Des poissons qui nagent à contre-courant
« Lorsque l’Arche partait, Moché disait : ‘Lève-toi D.ieu et fais en sorte que Tes ennemis s’éparpillent et que ceux qui Te haïssent s’enfuient de devant Toi’. Et quand elle faisait halte, il disait : ‘Réside tranquillement, Ô D.ieu, parmi les myriades de milliers d’Israël’. » (Bamidbar :10 :35-36)
Ce passage de la Paracha est encadré par deux lettres Noun à l’envers. Selon une opinion du Talmud, la Torah ne comporte pas cinq livres mais sept. La raison avancée pour justifier ce point de vue est que les deux Noun, au début et à la fin indiquent que ce passage est « un livre important, en et par lui-même. » En d’autres termes, le livre de Bamidbar est divisé en trois « livres » distincts : le premier livre avant le premier Noun, le second livre constitué par le passage dont nous parlons et le troisième livre qui comporte tout le reste de Bamidbar, après le second Noun.
Questions
- Pourquoi est-ce la lettre Noun en particulier qui délimite le commencement et la fin du « livre important » ?
- Pourquoi ces deux Noun sont-ils écrits à l’envers ?
- Pourquoi cette division se produit-elle précisément dans la Paracha Beaalote’ha ?
Ce sont la valeur numérique, le sens et le graphisme de la lettre Noun qui vont nous permettre de répondre à ces questions.
La valeur numérique du Noun
Le Noun équivaut à 50. Il existe cinquante portails de compréhension. Cinquante fait également allusion à Chavouot, lorsque nous avons reçu la Torah, le cinquantième jour du décompte de l’offrande du Omer.
Rabbénou Bé’hayé explique que le Noun à l’envers nous enseigne que « ce livre » aurait dû être placé cinquante paragraphes plus tôt, lorsqu’il s’agissait des voyages des Juifs dans le désert.
Le sens du Noun
En Araméen, Noun signifie « poisson ». Le Noun à l’envers nous rappelle notre aptitude à faire demi-tour, à faire Techouva et « nager dans le sens inverse. »
Noun fait également référence à Néfila qui signifie « tomber dans un niveau spirituel bas ». Un Noun inversé évoque donc l’inverse de Nefila. La transformation d’une chute en une élévation est un Ness, un « miracle ». Le mot Ness s’épelle en hébreu : Noun, Samè’h. Quand une personne expérimente un Noun, c’est-à-dire une chute, elle est suivie d’un Samè’h, ce qui fait allusion au Somè’h, c’est-à-dire Celui qui soutient ceux qui sont tombés. En d’autres termes, D.ieu Lui-même vient nous soutenir et nous relever lorsque nous tombons. Cette aide miraculeuse nous permet de nous élever à nouveau, de nager à contre-courant pour revenir à D.ieu.
Les lettres Noun et Samè’h se rencontrent également dans un mot du « livre important » : Binsoa : « voyage ».
Il est un principe selon lequel toutes les doubles lettres font allusion à la Rédemption. Ainsi ce double Noun nous indique-t-il que le sujet principal du « livre important » est notre voyage vers la Rédemption.
Enfin, le Noun renvoie au mot Nassi, « prince » ou dirigeant du Peuple juif. Le dirigeant de chaque génération nous inspire au retour à D.ieu et nous guide pour nous rapprocher de plus en plus de la Rédemption Ultime.
Le graphisme du Noun
Selon le Émèk HaMélè’h, « deux Noun qui se font face se joignent pour former la lettre Mêm. Cette lettre fait allusion à la Torah. Les deux Noun, unis dans la lettre Mêm représentent les deux aspects de la Torah : la Torah révélée et la Torah cachée. La Torah révélée comporte le Talmud, les enseignements hala’hiques. La Torah cachée se réfère au mysticisme du Midrach, de la Kabbale et de la ‘Hassidout.
« Naassé Vénichma »
La paire de Noun évoque aussi la réponse des Juifs lorsque D.ieu leur offrit la Torah : « Naasé Venichma » : « nous ferons et ensuite nous écouterons. » La ‘Hassidout explique que le premier Noun, correspondant au Naassé, « nous ferons », signifie : « nous acceptons D.ieu comme Roi. » Cela exprime un empressement à servir D.ieu, en général. Nichma, « nous écouterons », signifie : « nous acceptons le joug des Mitsvot. » Il s’agit ici d’une disposition à s’engager dans chacun des commandements de D.ieu, en particulier.
Le plan pour la Rédemption
Mais quel est le lien de tout ce qui précède avec la Paracha Beaalote’ha ?
Elle commence avec le commandement qu’adresse D.ieu à Aharon, le Cohen Gadol (le Grand Prêtre) d’allumer les sept lumières de la Menorah.
Nous devons imiter Aharon en illuminant notre foyer des « bougies des Mitsvot et de la flamme de la Torah ».
Et qu’en est-il de l’extérieur ? Le « livre important » nous dit que lorsque l’Arche voyageait… elle aplatissait le chemin pour les Hébreux. Nous aussi, devons emporter avec nous l’Arche de la Torah, où que nous voyagions. Nous devons illuminer le monde autour de nous. Le marché tout comme le monde des affaires ont également besoin de lumière.
Quand notre âme se met en route pour son voyage sur terre, elle vit une Néfila, une descente et un choc culturel, par rapport à l’atmosphère sainte de son foyer originel, symbolisé par le Michkane (le Tabernacle). Cependant, voyager avec la Torah, représentée par l’Arche ou le Noun, nous permet de faire jaillir la lumière de D.ieu où que nous allions dans le monde. Nous pouvons même susciter le « miracle » du retour, en nous-mêmes et chez ceux que nous influençons. C’est la raison pour laquelle le « livre important » est réellement le plan pour la Rédemption.
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- Publication : 4 juin 2023