
Kalman s’exécuta, sous l’œil vigilant du Rav et du boucher. La boîte contenait exactement la somme que le boucher avait promise aux futurs beaux-parents de sa fille !
- L’heure de ces pièces d’or est arrivée, commenta le Rav. Elles ont été utilisées pour la Mitsva d’allumer les bougies de la synagogue, elles apporteront maintenant la lumière dans un nouveau foyer juif ! Kalman, donne ces pièces à Barou’h afin que sa fille puisse se marier !
Et Kalman s’exécuta, heureux.
En racontant cette histoire, Rav Aszod remarquait : « Combien d’enseignements pouvons-nous retirer de ces deux Juifs simples ! On peut admirer la droiture de Kalman qui accepta de céder la Mitsva qu’il chérissait tant. Deuxièmement : Barou’h avait toujours pensé qu’il donnait de l’argent à Kalman alors qu’en fait, la Mitsva lui rendit un bien immense à lui-même plus tard. Mais surtout : le fait d’allumer des bougies pour la synagogue apporta la lumière aux âmes de Kalman et de Barou’h ! ».
Elchonon Isaacs – chabad.org
Traduit par Feiga Lubecki
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- Publication : 21 juin 2018