Il y a eu le temps du bilan, le temps du recueillement, de la prière fiévreuse, le temps de l’assemblée synagogale toute entière tendue entre repentance et espoir. Et puis le temps si joyeux de Souccot a couronné le mois de Tichri pour culminer avec Sim’hat Torah dans une explosion de chants et de danses.

Quel temps riche que ce temps aux mille couleurs, à la visible profondeur, ce temps des hauteurs !  Il s’est achevé et voilà qu’il nous faut retrouver la vie qui va, à son train ordinaire, un peu fade au long d’un automne un peu gris.

Retour à la « normalité » donc, à ce quotidien qui entend bien reprendre ses droits : comment ne pas éprouver le regret du temps chaleureux, des heures vibrantes ?

Une ancienne coutume offre sa réponse. A l’issue du premier Chabbat qui suit les fêtes de Tichri, on proclame dans les synagogues : « Yaacov (ou Jacob) partit sur son chemin ». Cet énoncé, vous le trouverez dans la paracha Vayétsé (Genèse 32, 2). Yaacov a quitté le monde qui, vingt années durant, fut le sien, où il a patiemment entrepris de construire la Maison d’Israël pour marcher vers l’avenir, ses dangers et ses promesses, la rencontre d’Esaü et celle de l’Ange.

Le présent de Yaacov qui, bientôt, va devenir Israël, est toujours orienté vers un futur. Contrairement au temps grec, celui d’Israël ne se satisfait pas de la répétition de cycles éternels mais il est ouvert à son dépassement, contient l’espoir du progrès. Il offre à chacun d’entre nous cette dimension essentielle : l’avenir.

 L’avenir dont il est question, c’est précisément celui offert à tous ses descendants par Yaacov notre Père. Car le chemin de Yaacov, bien sûr,  est toujours le nôtre. Nous le suivons à travers la multitude des obstacles, petits ou grands du temps quotidien auquel nous sommes maintenant retournés. Retournés certes mais revivifiés par les expériences spirituelles qui furent les nôtres, enrichis par les trésors accumulés pendant  le temps si précieux de Tichri. Le chemin de Yaacov est un chemin que tracent nos actes mêmes, habités par la spiritualité reçue de nos Patriarches et de nos Matriarches. 

Nous le reprenons avec confiance, conscients qu’une nouvelle année est véritablement un nouveau départ. Nous savons où il mène : vers l’ultime libération.