«Quand entre le mois d’Adar…»
Certaines phrases sonnent comme des fanfares de victoire et des cris d’allégresse. Elles montent avec les couleurs dansantes des plus grands feux de joie : “Quand entre le mois d’Adar, on multiplie la joie”. Voici, en effet, que le nouveau mois se présente à nous et l’évènement dépasse largement les considérations de calendrier.
Le mois d’Adar possède une lumière intérieure particulière. Eclairé, dès son début, par la fête de Pourim à présent si proche, il est une période où le temps est comme transfiguré par une joie infinie. Il est celle où, selon l’expression du livre d’Esther, tout “fut transformé”. Il faut s’en souvenir : alors que l’ennemi des Juifs, Haman, pensait faire de ce mois celui de leur disparition, il devint celui de leur victoire. Et ce fut leurs ennemis qui subirent le terrible sort qu’ils voulaient leur infliger. Cette transformation brutale du drame annoncée en allégresse étend ses effets sur l’ensemble du mois. C’est pourquoi celui-ci prend, dès son ouverture, cette coloration particulière d’espoir et de bonheur, jusque dans les temps troublés.
Cette notion est si étonnante que nos Sages en ont tiré une recommandation étonnante : si un homme a un litige qui doit être réglé devant la justice, qu’il reporte l’examen de cette affaire au mois d’Adar car c’est là un mois propice.
Tout se passe comme si ce mois était décidément porteur d’une puissance qui n’appartient qu’à lui et change tout ce qu’il touche. Alors que nous entrons dans cette période nouvelle, c’est cette approche différente qu’il convient d’avoir ; certes, l’espoir peut sembler ne pas toujours être au rendez-vous de la vie quotidienne et le bonheur sans nuages quelquefois un peu trop absent, cependant Adar nous introduit dans une autre dimension : celle où le meilleur possible est la seule éventualité admissible.
Forts d’une telle certitude, nous avançons sans hésiter dans les jours qui viennent. Ils nous conduisent vers une lumière sans fin et nous savons que celle-ci, par nature, ne peut que continuer de nous conduire de victoire en victoire jusqu’à la plus belle et la plus nécessaire de toutes : la venue de Machia’h.
La justesse du jugement
Isaïe (11 :4), décrivant l’œuvre de Machia’h, déclare : “Il jugera le pauvre avec justesse”. Le pauvre est ici désigné, en hébreu, par le terme “dal”. Il est celui qui ne parvient pas à se contrôler. Il sait discerner le bien et le mal mais il manque de la détermination nécessaire pour traduire cette compréhension dans la pratique quotidienne. Le mot qui le désigne, “dal”, souligne ce manque. La Torah (Lévitique 14 :21) le traduit ainsi : “Celui dont la main n’atteint pas”.
Cet homme spirituellement pauvre qui ne parvient pas à “se prendre en main” sera jugé par Machia’h, annonce le prophète. Mais ce jugement sera mené avec “justesse” car Machia’h relèvera ses circonstances atténuantes.
(d’après Likouteï Dibourim, vol. II, p. 645) H.N.
Terouma: le Sanctuaire dans le cœur
Seul à seul dans un face à face avec D.ieu, sur le Mont Sinaï, Moché apprit les détails de la construction du Tabernacle, le Temple portatif décrit dans la Paracha de cette semaine. Il allait s’agir du centre spirituel des Juifs, voire du monde entier, le lieu de la révélation de la Présence divine.
Le Tabernacle était fait de lourdes planches de bois, posées verticalement. Chaque planche était soutenue à sa base par un lourd bloc d’argent dans lequel elle s’encastrait. Les planches étaient recouvertes d’or et solidement fixées les unes aux autres. Elles formaient les murs du Tabernacle et des rideaux superposés en constituaient le toit.
A l’intérieur du Tabernacle étaient disposés la Menorah, une Table et un autel pour les encens, tous faits d’or. Derrière des rideaux magnifiquement brodés, apparaissait le Kodech Hakodachim, le Saint des Saints, renfermant l’Arche d’or. Y étaient enfermées les Tables en saphir sur lesquelles avaient été gravés les Dix Commandements et que Moché avait rapportées du Mont Sinaï.
Il y a bien longtemps que Moché construisit ce Sanctuaire et, sous la forme du Temple, il sera à nouveau édifié à Jérusalem. Mais il existe également un Sanctuaire intérieur, dans le cœur de chaque homme et de chaque femme. Les détails du Sanctuaire matériel décrits dans la Sidra nous aident à comprendre comment nous pouvons construire ce Sanctuaire intérieur pour que la Présence de D.ieu se révèle également, à l’intérieur de chacun d’entre nous.
Le bois d’acacia, avec lequel était fabriqué le Sanctuaire, possède, en hébreu, un nom étrange: atsé chittim. On peut le traduire par “le bois de la folie”.
En fait, ce nom va nous aider à comprendre le but du Sanctuaire et celui de la vie.
Il existe un niveau de comportement normal, ordinaire et civilise. C est la norme. Un comportement bas, vulgaire et grossier signifie agir d une façon inferieure a la norme: c est une forme de folie dont émergent toutes formes de mal et de fautes.
Mais il existe également une autre forme de folie qui implique que l’on aille au dessus de la norme. On l’appelle “folie de sainteté”. Par foi, dévouement, dévotion et amour, la personne va au-delà de la norme de la rationalité conventionnelle, elle commet des actes qui paraissent déraisonnables ou peuvent être exceptionnels. Imaginez un homme décidant de mettre les Téfilines chaque jour ou une femme entreprenant de transformer toute sa cuisine pour la rendre complètement cachère.
Le Judaïsme est basé sur la force que génèrent de telles décisions. Nous avons survécu pendant des milliers d’années grâce à la force de cette “folie sacrée”, à notre volonté d’aller, en certaines occasions, au-delà de la norme conventionnelle. Le pas que nous franchissons alors répare les erreurs et les excès de notre folie inférieure et déplaisante. Le mal se voit transformer en bien, l’obscurité en lumière. Et c’est grâce à ce processus que nous construisons notre Sanctuaire intérieur.
C’est la raison pour laquelle le Tabernacle décrit dans notre Paracha était construit de ce bois “le bois de la folie”. Mus par un désir de progresser, nous allons au-delà de la raison dans le règne de la folie sacrée et nous révélons ainsi la radieuse Che’hina, la Présence de D.ieu qui illumine le Sanctuaire de notre cœur, de notre maison, de notre vie et en dernier ressort, depuis le Temple de Jérusalem, le monde entier.
Les couleurs de l’âme.
Le monde que D.ieu a créé pour nous est très beau. L’un de ses aspects particulier en est la couleur: le ciel bleu et le bleu plus profond de la mer, les montagnes marron et vert, les couchers du soleil rougeoyants etc. Les couleurs possèdent également une signification spirituelle. On peut en avoir un aperçu dans la façon dont elles apparaissent dans la Paracha de cette semaine, dans la description qui nous est donnée de la construction du Tabernacle, prototype du Temple de Jérusalem. Les murs étaient, comme nous l’avons vu, construits de planches de bois couvertes d’or, posées sur des socles d’argent. Ces murs étaient presque entièrement recouverts d’une tenture faite tout spécialement tissée. En outre, il y avait également les vêtements des prêtres. La Torah cite tout ce qu’incluaient ces tissus dans une liste que l’on peut lire au début de la Paracha: la laine bleue, la laine écarlate, le lin blanc…
Des couleurs! Quel est leur sens?
Que signifient donc les couleurs dans le sanctuaire du cœur? Voici comment Rabbi Yossef Its’hak, le précédent Rabbi, l’explique.
Le bleu exprime notre crainte devant l’infinie grandeur du Divin. Toute l’immensité de notre univers que décrivent les astronomes n’est rien par rapport à D.ieu dont l’infinitude dépasse le monde. Cette idée fait naître un sens de crainte: le bleu.
Et pourtant les Cabbalistes nous disent que la même idée implique également un sentiment différent, une soif passionnée de se lier avec D.ieu, au-delà du monde, au-delà de la vie elle-même, un amour passionné pour D.ieu: l’écarlate.
La combinaison de ces deux sentiments, la crainte et l’amour violent, conduit à la perception de notre propre petitesse, une conscience de notre pitoyable insignifiance par rapport à la grandeur infinie de D.ieu. De cette perspective, l’on considère sa propre personne avec compassion, comme en observant de haut un petit moi, exclusivement préoccupé par lui-même… Cet amalgame de bleu et de rouge donne le violet.
Mais il existe aussi une autre forme d’amour de D.ieu. Non l’amour enflammé qui s’épanouit au-dessus de l’univers mais un amour qui coule comme de l’eau pure, conscient de ce qui est intime, recherchant la proximité avec D.ieu et l’amour de D.ieu pour nous. Ce chaleureux sens d’amour et de bonté aimante est blanc.
Ce sont là les couleurs de l’âme, les émotions avec lesquelles nous nous lions à D.ieu dans notre propre Sanctuaire: le bleu, l’écarlate, le violet et le blanc.
Qu’est-ce que les « quatre Parachiot » ? (2ème partie)
Nos Sages ont institué de lire, en plus de la Sidra hebdomadaire, une « Paracha » durant les semaines qui précèdent Pourim et Pessa’h.
• La seconde s’appelle « Za’hor ». Elle rappelle la nécessité de se souvenir du mal que nous a fait Amalek dont le descendant, Haman, chercha lui aussi à anéantir le peuple juif à l’époque d’Esther et de Morde’haï. Cette Paracha (Deutéronome 25. 17 à 19) sera lue le Chabbat « Tetsavé » avant Pourim (cette année le Chabbat 7 mars 2009). On lira la Haftarah dans Samuel I. 15. 1 à 34).
• La troisième s’appelle « Para ». Elle rappelle la nécessité de se purifier avec l’eau lustrale mélangée aux cendres de la vache rousse avant la fête de Pessa’h pour pouvoir se présenter au Temple et offrir le sacrifice de la fête. Cette Paracha (Nombres 19. 1 à 22) sera lue le Chabbat « Ki Tissa », (cette année le Chabbat 14 mars 2009). On lira la Haftarah dans Ezékiel 36. 16 à 38.
• La quatrième s’appelle « Ha’hodech ». Elle rappelle l’importance du premier jour (« Roch ‘Hodech ») du mois de Nissan et la préparation du sacrifice pascal. Cette Paracha (Exode 12. 1 à 20) sera lue après la Sidra « Vayakhel-Pekoudei », avant Roch ‘Hodech Nissan, le Chabbat 21 mars 2009). On lira la Haftarah dans Ezékiel 45. 16 à 46-48.
On a l’obligation d’écouter plus attentivement que d’habitude la lecture de la Paracha Za’hor, avant Pourim. Dans de nombreuses communautés, les femmes font l’effort de se rendre à la synagogue pour écouter cette Paracha.
F. L.
Un «médecin–ami»
Emissaire du Rabbi à Netanya, Rav Netanel Dreyfus a conservé des liens étroits avec la communauté juive française dont il est issu.
J’étais une fois invité un Chabbat à Paris chez un ami Loubavitch, un médecin spécialiste et je lui racontais des histoires extraordinaires du Rabbi. Il me fit remarquer que je n’avais sans doute pas entendu parler de ce qui lui était arrivé personnellement :
«Alors que mon épouse était enceinte, on découvrit qu’elle était affectée d’une maladie cardiaque sévère mais rare. Le diagnostic était pessimiste, aussi bien pour elle que pour l’enfant qu’elle portait. J’écrivis immédiatement au Rabbi qui me répondit de prendre conseil auprès d’un médecin-ami spécialiste de la chirurgie cardiaque infantile. Jusqu’à la réception de cette lettre, j’ignorais même qu’il existait une telle spécialisation. Et, bien entendu, j’ignorais à qui m’adresser : qui pouvait être en même temps un médecin-ami et un spécialiste de la chirurgie cardiaque infantile ? Ce qui était clair, c’est que des capacités particulières étaient nécessaires.
Je passais en revue, mentalement, les noms de tous mes camarades des bancs de la faculté de médecine pour tenter d’en retrouver un qui soit particulièrement doué.
Soudain, je me suis souvenu d’un étudiant, vraiment brillant : à chaque cours, il proposait aux professeurs des solutions judicieuses et originales.
C’était lui qu’il me fallait retrouver. Mais comment ? Je m’adressai à la direction de l’université mais on refusa de me donner ses coordonnées : il était devenu un grand spécialiste, très difficile à contacter. Quand j’expliquai au directeur de l’université qu’il s’agissait d’une urgence extrême, il consentit à prendre mes coordonnées et à les transmettre à ce médecin : s’il le désirait, ce serait lui qui me contacterait. J’attendis nerveusement la suite : heureusement, il me téléphona et me demanda pourquoi j’avais cherché à le joindre. Je lui demandais quelle était maintenant sa spécialité et il répondit : la chirurgie cardiaque infantile. J’étais stupéfait de la façon dont le Rabbi m’avait amené jusque là. Je lui expliquai la situation de mon épouse et il répondit que ce cas n’était pas de son ressort puisqu’il n’opérait pas des adultes.
J’ai insisté et je lui expliqué – à lui qui n’était pas juif – que j’avais reçu des instructions spécifiques de notre grand Rabbi à New York, qui était connu, entre autres, pour ses réalisations miraculeuses. Pensif, il finit par déclarer : «Ecris à ton Rabbi que tu m’as retrouvé ; donne-lui mon nom : si ton Rabbi prend la responsabilité de l’opération, je suis prêt à l’effectuer sans me porter du tout garant de son succès car, comme tu le sais, ma spécialité ne s’étend pas aux adultes».
(Autant que je le sache, ce médecin n’avait jamais entendu parler du Rabbi !)
Le Rabbi envoya son accord, le médecin opéra et voici l’enfant qui est né quelques mois plus tard ! D.ieu merci, mon épouse s’est également très bien remise !
Et il y a une suite à cette histoire : quelques années plus tard, un autre cas similaire se présenta : un non-Juif avait besoin d’une opération cardiaque délicate. Ce non-Juif s’adressa à mon ami qui répondit – comme à moi – qu’il n’opérait pas les adultes. Le malade insista : «J’ai entendu que vos opérations étaient couronnées de succès et je n’aurais confiance qu’en vous ! Faites une exception pour moi !» Ce médecin eut alors une idée. Il me téléphona : «J’ai quelque chose de très spécial à te demander, déclara-t-il tout de go. On me demande d’effectuer exactement la même opération que j’ai effectuée sur ton épouse. Je n’accepterai de la faire que si ton Rabbi m’accorde encore une fois sa bénédiction !»
J’ai transmis cette demande inédite au Rabbi qui donna son accord. L’opération fut un succès !
Rav Netanel Dreyfus
Kfar Chabad n°1315
traduit par Feiga Lubecki