Le verset Toledot 26, 12 dit : «lts'hak planta dans ce pays-là et il trouva, cette année-là, cent mesures(1), car l'Eternel le bénit». La Paracha rapporte que notre père lts'hak se demanda s'il devait se rendre en Egypte, du fait de la famine(2). D.ieu lui dit alors : «Réside dans ce pays(3). Je serai avec toi et Je te bénirai»(4). Il resta donc dans le pays et, malgré la famine, il planta son champ(5).

La Torah relate donc que sa récolte fut cent fois plus importante que celle qu'il escomptait. Quelle est la signification des expressions : «ce pays-là» et «cette année-là» ? Rachi l'explique : «Pourquoi ces deux précisions ? Pour t'indiquer que le pays était difficile(6) et l'année était difficile(7)». Or, malgré la famine et la difficulté de planter son champ, lts'hak parvint à obtenir une récolte cent fois plus importante.

Concernant ces cent mesures(8), Rachi cite deux explications, la première : «on évalua ce qu'elle devait produire(9) et elle produisit cent fois plus» que ce que l'on aurait pu attendre en pareil cas, la seconde : «nos Sages disent(10) que cette évaluation était pour la dîme(11)» et elle fut donc réalisée à l'issue de la récolte, dans l'optique du prélèvement de la dîme. Un miracle prodigieux se produisit alors et la récolte fut multipliée par cent.

La seconde interprétation décrit effectivement un miracle prodigieux et surnaturel(12). Elle justifie la richesse immense et soudaine de lts'hak. Après avoir évoqué ces cent mesures, la Torah dit, en effet, que : «il avait du grand bétail, du petit bétail, beaucoup de travail(13) et les Philistins le jalousèrent»(14). Quelle était l'origine de cette grande richesse?

Si l'on s'en tenait à la première interprétation, selon laquelle le champ produisit une récolte cent fois plus importante qu'à l'accoutumée, cette richesse de Its'hak resterait inexpliquée. Celui-ci se trouvait, en effet, «dans ce pays-là» et «cette année-là». La terre était desséchée et l'année était difficile, alors qu'il n'y aurait rien eu d'exceptionnel en cela pour une bonne terre, en une bonne année(15). En revanche, quand la récolte finale fut cent fois plus importante, il y avait bien là une immense abondance, susceptible d'enrichir Its'hak.

Toutefois, une question se pose encore: pourquoi nos Sages soulignent-ils que : «cette évaluation était pour la dîme» ? S'ils entendent souligner que la multiplication par cent intervint après la récolte(16), ils auraient pu le dire clairement, plutôt qu'y faire une simple allusion, en mentionnant la dîme.

En fait, cette précision est nécessaire, car c'est elle qui donne la raison de la bénédiction. D.ieu accorda à Its'hak une telle abondance par le mérite de la Mitsva de la dîme, qui a la vertu de susciter la richesse(17). En effet, comme le disent nos Sages(18), dont la mémoire est une bénédiction, «prélève la dîme pour t'enrichir». Quand un Juif prélève, pour D.ieu, la dîme de sa récolte, D.ieu accorde Sa bénédiction à ses possessions, au point de les multiplier par cent, «cent mesures».

Et, une telle bénédiction se manifeste de telle façon que la récolte pousse, dans un premier temps, comme à l'accoutumée. Puis, par la suite, quand la récolte a d'ores et déjà poussé, Its'hak l'évalue, afin de déterminer la dîme qu'il doit prélever. C'est alors que D.ieu lui accorde la bénédiction des cent mesures(19).

(Discours du Rabbi, Likouteï Si'hot, tome 5, page 121)

Notes :

(1) Une récolte cent fois plus importante que celle qui est produite, dans des conditions ordinaires, par un tel champ.
(2) Il n’avait pas le droit de quitter Erets Israël, à la différence des deux autres Patriarches, parce qu’il était « un holocauste intègre», depuis son sacrifice. En l’occurrence, néanmoins, il se dit que l’interdiction avait été ôtée par la famine, du fait de laquelle il était impossible de se nourrir en Terre sainte.
(3) Malgré la famine.
(4) Toledot 26, 3.
(5) Ce qui souligne encore plus clairement le miracle qui fut accompli pour lui, <(dans un endroit difficile, en une année difficile», selon l’expression de Rachi que le texte mentionnera et analysera par la suite.
(6) Sa fertilité était réduite.
(7) C’était une année de famine.
(8) Par rapport à quelle référence étaient-elles évaluées ? C’est ce que le texte expliquera par la suite.
(9) En temps normal.
(10) Dans le Midrash Béréchit Rabba, chapitre 64, au paragraphe 6.
(11) L’évaluation de Its’hak portait sur la quantité de dîme qu’il devait donner, puisque, disent nos Sages, « les Patriarches ont accompli toute la Torah avant qu’elle soit donnée». Au final, il donna une quantité de dîme cent fois plus importante.
(12) Au-delà de la première, comme le texte le montrera.
(13) En plus de cette récolte.
(14) Toledot 26, 14.
(15) La portée du miracle s’en trouve réduite. (16) Lors de l’évaluation de la dîme.
(17) Il en est de même pour toutes les formes de Tsedaka, en général, qui sont le moyen d’obtenir la bénédiction de l’opulence matérielle. Bien plus, comme le rapportent nos Sages, dont la mémoire est une bénédiction, D.ieu dit, à ce propos: « De grâce, mettez-Moi à l’épreuve, en la matière». Les Sages en déduisent que, même si, de façon générale, « les Mitsvot n’ont pas été données pour que l’on en tire un profit personnel», il est, cependant, permis de donner de la Tsedaka: « pour que mon fils guérisse».
(18) Dans le traité Chabbat 119a.
(19) Et, de cette façon, le miracle apparaît encore plus clairement.

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