Il y a quelques années, j’ai eu le privilège d’assister à la Bar Mitsva du petit fils de l’ancien Grand-Rabbin d’Israël, Rav Israël Meïr Lau. Près d’un millier d’invités, de toutes les communautés orthodoxes du pays, se pressaient dans l’hôtel Carmel de Netanya pour honorer le jeune Yossef Sorotzkine et sa famille.

Tout au long du repas, les discours se succédèrent : des paroles de Torah, des compliments pour le Bar Mitsva et son grand-père, des mots d’esprit et des bénédictions sans nombre. Puis Rav Lau se leva et s’approcha du micro : connaissant la puissance de ses discours, les invités se turent et un silence absolu régna dans la salle. Commentant la sidra de la semaine, Rav Lau captiva l’auditoire et sut exprimer toutes les bénédictions qu’il souhaitait à son petit-fils qui, dans son fauteuil roulant, l’écoutait attentivement.
Soudain, il s’arrêta. Non, ce n’était pas que pour reprendre son souffle. On percevait sur son visage une émotion inhabituelle. Se tournant vers le Bar Mitsva, il s’adressa à lui avec une voix étranglée et tremblante : « Yossef, je dois te transmettre un « cadeau » de la part du Rabbi de Loubavitch… »
Quand j’entendis ces mots, je fus stupéfait. Nous étions déjà en 2002, soit huit ans après le départ de ce monde du Rabbi ! Que signifiaient ces paroles ?
Rav Lau continua, conscient de l’effet de surprise qu’il avait créé : « Quand tu es né, Yossef, tu souffrais de graves problèmes de santé. Les meilleurs médecins d’Israël se sont succédés à ton chevet. Quand tu as atteint l’âge de deux ans, ta situation s’est encore aggravée et les médecins ne nourrissaient plus d’espoir pour ta vie…
« Nous avons alors décidé de t’emmener aux Etats-Unis, peut-être les médecins américains trouveraient-ils une solution. Cependant eux aussi ne nous laissèrent guère d’illusion…
« Nous avons profité de notre séjour pour nous rendre chez le Rabbi. J’ai raconté au Rabbi ce que les médecins avaient dit mais on voyait sur son visage qu’il n’en était pas impressionné. Le Rabbi prit un dollar dans son tiroir et me le tendit en me recommandant de te le donner le jour de ta Bar Mitsva !
« A dire vrai, nous n’osions même pas penser à la fête qui aurait lieu pour tes trois ans, pour ta première coupe de cheveux. Les médecins avaient été si pessimistes !
« Puis ma fille, ta mère Yossef, est passée devant le Rabbi et il lui a donné deux dollars : un pour elle et un à remettre au « Sofer » (scribe) qui écrirait les parchemins de tes Téfilines pour ta Bar Mitsva ».
Rav Lau sortit alors de sa poche le dollar qu’il avait secrètement gardé depuis onze ans et, tout en essayant de dominer son émotion, il s’approcha de son petit-fils, lui-même très impressionné, lui remit le dollar et l’embrassa.
Il est impossible de décrire combien l’assistance était bouleversée devant l’ampleur de l’esprit prophétique du Rabbi, onze ans plus tôt : malgré tous les pronostics des médecins, le Rabbi avait déjà pensé à cette Bar Mitsva et continuait de le bénir pour une longue vie de santé, de bonheur, de Torah et de prospérité.

Rav Moché Orenstein – Netanya
traduit par Feiga Lubecki

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