La 'Hassidout explique(1) que tout ce qui se passe, d'une manière cachée, à Roch Hachana, de même qu'à Yom Kippour, qui est la dimension profonde de Roch Hachana, se révèle pendant : « le jour de notre fête », à Soukkot. L'un des aspects dominants de Roch Hachana et de Yom Kippour est l'unité qui règne alors entre les Juifs. En effet, tous servent D.ieu, en ces jours, par la partie profonde de leur âme, ainsi qu'il est dit : « Recherchez Ma Face ». A ce stade, tous les Juifs sont identiques. Et, c'est pour cela qu'ils peuvent s'unir, ainsi qu'il est dit : « Vous vous trouvez tous ensemble, en ce jour », depuis : « vos chefs de tribu » jusqu'à : « ton coupeur de bois et ton puiseur d'eau »(2). Cette unité de tous les enfants d'Israël apparaît à l'évidence, comme tout le contenu de Roch Hachana et de Yom Kippour, pendant la fête de Soukkot.

Le Midrash dit que les quatre espèces de Soukkot font allusion à toutes les catégories du peuple d'Israël : « Le fruit de l'arbre de splendeur, c'est Israël. Tout comme l'Ethrog a un goût et une odeur, de même, il y a, parmi les Juifs, des hommes qui possèdent la Torah et les bonnes actions ». Le goût souligne que l'étude de la Torah doit être perçue et comprise, ce qui procure à l'homme un goût et un plaisir. L'odeur est la pratique des Mitsvot, qui doit être soumise. « Les palmes de dattier, c'est Israël. Tout comme une datte a un goût mais pas d'odeur, de même, il y a, parmi les Juifs, des hommes qui possèdent la Torah, mais non les bonnes actions. Les feuilles de l'arbre aux rameaux entrelacés, c'est Israël. Tout comme le myrte a une odeur et pas de goût, de même, il y a, parmi les Juifs, des hommes qui possèdent les bonnes actions, mais non la Torah. Les saules des rivières, c'est Israël. Tout comme le saule n'a ni odeur, ni goût, de même, il y a, parmi les Juifs, des hommes qui ne possèdent ni Torah, ni bonnes actions. D.ieu  déclara : qu'ils soient tous attachés ensemble, en un seul bouquet et les uns apporteront l'expiation aux autres(3). »

En outre, l'unité des Juifs, à Soukkot, est un fait nouveau, par rapport à celle de Roch Hachana et de Yom Kippour. En effet, on ne ressent pas clairement, en ces jours, la différence qui existe entre toutes les catégories d'Israël. Le Chofar de Roch Hachana et la Techouva de Yom Kippour ont une portée générale. Tous les Juifs servent D.ieu en révélant la dimension profonde de leur âme. Il n'y a alors aucune distinction entre l'une et l'autre. Tout reste caché. A Soukkot, en revanche, les différentes catégories d'Israël prennent une expression concrète. On observe qu'il y a un Ethrog, un Loulav. Bien plus, la Mitsva consiste précisément à prendre quatre espèces différentes, qui forment un bouquet unique.

On peut déduire des termes du Midrash que l'espèce la plus haute est l'Ethrog, puisqu'il cumule les deux qualités, le goût et l'odeur, la Torah et les Mitsvot. Mais, dès lors, pourquoi la bénédiction que l'on récite pour cette Mitsva est-elle : « prendre le Loulav » ? Il est expliqué, à ce propos, qu'il en est ainsi parce que le Loulav est la plus haute des quatre espèces. Néanmoins, l'apparence matérielle n'est que l'extension de la source morale. En l'occurrence, le Loulav est plus haut que les autres espèces à cause d'une qualité morale qu'il possède et que les autres n'ont pas, y compris l'Ethrog. Pourtant, l'Ethrog a un goût et une odeur, alors que le Loulav n'a qu'un goût.

L'explication est la suivante. Il y a une différence entre la Torah et les Mitsvot. Ces dernières sont : « les membres du Roi »(4), alors que : « la Torah et D.ieu ne font qu'un »(5). Les membres du corps ne sont pas totalement unifiés à l'âme, même s'ils lui sont soumis et appliquent naturellement sa volonté. De même, les Mitsvot sont l'expression de la soumission à la Volonté de D.ieu, mais celui qui les met en pratique conserve sa propre existence et il ne s'unifie pas à D.ieu. A l'inverse celui qui étudie la Torah saisit la Sagesse de D.ieu. Or, « Lui et Sa Sagesse ne font qu'un ». La qualité de l'étude de la Torah est donc l'unification à D.ieu qu'elle procure. Plus un homme s'y consacre et plus il fait corps avec Lui. Un tel homme est alors un Loulav, possédant la Torah, mais non les bonnes actions.

Certes, il est clair qu'un tel homme pratique également les Mitsvot. Si ce n'était pas le cas, il ne mettrait pas en application l'objet de cette étude et c'est à ce propos qu'il est dit : « D.ieu dit à l'impie : pourquoi t'entretiens-tu de Mes Lois ? »(6). Bien plus, même s'il n'a pas enfreint le Choul'han Arou'h, mais n'a cependant pas accompli de bonnes actions, c'est à son propos qu'il est dit : « celui qui prétend ne posséder que la Torah ne possède même pas la Torah »(7). Il s'agit donc bien, en l'occurrence, d'un homme qui étudie la Torah et accomplit de bonnes actions, mais uniquement dans la mesure de ce qu'exige la Hala'ha. L'étude de la Torah est sa préoccupation essentielle. Il est alors plus clairement unifié à D.ieu que celui qui est défini comme un Ethrog, se partageant entre la Torah et les Mitsvot. Ce dernier ne se concentre pas uniquement sur l'étude. Pendant une partie de son temps, sa relation avec D.ieu est basée sur la pratique des Mitsvot, de la même étymologie que Tsavta, le lien. Il est alors attaché à D.ieu, mais non unifié, comme c'est le cas pendant son étude. C'est pour cela que la qualité du Loulav est soulignée, l'unification totale avec le Saint béni soit-II, celle des personnes qui se consacrent à l'étude de la Torah. En effet, les quatre espèces unissent les enfants d'Israël à D.ieu, au-delà de toute limite.

C'est précisément la particularité du Loulav. Quand les quatre espèces sont agitées dans les six directions, c'est précisément lui qui bouge le plus clairement. Bien plus, la coutume de nos maîtres, après avoir éloigné le Loulav, est de le secouer avant de le ramener vers soi. En outre, il doit avoir au minimum quatre Tefa'h, soit un de plus que les myrtes et les saules, « afin d'être secoué »(8). On sait que les âmes « stagnent », quand elles se trouvent là-haut. Elles conservent toujours le même niveau et ne s'élèvent que graduellement. C'est uniquement en descendant ici-bas et en mettant en pratique la Torah et les Mitsvot qu'elles vont de l'avant, au-delà de toute mesure. Cet avancement, obtenu ici-bas, s'exprime par le fait qu'un Juif se balance, quand il prie et quand il étudie la Torah. Le Zohar explique(9) qu'il en est ainsi parce que l'âme est comparée à une bougie, « la bougie de D.ieu est l'âme de l'homme ». La flamme d'une bougie vacille parce qu'elle est attirée vers sa source et il en est de même pour l'âme, pendant l'étude de la Torah.

Il en est ainsi parce que l'âme, pendant l'étude de la Torah, s'approche de D.ieu, est attirée par Lui. Certes, la Torah adopte une approche rationnelle. Pour bien comprendre l'une de ses notions, il faut méditer, s'approfondir, ce qui est le contraire du balancement. Malgré cela, on se balance effectivement, pendant l'étude, afin de montrer que la Torah, même après avoir pris une forme rationnelle, reste la Sagesse du Saint béni soit-Il. Il doit donc apparaître clairement que celui qui l'étudie, au profond de lui, s'attache à D.ieu. L'avancement au-delà de toute mesure passe par l'attachement à D.ieu, Qui est l'Infini véritable. Or, on s'attache à D.ieu en étudiant la Torah, qui permet d'aller de l'avant. C'est pour cela que le balancement est lié au Loulav et l'attachement par la Torah permet d'avancer également par la pratique des Mitsvot, de même que le mouvement du Loulav affecte aussi les trois autres espèces.

Le mouvement, pendant l'étude de la Torah, n'est pas seulement un bond en avant. Il en est partie intégrante, de deux façons. D'une part, cette étude doit être « développée chaque jour »(10), par des explications nouvelles. C'est précisément ce qui la distingue de la prière, qui a le même texte, chaque jour de semaine, chaque Chabbat. A la Torah, en revanche, on ajoute des explications nouvelles. D'autre part, « un homme ne perçoit les paroles de la Torah qu'après avoir trébuché sur elles »(11). Pour bien la comprendre, il faut l'analyser, peser le pour et le contre, comprendre d'une façon, puis d'une autre et encore d'une troisième. C'est ce « mouvement », ce va-et-vient des raisonnements, « dans les six directions », qui permet de découvrir l'explication véritable.

Ceci nous permettra de comprendre un fait surprenant. Le Midrash dit que le Loulav fait allusion aux érudits de la Torah, car il a un goût et pas d'odeur. Il aurait donc fallu prendre une datte, plutôt qu'une branche de palmier, car c'est elle qui a un goût. L'explication est la suivante. La Mitsva des quatre espèces fait allusion à l'unité de toutes les catégories du peuple d'Israël. Pour qu'un Juif s'unisse à un autre, il doit être soumis, car l'orgueil et la forte conscience de sa propre personne font obstacle à l'unité. Et, ce qui est vrai en spirituel l'est aussi matériellement. La soumission doit apparaître en chacune des quatre espèces, car elle est la clé de l'unification avec les autres espèces. A qui souligner la nécessité de l'humilité ? Précisément à celui qui est le plus haut ! Plus l'on est grand et plus l'on est susceptible d'en concevoir de l'orgueil. Il faut donc souligner qu'il ne doit pas en être ainsi. Le nom de l'Ethrog, l'espèce la plus importante, qui a un goût et une odeur, est constitué des initiales de la phrase signifiant : « Ne me conduis pas au pied de l'orgueil ».

Cette supériorité du Loulav sur l'Ethrog, parce qu'il a un goût et pas d'odeur, implique qu'il doit également faire allusion à la soumission. C'est justement pour cette raison que l'on ne prend pas les fruits du palmier, les dattes, mais bien ses feuilles. L'homme est : « tel l'arbre du champ ». L'intellect, qui est sa qualité principale, est comparé à une datte, comme l'indique le Midrash. Celle-ci ayant un goût et pas d'odeur, fait allusion à la Torah et les feuilles de palmier la protègent. Or, il en est de même pour l'intellect. La conclusion, l'idée juste est le fruit, alors que le raisonnement, le pour et le contre, la réponse aux questions protègent la conclusion, comme les feuilles protègent les fruits. Par nature, l'homme qui comprend une idée en éprouve du plaisir, ce qui n'est pas le cas au milieu de son raisonnement, quand il n'a pas encore répondu à toutes les questions. Bien plus, il est alors gêné par son manque de compréhension. Il n'est pas satisfait et il ne peut donc pas en éprouver de l'orgueil.

C'est à cela que font allusion les feuilles de palmier. Un homme doit savoir que son étude est comparable à ces feuilles. Plus il acquiert des connaissances et s'approfondit, plus il aura conscience que tout cela n'est qu'une goutte d'eau par rapport à l'océan, ou même encore moins que cela, car la Torah est : « plus longue que la terre et plus large que la mer »(12). Elle est réellement : « dissimulée aux yeux de tous les vivants »(13). Cette conscience d'être au début du chemin empêche de ressentir de l'orgueil de son étude de la Torah. Un homme aura conscience d'être très éloigné de la Torah et ceci mettra en éveil sa soumission, de sorte qu'il ne ressente pas sa propre personne. Ainsi, Kapot, les feuilles de palmier, peut se lire aussi Kafout, attaché. Grâce à sa soumission, un tel homme est profondément attaché à D.ieu. Et, c'est par le mérite de sa soumission que le Loulav, l'espèce la plus haute, s'élève au-dessus des autres espèces. L'homme qui atteint ce niveau peut comprendre le sens véritable de la Hala'ha. Ainsi, nos Sages disent de Beth Hillel que la Hala'ha est tranchée selon leur avis parce que : « ils sont agréables et humbles »(14).

Il découle un enseignement de tout ce qui vient d'être dit. Il faut étudier la Torah comme un Loulav, en s'absorbant totalement dans cette activité, en faisant abstraction de toute autre considération. Ceci ne concerne pas uniquement un élève de Yechiva ou celui qui a l'étude pour seule activité, car les quatre espèces forment un bouquet unique. Leur unité est telle que chaque espèce possède les qualités de toutes les autres. Ceux qui appartiennent à la catégorie du saule doivent aussi avoir un temps fixé pour l'étude, durant lequel ils sont un Loulav. C'est précisément ce qui leur permettra de se libérer de leur situation, de connaître l'avancement, au-delà de toute mesure, y compris dans les autres domaines, tout comme le mouvement du Loulav agit sur les autres espèces. Il en sera donc ainsi dans la pratique des Mitsvot, dans les domaines du monde, afin de mettre en application, tout au long du jour, le Précepte : « En toutes tes voies, connais-Le ».

La première étape est l'effort, l'approfondissement en l'étude de la Torah, le développement de ses explications, l'élévation, au quotidien. Nos Sages donnent l'assurance que : « si tu fais des efforts, tu trouves »(15), au-delà des efforts investis, comme un objet trouvé que l'on découvre quand on n'y pense pas. C'est ainsi que l'on obtient la révélation de la dimension profonde de la Torah, par notre juste Machia'h. En effet, sa venue sera aussi comme un « objet trouvé », ainsi qu'il est écrit : « J'ai trouvé David, Mon serviteur »(16). C'est alors que l'on saisira les raisons profondes de la Torah que l'on ne comprend, à l'heure actuelle, que d'une manière superficielle. Il en sera ainsi lors de la venue de notre juste Machia'h, très bientôt et de nos jours.

(Discours du Rabbi, Otsar Likouteï Si'hot, tome 6, première causerie de Soukkot)

Notes :
(1) On verra, à ce propos, le Likouteï Torah, Parchat Nitsavim, à la page 48b.
(2) On verra, à ce propos, l'explication relative à la Parchat Nitsavim.
(3) Midrash Vaykra Rabba, chapitre 30, au paragraphe 12.
(4) Tikouneï Zohar, Tikoun n°30.
(5) On verra, à ce propos, le Zohar, tome 1, à la page 24a et tome 2, à la page 60a.
(6) Tehilim 50, 16.
(7) Traité Yebamot 109b.
(8) Traité Soukka 32b. Choul'han Arou'h, Ora'h 'Hahn, au chapitre 650.
(9) Tome 3, à la page 218b.
(10) Zohar, tome 1, à la page 12b.
(11) Traité Guittin 43a.
(10) Zohar, tome 1, à la page 12b.
(11) Traité Guittin 43a.
(12) Job 11, 9.
(13) Job 28, 21.
(14) Traité Erouvin 13b.
(15) Traité Meguila 6b.
(16) Tehilim 89, 21.

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